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Entre satire et tragédie
[...]
La vie d'un critique littéraire est faite de 99 % d'ennui et de 1 % de ce rare bonheur que procure la découverte de loin en loin d'un grand livre qui frappe l'imagination par la maîtrise et l'intensité de la chose dite et racontée. La Chute de Fak, le second roman du Thaïlandais Chart Korbjitti [...], appartient indéniablement à cette catégorie. Rejetant à la fois l'engagement (si peu) littéraire et l'art pour l'art souvent stérile, l'écrivain se définit désormais comme simple artisan et observateur de la vie et c'est en tant que tel qu'il explore et analyse la condition équivoque de l'individu face à une société normative et aliénante. Edité en Thaïlande en 1981 et récipiendaire du prestigieux SEA (South-East Asia) Write Award, La Chute de Fak s'inscrit pleinement dans ce programme que s'est manifestement fixé le romancier thaï contemporain. « Ceci est l'histoire d'un jeune homme qui a pris pour femme une veuve qui n'avait pas toute sa raison. (L'histoire se serait sans doute terminée là si la veuve n'avait été la femme de son père.) » Ainsi commence le roman. Tout est dit dès ces premières lignes, toute la complexité ou presque d'une intrigue quasi oedipienne. Au fil des pages, le lecteur s'aperçoit que cette intrigue est encore plus compliquée que les premières lignes ne le laissaient entendre. En réalité, Fak n'a jamais pris pour femme la veuve de son père car il est beaucoup trop respectueux du qu'en-dira-t-on et surtout de la mémoire du défunt. Mais, dans ce village de la Thaïlande profonde où la vie est ordonnée par le moralisme bouddhiste étriqué, la rumeur publique fait de Fak un épouvantable transgresseur de la bienséance. Celui-ci souffre atrocement de ces malentendus, mais, accablé par le poids de la hiérarchie sociale, il est bien incapable de les dissiper. le refus de ses voisins de participer à la cérémonie de crémation symbolique de son père le conforte dans ses doutes. Il trouve alors refuge dans l'alcool, dérivant irrémédiablement vers la déchéance et l'autodestruction.

Ce roman est une magnifique fable de l'aliénation de l'individu au sein d'une société pervertie par les valeurs d'un progrès matérialiste et sans âme. Une autre métaphore significative est celle du village reculé où se déroule l'action du roman. Celui-ci s'ouvre à la modernité, comme le pays tout entier. Hélas, ainsi que le montre le destin du protagoniste, le bonheur est inversement proportionnel à l'avènement de la modernité, représenté par la construction des routes, l'arrivée de l'électricité et de la télévision. Korbjitti procède ainsi par images et métaphores, comme pour amortir le choc de la critique sociale accablante et désespérée qui sous-tend son récit tragique de descente aux enfers de l'âge d'or thaï.

Tirthankar Chanda
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Un village de Thaïlande, non loin de Bangkok. C'est là que vivait Fak, entre espoir, reconnaissance et déchéance.
Lui qui voulait être bonze, se sent de par le décès de son père, l'obligation de quitter la robe pour s'occuper de sa belle-mère, Ma'ame Somsong.
Et c'est là que l'ostracisme débute. Ma'ame Somsong est particulière, pas tout à fait « dans les cases », autrement dit un peu simple d'esprit. Elle s'exhibe à tout va, collectionne des objets hétéroclites, ne ressent que peu des valeurs traditionnelles du village.
Et Fak, qui, fidèle au cinq préceptes qui lui ont été inculqués, ne fait que l'accueillir sans jamais avoir de relation intime avec elle.

Mais c'est sans compter sur la bêtise villageoise qui ne voit en lui que l'homme qui a pris comme femme la veuve de son père.

Ayant hérité de la fonction de concierge de l'école, il mettait tout son coeur à servir autrui, souvent sans dédommagement, cela lui paraissait naturel. Au fil du récit, et au fil de sa perdition, il se voit nié et renié par tous. Son étrange couple avec sa belle-mère que personne ne comprend et, découlant de cela, le fait que personne ne soit présent à la crémation de son père vont le conduire à sa perte.

Jour fatidique pour lui, car l'oncle Kaï, le fossoyeur, souhaitant l'aider à passer ce cap, lui offre un verre d'alcool de riz. Ce sera alors le début d'une lente et longue déchéance, car Fak va trouver dans ce liquide de quoi oublier un peu et puis tout, jusqu'à s'oublier lui-même, ne prenant plus soin de lui, négligeant toutes ses obligations.

Une double lecture peut être faite sur ce roman. D'un côté, l'ostracisme et de l'autre, la longue descente aux enfers d'un homme sous l'emprise de l'alcool, qui lutte et qui finit par abandonner.
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Comment la vie d'un homme peut basculer à cause d'une rumeur non fondée ? Il suffit de prendre Fak comme exemple.
Fak, est né pauvre, mais il est respecté dans le village car il est travailleur et dévoué. A la mort de son père, il hérite de son métier de concierge à l'école qui jouxte le temple, mais également de la femme de celui-ci. Madame Somsong est une femme que son père a pris comme épouse alors que son fils effectuait son service militaire. Mais Madame Somsong n'est pas une femme douce et travailleuse, elle est paresseuse mais surtout elle est folle. Fak se retrouve à devoir s'occuper d'elle et de surcroît les gens racontent qu'il l'a pris comme femme. Fak, qui n'a jamais voulu toucher une femme, lui qui rêve de devenir moine, va devoir supporter les moqueries, qui seront amplifiés avec le comportement impudique de Madame Somsong. La situation blesse Fak et à cause d'elle, il perdra peu à peu la confiance des gens du village. Il deviendra la risée et Fak noiera sa peine dans l'alcool.

"La chute de Fak" est roman tragique qui nous transporte dans un village du centre de la Thaïlande. Au fil des chapitres, le lecteur est le témoin d'un homme qui se meurt à cause de médisance, de ragots, de la méchanceté gratuite. A travers ce roman Chart Korbjitti nous offre une fable moderne intemporelle, à la découverte de la culture thaïlandaise. Une très belle découverte.
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En refermant le livre, il me reste une impression mitigée. le roman est découpé en deux parties, qui sont pour moi de qualité très inégale.


La première partie est une plongée dans un village thaïlandais, à la rencontre des personnes et des rituels qui dessinent ce livre. Bien menée, parfois drôlatique et pas ennuyante pour un sou malgré le huis-clos géographique. le lecteur non-initié que je suis en apprend d'ailleurs sur la culture thaï. Bref, fin de première partie : tout roule.


Puis vient la seconde partie et c'est là pour moi une longue agonie. La chute de la chute de Fak. Si notre personnage principal et ses deux proches font face à la vilenie humaine, l'ensemble est rendu insupportable par le pathétique total de la situation. Concrètement, on se farcit cent cinquante pages d'un bonhomme qui picole et ne pense qu'à picoler. Non, juste non. Ça me gonfle.


Dommage du coup. Bien lancé dans l'intrigue durant la première moitié du livre et attaché aux personnages, j'étais soulagé de voir arriver la fin d'une histoire dont la structure narrative à fini par m'enquiquiner, pour rester poli.


Livre reçu gratuitement dans le cadre d'une opération Masse Critique.
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Une critique ardue de cette société thaïlandaise sans pitié et de son jugement sans appel.

Le karma. Faites y bien attention. Ou vous risqueriez d'écoper d'une fin des plus terribles. Enfin...C'est ce qu'on raconte dans cette petite ville de campagne thaïlandaise. Pour imager l'importance du karma, on répète encore et encore le cas de cette ordure de Fak, qui mérite décidément bien ce qu'il lui ait arrivé. Et pourtant...Ne serait-ce pas plus compliqué que cela ?

Chart Krobjitti, auteur dont j'affectionne particulièrement la plume, illustre dans son roman La chute de Fak, le concept finalement bien superficiel et hypocrite qu'est le karma, avec une ironie assez tragique. Plus largement, il fait une assez belle critique de la société, une société obsédée par les apparences et par le désir de se fondre dans un groupe. Et si pour s'assurer une place de choix, un pauvre bougre doit y perdre sa place, sa dignité, son humanité jusqu'à son âme, tant pis. Il faut dire qu'il l'aura presque cherché. N'est-ce pas ?

Je vous préviens, ce roman est dur à lire du fait de l'impuissance et de l'injustice dont nous sommes témoins. Rester indifférent devant l'évolution de Fak est impossible. Jusqu'au bout, j'ai espéré un retournement de situation qui aurait été trop peu réaliste en y réfléchissant bien, mais tout de même j'ai espéré.

Que ce roman soit réédité est très important. Comme indiqué précédemment, il est une critique sociale cinglante mais il est aussi une ressource culturelle très complète ! Au fil des événements et du parcours de Fak, nous sommes témoins du passage des saisons et des fêtes traditionnelles qui les accompagnent mais aussi du passage du temps et de l'arrivée progressive de la technologie dans ce village. Elle accompagne d'ailleurs la chute de Fak, comme un marteau appuyant la perte de repères traditionnels plus proches de la nature...Cette nature décrite dans des descriptions si imagées, si fluides qui donnent envie d'y être, malgré la descente aux enfers du personnage.

Je ne peux que vous conseiller de lire ce roman, que vous connaissiez la Thaïlande ou non, vous serez indéniablement touché par ce texte.
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"La chute de Fak" ne fait pas partie des romans qu'on lit distraitement et qu'on classe dans sa bibliothèque sans plus jamais y penser. Sa lecture peut être âpre et rugueuse car le drame engendre le drame jusqu'à l'inexorable fin. Il fait partie des livres qui bousculent, tout simplement car il nous fait sortir de notre zone de confort et de notre bain culturel habituel.

LA SOUFFRANCE DE FAK
Le roman de Chart Korbjitti s'ouvre sur une scène de liké (ndlr: forme d'opéra thaïlandais). le village est au spectacle, le lecteur aussi. Ce spectacle c'est la destinée tragique de Fak, celle d'un pauvre homme sacrifié sur l'autel de la rumeur. Elle veut que Fak ait pris pour femme la veuve de son père. Ce bruit ne peut courir que parce qu'il est alimenté par un groupe où seules les apparences comptent et où il est mal venu de sortir du rang; un groupe d'ailleurs prêt à toutes les impudeurs pour entacher la réputation d'un individu.

La fameuse rumeur se rajoute à la double peine qui accable déjà le jeune homme: son père n'est plus, il se retrouve avec cette belle-mère qu'il connaît à peine et qui est déjà la risée du village car elle n'a pas toute sa tête. On assiste, impuissant, à la disgrâce de Fak qui se transforme peu à peu en lente déchéance, même les chiens errants finissent par le fuir. Sa souffrance est une agonie.

Un épisode du livre est une superbe mise en abîme de cette chute: Fak tue un chien supposément enragé sous le regard des villageois qui l'entoure. Cette condamnation sur la base d'une supposition n'est pas sans rappeler la mort sociale de Fak, le pestiféré du village, avec des habitants qui n'en perdent pas une miette.

LE KARMA DIRIGE L'HUMANITÉ
Il sera plus facile d'accéder à la profondeur du texte avec quelques clés de lecture, notamment sur la notion de karma dans le bouddhisme Theravada, religion majoritaire en Thaïlande. Dans son ouvrage "100 questions sur le bouddhisme Theravada, Didier Treutenaere l'explique ainsi: "Nos actes intentionnels constituent un flux complexe qui imprime ses effets sur nos corps, nos pensées et nos nouvelles actions; ce flux détermine notre existence présente comme nos existences futures; ce flux est en quelque sorte "notre énergie en devenir": c'est le karma."

C'est donc le karma de Fak qui est à l'oeuvre et ne lui laisse aucune chance. Pourtant le protagoniste rêve que la vérité éclate. Pourquoi ne s'en charge-t-il pas lui-même? Parce qu'il est inenvisageable d'être frontal. La justice et la vérité ne peuvent être rétablies que par un autre. Mais surtout qui peut aller contre son karma ? Comme le rappelle Didier Treutenaere "il est cependant affirmé dans les textes bouddhistes que : "Le monde est dirigé par le karma, l'humanité est dirigée par le karma". La descente aux enfers de Fak est donc par là-même inéluctable.

CHART KORBJITTI, UNE PLUME ACÉRÉE
Né en 1954, Chart Korbjitti est considéré comme le meilleur romancier contemporain de Thaïlande par son traducteur, Marcel Barang. Les failles de la société thaïlandaise, telles que l'abus de pouvoir, de même que l'exclusion sociale et l'ostracisme sont ses thèmes de prédilection. "La chute de Fak" est son premier roman et celui pour lequel il reçoit son premier prix littéraire, le SEA Write Award. Il se verra attribuer d'autres récompenses par la suite et sera même nommé Artiste national en 2004.

À travers le récit de la descente aux enfers de Fak, il propose une incursion sociologique dans une communauté rurale de la Thaïlande du XXe siècle. Chart Korbjitti dépeint avec une certaine acidité les relations sociales, les événements qui rythment la vie du village et le développement, parfois à double tranchant.

La traduction du regretté Marcel Barang, traducteur de référence du thaï vers le français et l'anglais, est dans une langue ciselée qui fait honneur à la plume de Chart Korbjitti. Les descriptions des lieux, des personnages ou encore des traditions amènent une vérité romanesque indiscutable.

"La chute de Fak" ne laisse pas indifférent.
N'est-ce pas aussi à ça qu'on reconnaît un grand texte?


Lien : https://www.comptoirdelamous..
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Je n'ai pas réussi à venir à bout de la chute de Fak. Je n'ai pas réussi à compatir aux déboires du pauvre Fak. Homme de peine dans un monastère dans une province de Thaïlande, il subit toutes sorte d'humiliations et sombre peu à peu dans la déchéance. J'espérais retrouver dans ce livre l'impression de douceur et de sérénité que j'ai ressenti en visitant des temples et des monastères bouddhiques mais c'est tout le contraire. le monastère où vit Fak est le royaume de l'injustice, de l'intolérance et de l'hypocrisie. Ce roman a au moins le mérite de casser les clichés que l'on pourrait avoir sur l'Asie et sur le boudhisme. Un autre intérêt de ce roman est les descriptions que fait l'auteur du mode de vie et des rites des moines. Mais cela n'a pas suffit à accrocher mon attention, j'ai lu avec peine la première moitié puis j'ai survolé la deuxième moitié jusqu'au dénouement...

la suite sur http://leslecturesdeclarinette.over-blog.com/article-13495499.html
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Chart Korbjitti nous convie à un voyage en Thaïlande pour assister à la Chute de Fak.
Fak c'est l'homme à tout faire du temple de son village.
Mais pour son plus grand malheur, le pauvre Fak "héritera" à la mort de son père d'une belle-mère un peu fofolle qui a la gênante habitude de montrer ses fesses ou sa poitrine à qui mieux mieux.
De là à ce qu'on dise que Fak couche avec sa belle-mère, il n'y a qu'un pas que les villageois auront tôt fait de franchir.
C'en est fini de la renommée de Fak qui sombrera peu à peu dans la déchéance et se noiera dans l'alcool.
C'est cette longue descente aux enfers que raconte ce roman. Et c'est précisément cette lenteur qu'on peut lui reprocher : pas de surprise dans cette longue contemplation de la chute de Fak.
Il n'en reste pas moins une savoureuse et instructive description des moeurs et coutumes de ce village thaïlandais : la rentrée des classes, les fêtes, les crémations funéraires, jusqu'à l'arrivée de la fée électricité.
Quand l'individuel et le social ne font qu'un, quand tout tourne autour de la pagode ...
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