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Une histoire truculente qui nous vient de Malasie, d'une écrivaine chinoise.
Au nord de Kuala Lumpur, Lubok Sayong, un village situé “ à la confluence de la volonté divine et des lois de la météorologie », est inondé plusieurs jours par an.
Y vit un trio insolite, mais oh combien attachant.
Beevi, succulente petite vieille qui s'engueule avec son poisson qui ne rêve que de déguerpir, Auyong, son paisible copain, un vieux chinois, propriétaire d'une conserverie de litchis,et Mary Anne, fillette de onze ans, orpheline très futée , recueillie par Beevie, par un concours de circonstances.

Dans cette communauté mixte de malais, d'indiens et de chinois, malgré les divergences ethniques et religieuses, tous les ingrédients de la chaleur humaine sont présents : l'honnêteté, l'amitié, la tendresse, la solidarité, la tolérance.
Mami Beevi est une conteuse hors pair à l'auditoire fidèle. Elle a trés mauvais caractère et pas sa langue dans sa poche, et peut être follement amusante quand elle est de bonne humeur, malheureusement ça n'arrive pas souvent,
Mary Anne est une petite fille au caractère bien trempé, qui se lance dans des entreprises surprenantes pour son âge, tout en rêvassant que sa mère est une star de cinéma, et voyant des anges aux endroits les plus bizarres, même dans les journaux ou à la télé,
Alors que Auyong, le neutron du trio, est un doux qui observe la vie, toujours au service de Mami Beevi, pour laquelle il semble avoir « une sorte d'amour de vieux, tranquille et sans chichis. », pourtant, à ses heures....
Quand aux personnages secondaires, ils ne sont pas moins farfelus, tout aussi attachants, particulièrement, Ismet et Miss Boonsidik, que je vous laisse découvrir.

Ceux sont Auyong et Mary Anne, qui s'alternent, pour nous raconter l'histoire foisonnante d'anecdotes trépidantes et insolites, mi-réelles, mi- imaginaires, de ce sacré bled caché derrière des plantations d'hévéas, et de ses habitants à la douce folie. le style directe, simple, sans fioritures, pétillant d'humour fait le sel de ce récit fantasque et touchant.
Sublime !

« Je voudrais dire à ceux qui passent, à qui voudra bien m'écouter, que les leçons viennent de la vie et non des histoires. »
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Autant le dire tout de go, certaines régions du monde me sont inconnues. Je ne les connais que par les clichés idylliques d'agences de voyages. Vous savez ce genre de montage photos qui vous présente l'Australie sous forme de carte postale, un magnifique kangourou bondissant devant les sables écarlates de l'Ayers Rock, le tout sous un un ciel azuré à souhait ! Il en va de même pour l'Asie du Sud-Est. Que sais-je de cette région ? Hormis que la gastronomie thaïlandaise est délicieuse, que les plages d'Indonésie sont paradisiaques et qu'il y a eu une guerre au Vietnam ? Pas grand chose d'autre malheureusement. Et si vous me demandez ce que je connais de la Malaisie, j'aurai bien du mal à vous répondre.

Enfin, ça c'était avant, puisque les éditions Zulma ont toujours eu l'art de me faire découvrir des cultures et des auteurs de l'autre bout du monde sans tomber dans le travers de lieux communs. Sans vouloir leur faire une publicité particulière, je dois bien avouer que les romans traduits chez Zulma m'ont rarement déçu. Pour cette petite analyse-ci, je vous invite à traverser mers et océans afin de faire un tour du côté de la littérature malaisienne avec La Somme de nos folies de Shih-Li Kow.

L'histoire:

Dans la Malaisie actuelle, plusieurs destins vont soudainement se heurter les uns aux autres. Il y a d'abord l'impétueuse Beevi, qui mène sa vie, tambour battant, en compagnie de son énorme poisson domestique. le vieil ami fidèle, Auyong, qui gère la conserverie de litchis du coin et enfin la jeune Mary Anne, une orpheline de Kuala Lumpur, sur le point d'être adoptée. de cette rencontre inattendue, entre ces trois personnages, se dessinera des tranches de la vie quotidienne malaisienne. Entre désir d'une modernité à l'occidentale et envie de garder les choses d'antan.

“ Je me félicitais du départ des bénévoles, nous laissant le plaisir d'assister à de telles scènes. Attention aux maladies véhiculées par l'eau, répétaient les gens de la capitale. Attention aux crocodiles et aux serpents. Attention de ne pas marcher sur la carcasse pourrie d'une bête morte. Gare au choléra. Gare aux tourbillons et aux courants. Ils publiaient des consignes de survie dans les journaux qui n'étaient pas distribués ici et qu'on lisait dans la capitale en sirotant un café latte frappé, bien installé au sec chez Starbucks. Gare à la vie. “

Le style:

La plume de Shih-Li Kow va à l'essentiel, elle ne s'embarrasse pas de fioritures, ce qui permet au lecteur d'être immergé dans le quotidien des personnages et de faire connaissance avec cette culture malaisienne. L'auteure sait jongler avec l'humour, la liberté de ton mais aussi avec un certain côté tendre. Cette manière de procéder fait en sorte que l'on s'attache, quasi instantanément, aux différentes petites histoires que l'auteure nous conte calmement et qui finissent par devenir la trame du livre.

Au niveau de la structure narrative, La Somme de nos folies est un roman duophonique puisque ce sont les voix de Mary Anne et Auyong qui s'alternent afin de donner corps à l'histoire. Ainsi, peut-on lire une même situation mais qui est vécue et racontée par deux personnages ayant des perceptions différentes sur les choses ; l'un étant un enfant et l'autre un vieil homme.

Le thème de la filiation:

Malgré les diverses oscillations de la vie des protagonistes, il y en a un thème qui revient sans cesse, en filigrane, tout au long du roman. Il s'agit de celui de la filiation — ou plutôt d'absence de filiation. Derrière l'espièglerie de Mary Anne, on aperçoit les cicatrices d'une enfant orpheline qui imagine sa mère en actrice de cinéma et qui pense soudainement l'avoir retrouvée en la personne d'une certaine Violette simplement parce qu'elle correspond en tout point au fantasme qu'elle se construit depuis toute petite.

D'autres personnages ne sont pas en reste sur ce thème de la filiation manquée puisque l'on retrouve l'histoire d'un avortement forcé afin de protéger l'honneur de quelques-uns ou encore la vie d'une jeune adulte, orpheline elle aussi, qui n'a jamais été adoptée (au contraire de Mary Anne) et qui se construit seule dans la frénésie de la capitale malaisienne, Kuala Lumpur.

La Malaisie :

Ce livre est aussi l'occasion d'avoir un aperçu sur ce pays tiraillé entre la modernité, représentée par la capitale malaisienne, et la vie provinciale, représentée par Lubok Sayong (ville imaginaire où se déroule le récit). Sans jamais forcer le trait, l'auteure nous emmène dans cette dichotomie où certains veulent continuer à vivre “à l'ancienne” tandis que le monde contemporain les rattrape bien malgré eux.

La Somme de nos folies permet aussi de rentrer dans cette Malaisie à majorité musulmane où l'on dénombre quand même pas moins de 20% de bouddhistes et un peu moins de 10% de chrétiens. Au niveau des ethnies, il en va de même puisqu'on y retrouve trois ethnies principales: les malais, les chinois et les indiens. Tout ce petit monde vit ensemble avec ses aléas quotidiens … comme dans l'histoire du roman.
En conclusion, Shih-Li Kow signe une histoire simple où la narration pourra surprendre les lecteurs et lectrices francophones puisque le rythme n'est jamais effréné, à l'image de la culture asiatique serai-je tenté de dire. La Somme de nos folies ne verse jamais dans l'excès ni dans le tape-à-l'oeil et déroule la vie actuelle en Malaisie non sans un certain sens de l'humour qui fait mouche 😉.
Lien : https://lespetitesanalyses.c..
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‘Un peu de magie dans l'air, c'est toujours bon à prendre'.
Elle nous vient de la Malaisie multiculturelle et se savoure avec bonheur.
J'ai aimé le décor, les personnages hauts en couleurs, l'humour tendre, l'esprit de bienveillance et tout ce qui a été souligné dans les autres critiques.
Pour apporter quelque chose d'original à ma chronique, j'aimerais me concentrer sur la légende qui ouvre le roman, car elle possède un charme particulier à mes yeux. L'air de rien, elle m'a amené vers ma ville natale que j'ai laissée derrière moi, il y a une dizaine d'années.
Inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, elle se trouve quelque part sur la côte méditerranéenne et attire chaque année beaucoup de touristes.
Un fleuve divise la ville en deux et à plusieurs kilomètres de distance deux montagnes qui se font face, veillent jalousement sur elle. Comme Ayong le dit si bien : ‘ avec un tél décor, on n'échappe pas à une légende locale'.

Elle m'a été racontée par ma grand-mère, mais quelques petits changements existent selon la version de chacun.

Il y a très longtemps une histoire d'amour mena deux jeunes hommes au fratricide. Tombés amoureux de la même femme et rongés par la jalousie, ils se sont battus sauvagement.
Le premier donna un coup d'épée à son frère qui lui flanqua à son tour un coup de massue. Une malédiction tomba sur eux. Transformés en montagnes, ils furent condamnés à porter sur leur corps les stigmates de leur combat. L'une des montagnes porte des lignes verticales, l'autre des bosses. (On peut les voir de loin.)
La malédiction tomba sur la femme aussi. Elle se transforma dans une colline rocheuse, sur laquelle fut construit un château qui attire chaque année des visiteurs. Dans sa tristesse, la femme versa toutes les larmes de son corps et un fleuve se forma. Il sépare les deux quartiers les plus populaires de la ville.
Lorsque je retourne au pays pendant les vacances, je ne peux pas m'empêcher de penser à la légende de la ville qui m'a vu grandir. Mes yeux s'arrêtent souvent sur la montagne avec des lignes qui se trouve en face de la maison de mes parents. Elle se dresse triste et solitaire, preuve réelle de la folie des hommes…

La littérature fait voyager, d'une manière ou d'une autre.
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Mélant souvenirs et légendes, Shih-Li Kow nous immerge avec humour dans sa Malaisie provinciale en utilisant habilement les voix du vieux directeur Auyong et de l'ado orpheline Mary Anne.

Inondations récurrentes avec les pénibles et encombrants volontaires venus de la ville, timide développement touristique et dramatique pèche du mystérieux poisson géant, camp de redressement pour lady-boy, désopilante directrice de l'orphelinat, la corrompue ministre ou Violette revenue après des années libérer l'esprit de son enfant mort-né...
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Auyong un chinois à la retraite, qui a repris la gestion d'une conserverie de litchis, est bien intégré à Lubok Sayong, cette petite ville de Malaisie, à une trentaine de kilomètres de Kuala Lumpur. Il s'entend particulièrement avec Mama Beevi, une femme au caractère bien trempé qui n'a pas sa langue dans sa poche et qui est toujours en colère avec les enfants des trois femmes que son père a épousé après la mère de Mama Beevi. Quand Assunta, l'une de ses demi-soeurs - la seule qui trouvait grâce à ses yeux -  meure avec son mari dans un accident de voiture, elle accepte de recueillir Mary Anne, une petite fille de onze ans que le couple venait juste d'adopter. La petite qui sort tout juste de l'orphelinat Sainte Mary, se retrouve par hasard, sous la responsabilité et dans la maison que Mama Beevi décide de transformer en gîte.

La somme de nos folies est une chronique mi-tendre, mi-amère, où l'on retrouve une galerie de personnages truculents et hauts en couleur, à commencer par Mama Beevi, femme forte en gueule mais généreuse, combattante et qui prend sous son aile une petite fille qu'elle rudoie mais qu'elle aime tendrement, un retraité chinois qui s'occupe de la petite comme un grand père le ferait, une petite fille sensible et drôle. Dans un récit à deux voix, celle de Auyong et celle de la petite fille, Mary Anne, c'est la vie de tous les jours avec toutes ces petites anecdotes que nous fait partager Shih-Li Kow avec tendresse et humour, quelquefois avec tristesse, mais toujours avec un regard bienveillant.
Les chroniques de nos folies est une belle découverte, qui donne espoir et bonne humeur.
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J'aime bien découvrir la plume d'écrivain.e.s d'origine diverses et plus particulièrement de pays lointains qu'on connaît moins.

Shih-Li Kow est malaise et La somme de nos folies est son premier roman.
On pourrait le qualifier de chronique dans la mesure où elle met en scène quelques personnages typiques auxquels il arrive des aventures parfois cocasses, quand elles ne sont pas carrément surnaturelles tirées de légendes locales.

La vieille Beevi est le plus attachant de tous, à la fois imprégnée de la culture malaise et entêtée dans son refus de la modernité qui envahit petit à petit le pays.
Auyong et Mary Anne, qui se partagent la narration faisant ainsi office de chroniqueurs, nous content les divers évènements qui émaillent la vie de Labok Sayung et les conséquences sur leur petite communauté.

Le début du roman était prometteur qui faisait état du caractère inondable de la région et des crues régulières dont les habitants mettent un point d'honneur à se sortir seuls.
Et puis, petit à petit, mon intérêt s'est émoussé victime du trop grand nombre de personnages qui gravitent autour du trio principal me laissant une impression de décousu dans le récit.
Je salue toutefois une plume légère et non dénuée d'humour qui pourrait bien être le reflet des Malaisiens ruraux.
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L'histoire est racontée par Auyong, un homme d'affaires local, et Mary Anne, une jeune orpheline qui a été adoptée à onze ans par une famille de Lubok Sayong, une petite ville de Malaisie. Un endroit isolé par sa topographie, cette cuvette entre rivières et lacs est soumise à de fréquentes inondations va devenir un lieu prisé des touristes.
« À Lubok Sayong, l'eau est un vrai problème. Simplement parce qu'il y en a trop. La ville est vouée à être inondée, les inondations ravagent les maisons et emportent les vies. »

On ne peut que s'attacher au personnage de la petite orpheline Mary Anne qui avant de mourir aimerait bien être demoiselle d'honneur, apprendre à faire un gâteau au chocolat, et surtout elle aimerait retrouver sa mère. Sa mère qui est selon elle, star de cinéma à Hollywood et qui est très belle.

Un récit drôle et dépaysant émouvant, très humain, un voyage exotique et enchanteur dans la Malaisie multiculturelle d' aujourd'hui où le surnaturel marche main dans la main avec la réalité. Les personnages sont hauts en couleur, Mami Beevi propriétaire de chambres d'hôtes, conteuse hors pair, miss Boonsidik un travesti héroïque qui fait face à des violeurs ; Ismet le fabricant de poterie artistique et aussi le fantôme d'un garçon qui hante le jardin. L'écriture est fraîche et malicieuse, la fantaisie et la tendresse sont omniprésentes.

La chronique de cette petite de Malaisie, au carrefour des traditions et de la modernité qui hésite entre nouvelles et roman a été pour moi un agréable moment de lecture, mais sans plus, je n'ai pas réussi à entrer vraiment dans la magie de ce livre.
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Jours de pluie ...
Une lecture pour m'évader
Voyage vers des lieux inconnus
La Malaisie !
Sauf ... que j'entre dans ce livre et une pluie torrentielle ouvre le récit !

Si je suis un peu noyée, les habitants eux sont habitués aux catastrophes naturelles, leur village étant inondé plusieurs fois par an !
Et moi je sèche pour parler de ce livre !
Alors, même si je ne comprends pas tout, les mots, rituels, prénoms, fruits exotiques, animaux et lieux, je décide de faire abstraction de ma culture occidentale de mes lacunes géographiques, historiques.
Et je laisse l'auteure m'amener à apprécier et découvrir tout ce qui m'est différent !
Je la suis, humblement et m'immerge dans cette atmosphère entre réalité et fantaisie, gravité et loufoquerie.
Lubbock Sayong, une petite ville au nord de Kuala Lumpur, endroit isolé, une cuvette entre rivières et lacs qui subit inondations, déluges mais où il se passe des choses ! ...
Et des histoires "inconcevables" ...
Mami c'est Beevi un personnage féminin, mystérieux
hors du commun, authentique, caractère bien trempé, sans filtre.
Elle transforme la grande demeure familiale en Maison d'hôtes. Elle est la conteuse . Toutes ses histoires commencent par "inconcevable" entre fabulation et exagération !

« Dans les histoires de famille de Mami, il y a autant de monde que de nouilles dans une soupe, on a vite fait de s'embrouiller. »

Les deux narrateurs :
Auyong, l'ami fidèle, retraité au grand coeur qui dirigeait une conserve le litchis. Il est le regard de la sagesse, non dénué d'humour, sur le monde, les touristes, la société !
Mary-Ann et son imagination débordante, quitte l'orphelinat pour être adoptée.
Une panoplie de personnages : une cinglée éleveuse de sangsues, la directrice de l'orphelinat "soeur cougar" , le transexuel engagé, le talentueux et bienveillant Ismet potier...
La somme de nos folies est un roman enchanteur, dépaysant. C'est l'histoire des rapports humains, l'amitié, la solidarité et la tolérance.
Chaque personnage prend soin de son grain de folie personnel : il en découle des anecdotes truculentes , des légendes et la magie des traditions.
Ce roman est tout à tour émouvant, drôle, tragique et loufoque.
Ce roman nous fait dire :
"Que nous ne sommes que la somme de nos folies racontées ou tues"

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Voyager en Malaisie, pays quasi équatorial, interroge sans doute son rapport à l'humidité. Écrire son ressenti sur cet ouvrage interroge nécessairement son rapport à l'humilité.
En effet, il faut être prudent pour oser une analyse. le cadre géographique ainsi que les références culturelles sont éloignés. Mais, surtout, l'écriture espiègle de l'auteure et le malin plaisir qu'elle prend à osciller entre scènes cocasses et situations graves trouble le lecteur, surtout si il entre dans ce livre comme le touriste entre parfois dans un pays lointain. Ce lecteur, que je crains de reconnaître dans le miroir et qui, forcément, préfèrera se qualifier de bourlingueur, de baroudeur, voire d'explorateur. Consommateur de phrases, comme d'autres collectionnent des paysages, il s'est surpris à penser « Tiens ! Un livre malais… Voyons-voir ! » et pourra plus tard se fendre d'un triomphal « J'ai fait une découverte singulière » comme d'autres diraient « J'ai fait la Casamance ».
Pour éviter le piège insidieux de l'ethnocentrisme, nous sommes donc contraints à des efforts : faire fi de nos a priori, de ces représentations héritées de notre civilisation jadis dominante, nous affranchir de nos « honni soit qui malais pense ». de nombreux passages jouent d'ailleurs de ce rapport à l'altérité qui est marqué par le poids de tribulations historiques encore prégnantes.
« La somme de nos folies » est également une réflexion sur les mutations d'un pays réputé pour être un « tigre économique ». Nous sommes dès lors sur ces thèmes qui préoccupent aussi d'autres régions du monde : la disparition du « Temps longtemps », l'adaptation forcée à la modernité, la confrontation accélérée à la mondialisation. Même en Malaisie, le Grand Pan n'est pas au mieux de sa forme, la magie recule, la technologie progresse. Pourtant, nulle pleurnicherie chez Shih-Li Kow, « Shi-li Kow n'est pas grande mais elle est vaillante ». Elle nous amuse sans doute avec ses poissons géants, ses spectres enfantins pour nous conduire à réfléchir à d'autres problématiques sociétales, l'homophobie, la corruption, la coexistence religieuse, ou intimes comme les secrets de famille. A la manière d'une Cesaria Evora, Shi-Li Kow nous parle de ce petit pays qu'elle aime beaucoup et nous permet de mettre en perspective des problématiques qui ne connaissent pas de frontières. Elle le fait avec intelligence, choisissant deux narrateurs aux âges et aux parcours différents, ce qui permet, avec subtilité, d'ouvrir encore davantage l'éventail des points de vue. Mais l'écrivaine, probablement hédoniste, convoque aussi la gourmandise, les passages culinaires mettant l'eau à la bouche.
Il existe ainsi de belles correspondances avec l'univers d'Ólafsdóttir : L'Islande est loin de la Malaisie et pourtant, c'est comme si « les parfums, les couleurs et les sons se répondent ».
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La chronique pleine de fantaisie et de drôlerie de Lubok Sayong, petit village perdu de Malaisie (dé)bordé par deux rivières et trois lacs.

Il y a quelque chose de Marcel Pagnol chez Shih-Li Kow. Car, si son roman est profondément local, ses personnages hauts en couleur, par leur sincérité, leur tolérance, leurs souffrances, leurs petites et très grandes bizarreries, et surtout leur manière inimitable de tout transformer en histoires improbables à raconter encore et encore, en enjolivant à l'envi leurs souvenirs, confinent à l'universel.

On apprend beaucoup sur la Malaisie. Mais surtout on rit et on se laisse emporter par Beevi, Auyong, Mary Ann et Miss Boonsidik, jamais à court de tendresse, d'imagination et d'exagérations.

Un roman fantasque et pétillant à ne pas manquer !
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