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EAN : 9782355361364
448 pages
Carnets Nord (04/09/2014)
3.5/5   17 notes
Résumé :
Mars 1948, Richard Kornitzer débarque sur le quai de la gare de Lindau, sur les bords du lac de Constance, pour retrouver sa femme. Ils ne se sont pas vus depuis dix ans. D origine juive, Richard Kornitzer a été mis à l écart de la société dès 1934, perdant d abord son emploi de juge, puis ses privilèges de citoyen, à mesure que les lois raciales progressaient dans le pays. Dans la folie nazie qui se prépare, la famille Kornitzer se déchire : les enfants sont envoyé... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (9) Voir plus Ajouter une critique
Décrire le dénuement, la solitude, l'incertitude du présent et la peur de l'avenir, la volonté de plus en plus affirmée de recouvrer sa vie d'avant la rupture de vie, jusqu'à en devenir une idée fixe, une obsession presque maladive. Jusqu'au bout. Même lorsque la guerre finie, les tourments deviennent caducs. C'est ce cheminement psychologique inflexible dans la bonne conscience de Kornitzer, "juif assimilé" contraint de quitter l'Allemagne en 1938, auquel s'attache l'auteure.
Avec une précision remarquable, Ursula Krechel déroule le récit d'un homme bafoué dans sa dignité avant, pendant mais également de manière insidieuse après la guerre. Désarmé face à la machine de guerre national-socialiste, exilé à Cuba pendant dix ans où il a dû s'adapter à une vie faite d'improvisation, Kornitzer ne pensait pas qu'à son retour il devrait mener un long et âpre combat. Celui pour reprendre le cours de sa vie, combler le vide de la séparation et même tenter de reconstituer sa famille.
De l'abandon du sens de la rationalité et de la rigueur précieuses à un homme de loi prussien, remplacées par la nécessité de faire preuve d'imagination et d'adaptation dans un pays cubain gangrené par la corruption, au sentiment d'indifférence opposée par l'administration allemande qui isole et rejette, c'est l'histoire d'un homme vulnérable qui se sent humilié et qui vacille. Même si l'auteure a eu la volonté de garder l'émotion lointaine avec une écriture élégante qui sied à cette famille bourgeoise, le lecteur perçoit la sensibilité nouvelle qui grandit après des années de souffrance silencieuse, l'amertume et toutes les blessures invisibles de la guerre.
Bel hommage aux victimes ignorées de la guerre.
Beau roman sur la fragilité d'un homme, malgré une traduction parfois maladroite affaiblissant le texte avec quelques passages redondants.

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En 1948, quand il rentre en Allemagne après 10 ans d'absence, Richard Kornitzer espère reconstruire sa vie, et participer à la réorganisation de l'Allemagne démocratique. En 1939, ce jeune juriste juif passionné a dû quitter l'Allemagne pour Cuba. II avait préalablement envoyé ses deux enfants d'Angleterre, et il laissait, avec ses certitudes, sa jeune épouse protestante chef d'entreprise.

Au retour, il faut recommencer avec les nazis d'hier. Avec ceux qui pensent que Richard, ayant échappé aux camps, aux bombardements, aux combats, n'a pas eu un si mauvais sort que ça. Il faut retrouver l'autre, il faut trouver du travail et un logement dans une Allemagne anéantie par les bombardements, il faut essayer de récupérer les enfants. C'est un long cheminement semé d'embûches, où les joies sont trop souvent voilées par les déceptions : Richard Kornitzer n'a pas fini de payer son tribut au Troisième Reich.

C'est un livre extrêmement documenté, qui, comme on dit, part d'une histoire vraie, s'appuyant sur des archives scrupuleusement réunies par Ursula Krechel. Il s'ensuit un livre où alternent les parties très romanesques, et les parties plus documentaires.

Côté roman, il faut accepter une certaine froideur, une certaine distance. Mais on sent que cela palpite là-dessous. Claire et Richard, s'ils sont bien obligés de se laisser dicter leur conduite, veulent cependant exercer au maximum leur maîtrise sur leur destin. Ils laissent rarement leurs émotions les submerger, ils veulent se détourner de ce passé qui les a détruits. le désarroi affleure à peine sous le contrôle, jusqu'à ce que finalement, il prenne le dessus, et tout leur échappe à nouveau.

Côté documentaire, on apprend énormément de choses, sur des sujets rarement abordés : l'aspect matériel et individuel de cette reconstruction de l'Allemagne, mais aussi, du fait du passé des personnages, sur les enfants déplacés en Angleterre , et surtout sur l'exil juif à Cuba, auquel est consacré une bonne partie du livre.

Il m'a manqué une meilleure subtilité dans le mélange des deux genres, j'aurais aimé que le travail historique soit plus intimement mêlé à l'intrigue, les documents et archives plus assimilés. le roman y aurait gagné en équilibre. Il y a aussi quelques lourdeurs dans l'écriture, dont je ne sais s'il faut les attribuer à l'auteur ou à sa traductrice. Ces réserves ne sont cependant que des péripéties, c'est un ouvrage tout à la fois émouvant, et passionnant, mon intérêt n'a pas faibli.
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Terminus Allemagne raconte le parcours de Richard Kornitzer, un ancien juge allemand privé de sa nationalité et exilé à Cuba en raison de ses origines juives. Trois ans après la fin de la guerre, il arrive à la gare de Lindau et retrouve sa femme, Claire, qu'il a quittée presque dix ans auparavant. le roman revient sur ces retrouvailles avec sa femme et la lente réintégration de Richard Kornitzer dans l'Allemagne d'après-guerre.

L'originalité de ce roman réside dans le fait d'aborder une période, l'après-guerre, et un point de vue, les exilés allemands qui ont réussi à s'enfuir avant les grandes vagues d'arrestation, tous deux rarement traités dans la littérature.

Grâce à Ursula Krechel, j'ai ainsi découvert les difficultés de l'après-guerre pour les exilés et les survivants de la Shoah qui ont fait le choix de revenir au pays et de se battre pour être réintégrés et indemnisés, tout en faisant face aux difficultés communes à toute la population dans des villes allemandes largement détruites par les bombardements alliés. J'ai imaginé l'exil de ces allemands chassés de leur pays, réfugiés dans l'île de loisirs qu'était Cuba à l'époque, à l'abri de la guerre, au point d'être considérés à leur retour presque comme des privilégiés. Des situations et problématiques passionnantes qui soulèvent des interrogations éthiques, sociales, et humaines complexes.

J'ai ainsi beaucoup aimé les deux premières parties du roman qui se concentrent sur le retour de Richard, les premières démarches pour réintégrer et retrouver son identité de juge allemand marié à la courageuse Claire, ainsi que sur les années 30 et l'exil de Richard à Cuba. J'ai peut-être trouvé la troisième partie sur les années 50 et les interminables démarches de Richard pour obtenir des réparations un peu longue et répétitive, mais non moins intéressante. Un dernier tiers peut-être plus difficile à lire en raison du personnage de Richard qui devient moins sympathique, trop centré sur les injustices faite à sa personne pour voir que le monde a continué d'avancer malgré l'énorme tas d'atrocités résultant de la guerre et qui touche presque tout un chacun. Une obstination qui vire vite au sentiment de persécution... Et on se reproche justement de penser cela, car qui sommes-nous pour juger des personnes qui ont tout perdu et tentent d'en récupérer au moins une partie, par honneur, par justice?

Le style d'Ursula Krechel ne m'a ni déplu, ni emballée mais il y a en tous cas une touche personnelle certaine, une construction des phrases à laquelle il faut s'habituer. Pareil pour le rythme de l'intrigue qui est parfois lent, puis très elliptique, donnant ainsi au lecteur l'impression que les personnalités et sentiments profonds des personnages restent bien enfouis. Cela peut donner au roman un côté un peu impersonnel, type compte-rendu judiciaire, voire même "arrangé".

En définitive, Terminus Allemagne est une lecture que je vous recommande, plus pour les nombreuses réflexions qu'elle provoque, que pour son intrigue qui manque parfois un peu de rythme.
Lien : http://unmomentpourlire.blog..
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La guerre est finie. Pour Richard Kornitzer, ce devrait être une renaissance. D'origine juive, il avait été séparé des siens dix ans auparavant: les enfants envoyés en sécurité en Angleterre, mais pas de place pour lui, et l'exil à Cuba, tandis que son épouse, aryenne, restait coincée en Allemagne...En 1948, le voici enfin rapatrié, mais tout est encore à faire. Dix ans. Et chaque Allemand qu'il croise le traite en privilégié de n'avoir subi les bombardements, la guerre, alors que la plaie d'être devenu un paria dans son pays ne s'est jamais refermée, sans parler de celles de l'exil. Et les enfants, les enfants anglais depuis dix ans, se souviennent-ils seulement de leurs parents? Sans parler des nouveaux collègues, anciens nazis un peu rapidement blanchis....
Un roman intéressant mais souffrant parfois de longueurs, surtout dans la dernière partie, qui alourdissent un roman jusqu'alors assez intense et qui nuisent à un sujet intéressant et moins traité que d'autres aspects de cette sombre époque.
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Le roman s'ouvre sur le retour en Allemagne de Richard Kornitzer, en 1948. Il a dû fuir le pays dix ans plus tôt, déchu de sa nationalité et de ses droits parce que juif. Il est passé du statut de jeune juge à la carrière prometteuse à paria. Sa femme Claire, aryenne, a perdu elle aussi sa florissante société de publicité.

Acculés tous deux, ils décident d'émigrer ; ils envoient leurs deux enfants en Angleterre, Richard va à Cuba où Claire le rejoindra au plus tôt. La déclaration de guerre en 1939 va déjouer leurs plans et la famille va être séparée plus de dix ans.

Le retour ne va pas être facile. Claire et Richard doivent refaire connaissance dans un pays dévasté. Ils ne savent pas exactement où sont leurs enfants et entreprennent rapidement des recherches. Ils ignorent ce qu'ils ont vécu chacun de leur côté pendant ces dix années. Tout est à reconstruire.

Je suis assez partagée sur cette lecture. L'aspect historique est passionnant et très détaillé. L'auteure revient sur le déroulement des évènements à partir des années 30, puis sur le long exil de Richard à Cuba, l'hébergement des enfants en Angleterre, le persécution dont Claire est victime en temps qu'épouse d'un juif. le lecteur mesure parfaitement à quel point le régime nazi a détruit des familles durablement, puisque la fin de la guerre ne signifie pas la fin de leurs problèmes.

Richard va se battre toute sa vie pour récupérer un niveau équivalent à celui qu'il avait avant l'exil, sans y parvenir. Son amertume est grande en voyant qu'un certain nombre de magistrats nationaux-socialistes sont eux restés en place et sont mieux lotis que lui. Par ailleurs, son rêve de réunir la famille comme avant ne se réalisera pas, les enfants ont grandi sans eux et ne veulent pas revenir dans un pays qu'ils ne considèrent pas comme le leur.

Là où le bât blesse, c'est dans l'aspect romanesque du livre. Je ne me suis pas attachée aux personnages, peut-être à cause d'une narration trop froide et distanciée. Il y a de plus des lourdeurs et des longueurs qui n'aident pas à la compréhension des enjeux. J'ai même trouvé les cent dernières pages assez embrouillées quant à l'évolution de Richard et à son obssession d'être indemnisé à hauteur de ce qu'il a perdu.

Une lecture en demi-teinte qui a son intérêt, mais où j'ai fini par m'ennuyer.



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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Par la suite, il lut dans un journal que le célèbre groupe de pression littéraire, le Groupe 47, s’opposait aussi à l’adhésion d’émigrés selon un argument transparent : ceux-ci parlaient et écrivaient un allemand démodé, en tout cas pas celui qui avait été endurci par les expériences de la guerre, qu’il s’agisse de la participation ou de la captivité. […]
Les efforts d’adaptation que les émigrés durent fournir en silence, en s’inclinant devant le sort des personnes bombardées et décimées ne comptaient pas. Et la destruction de leur existence ne comptait pas non plus. Ils étaient marginalisés de manière silencieusement consternante.
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Il était arrivé. Arrivé, mais où. La gare était une gare terminus, les quais sans intérêt, une dizaine de voies, il entra alors dans le hall. C'était un grandiose artefact, une cathédrale en guise de gare, coiffée d'une voûte en berceau à caissons; par les fenêtres se déversait une lumière bleue, fluide et claire, comme une renaissance après un si long voyage. Les hauts murs du hall étaient revêtus de marbre sombre, "couleur chancellerie du Reich", aurait-il ironiquement qualifié cette teinte avant son exil, maintenant il la trouvait juste somptueuse et élégante, intimidante même. Le marbre n'avait pas été posé comme un simple revêtement, mais disposé en redents, ce qui donnait aux murs une structure rythmique. Un sol brillant, des hommes en uniforme impeccable, derrière les guichets, qui regardaient par une petite fenêtre rond, et des files de gens qui n'étaient pas si mal habillés que ça. (Pour les perdants de la guerre, pour les vaincus, songeait-il, ils gardaient la tête étonnamment haute.
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Les retrouvailles d’un homme et d’une femme qui ne se sont pas vus depuis si longtemps, qui avaient dû se croire perdus. Stupéfaits, le souffle coupé, sans voix, les yeux qui cherchent le regard de l’autre, qui se cramponnent au regard, les yeux qui s’agrandissent, boivent, plongent puis se détournent, comme soulagés, fatigués par le travail de la reconnaissance, oui, c’est toi, c’est toujours toi.
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On boit une théière de tisane blonde à base de différentes herbes, on réfléchit, on s’absorbe, et partout où l'on s'absorbe, se guide, on trouve un noyau de vérité, de beauté, de bonté, et quand on a écouté à l'intérieur de soi comme dans une grotte où serait caché un trésor, même le pain sec a bien meilleur goût. C'est un don. C'est un moyen de connaissance, un moyen pour structurer sa faculté de savourer, et où serions-nous si la révélation ne s'imposait pas, fut-elle chèrement acquise dans un bel endroit où l'on jeûne et où les privations sont couronnés de fleurs.
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Beaucoup de gens étaient restés sur le pont à regarder en silence le spectacle de la ville voisine qui brûlait — avec horreur mais aussi avec une satisfaction secrète parce que leurs propres toits, pignons et vitres n'avaient pas été touchés, ni leur tête, qui n'avait pas fini de s'étonner. Les avions des Alliés attaquèrent trois heures durant tandis que les projectiles de l'artillerie lourde pleuvaient sans interruption. Bregenz tomba le lundi 1er mai, l'énorme flot des troupes de combat poursuivit son chemin, l'électricité fut coupée, et il n'y avait plus de journaux. Il régnait un silence sépulcral, tapissé de la lumière radieuse du printemps. Dieu dormait, Dieu se reposait après avoir autorisé tant de chaos.
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