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Critique de bibliothequegries


Pierre KRETZ écrit ici un livre en forme de « devoir de mémoire » sur tous les morts alsaciens en général et de sa famille en particulier, des guerres de 1870 à nos jours. Pourquoi morts alsaciens ? Parce que ces jeunes gens là n'avaient ni choisi le pays pour lequel ils devaient se battre, ni la cause, ni l'idéologie, ni l'uniforme : ils devaient juste obéir, d'une guerre à l'autre, à l'autorité en place dans leur région, et se battre sous l'uniforme fourni et pour la cause défendue par le conquérant du jour. D'une génération à l'autre, des pères aux fils, chacun avait sa guerre sous la bannière d'un pays qui pour les fils devenait l'ennemi ; chacun avait sa langue contre laquelle les descendants devaient lutter pour en apprendre une autre : ainsi perturbés pendant près de cent ans, ces alsaciens devaient aussi gérer les conflits nés de ces oscillations politiques et linguistiques, pour eux-mêmes et en famille où chacun aurait aimé embrasser la cause qui lui semblait la plus conforme à ses sensibilités, si cela n'avait pas irrémédiablement mis en danger toute sa famille. Et que penser de ces monuments aux morts de chaque village, où gravée dans la pierre se lisait la phrase traditionnelle « Morts pour la France » alors que d'une guerre à l'autre, ils furent tour à tour tués pour l'Allemagne ou pour la France, et si souvent dans cette lointaine, mythique et terrible Russie où chaque pays les envoyait afin d'éviter qu'ils ne changent d'armée, et d'où si peu sont revenus.
Devoir de mémoire donc, par un narrateur qui finit par se sentir lui-même si coupable, dans sa vie privée d'abord suite à une impardonnable irresponsabilité qui a mit son fils en danger et sa famille à dos, et par son empathie ensuite avec toutes ces générations sacrifiées qui l'ont précédé, qu'il finit solitaire, alcoolique et terré comme une bête dans une cave, et dont le seul lien avec la vie sociale se résume à sa séance d'analyse chez un psychiatre, une fois par semaine, et par une visite de son cousin.
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