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Pendant la guerre, deux jumeaux, Claus et Lucas, sont placés par leur mère chez leur grand-mère qu'ils ne connaissent pas.
A priori, ils ont entre sept et huit ans. La grand-mère est sale, méchante, intransigeante, les force à travailler.
D'une intelligence peu commune, ils font face à tout, s'adaptent à toutes les atrocités de la guerre et des hommes, avec un détachement et une clairvoyance sidérants. Tout est consigné dans un grand cahier.
Leur comportement est si étrange qu'ils font penser à des extraterrestres.
Dans cette première partie, le ton est sec, sans émotions ; Les évènements s'enchainent, frôlant souvent l'horrible, sans que rien n'entache la force et la détermination des jumeaux. C'est dur.

A quinze ans, Claus est parti. Il a réussi à franchir la ligne de démarcation. Lucas se retrouve seul dans la maison de la grand-mère.
Le pays est sous un régime totalitariste. Il devient un homme, fait quelques rencontres déterminantes, rachète une librairie, fait sien l'enfant de Yasmine, mais il reste toujours un être à part.
Dans cette deuxième partie, il n'est question que de Lucas qui, toute sa vie, attend le retour de son frère.
Le ton est plus doux, le style plus allongé, les personnages plus humains.

Dans la dernière partie, Claus refait surface, mais plusieurs versions de l'histoire des deux frères se succèdent.
Quelle et la bonne version ?
Qui est Lucas, qui est Claus ?
Y a-t-il vraiment deux frères.
On se perd en conjectures. Qui croire ? Que croire ?
Là aussi, le style est plus élaboré

C'est une trilogie absolument passionnante et qui se dévore d'une traite. le sentiment de malaise sordide du début se transforme en sentiment de mal-être des deux frères et se termine en sentiment d'incompréhension. Mais chaque lecteur se fera sa propre opinion de la vérité.
En tous cas, c'est une véritable réussite.
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Klaus et Lucas sont jumeaux, ce qui dans leur cas signifie être deux parties pas si distinctes d'une même entité. D'ailleurs, c'est au pluriel qu'ils conjuguent le mieux leur enfance. C'est la guerre et leur mère les envoie dans la Petite Ville chez sa propre mère pour leur éviter de sombrer sous les décombres de la Grande Ville. C'est auprès de cette grand-mère aride qu'ils grandissent dans un dénuement qui n'est pas mal vécu. L'un et l'autre grandissent marge d'une société qu'ils connaissent mal. Dans ce monde qu'ils se construisent l'un pour l'autre, ils cherchent à s'endurcir et la douleur est provoquée pour être domptée. Ils grandissent entre deux murs immenses : la vérité l'un envers l'autre – vérité qu'ils couchent dans un grand cahier – et le mensonge pour les autres, et parfois pour eux-mêmes.

Au fil des tomes, ils grandissent et leur vie se peuple de fantômes de chair, d'os et d'esprit. L'auteure joue avec le lecteur en déconstruisant par morceaux l'histoire déjà écrite. Elle déploie son talent à plusieurs niveaux. Justement dans cette fiction qui revient sur ses pas et se corrige, voire se nie. Mais également grâce à une plume d'une sobriété déroutante. C'est sans état d'âme qu'elle raconte, annulant toute représentation morale préétablie. Aucun voyeurisme dans ces pages, mais une exposition de faits qui se heurtent les uns les autres, effleurant à peine les personnages mais remuant nécessairement le lecteur. Il y a une beauté froide dans cet épurement et une violence sourde dans ces histoires emplies de solitudes et d'amours extrêmes et extrêmement malmenées.
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C'est dans un style très simple, très épuré, qu'Agota Kristof nous emporte dans le récit passionnant de deux frères jumeaux durant la Seconde Guerre Mondiale.
Moi qui m'attendais à un récit terre-à-terre du genre "Au revoir les enfants", j'ai été fort surpris par ce style très particulier. En effet, derrière l'apparence d'un conte pour enfants et au fur et à mesure que le lecteur entre dans le récit, c'est à l'âpreté d'une vie cruelle et misérable, aux horreurs de la guerre, que l'on est confronté.
Et puis, survient ce qui confère à cette "trilogie" son cachet si particulier, sa touche personnelle qui en fait une oeuvre unique : une touche subtile de fantastique, un zeste de dérèglement psychologique que l'auteur laisse lentement pėnétrer dans l'esprit du lecteur... Qui des deux jumeaux est le narrateur ? Derrière l'anagramme formé par les prénoms de Lucas et Claus, n'est-on pas face à une maladie psychique magistralement restituée par le talent littéraire d'Agota Kristof ?...
Une tournure dramatique totalement bluffante attend le lecteur qui se plongera dans ce roman.
Une belle découverte en ce qui me concerne !
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La guerre a éclaté. Une femme confie ses enfants, des jumeaux, à sa mère, à la campagne. Les garçons sont fusionnels et ne font rien l'un sans l'autre. Pour faire face à toutes les douleurs, ils décident de s'endurcir et se livrent à de cruels exercices. « À force d'être répétés, les mots perdent peu à peu leur signification et la douleur qu'ils portent en eux s'atténue. » (p. 27) de l'insensibilité à la cruauté, les jumeaux font l'apprentissage d'une résistance à toute épreuve. Mais il reste une chose qu'ils doivent surmonter : la séparation. L'un part donc, traverse la frontière, se rend dans l'autre pays. Lucas reste seul, sans Claus, dans la maison de la grand-mère. Il continue à écrire dans le grand cahier, pour que Claus sache qu'il ne l'a pas oublié. « Nous avons décidé de nous séparer. Cette séparation devait être totale. Une frontière n'y suffisait pas, il y fallait aussi le silence. » (p. 319) Lucas rencontre Yasmine et Mathias : il essaie de former une famille avec cette femme et cet enfant, mais sans Claus, il n'est que claudiquant, incomplet. « Je connais la douleur de la séparation. […] le départ d'un frère avec qui je ne faisais qu'un. Il est parti. Il a traversé la frontière. » (p. 220) Quand vient l'heure de tomber les masques, il faut relire toute l'histoire et démêler le vrai du faux, le véridique de l'inventé.

La générosité froide et automatique du/des protagonistes est effrayante, tout comme leur histoire aux accents si vrais et pourtant si faux. « Ne me remerciez pas. il n'y a aucun amour et aucune bonté en moi. » (p. 233) Qui sont Lucas et Claus ? Existent-ils ? Où est la vérité dans leur histoire ? Qu'y a-t-il dans ce grand cahier ? « Je suis convaincu, Lucas, que tout être humain est né pour écrire un livre, et pour rien d'autre. Un livre génial ou un livre médiocre, peu importe, mais celui qui n'écrira rien est un être perdu, il n'a fait que passer sur la terre sans laisser de trace. » (p. 256) Les trois parties de cette trilogie ne sont en fait que trois versions de la même histoire, celle d'un drame si bouleversant qu'il a fallu écrire sur les mots pour les faire taire. « J'essaie d'écrire des histoires vraies mais, à un moment donné, l'histoire devient insupportable par sa vérité même, alors je suis obligé de la changer. » (p. 335) Les dialogues sont terriblement efficaces, incisifs et décisifs. S'il y a beaucoup de mensonges entre les lignes, les répliques disent beaucoup. « Quelqu'un qui n'existe pas ne peut pas revenir. » (p. 276)

J'ai lu ce roman une première fois, il y a près de 10 ans. Déjà, le texte m'avait éblouie, bouleversée, retournée. Forcément, une histoire de jumeaux et de séparation… Cette relecture est tout aussi poignante, le choc est le même. Ce superbe roman, une nouvelle fois, m'a mise KO.
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La trilogie des jumeaux est un ensemble de romans qui en réalité ne font qu'un seul récit. Agota Kristof publie "Le grand cahier" en 1986 (directement en français). le roman forme un tout et l'histoire semble s'arrêter là. Sauf que les publications de "La preuve" en 1988, puis du "Troisième mensonge" en 1991 remettent en cause ce qu'on a lu dans le premier livre.
Si l'univers reste le même (cette petite ville hongroise, bien que jamais citée ou située), les personnages réapparaissent, mais le point de vue différent et les distorsions du récit obligent le lecteur à questionner ce qu'il a déjà lu. Pour preuve le changement de narrateur, selon les récits : « nous » dans "Le grand cahier", « je » (mais un « je » différent) dans les deux autres romans.
Au départ, donc, des jumeaux sont confiés par leur mère à une grand-mère qu'ils n'avaient jusqu'alors jamais connue, dans une petite ville de province. La femme est sale, haineuse, fait travailler les enfants et les insulte constamment. Pour survivre les enfants vont faire des exercices pour s'endurcir et leur attitude se révèle étrange, troublante voire inquiétante.
Tout sentiment ou empathie leur semble inconnu. Ce qui ne les empêche pas d'aider la voisine handicapée et leur fille… comme un devoir.
Un sentiment trouble, voire un malaise, s'empare du lecteur au fil des pages et pourtant impossible de lâcher le livre, tant la destinée tragique des jumeaux intrigue. Capables de violence comme de gestes d'entraide envers leur entourage et tout cela avec une logique qui leur est propre.
Les romans suivants ne feront qu'accentuer cette attitude, avec l'interrogation supplémentaire sur l'existence réelle ou supposée d'un jumeau, les années qui passent, les blessures qui perdurent. Sans oublier l'évolution sociale et politique du pays : la guerre, puis l'occupation par le « libérateur », une frontière fermée vers l'Ouest.
Un ouvrage, trois romans, une lecture souvent dérangeante, un style sec et incisif comme taillé au couteau, "La trilogie des jumeaux" a propulsé à juste titre l'auteure parmi les grands écrivains de la fin du XXe siècle. du grand art.
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A lire absolument sous la forme de trilogie sous peine d'en perdre tout le sens. Un livre énorme, troublant, dérangeant, bouleversant.
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Avec une écriture méthodique et inventive Agota Kristof révèle dans ces trois récits la brutalité audacieuse et déconcertante du mensonge, mais aussi de la vérité qui alimente certaines preuves rapportées par les victimes de guerre. Dans cette trilogie, les jumeaux se révèlent des êtres stupéfiants de cruauté ou l'humour noir fait passer la pilule...Cette indéniable tendresse qui relie les deux frères devenus grands, retrouvant la liberté de leurs faits et gestes dans leur pays délivré. Tout n'est qu'apparence, les chagrins sont imprégnés dans les tréfonds de leur cerveau marqué par les traumatismes de leurs infamies dont la guerre est la seule responsable dans les territoires occupés. Comment redevenir des êtres humains dits normaux? ils sont condamnés toute leur vie au silence et la tristesse, car en avouant leurs exactions d'hier dont leur survie en dépendait, à leur tour ils auraient été emprisonnés. Aux lendemains de la guerre, la haine tenace et omnibulante contre l'ennemi les auraient précipité dans un jugement hâtif et partisane en une humiliante condamnation à mort.
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La Trilogie des Jumeaux rassemble en fait les trois volumes d'un roman, à savoir le Grand Cahier, La Preuve et le Troisième Mensonge. L'histoire est assez difficile à résumer car elle évolue au fur et à mesure qu'on progresse dans la lecture. Tout du moins la perception que l'on en a évolue. En effet, aucune certitude n'est acquise, car tout est subjectif. Il y a toutefois une constante, c'est la guerre. Une guerre inconnue dans un pays sans nom. Et cette guerre va influer sur la vie des personnages, sur leur ressenti, leurs souvenirs.
Ces trois volumes réservent beaucoup de surprises, magistralement orchestrées. La dureté du 1er volume, la découverte de ces enfants qui n'en ont plus que l'apparence. le style, net et incisif. La guerre ensuite, qui pourrait constituer un 3e personnage, extérieur, flou, car on ne l'apperçoit que du point de vue de ce peuple qui n'y comprend rien et subit l'invasion, la libération, les violences. Et finalement, la vérité, que l'on connait jamais vraiment, qui se faufile entre les doigts du lecteur, qui s'échappe et revient quelques pages plus loin.
Tous ces éléments en font un livre passionnant, vraiment à part, et qui vaut vraimentla peine d'être découvert.
(...)
Lien : http://lemonde2cely.canalblo..
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Absolument bouleversant. Addictif aussi, on ne lâche rien avant la dernière page du troisième volume.
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Afin de ne pas dévoiler les surprises de cette trilogie, je ne résumerai que le début de son 1er volet. En effet, impossible d'évoquer le 2ème tome sans révéler la fin du 1er, ni de parler du 3ème sans… vous m'avez comprise !

Dans un pays en guerre, la mère de jumeaux nommés Claus et Lucas les confie à la garde de leur grand-mère, une femme méchante, avare et malpropre, surnommée "la sorcière" par le reste du village. Les deux garçons, âgés de 5 ans à leur arrivée chez cette mégère, font preuve d'une intelligence et de ressources hors du commun. Dispensés d'école, ils pourvoient eux-mêmes à leur instruction, qui va de l'étude de la Bible à l'observation des comportements humains les plus abjects. Comme exercice, ils s'astreignent à écrire, dans "Le grand cahier", des rédactions devant relater de la façon la plus objective leurs expériences diverses. le roman est la compilation de ces rédactions.
Il en résulte un style froid, dénué de tout apport émotionnel, mais néanmoins glaçant, car les scènes décrites sont souvent empreintes de violence, et le fait de s'imaginer qu'elles le sont par de jeunes enfants ajoute à leur noirceur.

Tout au long de la trilogie, l'auteure gardera cette distance vis-à-vis des sentiments : ses personnages, qui ont décidé de ne plus rien ressentir dans le but de pouvoir faire face à un monde injuste et cruel, subissent ensuite comme un handicap cette carence émotionnelle, porteuse dans les 2ème et 3ème volumes d'une immense mélancolie.

La relation ambiguë qu'entretiennent Claus et Lucas au bien et au mal est troublante pour le lecteur, qui est de plus déstabilisé par les rebondissements de l'histoire, que l'on pourrait qualifier d'histoire "à tiroirs". En effet, Agota Kristof nous plonge dans une réalité qui se dérobe pour en révéler une autre, elle-même enrichie d'un nouvel éclairage qui rend caduc le récit qui précède... et finalement, ne s'agit-il pas d'une seule réalité abordée sous divers points de vue plus ou moins fantasmagoriques, mais tous recevables ? Sur quoi est-il vraiment nécessaire et intéressant de s'attarder : sur ce qui est, ou sur ce que la souffrance, les désirs, nos mécanismes d'autoprotection, nous poussent à imaginer ?

De même, l'action se déroule dans un lieu et un temps qui ne sont jamais vraiment précisés : il est question du "village", de "la ville", de "la guerre" et de "la révolution", le quotidien est celui d'un pays totalitaire, où sévit la censure… là aussi, on a l'impression d'être à la fois dans un monde imaginaire mais inspiré de la réalité, appréhendé à partir de diverses perspectives, selon que l'on se place d'un côté ou de l'autre de la frontière.

Un style extrêmement simple qui sert un récit à la structure complexe, et une lecture qui ne laisse pas indifférent… à tel point que "Le grand cahier" a souffert de la censure : il a été interdit dans certaines bibliothèques (notamment au Québec) et l'enseignant de français d'un collège d'Abbeville a été soumis à une garde-à-vue et à une perquisition à son domicile pour avoir fait travailler une classe de troisième sur ce roman (les parents des élèves ont porté plainte en raison des scènes de zoophilie et de pédophilie qui y sont décrites).
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