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Je me délecte de prendre entre mes mains ce petit livre à la couverture douce comme une peau de bébé, présage de la poésie du texte qu'il contient. Il nous dit, une vie simple, pas toujours facile, où le goût des petits moments de bonheur se veut plus persistant que celui des rêves abandonnés.

"Elle dit, J'ai continué à coudre. J'ai fait des jupes, des robes, catalogue Burda, les patrons sur la table de cette cuisine, sur cette table-là, formica, le tracé à la craie, la découpe du patron, j'étais douée. Les habits pour les amies, les habits pour mes enfants. J'habillais mon monde. Mais je n'étais pas secrétaire. Je n'avais pas le droit à cette machine aux mille touches, ni au chignon. Aux lunettes profillées à l'américaine. Cinéma. Seins en obus. Hollywood. La route des étoiles. - Mauvaise distribution. Pas pour moi les doigs qui à l'écran frappent les touches, les martèlent, poignets rigides qui marquent la présence au monde, tchac, tchac, tchac, musique mécanique, code morse, indéchiffrable. Guerre, charme, émancipation. Faites une place aux femmes. Non pas pour moi. de toute façon, je n'étais pas faite pour ça, j'en ai conscience à présent. Au fond de moi j'avais décidé de tout sacrifier à la famille." p.29

Tous les chapitres commencent par "Elle dit,", en italique, et derrière ce sont les paroles de la mère avec des phrases sobres et évocatrices, elle égraine sa vie douce amère dans une cité minière du nord. Elle dit, ...ses parents "polaks", la cité minière, son père mort du charbon ; elle dit l'usine, son mari, l'amour, les déceptions ; elle dit, ses enfants, l'éclat des vacances au soleil.
Tout cet assemblage qui fait une vie... ces moments heureux, tristes, joyeux, nostalgiques... c'est aussi le fils qui les diffuse de cette façon indirecte pour dire son amour à sa mère.

"Fils des mères encore vivantes, n'oubliez plus que vos mères sont mortelles." Albert Cohen, le Livre de ma mère.

À noter la belle préface de Yves Charnet qui rend hommage à l'écriture de Yannick Kujawa : ..."Une vie, chapitre par chapitre ; l'amour, le tourment, la mort ; comme un album-photo en toutes lettres. Je laisse au lecteur le soin émouvant d'entrer dans cette vie. Cette vie de peu, cette vie de rien - cette vie de l'amour de la vie malgré tout."...

J'espère avoir donné envie à quelques "babeliotes" de découvrir ce petit livre... il vaut le coup !
Pour ma part, je dis un sincère merci à Babelio et aux éditions le Bateau Ivre pour cette belle lecture.
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Yannick Kujawa est né en 1973, il enseigne les Lettres.
Les trois ouvrages qu'il a déjà fait paraître se caractérisent par la place accordée à l'intime.
D'abord influencée par le surréalisme (" D'un Constant l'autre"), son écriture cherche rapidement à affronter plus frontalement le réel.
"Sommes", son deuxième texte, paru aux Editions Henry, constitue une oraison funèbre à la mémoire du père, un lieu de conflit, où le « Je » de l'auteur trouve peu à peu à s'affirmer.
À l'inverse, dans "Elle dit," qui paraît aux Éditions le Bateau ivre, Yannick Kujawa choisit de s'effacer pour donner la parole à sa mère, en restituant la voix de celle-ci. Un texte qui joue sur les genres, entre témoignage et fiction. C'est ainsi que par le récit de sa vie fait par la mère au fils l'autobiographie prend toute sa dimension romanesque.
Sommes et Elle dit, forment par ailleurs un diptyque consacré à l'univers minier du nord de la France, vu à travers le prisme familial.
Lien : http://lebateauivre.fr/
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Elle dit de Yannick Kujawa

Transmission est le premier mot qui me vient à la lecture de ce nouvel opus de Yannick.
Après Sommes, l'auteur continue d'explorer la cellule familiale.
Elle dit des mots. Elle dit la mère et le fils l'écoute. En Afrique, il est dit que lorsqu'une personne âgée meurt, c'est une bibliothèque qui disparaît. Grâce à cette transmission, la continuité s'écrit. Et l'échange se fait parce que l'auteur nous donne en partage ces mots simples d'une existence simple et sacrifiée à l'autel de la Réalité. Elle, donne le ton, le goût de l'écriture par la parole donnée. La mère fait un deuxième don après celui de la Vie. L'Amour se transmet et se grave dans la Mémoire. Alors quel juste et bel hommage en retour que nous donne le fils. Ne vous méprenez pas : elle ne radote pas, elle évoque.
Yannick confirme son talent de narrateur et impose son parti pris pour l'autofiction livrée sans fard et avec ses phrases si justes d'authenticité.
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Étant moi-même originaire du nord, c'est aussi une partie de mon histoire familiale que j'ai lue. Je me suis très vite attachée à cette femme, cette épouse, cette mère qui nous dévoile autant ses bons que ses „moins“ bons moments. En lisant ses confidences, j'ai ri et j'ai même eu parfois les larmes aux yeux car Yannick Kujawa, par le choix de ses mots, a su créer une certaine intimité entre son personnage et le lecteur. Mais au delà de ce destin de femme, « Elle dit » aborde également des sujets toujours brûlants : l'intégration réussie des mineurs polonais dans le Nord – Pas-de-Calais à partir des années 1920-1930 qui ont su concilier leurs traditions avec les valeurs de la République française. Ou encore la disparition des petits cinémas de quartier, des bals dansants, des tournois de boules, de cartes ou toutes ces activités sociales (souvent proposées par les sociétés minières d'ailleurs - quelles sont les entreprises qui en proposent encore aujourd'hui ?) qui permettaient aux gens de se retrouver le soir pour prendre le temps de se parler, ou simplement d'être ensemble sans avoir les yeux rivés toute la soirée sur un téléphone....
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Elle dit, de Yannick Kujawa est avant tout l'histoire d'une transmission et d'une écoute. La transmission d'une mère, l'écoute d'un fils, dans une tentative d'éclaircissement historial de l'intime, de re-saisissement de soi et de quelques autres dans le grand fleuve de l'usure du temps, de l'oubli. Elle dit, est aussi le titre d'une modestie. Un titre volontairement inapproprié où l'auteur ne laisse momentanément entrevoir que la main blanche du scribe alors même que le travail d'écriture excèdera le seul champ de la transcription du dire. Elle dit, est incontestablement une re-naissance, celle de la voix du fils-écrivain qui vient faire sienne et autre la voix de la mère. L'autofiction existentielle de la mère qui se dit, qui se donne et fait matière à un dépassement de ses impasses par l'autre voie, par l'entremise du fils passeur, celle de l'écrit. L'écrit, la voix. Est-ce cela un écrivain, un tripatouilleur de voix qui ne se satisfait pas de les entendre et qui cherche, géomètre de scansions nouvelles, d'autres résonnances propres à enrichir la seule palette de l'existant, comme une modestie définitive où l'ex-sistence nous tient reclus?
Michel Gros Dumaine


Lien : https://michelgrosdumaine.bl..
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Coucou, je sais la soeur affective, apprécie avec une objectivité certaine " Elle dit". J'ai retrouvé mon enfance, la sensibilité et la mélancolie de Maman. C'est fluide et riche en émotions, j'ai pleuré mais mon frère je t'accorde un talent certain.
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Beau récit, mettant en valeur un personnage vrai, humain. J'ai aimé la pudeur avec laquelle ce portrait de femme est écrit. J'ai aussi aimé l'évocation d'une région qui n'est pas la mienne mais à laquelle je me suis attachée. Merci à Yannick Kujawa de nous faire partager son histoire personnelle.
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J'ai reçu ce livre dans le cadre de la Masse critique Babelio, merci pour cet envoi.

Autant être honnête de suite, je n'ai pas accroché à cet ouvrage.

J'en attendais effectivement autre chose.

Etant moi-même originaire du Nord - Pas de Calais avec des origines polonaises, je pensais trouver dans ce roman, les choses que me raconte ma famille, un peu plus de sujets ayant attrait au monde des mineurs...
Malheureusement, je n'y ai pas trouvé mon compte, trop d'espoir, une envie de découvrir une autre histoire...

L'auteur nous livre ici le témoignage de sa mère, touchant certes, mais trop personnel, pas assez varié, cela reste cependant un bel hommage d'un fils-écrivain à sa mère.

Les chapitres parfois longs, parfois très courts, m'ont lassés.

Attention, ce livre n'est pas mauvais, il n'as juste pas fonctionné sur moi.

Je retiendrai la souffrance de cette mère dans une vie et un contexte difficile, mais pas de joie ou de bonheur.


Lien : http://nadoubouquine.fr/Arti..
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BONNE À TOUT DIRE
l'Invention du fils-écrivain

Ce n'est sans doute que ça, un fils. La voix de sa mère. de même qu'un écrivain n'est rien d'autre, à la fin, que quelqu'un qui entend des voix. de vieilles voix increvables ; leur intarissable murmure. Yannick Kujawa a fait, avec Elle dit, une entrée remarquée dans cette famille particulière. Les fils-écrivains.
(...)
Elle dit. le récit maternel dans tous ses états. Elle dit tout. Les parents, le mari, les enfants. Elle dit tout le familial. Une vie, chapitre par chapitre ; l'amour, le tourment, la mort ; comme un album-photo en toutes lettres. Je laisse au lecteur le soin émouvant d'entrer dans cette vie. Cette vie de peu, cette vie de rien – cette vie de l'amour de la vie malgré tout.
(...)
Le fils-écrivain règle la note pour toute la famille. Chacun son héritage. Il met tout sur la table. La peau et les mots. Sa plume-scalpel taille dans le vif de la fiction maternelle. Jusqu'à l'os de l'amour. C'est une fable mise à nu. Par son légataire même. Ce récit des origines remonte, à sa façon lyrique et sociologique, à l'origine des récits. À la blessure intime de la parole elle-même. Au commencement était la Mère. La Mère comme Verbe.
(...)
Elle a toujours aimé ça. Écrire. C'est ça qu'elle aurait voulu faire. « Secrétaire ». Elle aurait préféré coudre des phrases plutôt que des habits. Bonne à tout dire plutôt que bonne à tout faire. C'est à son fils qu'elle va passer ça. Cette manie d'empêchée. C'est lui qui sera couturier du texte. Styliste de cet autre tissu. C'est lui qui prendra la relève.
(...)
C'est l'invention du fils comme écrivain. L'invention du fils-écrivain. D'une certaine façon il ne dit que ça. Ce beau livre d'amour. Il raconte comment un fils devient écrivain pour faire un livre avec ce qu'elle dit. Sa mère, sa mère fabuleusement mortelle, sa chimère.

Éxtraits de la préface d'Yves Charnet
Lien : https://www.facebook.com/LeB..
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