"Toutes les forêts du monde ont sans doute quelque chose en commun: le silence et les cachettes."
Dans ce superbe roman de la finlandaise Anni Kytömäki, la forêt, les arbres et toutes les créatures sylvestres ne sont jamais loin. Les hommes, les femmes se débattent avec le temps, la succession des évènements historiques, les aléas de leurs existences individuelles, mais la nature elle, est toujours là, immuable, refuge précieux de ceux qui la connaissent intimement, gardienne des secrets de ceux qui la parcourent, compagnon fidèle de la solitude de ceux qui la protègent.
Ce premier roman est un manifeste sensoriel, une célébration des arbres et des oiseaux, une ode aux saisons qui se succèdent et aux légendes merveilleuses que se transmettent ceux qui y vivent.
Mais il est aussi le reflet de la folie des hommes, de la démesure des projets d'exploitation forestière du père d'Erik Stenfors, à la violente répression des militants communistes qui condamne la relation d'Erik et de Lidia, et l'équilibre de leur fille, Malla.
Les voix d'Erik, naturaliste, et de Malla, nous donnent à entendre l'histoire tragique de la Finlande du début du XXè siècle : l'indépendance, la guerre civile entre les Blancs et les Rouges, le rapprochement avec l'Allemagne nazie, mais ce ne sont que des échos lointains d'un monde qui change. Parce que dans leurs coeurs, leurs jambes, leurs rêves, c'est la forêt qui règne, et elle les appelle constamment.
Vous l'aurez compris, ce récit, ample, généreux, sensible m'a complètement conquise. C'est une histoire au long cours, qui traverse les générations, les vicissitudes de la vie de chacun des personnages auxquels on s'attache férocement.
Une fois la dernière page tournée, ne demeurent que la beauté de ces forêts, et la magie qui se dégage de la
gorge d'or d'un ours devenu homme. Ou peut-être le contraire.
Un roman à parcourir, une invitation au voyage irrésistible et un très bel objet-livre, édité avec passion par les éditions @ruedelechiquier