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Critique de 5Arabella


Oeuvre d'une vie, le Roland furieux aurait été écrit et modifié pendant une trentaine d'années par l'Arioste, au début du XVIe siècle, la première version publiée date de 1516, mais d'autres suivront : des épisodes seront rajoutés, la langue même aura changée (du dialecte de Ferrare, l'Arioste passe au toscan littéraire). L'oeuvre est dédiée au cardinal Hyppolite d'Este (la famille d'Este est la famille qui dirige Ferrare à cette époque) et de nombreux passages glorifient sa famille, censée descendre de Roger, l'un des personnages principaux du poème, et plus loin d'Hector, le héros troyen. Il s'agit donc d'un poème, composé en strophes de huit vers, comportant 46 chants, ce qui dans l'édition dans laquelle je l'ai lue, fait environ mille pages. Autant être prévenu, on s'engage dans une lecture au long cours. le poème de l'Arioste fait suite à un autre ouvrage célèbre dans son temps, mais éclipsé par celui de sont continuateur, le Roland amoureux de Matteo Maria Boiardo . L'ouvrage de l'Arioste débute exactement à l'endroit où le Roland amoureux s'interrompait (Boiardo n'a pas pu le finir).

Nous sommes à l'époque de Charlemagne, qui est un personnage du poème. le roi sarrasin Agramant a décidé de faire la guerre aux Chrétiens, au début du poème, il fait le siège de Paris, où s'est réfugié Charlemagne. C'est que ses meilleurs chevaliers ne sont pas disponibles pour la défense du royaume, une certaine Angélique, au charme, irrésistible, est venue jeter le trouble, et les chevaliers, à sa poursuite, pensent plus à l'amour qu'à défendre leur suzerain. Angélique, fuit, et qui peut la poursuit. Elle fuira jusqu'à rencontrer l'amour en la personne de Médor, un obscur soldat sarrasin. Lorsqu'il apprend le mariage d'Angélique, Roland, le chevalier le plus puissant de tous, devient fou, et parcourt nu et irrésistible, la terre, provoquant des ravages auxquels personne ne peut mettre fin. Par ailleurs, de nombreux personnages vivent leurs histoires, de guerre d'amour, de sorcellerie. Roger et Bradamante, Alcine l'enchanteresse, Atlant et son château où les chevaliers sont pris au piège, Bradimart et Fleurdelys, Astolphe qui ira jusqu'à la lune à la recherche de la raison de Roland, et tant et tant d'autres traversent plus ou moins longuement les pages du poème.

L'oeuvre est un étrange mélange, à la confluence de diverses époques et genres. Les personnages et le contexte guerrier des batailles contre les Sarrasins évoque les chansons de geste. La magie, les fées et sorciers, les objets enchantés, les palais merveilleux qui se révèlent des prisons redoutables, les romans du moyen-âge, ceux qui relèvent de la matière de Bretagne,. Mais la renaissance est déjà là, et l'antiquité, ses épopées et sa mythologie, ont déjà fait un retour en force. Des récits enchâssés, les histoires de tromperies entre maris et femmes par exemple, font penser au Décaméron. C'est donc une sorte de somme, de mélange, entre l'ancien et le nouveau. C'est surtout un formidable réservoir d'histoires, de récits, de contes, qui sera une source d'inspiration quasi inépuisable, qui seront repris, réarrangés, dans des livres, des pièces de théâtre, des opéras, des peintures et dessins, puis des films tellement nombreux qu'il est impossible d'en faire le catalogue.

Les vers de l'Arioste sont beaux et élégants, une certaine ironie apporte une touche de légèreté, c'est très inventif également. C'est évidemment très long, il faut avoir le temps de plonger dans l'histoire, en essayant de ne pas se perdre dans tous les dédales et tous les personnages. Les passages nombreux glorifiant les d'Este sont par moments un peu lourds aussi. Restent les belles histoires, dont certaines sont devenues très connues, des personnages mythiques, loin d'une profondeur ou vraisemblance psychologiques, l'époque n'envisageait pas les choses sous cet angle, mais plutôt sous celui d'images somptueuses, d'archétypes. Un voyage dans le temps, l'espace, et le rêve.
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