Jean-Michel Ribes,
Comédie-française,
Eugène Labiche... voilà des noms qui ne semblent pas trop coller ensemble. Et pourtant.
Ribes avait un net penchant pour l'absurde qu'il voyait dans les pièces de
Labiche, et notamment
La Cagnotte qu'il va mettre en scène avec Khorsand et Bideau... à la
Comédie-française. Cette pièce, tout comme le Voyage de Monsieur Périchon, fera partie du répertoire de cette vénérable institution. Une consécration que ne connaîtront pas bien des auteurs moins portés sur la gaudriole.
La Cagnotte raconte les péripéties parisiennes d'un groupe de notables, de bons bourgeois de "province", bien décidés à se payer du bon temps à la capitale pour y dépenser une cagnotte amassée lors de nombreuses parties de cartes.
Labiche soigne ses effets. le jeu s'appelle la bouillotte... ce n'est pas le whist, la canasta ou le rami... non, c'est la bouillotte...
Ce que Ribes aime chez
Labiche, c'est le sens de l'absurde. J'ai souvent pensé aux
Marx Brothers, qui doivent connaître leurs classiques. Pas de temps mort, cela rebondit en permanence. Jeux de mots, quiproquos, comiques de situation...
Labiche use de tous les artifices pour déployer son intrigue. de bourdes en malentendus, la bande de bourgeois va aller d'un restaurant au poste de police puis dans les salons d'un marieur, pour finir dans la rue ruinés et désemparés... la morale pourrait venir
De La Fontaine... ils jurèrent, mais un peu tard, qu'on ne les y prendrait plus...
Dire que la pièce n'a pas vieilli est sans doute excessif. Mais la mécanique fonctionne encore très bien. On y prend un plaisir non feint. Les didascalies émises par
Labiche indiquent à quel point ce texte est exigeant pour les acteurs, car tout est une question de rythme, de dynamique, de pulsation. Qu'un élément se mette en place trop lentement et c'est tout l'édifice qui s'écroule.
Une très belle découverte.