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EAN : 9782070720712
312 pages
Gallimard (28/08/1990)
3.57/5   301 notes
Résumé :

Philippe Labro
Le petit garçon


La Villa, à l'écart d'une petite ville du sud-ouest de la France, ressemble, avec son immense jardin, à un paradis où rien ne peut arriver. C'est bien ce qu'avait voulu le père, un homme juste et sage. Voyant approcher la guerre, il avait quitté Paris pour mettre sa jeune femme et leurs sept enfants à l'abri. Mais quand déferlent les années quarante, le malheur atteint les univers les plus protégés... >Voir plus
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Philippe Labro, le petit garçon, roman

J'en ai lu des romans de Philippe Labro, parce que l'auteur a, il faut le reconnaître, un beau parcours, et qu'il me plaît à moi, de faire avec lui ce beau parcours. Il est né en 1936 à Montauban, je connais un peu Montauban, je reconnais les lieux, avec plaisir, malgré le temps passé.
Il est intéressant d'avoir en tête l'année de naissance de Labro quand on lit le petit garçon, car si évidemment on lui accorde avec ses frères jumeaux l'appellation de petit, personnellement à certains passages je ne le voyais pas si petit, notamment quand il parle avec complaisance et fierté de sa précoce sensualité, des jeux avec les filles du Joulas, ou quand il se sent responsable du jeune Maurice, le petit Juif apeuré qui n'arrive pas à dormir, qu'il réconforte.
Les livres de Labro sont toujours construits de la même façon, de manière académique et maîtrisée, avec un prologue, trois parties, et un épilogue.
Il en vient - c'est son sixième roman- ou revient à son enfance à Montauban, où sans doute les bases de ce qu'il est se sont posées. C'est un peu comme la jarre à côté de laquelle est bâtie la Villa de Montauban, dans laquelle le petit garçon lit ce qu'il veut bien, voit des esprits, et que la famille laisse à son départ, comme le petit garçon laisse celui qu'il fut et qui pressent que s'il revient à Montauban, c'est malgré tout un autre qui reviendra. L'on comprend alors la phrase de Bernanos mise en exergue: mais le plus mort des morts est le petit garçon que je fus. Cependant né du précédent. Ce qui justifie la dernière phrase du roman.
C'est ce que j'ai le plus aimé dans le livre, les paliers très marqués de l'âge, le passage du temps qui obnubile les adultes, le frère aîné que les jeux des petits lassent très vite, la jeune fille qu'est la soeur aînée qu'il faut protéger des désirs des Allemands logés dans la Villa, le benjamin qui se sent exclu du groupe des jumeaux, le petit garçon qui mûrit, et dont la maturation est accélérée par les circonstances de la guerre et du sauvetage des Juifs.
Un petit garçon a pour repère sa mère et son père. Un beau portrait de la mère est dessiné, et l'on n'est pas étonné qu'un livre sur elle vienne de sortir, Ma mère, cette inconnue, mais c'est surtout un hommage au père qui est rendu. le père est vieux, de dix-huit ans plus âgé que sa femme connue quand elle avait dix-sept ans, considérée comme la grande soeur de ses enfants. Un père clairvoyant qui met très vite sa famille à l'abri de la catastrophe qui se prépare, un père compétent dans son travail, organisé, ouvert aux autres et payant sans hésiter et au risque de sa vie, de sa personne et de ses biens -il assure le passage des Juifs, qu'il cache dans sa Villa, et ses fermes, en Espagne. Avec sa femme, il recevra le titre de Juste parmi les Nations- qui reprend le travail pour assurer les meilleures études à ses enfants, un père qui a le sens du sacrifice. Ce père a perdu le sien dans son adolescence, d'où peut-être son pessimisme constant, et au moment de cette perte, a trouvé un ami indéfectible, que Labro considère comme son second père.
Labro est pour ainsi dire la continuation de son père, sans peut-être ce don du sacrifice, mais aimant les autres, avec la même passion des conquêtes féminines, et le beau Diego qui passe comme une étoile noire est peut-être un demi-frère, qui l'a initié à la littérature, qui voulait écrire, regardait le buste de Voltaire. Même si aujourd'hui, grâce à l'enquête qu'il a menée pour écrire sur sa mère, Labro a découvert qu'elle a écrit, en secret, qu'elle a été journaliste, et pour avoir lu Quinze ans, on sait qu'elle a poussé son fils, pour le sortir d'un certain enlisement, vers l'écriture journalistique.
Le petit garçon, c'est aussi un hymne à la fratrie, de quatre garçons et de trois soeurs (tiens?! qui sont-elles, pourquoi sont-elles là? surtout pour être si en demi-teintes, comme les deux cadettes. Et l'on se demande si les jumeaux sont réellement des jumeaux. Et l'on s'interroge sur l'écart d'âge entre les enfants dont deux seulement font partie des grands) soudée par la rédaction de l'Album, où les enfants consignent les faits de la vie, la recherche des surnoms pour définir les personnes, personnages de leur enfance, qui est leur monde merveilleux, celui d'un paradis ouvert à la nature, de découvertes et d'inconnus, au même titre que les héros de leurs livres.
C'est une ode à l'enfance, quand tout est neuf, qu'on devient l'émule de ses héros, qu'on découvre la différence avec son jeune professeur homosexuel, qu'on grandit, qu'on s'amuse, avec les sarbacanes, la cavalcade. Une ode tendre, lucide, et orgueilleuse à l'enfant qu'il fut et n'a jamais cessé d'être, curieux, avide de savoir, les oreilles grandes ouvertes et les yeux en-dehors des poches, goûtant le cinéma, notamment Quai des orfèvres, le premier film qui colle à la réalité- qui a aussi ses faiblesses, sa peur du chemin des Amoureux, mais un sens intransigeant de la justice, blessé profondément quand un ex-collabo reçoit des honneurs, et peut-être conscient d'une supériorité, il habite la Villa, à l'école, c'est facile, et son père dit: "Le petit commence à me tenir tête." Il fait l'expérience de la vie,, pour laquelle il est doué, et qu'il vit avec intensité, et de la mort, avec la disparition du faux jardinier, Monsieur Germain, et le spectacle des quatre pendus, événements qui font réfléchir sur la guerre et l'imperfection des hommes . Il apprend le Temps, que les adultes achètent, sa consistance, ses mouvements, et l'écrivain qu'il deviendra le saisira dans ses étirements variables, dans l'acte de l'écriture.
Ce livre est du Labro, solide et émouvant, efficace, sans rien qui soit appuyé, même pas l'accent du Sud-Ouest, qui retrace une époque, courant en gros de 36 à 48, avec les auteurs et les acteurs à la mode, avec les yeux d'un enfant revisité par l'adulte qu'il est devenu.
Labro vient d'écrire sur sa mère, peut-être écrira-t-il sur l'enfance de son père, et sûrement je lirai le livre paru et celui à paraître.
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Un gamin, le plus jeune de sept enfants raconte. Sa jeunesse dans une villa, près d'une petite ville du sud de la France dans les années 40-45. Tous les personnages sont si bien décrits qu'ils nous font partager l'univers à cette époque là, l'occupation allemande, la résistance,les collaborateurs et la gestapo. Un temps passé si bien raconté par l'auteur. Est-ce une auto-biographie, ou l'auteur s'est-il basé sur des faits de sa jeunesse, on le le lit pas vraiment. J'ai aimé et le conseillerai.
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Il s'agit d'un roman autobiographique qui décrit la vie de Philippe Labro (né en 1936), alors qu'il était encore petit garçon. L'auteur commence par évoquer des souvenirs très anciens, dans la petite ville du Sud-Ouest où il vit avec ses six frères et soeurs, dans l'ombre tutélaire de son père et l'amour inconditionnel de sa mère. Ce père est décrit comme un homme sage et réfléchi, dont l'influence sur Philippe est profonde. Dans le livre, tout est vu par un enfant qui, au début, ne comprend pas grand chose; il voit défiler diverses personnes qu'il affuble de sobriquets originaux (comme « l'Homme Sombre »). La seconde guerre mondiale éclate: de nombreux réfugiés - notamment des Juifs - fuient la zone occupée. Discrètement, le père accueille dans "la Villa" un bon nombre de ces « visiteurs ». Mais cette générosité devient très dangereuse quand la Wehrmacht envahit la zone "libre". Maintenant, dûment prévenus par le père, les sept enfants sont tenus de donner le change pour assurer la sécurité de la famille et des « visiteurs ». Paradoxalement, la présence d'un général de la SS (venu prendre ses quartiers dans la maison) protège la famille de la répression. Cependant, le petit garçon, emmené par son père, verra quatre maquisards pendus par les Allemands. L'heure de la Libération sonne enfin. Alors intervient Sam, un prof de lycée très atypique, qui devient un familier de "la Villa" et qui conseille vivement au père de déménager à Paris, pour assurer l'avenir de ses enfants. C'est ainsi que le petit garçon, devenu jeune adolescent, se retrouve dans la capitale.
Philippe Labro est un écrivain émérite qui sait bien conter l'histoire de sa vie, à sa façon. J'entends par là qu'il distille son récit avec sobriété et aussi avec quelques longueurs, parfois. Il y a finalement peu d'action, même dans la période dangereuse de l'Occupation; un lecteur pressé peut donc un peu s'ennuyer dans les 300 pages du livre. Quant au père, sans doute idéalisé, il apparait comme une icône trop "sacrée". J'ajouterai une autre petite critique: les rapports du petit garçon avec sa fratrie sont évoqués sans grand relief. Malgré tout, ce roman mérite d'être lu, notamment à cause du parti-pris de l'auteur de nous faire découvrir la vie puis la guerre à travers les yeux du petit garçon.
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N°669– Août 2013.
LE PETIT GARÇONPhilippe Labro - Gallimard.

Quelque part dans le sud-ouest de la France, quatre garçons et trois filles habitent avec leurs parents dans une maison, « La Villa » à l'écart de la ville sur une colline boisée, une sorte de microcosme paradisiaque où rien de mal ne peut arriver à cette famille unie et heureuse. le père avait choisi cette région après avoir longtemps exercé à Paris comme conseiller juridique et fiscal et fait fortune. Pour le narrateur, il y avait les jeux insouciants, la vie au quotidien, l'école, les maladies infantiles et même un voisin, le docteur Sucre, psychiatre de son état et original comme il se doit. L'énigmatique « Homme sombre » venait parfois pour une visite épisodique et mystérieuse mais rien de plus ! Enfin pas tout à fait parce qu'il y avait aussi Mme Blèze, une belle femme élégante, vivant seule en ville, modiste et ancienne parisienne qui nourrissait ses fantasmes et sûrement pas que les siens !
Tout cela aurait pu durer aussi longtemps que l'enfance mais la voix chevrotante du vieux maréchal faisant « à la France le don de sa personne » allait tout changer: la France était vaincue, son armée écrasée par l'Allemagne, nous étions en 1940, ce monde n'allait pas tarder à s'écrouler, les vélos-taxis à apparaître dans le paysage urbain …et les uniformes couleur vert-de-gris ! Cela c'était pour les adultes, mais lui, le narrateur, poursuivait sa vie frivole et ses amours d'enfant.
La ville étant en zone libre et voisine de la frontière espagnole, des « visiteurs » énigmatiques se succédaient à la « Villa ». Ainsi le père initia-t-il ses enfants au secret qui entourait ces réfugiés temporaires et des mots nouveaux, lourds de sens, entrèrent-ils dans leur vocabulaire : antisémite, intolérance mais aussi discrétion, loyauté, prudence. L'enfance et son insouciance s'en allait déjà au rythme des changements du monde extérieur ! Ainsi affranchis, les enfants allaient apprendre à jouer la comédie, à faire semblant pour se protéger et protéger ceux qui avaient choisi de résister. Dès lors, le narrateur, encore enfant, allait-t-il apprendre à connaître les hommes, la vie en société un peu avant l'heure et prenait-t-il très au sérieux le rôle de « messager » que lui confiait son père. C'était presque pour lui un jeu où la volonté d'agir le disputait à l'inconscience de la jeunesse et il s'identifiait sans peine aux héros de roman qui peuplaient la bibliothèque paternelle. Plus le temps passait, plus la guerre jusque là lointaine se précisait : réquisition de la « Villa » par l'armée allemande, rafles, disparition de personnes ou départs pour le maquis, engagement dans la police allemande de Français connus dans la ville. Pourtant leur chance vint de l'installation chez eux d'un général SS ce qui constitua pour eux une protection involontaire et leur permit de mieux cacher les juifs en transit. Puis ce furent les messages personnels de la radio de Londres, la lente dégradation des armées du III° Reich, le débarquement en Normandie et l'inexorable avance des alliés, la fuite de l'occupant et les représailles, les réjouissances de la Libération. Puis, après toutes cette agitation et sur les conseils éclairés de Sam, le précepteur bénévole un peu excentrique mais pour une fois réaliste, ce fut, avec toute la famille réunie, le saut dans l'inconnu pour les enfants, la montée vers la Capitale où ils pourront s'épanouir, l'abandon de cette « Villa », autant dire une page qui se tournait définitivement pour ce « petite garçon » qui ne l'était déjà plus. Paris est un autre monde, une autre planète où il finit par perdre son accent du sud-ouest et aussi pas mal de ses illusions sur les gens, la société, ces idées reçues et ses convenances.

Dans ce texte, le narrateur idéalise son père, un notable érudit de province, dans les circonstances exceptionnelles de la guerre, mais apprend à connaître son histoire personnelle d'avant son mariage, voit venir le mystérieux Diego. Je retiens également le personnage de Sam, aussi déjanté que le père est sérieux et dont l'enseignement est aussi moderne qu'est classique celui du géniteur, image inversée de celle du père mais tout aussi enrichissante pour l'enfant.

Beaucoup d'écrivains ont évoqué leur enfance comme une période merveilleuse dont ils aimaient se souvenir, ont rendu hommage à leurs parents qui en ont été les artisans. Personnellement, j'ai avec elle un problème récurrent voire obsédant et je souscris plutôt à la citation de Malraux « Tous les écrivains que je connais aiment leur enfance, je déteste la mienne ». J'ai donc un intérêt tout particulier à lire ceux qui en parlent avec des mots choisis. le narrateur fait fort bien cela et, à travers ce texte un peu nostalgique on sent qu'il en garde un souvenir ému et indélébile, excellent assurément. C'est vrai que l'enfance détermine la vie future. Il est essentiel qu'elle soit réussie, heureuse, qu'elle soit porteuse à la fois d'insouciance, d'attachement aux gens qui la font, de préparation aux années à venir qui sans doute n'y ressembleront pas. Je m'interroge cependant sur la dernière phrase de ce roman autobiographique [« l'enfant que je n'ai jamais cessé d'être »]. Je ne connais pas Philippe Labro, je crains cependant que cette sentence ne soit de l'ordre de l'apophtegme convenu. Mais peut-être me trompais-je ?

En tout cas j'ai passé avec ce roman bien écrit un bon moment de lecture.


© Hervé GAUTIER - Août 2013 - http://hervegautier.e-monsite.com











































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Derrière le récit d'une enfance heureuse malgré un contexte difficile (la guerre), se dessine le portrait d'un père, un "héros", auquel le petit garçon rend un vibrant hommage. de cet homme cultivé et fin pédagogue, il a gardé le goût des mots, ou plutôt du mot bien choisi. Il en fait ici la démonstration avec un style simple mais élégant, sans aucune afféterie. Une belle surprise à la portée de tout type de lecteur !
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Quand je pensais à mes parents, mes frères ou mes sœurs, chacun enfoui dans son sommeil au cœur de la nuit sous le même toit, je me faisais l'idée que, si nous ne rêvions pas les mêmes rêves, ils avaient néanmoins quelque chose en commun. Je rencontrais mon père ou ma mère dans mes rêves, comme je rencontrais les personnages des livres que je lisais, ou les animaux et les êtres humains que je voyais à la campagne et en ville. Aussi, je ne doutais pas que de leur côté, mon père, ma mère, mes frères ou mes sœurs ne me rencontrassent. Savoir que je pouvais me promener dans les rêves de ma mère m'avait toujours réconforté et consolidait la notion selon quoi un esprit commun veillait sur nous et notre bonheur - cet Esprit que j'étais allé chercher au fond de la jarre géante orange et jaune.
Mais, les rêves de l'officier allemand? De quoi étaient-ils peuplés? [...]
Je craignais que les rêves de l'officier, que je soupçonnais plus noirs que les nôtres, ne s'échappent du premier étage, glissant le long de l'escalier, pour venir pousser ma porte et que ses oiseaux à lui, ses épées à lui, ses horreurs à lui assaillent mon sommeil.
Soudain, une pensée plus forte, dont la portée me faisait chavirer: et s'il m'avait fait entrer dans son propre rêve? [...] Je m'éveille cauchemardeux, en larmes. Je sors de mon lit. Il y a une lumière au bout du couloir. Je m'avance, curieux et apeuré, marchant sur la pointe des pieds. Dans le grand hall, sur le canapé qui appartient au salon, je vois mon père, enroulé dans une couverture. Il dort. [...] il a choisi de camper au milieu de cet endroit-clé, ce point de rencontre entre l'escalier qui mène au premier étage et distribue les couloirs vers la cuisine, les chambres des enfants, mais permet aussi l'accès au sous-sol.
Et je me dis qu'il n'est pas seulement là pour surveiller d'éventuels déplacements intempestifs. Je comprends qu'il s'est fait le gardien de mes rêves. Alors, je vais embrasser, en m'agenouillant, sa main tavelée qu'il a laissée posée sur le dos d'un livre ouvert.
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Ce soir-là, j'étais resté malade, dans un lit, une bouillotte brûlante à mes orteils, avec pour tout remède un verre de vin chaud sucré. J'avais trouvé cela délicieux, autant que les journées passées en septembre à fouler de mes pieds nus la cuve pleine de chasselas pendant les vendanges, avant d'accompagner les hommes au pressoir.Le grouillement des jus, des peaux,du raisin,les fruits qui éclatent sous la plante des pieds nus, les jaillissements rouges, violets et jaunes sur les orteils qui se coloraient, j'en gardais un souvenir haletant et je priais pour que cette orgie recommence à l'automne suivant.
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On descendait en province, et on montait à Paris; cette notion qui nous habita pendant toute notre enfance, au point que j'imaginais la France comme un pays composé d'une seule et gigantesque colline, dont l'unique sommet, l'épicentre, se situait à Paris. [...] Je me disais que les trains, les voitures, les routes les hommes et les femmes qui "montaient" à Paris étaient obligés de fournir un tel effort, et qu'il y avait certainement, le long du parcours, des relais, où l'on pouvait se ravitailler, souffler, avant de reprendre l'interminable escalade vers cette métropole mythique, tout là-haut, au bout de la carte Vidal de la Blache, et vers laquelle les énergies, les volontés et les travaux convergeaient.
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Le petit garçon ne peut savourer les variations de ton qui ont émaillé ces quelques phrases et comment une dose de flatterie a contrebalancé une pincée d'ironie, le tout saupoudré de courtoisie, de fermeté, avec la constante notion d'une supériorité émanant de mon père, qui pourtant n'en abuse pas puisqu'il sait qu'elle irrite les médiocres et qu'il faut, en ces circonstances, jouer au plus fin avec l'adversaire, précisèment parce qu'il n'est pas plus fort que vous, et ne pas risquer de le vexer mais plutôt encorager chez l'autre la satisfaction de soi, la conscience de son rôle.
(...)
"le cuistre" est incapable de se voir avec lucidité lorsqu'il exhibe en société les attitudes qui permettent de le reconnaître, ni de s'entendre lorsque les opinions ou le ton qu'il invente pour les transmettre tracent les limites de son intelligence, mais il n'en est pas moins fort, puisque sa faiblesse l'aveugle assez pour lui permettre d'avancer sans gêne dans le monde et bousculer des comportements plus discrets, donc moins efficaces. Et sa pédanterie n'en recèle pas moins un savoir, un bagage de connaissances et une panoplie de références qui l'autorisent, là encore, à progresser et à survivre au sein des autres animaux parfois moins péremptoires et bruyants, donc moins entreprenants que lui.
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Tout est secret pour le petit garçon. Tout est énigme, merveille. Dans cette province tranquille, sans âge, des jardins, aujourd’hui ordinaires, étaient forêts de Brocéliande ; des routes, aujourd’hui banales, promettaient un danger palpitant et les demeures les plus modestes semblaient receler autant de situations rocambolesques, personnages farfelus, drames et trésors cachés.
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