Ne devient pas fou qui veut.
On semble oublier que dans la parole humaine, entre beaucoup d’autres choses, l’émetteur est toujours en même temps un récepteur, qu’on entend le son de ses propres paroles.
La comparaison qu’on peut faire de l’analyste avec un dépotoir, est justifiée.
[Ce qui permet de distinguer le délire]
C’est donc l’économie du discours, le rapport de la signification à la signification, le rapport de leur discours à l’ordonnance commune du discours […].
L’intuition délirante est un phénomène plein qui a pour le sujet un caractère comblant, inondant. Elle lui révèle une perspective nouvelle dont il souligne le cachet original, la saveur particulière [...].
Ce qui fait tenir debout la conception freudienne du complexe d’Œdipe, ce n’est pas […] un triangle père-mère-enfant […], c’est […] un triangle (père)-phallus-mère-enfant. Où est le père là-dedans ? Il est dans l’anneau qui fait tenir tout ensemble.
Au niveau de la névrose, […] le bonhomme, au lieu de se servir des mots, se sert de tout ce qui est à sa disposition, il vide ses poches, il tourne son pantalon, il y met ses fonctions, ses inhibitions, il y entre tout entier, il s’en couvre lui-même dans le dos, du signifiant, c’est lui qui devient le signifiant. Son réel, ou son imaginaire, entre dans le discours.
Si les névroses ne sont pas cela, si ce n’est pas cela que Freud a enseigné, j’y renonce.
Qu'est-ce que la parole ? […]
Qu'est-ce qui distingue une parole, d'un enregistrement de langage ? Parler, c'est avant tout parler à d'autres.
[…] Pour nous, la structure de la parole (...) c'est que le sujet reçoit son message de l'autre sous une forme inversée. […] Nous en avons deux formes exemplaires.
La première, c'est fides, la parole qui se donne, le Tu es ma femme ou le Tu es mon maître, ce qui veut dire […] Cela vient de toi pour y trouver la certitude de ce que j'engage. Cette parole est une parole qui t'engage, toi.
[…] [La deuxième forme où] se reconnaît la relation de sujet à sujet […] c'est la feinte, envers de fides. [Je vais à Cracovie... etc.]
[…] A l'intérieur de la notion de communication en tant que généralisée, je spécifie ce que c'est que la parole en tant que parler à l'autre. C'est faire parler l'autre comme tel.
Cet autre, nous l'écrirons […] avec un grand A.
Et pourquoi (...) ? […] Tu es ma femme –après tout, qu’en savez-vous ? Tu es mon maître –en fait, en êtes-vous si sûr ? Ce qui fait précisément la valeur fondatrice de ces paroles, c'est que ce qui est visé dans le message, aussi bien que ce qui est manifeste dans la feinte, c'est que l'autre est là en tant qu'Autre absolu. Absolu, c’est-à-dire qu'il est reconnu, mais qu'il n'est pas connu.
[…] [Seulement on ne doit pas ignorer que la parole] ne parle pas seulement à l'autre, elle parle de l'autre en tant qu'objet. Et c'est bien de cela qu'il s'agit quand un sujet vous parle de lui.
Il faut parler au patient son langage. Sans doute ceux qui tiennent de tels propos doivent-ils être pardonnés comme tous ceux qui ne savent pas ce qu'ils disent. […] On s'acquitte, on se met rapidement en règle, à ceci près qu'on ne révèle que sa condescendance […]. Marquer cette distance, faire du langage un pur et simple instrument, une façon de se faire comprendre de ceux qui ne comprennent rien, c'est éluder complètement ce dont il s'agit -la réalité de la parole.
Etre psychanalyste, c'est simplement ouvrir les yeux sur cette évidence qu'il n'y a rien de plus cafouilleux que la réalité humaine.