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EAN : 9782081506213
192 pages
Flammarion (04/03/2020)
4.11/5   18 notes
Résumé :
« Je n’ai jamais compris cette expression de "chez soi", se sentir bien "chez soi". En France, je suis étrangère ; mais je suis étrangère où que j’aille et je n’ai trouvé, hélas, aucun lieu ni même aucun être auprès desquels je puisse entrevoir une forme de repos. La maison, ce lieu utopique tant espéré, ce sont les livres des autres et peut-être un peu les miens. J’invite le lecteur à entrer dans ce livre comme dans ma maison, car c’est ici que j’habite, dans une l... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Commande Librairie Chantelivre fin février 2023

Après la découverte enthousiaste de cette auteure canadienne, avec son dernier texte" Les Manquants", j'étais curieuse de ses autres écrits, dont celui-ci qui interrogeait son histoire personnelle et son besoin viscéral de l' Écriture. ...

"ÉTRANGE (TÉ)S

Je n'ai jamais compris cette expression de " chez soi".Je n'ai aucune idée de ce que cela veut dire et c'est sans doute pour cette raison que j'ai pu immigrer sans difficulté ( du moins culturellement) en France : je n'avais rien à regretter, je ne suis pas nostalgique. Néanmoins, la question de l'étranger et de l'exil me rattrape sans cesse et plus spécifiquement parce que ce pays que j'ai quitté il y a dix-sept ans, le Canada, reviens quand j'écris, non pas pour chanter ses sapins mais pour questionner ce que j'ai eu à fuir si fort.Cette absence de socle initial, de terre à partir de laquelle j'aurais pu prendre ancrage, explique en partie ma personnalité rougissante. En France, je suis étrangère ; mais je suis étrangère où que j'aille et je n'ai trouvé, hélas, aucun lieu ni même aucun être auprès desquels je puisse entrevoir une forme de repos."

Cette autobiographie, ce récit intime nous relate le parcours personnel d'une jeune femme canadienne, émigrant à Paris, Capitale de tous les espoirs !

Marie-Ève Lacasse remonte ses souvenirs d'enfance, une histoire familiale toxique, entre un père trop absent, une mère dépressive, fort peu aimante...tout cela dans une société canadienne très formatée et puritaine....

La jeune fille, dès l'enfance, se trouve différente et décalée avec les autres petites filles...Elle ne parvient pas à trouver sa place...Elle décide donc de tout quitter: famille et pays...pour rejoindre la France et Paris, qu'elle imagine idylliquement comme la solution et Le Havre idéal de sa nouvelle vie !

D'abondants sujets sont abordés : les histoires complexes de secrets, de non-dits familiaux, la sexualité, la maternité, les genres, une société trop lisse, trop formatée qui " compresse" les individus, l'homosexualité, le mal de vivre, le sentiment de ne jamais pouvoir s'adapter, d'être toujours " à côté "...à part, ÉTRANGER toujours....

Cheminement douloureux qui m' a surtout retenue par toute la part de questionnements et d'observations de l'auteure sur cet espace unique de liberté et de pause que représente pour elle L'ÉCRITURE...Espace vital pour " poser des valises", ses douleurs, ses névroses...Lieu de Liberté, de thérapie, de création, de lien avec les autres.

Écrire pour se construire et reconstruire ce qui a été abîmé, détruit par les violences, les conditionnements familiaux, sociaux, professionnels...etc.
Un territoire où le sentiment d'Étrangeté devient vivable, et pourquoi pas ,une qualité précieuse pour Écrire et créer enfin un espace intime de réconciliation avec soi et les Autres !

De très beaux passages sur la littérature, ses auteurs préférés, le choix et l'apprentissage d'une nouvelle terre d'adoption ainsi que d'une nouvelle langue à apprivoiser...les difficultés à assumer et à dépasser !

"J'aime Conrad pour ses romans, mais aussi parce qu'il est un écrivain polonais émigré en Angleterre.Pour vivre en écrivain, il doit se transformer. C'est-à-dire qu'il doit s'arracher à son pays qui n'en est pas encore un et choisir une autre langue que sa langue maternelle pour écrire. Quand je lis ses histoires de vieux marins, j'entre avec lui dans la mer de l'inconnu: celle du langage. "









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J'ai découvert par un heureux hasard encore cette sorte de roman, et je ne sais s'il s'agit d'une auto-fiction ou exo fiction, fiction encore, que sais-je ? Car je ne connais pas du tout cet auteur d'origine canadienne. Je chercherai dans quelques jours des articles sur internet et, éventuellement je modifierai ma critique.
Mais peu importe dans l'immédiat.
Peu importe car cette écriture de soi est digne d'intérêt, par sa complexité, son élégance, sa clarté aussi. Je ne lui trouve que des qualités. Et il est rare que je sois conquise par la littérature contemporaine. Et par des femmes écrivains.
Je crois cependant qu'il y a beaucoup de la vie de l'auteur en personne, du fait de ses références familiales, de son parcours géographique, de ses expériences sexuelles, de ses nombreux jobs et ses déboires, ses prises de risques, sa manière de simplifier les choses les plus compliquées et les plus rédhibitoires aux yeux de la société.

Je crois qu'il y a chez cette jeune personne beaucoup de ses amours pour celle qui partagea quelque temps sa vie, qui fut, comme elle l'écrit, « sa femme », je çrois qu'il y a beaucoup de son besoin existentiel d'écrire, pour échapper au réel comme au passé et à l'emprisonnement. Car rien n'est simple pour elle (qui se comprend à peine, s'examine, se plaint, se culpabilise, se sent timide et éprouve le besoin d'être dominée).
Chose étonnante de rencontrer une personne qui se sent étrangère à tout ce qui l'environne, et même à sa petite fille. Seuls le silence et le repli sur soi qui permettent l'écriture salvatrice. Ce comportement aura des conséquences auxquelles le lecteur s'attend.
J'ai apprécié les nombreuses références et citations littéraires. C'est donc le genre de littérature et d'écriture qui me convient parfaitement, mêlant les autres - les étrangers - et les tout proches comme les écrivains admirés, les amours, les parents, la petite fille née d'un père donneur.

Je cite ces quelques lignes poétiques et singulières, pour clore ma critique :
J'aurais aimé faire comme Henri d'Ofterdingen. Avoir pour objectif de rentrer jusqu'à ce que, face á un jeune sapin, bien seul parce qu'on avait rasé tous les autres autour, je me sente enfin chez moi. Mais où est la maison ? Ce n'est pas ici, et ce n'est plus là-bas. C'est peut-être là, dans l'avion en transit, dans un entre-deux indéfinissable et qui avance toujours d'un côté ou de l'autre.
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Par le fil de l'écriture, l'auteur dénoue le mystère de son sentiment d'étrangeté au monde en rapport à sa double nationalité et à son isolement d'écrivain, sorte d'abnégation suscitant l'incompréhension de ses proches face à cet impératif artistique, incompatible avec une vie de famille. Dans son questionnement sur le langage, ses allers et retours entre la France et le Québec, l'auteur reconstitue le tableau de la rupture d'avec sa compagne. Dans une construction arborescente, les différents fragments que composent ce récit autobiographique montrent combien les souvenirs sont fugaces et fulgurants, le langage considéré comme un « inconnu » (qui serait un « lieu des monstres et de l'inconscient ») forme une écriture « flottante » à l'instar de l'écoute d'un psychanalyste. Ainsi, cette écriture permet à l'auteur d'enquêter sur son passé, d'observer le monde et les gens qu'elle considère comme « des romans » et surtout, de mieux comprendre ses parents et ses origines qu'elle avait toujours méprisés : « J'ouvre les yeux dans la foule ; je vois des bibliothèques vivantes ». / «Elle est là à la sortie de mon deuxième livre, puis du troisième. Elle fait comme elle peut pour garder le lien que je rejette. Elle s'arrange pour que le fil ne se rompe jamais tout à fait. Elle garde un oeil sur moi, même de loin […]. Elle a fait ce qu'elle a pu, avec ce qu'elle avait. Je l'aime, mais de loin [...] ». L'auteur puise de nombreux exemples langagiers chez Freud ou Lacan, joue avec du vocabulaire très littéraire ou archaïque et cite des personnalités du monde artistiques ou philosophiques, scientifiques ou politiques montrant qu'une large culture ne suffit pas à se construire ou à être heureux car il nous faut en passer par des expérimentations personnelles : « Est-ce que la plupart des gens ne se sentent pas obligés de combler en permanence cet espace entre eux et les autres pour avoir l'air « normaux » et « sains » ? le plus désespérant, c'est que lire Freud ou Bourdieu ne change rien. Ça ne donne pas pour autant les clés. Ça n'ôte rien au sentiment d'étrangeté ».
Les paroles et certaines opinions de l'auteur à caractère généraliste exposent aux lecteurs un manque de tolérance face aux travers humains, réels ou fantasmés. Mais l'écriture, en mettant en mots des images surgies du passé, des moments de sensualité, l'amour de sa fille, son caractère fougueux ou encore, l'expression de secrets, aidera l'auteur à s'appréhender avec bienveillance et à accepter la solitude utile pour se construire et créer, dans un rapport d'altérité plus serein.
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» J'ai a priori peu de goût pour la littérature du moi mais cet ouvrage m'a surpris :par sa structure éclatée en puzzle d'instants de vie rapportés sans complaisance aucune. Peu à peu , se dessinent des thèmes dominants :entre deux cultures, deux langues ,deux pays ,deux genres ,celle de la sensation d'être étrangère mais surtout l'amour fou de l'écriture qui surpasse et met en danger tous les autres attachements . Une écriture justement dont la qualité renforce le plaisir de cette lecture.
J'ajoute , qu'ayant rencontré l'auteure , j'ai été séduit par sa simplicité , son humour et la qualité de son expression .
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Passionnant ! Très rythmé, écrit sous forme de rush, comme au cinéma. J'aimerais en dire davantage, mais je risque d'en dévoiler les meilleurs enseignements !
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critiques presse (2)
LActualite
17 mai 2021
Autobiographie de l’étranger, de Marie-Ève Lacasse, est en lice pour les Prix littéraires du Gouverneur général 2020 dans la catégorie Romans et nouvelles.
Lire la critique sur le site : LActualite
LeJournaldeQuebec
15 juin 2020
Dans son cinquième livre, Autobiographie de l’étranger, Marie-Ève Lacasse tente de comprendre le monde qui l’a faite, et examine son rapport au corps, à l’amour, à la maternité, à la littérature.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
ÉTRANGE (TÉ)S

Je n'ai jamais compris cette expression de " chez soi".Je n'ai aucune idée de ce que cela veut dire et c'est sans doute pour cette raison que j'ai pu immigrer sans difficulté ( du moins culturellement) en France : je n'avais rien à regretter, je ne suis pas nostalgique. Néanmoins, la question de l'étranger et de l'exil me rattrape sans cesse et plus spécifiquement parce que ce pays que j'ai quitté il y a dix-sept ans, le Canada, reviens quand j'écris, non pas pour chanter ses sapins mais pour questionner ce que j'ai eu à fuir si fort.Cette absence de socle initial, de terre à partir de laquelle j'aurais pu prendre ancrage, explique en partie ma personnalité rougissante. En France, je suis étrangère ; mais je suis étrangère où que j'aille et je n'ai trouvé, hélas, aucun lieu ni même aucun être auprès desquels je puisse entrevoir une forme de repos.
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Je me suis demandé si le conservatisme extrême des modes de vie en banlieue, qui s'exprime, notamment, par une propreté névrotique, ne menaçait pas aussi la profondeur des liens. Même si les maisons se côtoient à quelques centimètres les unes des autres, rares sont les zones pavillonnaires où l'on ressent une vie de quartier, puisqu'il n'y a même pas de café pour se rencontrer. On ne se croise pas, car il n'y a que des avenues destinées à acheminer la marchandise, à faire circuler les biens.(...)
Tout ce qui appelle la pensée, la douceur, le rêve, est empêché par une idéologie de la circulation et de la laideur.

( p.85)
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J'aime Conrad pour ses romans, mais aussi parce qu'il est un écrivain polonais émigré en Angleterre.Pour vivre en écrivain, il doit se transformer. C'est-à-dire qu'il doit s'arracher à son pays qui n'en est pas encore un et choisir une autre langue que sa langue maternelle pour écrire. Quand je lis ses histoires de vieux marins, j'entre avec lui dans la mer de l'inconnu: celle du langage.

( p.129)
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Je lis parce que je cherche, dans le secret d'une pensée autre que la mienne, des réponses dans la nuit des questions.
Je me sens proche des exilés, des misanthropes, des incompris.Je lis parce que j'ai besoin que l'on me chuchote quelque chose d'intime à l'oreille, quelque chose de totalement inconcevable à dire en dehors du livre.Je cherche le secret des autres, qui me libérerait des miens et de cette douleur permanente dans la poitrine qui m'empêche de m'élever.Je lis pour ne plus être seule, pour admirer la liberté des autres, ce qui les fait pleurer.

( p.98)
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Près des lecteurs sans l'être. Ils connaissent quelque chose de si intime de vous que quelque chose nous lie... Lire, lier. Livre, livrer. p. 48

Les moufles sont des mitaines, les casseroles sont des chaudrons, le dîner est un souper, les chaussures sont des souliers, le pain grillé est une rôtie, le 'du coup' est un faque, le 'pas du tout' est un pantoute, ... le maintenant est un astheure, le seau est une chaudière, ... les Français trouvent apparemment hilarant cet accent - au point où le plus dramatique des films de Xavier Dolan peut faire pouffer une salle entière. p. 82

Je lis parce que je cherche, dans le secret d'une pensée autre que la mienne, des réponses dans la nuit des questions. p. 98

J'ai toujours pensé que l'obsession des écrans était une manière de s'abrutir durablement, le temps d'un film, et de longues soirées, pour ne pas penser. Pour se couper de la vie intérieure, là où grouillent les fantômes. p. 109

Je ne connais pas une seule personne dont l'existence ne soit pas digne d'un roman. p.130

Je me demande en quoi l'art a pu me servir de consolation. Un livre ne peut pas me prendre dans ses bras. p. 167
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Videos de Marie-Eve Lacasse (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Marie-Eve Lacasse
Chaque vendredi matin, Valérie Expert vous donne rendez-vous avec Gérard Collard pour leurs coups de c?ur... Voici les références des livres présentés dans l'émission du 12 janvier 2018 :
- Vie de David Hockney de Catherine Cusset aux éditions Gallimard https://www.lagriffenoire.com/103782-divers-litterature-vie-de-david-hockney.html
- Traité de savoir-rire à l'usage des embryons4 janvier 2018 de Anne AKRICH aux éditions Julliard https://www.lagriffenoire.com/102855-romans-traite-de-savoir-rire-a-l-usage-des-embryons.html
- Par amour de Valérie Tong Cuong aux éditions du Livre de Poche https://www.lagriffenoire.com/?fond=produit&id_produit=100958&id_rubrique=368
- Deux remords de Claude Monet de Michel Bernard aux éditions La Table Ronde https://www.lagriffenoire.com/49683-divers-litterature-deux-remords-de-claude-monet.html
- Romain Gary s'en va-t-en guerre de Laurent Seksik aux éditions Flammarion https://www.lagriffenoire.com/67180-divers-litterature-romain-gary-s-en-va-t-en-guerre.html
- Peggy dans les phares de Marie-Eve Lacasse aux éditions J'ai Lu https://www.lagriffenoire.com/103270-divers-litterature-peggy-dans-les-phares.html
- Les enfants du dernier salut de Brull-Ullmann Colette et Jean-Christophe Portes aux éditions City https://www.lagriffenoire.com/99913-divers-histoire-les-enfants-du-dernier-salut.html
Vous pouvez commander cette sélection sur le site de la librairie en ligne www.lagriffenoire.com
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