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Critique de nilebeh


Les Biarrots connaissent bien la légende de Laorens et Saubade, couple romantique d'amoureux noyés dans la Chambre d'amour, cette grotte située dans un renfoncement de la falaise, sous le phare. Aujourd'hui, l'accès en est interdit par des grilles. Mais le 1er novembre 1968, une échelle verticale permettait d'y accéder.

C'est que firent l'auteur-narrateur du livre, Jean-Marc Laclavetine, accompagné de son frère Bernard, de sa soeur Anne-Marie (contracté en Annie par la famille) et de Gilles, l'amoureux d'Annie. Qui d'autre ? Pas le petit frère, Dominique, resté avec la grand-mère, la très désagréable vieille dame dite « Marraine ». Contrairement à ce que pensait Jean-Marie.

Que s'est-il passé à 15h35 (selon le journal local) ? La mer était agitée, comme souvent au Pays basque, et d'un seul coup une vague s'est ourlée, a fait le gros dos, s'est gonflée pour finir par claquer comme une gifle sur les visiteurs. Deux personnages se retrouvent emportés, la vague, la vague est une tueuse. On pense à celle d'Okusai, on pense à l'inéluctable, l'imprévisible, le destin qui soudain se referme en boucle, laissant hébétés les survivants. Parmi eux le jeune amoureux, qui aura tenté de ramener Annie à la rive. En vain. C'est un surfeur qui remorquera le triste fardeau, des secours arriveront, bien tard selon les souvenirs de Jean-Marie.

Pendant des années, le deuil sera impossible pour la famille. Quand on demandera qui est cette jeune fille sur la photo, le petit frère répondra : Une amie de la famille. (Voulait-il dire une Annie ? ) Comme si dire la mort c'était l'accepter.

Cinquante ans plus tard, Jean-Marie Laclavetine tente par l'écriture de restituer les faits, les émotions et ce qui devait arriver se produit : au fil de ses rencontres avec les survivants (l'amie d'Annie nommée Lydie, l'amoureux Gilles retrouvé en 2018, les frères), il apprend que la mémoire est capricieuse, accommodante ou perturbée, que les souvenirs que, dur comme fer, nous croyions exacts, sont déformés, incomplets. Comme si nous faisions des arrangements avec la vérité.

C'est une expérience que pouvons avoir vécue, nous aussi. Nous comprenons d'autant mieux Jean-Marie, notamment quand il recourt à l'écriture pour rétablir une certaine forme de vérité. Lequel d'entre nous n'a pas essayé d'écrire pour restituer - et mieux accepter - le passé ? Avec toujours ce cuisant regret de ne pas avoir interrogé les témoins alors qu'ils étaient encore en vie. Tout ce que nos parents, nos frères et soeurs, nos amis ont pu emporter avec eux...définitivement perdu.

Vivez si m'en croyez, n'attendez à demain.
Le temps s'en va le temps s'en va ma Dame. Las ! le temps non, mais nous nous en allons.
Qui a dit mieux que Ronsard la nécessité de vivre l'instant présent ?

Ce livre autobiographique, illustré de quelques photos comme pour dire que tout est vrai, ce livre peut intéresser et émouvoir tout lecteur confronté au souvenir. Certains aspects peuvent sembler déconcertants voire peu utiles au propos (je pense en particulier aux liasses de lettres d'amour échangées entre ses parents) mais c'est in fine un livre à la fois touchant et intéressant.


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