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Gigi Bergamin (Auteur de la postface, du colophon, etc.)Frantz Rey (Illustrateur)
EAN : 9782910233303
79 pages
1001 Nuits (30/09/2000)
  Existe en édition audio
3.92/5   347 notes
Résumé :
Et si l'entame du texte de Lafargue était le secret du succès jamais démenti mais ambigu de ce Droit à la paresse ?

«Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie est l'amour du travail.

Et si Le Droit à la paresse était beaucoup plus qu'un pamphlet superbement écrit ? S'il contenait une compréhension essentielle de la transformation nécessaire et actuelle de nos sociétés à... >Voir plus
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Éloge de la valeur paresse.

L’homme politique, journaliste et écrivain Paul Lafargue (1842-1911) rédigea cet essai qui le rendit célèbre, tandis qu’il était incarcéré à Paris pour propagande révolutionnaire, en réponse aux paroles de Thiers qui appelait l’homme à souffrir au travail et à ne pas jouir de la vie, et en réfutation du droit au travail de 1848 (sous-titre de l’essai).

«Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis deux siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l’amour du travail, la passion moribonde du travail, poussée jusqu’à l’épuisement des forces vitales de l’individu et de sa progéniture.»

Initialement publié en feuilleton en 1881, puis en 1883 en un volume, réédité aux éditions Mille et une nuits en 1994, chez Allia en 1999 et au Passager clandestin en 2009, ce texte classique reste passionnant et plus que jamais d’actualité. Paul Lafargue s’y étonne et s’insurge contre la sacralisation de la valeur travail en particulier dans une classe ouvrière alors soumise à des conditions de travail quasiment inhumaines.

La suite sur mon blog ici :
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Il faut choisir le bon moment pour se lancer dans cette lecture…
Entamée pour ma part à la fin de la période des examens, elle m'a semblée totalement adaptée à la situation. Elle le paraîtra encore davantage à celui qui déciderait d'ouvrir ce livre au début de ses congés payés car Lafargue s'attaque moins au travail intellectuel d'apprentissage qu'au travail répétitif et abrutissant qui est avant tout motivé par l'acquisition de son gagne-pain.
En revanche, lecture à éviter peut-être pour celui pour qui les congés payés ne sont encore qu'un vague mirage : se faire comparer à un lourd bovin des prairies auvergnates et se faire rappeler l'abrutissement sévère qui est le sien ne saurait certainement pas remonter le moral après une longue journée à assembler des vis et des boulons, à rédiger des compte-rendu de réunion, ou à apporter des cafés à son supérieur et à ses collègues.

Aucune caste socio-professionnelle n'est épargnée par le constat de Lafargue : les politiciens, économistes et religieux sont les vecteurs de doctrines aptes à asservir les ouvriers, qui s'imaginent travailler pour leur bien et leur indépendance alors qu'ils ne servent qu'à enrichir le patron ou les bourgeois. Là où Lafargue surprend, c'est qu'il ne fustige pas entièrement ces vilains riches pleins de sous. Non, eux aussi sont victimes de la morale et des valeurs d'une société dédiée au labeur : contraints de s'enrichir toujours plus pour permettre aux ouvriers sans cesse plus nombreux d'avoir du travail, ils finissent par se morfondre d'une vie trop facile et ennuyeuse. C'est pour eux qu'on détourne une grande partie de la population active pour former cette caste qu'on nomme aujourd'hui le secteur tertiaire –celui des services. Des gens inutiles, qui n'ont d'autre mission que celle de distraire les bourgeois devenus malheureusement riches à cause des ouvriers qui se tuent malheureusement à la tâche, parce qu'ils croient aux discours faussement émancipateurs qu'on leur inflige.

Lafargue expose ce point de vue original avec une dérision souvent drôle. Il arrive à transformer cette agitation des sociétés capitalistes en une scène de théâtre absurde, uniquement dirigée par une poignée d'orateurs à l'esprit tordu. Où sont passés les philosophes de la Grèce Antique ? Eux, au moins, comme bon nombre d'autres peuples sauvages que Lafargue n'hésite pas à rappeler, avaient compris la nature aliénante du travail. Ces civilisations sont brandies comme des modèles, souvent comparées d'une manière caricaturale –mais drôle- à notre pauvre société qui s'est créée son propre malheur.

Lafargue a toutefois beau forcer le trait –procédé auquel on le sent obligé de recourir s'il se veut efficace, eut égard à la brièveté de son manifeste- jamais il ne paraît réducteur. L'enfermement dans lequel nous vivons ne provient que d'une chose : l'erreur qui est la nôtre lorsque nous pensons nous émanciper par le biais du travail acharné. Etant donnés les progrès techniques et technologiques qui caractérisaient la société du 19e siècle, 3 heures de travail quotidien auraient suffi à assurer son bon fonctionnement. Mieux que cela, tout le monde aurait enfin pu occuper une fonction et aurait disposé de suffisamment de temps pour se consacrer à ce que tout bon employé rêve de faire lorsqu'il s'image en vacances, mais qu'il ne fait jamais lorsqu'il l'est enfin –effrayé par la perspective de tout ce temps d'oisiveté qui se présente face à lui- : se prélasser, passer du temps en bonne compagnie, faire ripaille, se promener, instruire son esprit…

Heureusement que Lafargue n'exclut pas l'activité intellectuelle –modérée et motivée par le plaisir- de son Droit à la paresse : on se sentirait presque coupable de ne pas occuper notre temps libre à faire plutôt une petite sieste…Mais, au fait, pourquoi prendre de son temps libre pour effectuer cette lecture ? L'idéal reste certainement de lire ce manifeste pendant ses heures de travail, détournant ainsi la productivité de ses quotas de rendement exigés, et effectuant un bel hommage à la pensée de Lafargue… !


Lien : http://colimasson.over-blog...
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Ah, que c'est bon, ce style pamphlétaire fin XIXème ! Plein d'hyperboles, de caricatures grivoises d'illustres politiques et capitaines d'industrie aujourd'hui totalement oubliés, ça sent encore la poudre de 48 et déjà tellement la Première Internationale... L'athée cite la Bible pour "confondre les jésuites", et le révolutionnaire, contre les moralistes, Platon, Cicéron, Hérodote, Xénophon, et j'en passe. Et puis, quel personnage tragique, que ce gendre de Marx !
Vous voulez en goûter, de l'hyperbole ? Tenez :
"La France capitaliste, énorme femelle, velue de la face et chauve du crâne, avachie, aux chairs flasques, bouffies, blafardes, aux yeux éteints, ensommeillée et bâillant, s'allonge sur un canapé de velours ; à ses pieds, le Capitalisme industriel, gigantesque organisme de fer, masque simiesque, dévore mécaniquement des hommes, des femmes, des enfants, dont les cris lugubres et déchirants emplissent l'air ; la Banque à museau de fouine [tiens tiens, déjà !], à corps d'hyène et mains de harpie, lui dérobe prestement les pièces de cent sous de la poche." (p. 80)
Une gourmandise littéraire que ce style, donc, qui valut à l'auteur d'être d'autant moins pris au sérieux qu'il a été souvent cité.
Et si, comme le suggère le préfacier (Paul Allies), ce petit opuscule avait mis le doigt sur la plaie que le communisme ne sut pas comprendre, à savoir le lien entre travail-croissance, surproduction et appauvrissement des classes laborieuses (cessons de parler de prolétariat !), avec une appendice non moins néfaste pour les "capitalistes" ? Eh oui ! dans ce cas, il s'agirait bel et bien d'une prémonition quasi prophétique, qui devrait avoir résisté à l'épreuve du temps, qui devrait valoir plus que la "nécessité historique" marxienne, en fait qui serait toujours d'actualité (même si la plupart des idées secondaires sont amplement périmées)...
Personnellement, je me suis fait ma petite idée là-dessus : jugez-en pour vous-mêmes si ça vous intéresse :
"Travaillez, travaillez nuit et jour ; en travaillant, vous faites croître votre misère, et votre misère nous dispense de vous imposer le travail par la force de la loi. L'imposition légale du travail donne trop de peine, exige trop de violence et fait trop de bruit ; la faim, au contraire, est non seulement une pression paisible, silencieuse, incessante, mais comme le mobile le plus naturel du travail et de l'industrie, elle provoque aussi les effets les plus puissants." (cité p. 39)

"... le grand problème de la production capitaliste n'est plus de trouver des producteurs et de décupler leurs forces, mais de découvrir des consommateurs, d'exciter leurs appétits et de leur créer des besoins factices." (p. 62)

"Tous nos produits sont adultérés pour en faciliter l'écoulement et en abréger l'existence. Notre époque sera appelée "l'âge de la falsification", comme les premières époques de l'humanité ont reçu les noms "âge de la pierre", d'"âge de bronze", du caractère de leur production." (p. 64).

Eh bien, pour être daté 1880, chapeau bas !
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Oh la la la vie en rose
Le rose qu'on nous propose
D'avoir les quantités d'choses
Qui donnent envie d'autre chose
Aïe, on nous fait croire
Que le bonheur c'est d'avoir
De l'avoir plein nos armoires
Dérisions de nous dérisoires.

Alain Souchon - Foule sentimentale.


Paul Lafargue, gendre de Karl Marx a écrit en 1890 ce pamphlet dans lequel il dénonce l'attachement addictif au travail.
Bon c'est vrai qu'avec la révolution industrielle, on avait un peu exagéré avec des journées de travail de 13 ou 14 heures, hommes, femmes et enfants ruinaient leur santé à la tâche mais à bien y réfléchir, comme il le dit en page 59, c'est dans les pays pauvres que le peuple est à son aise et dans les pays riches qu' il est pauvre.
En se serrant le ventre, la classe ouvrière a développé le ventre de la bourgeoisie condamnée à la surconsommation, ce qui n'est pas bon pour ses artères. On a créé des besoins pour les consommateurs mais comme cela ne suffisait pas à épuiser les stocks, on a créé ces mêmes besoins aux peuples coloniaux qui n'en avaient que faire. Comme cela ne suffisait toujours pas, on a réduit la durée de vie des produits (ce qu'on appelle aujourd'hui l'obsolescence programmée) pour fournir toujours plus de travail aux ouvriers qui ne pouvaient pas se résigner à vivre les bras croisés. On inventa ensuite la mécanisation qui devait libérer l'homme du travail, on peut constater qu'il n'en est rien. Enfin, on a rationné le travail en inventant le chômage comme on rationne l'eau sur un navire en détresse.
Pourtant, il savait déjà même s'il ne le dit pas en ces termes qu'une réduction du temps de travail peut augmenter la productivité. Pour lui, le droit au travail n'est qu'un droit à la misère.
Pour lui, on pourrait ne travailler que 3 heures par jour, le temps libéré permettrait de prendre du bon temps et développerait la créativité. Un adepte de la simplicité volontaire avant l'heure ? Ce texte est étonnant !

Je viens de prendre ma retraite après avoir cotisé mes 168 trimestres et qu'est-ce que je fais depuis ? Je marche 10 km par jour et je m'impose des heures de lecture et des critiques sur Babelio. Il me faut apprendre à glandouiller, à siroter mon café en terrasse en regardant les gens qui vont bosser. de plus, je n'ai pas besoin de marcher à 6 km/heure puisque j'ai le temps. Il y a bien là un conditionnement dont il faut apprendre à se détacher. Il faut que j'apprenne à me promener plutôt que de crapahuter comme un bourrin…
Merci Monsieur Lafargue !


Challenge ABC
Challenge Riquiqui 2022.

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« Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l'amour du travail, la passion moribonde du travail, poussée jusqu'à l'épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture. »

L'introduction donne tout de suite le ton de l'ouvrage : Lafargue s'indigne avec vigueur contre le « droit au travail » que réclament les ouvriers, et milite pour qu'au contraire, ils travaillent un peu moins et s'occupent un peu plus de leur loisir.

Il me manque peut-être des éléments pour comprendre vraiment le but de l'auteur, mais je reste très sceptique. Comme disait Coluche : « A la télé ils disent tous les jours : “Y a trois millions de personnes qui veulent du travail.” C'est pas vrai : de l'argent leur suffirait.  » Et ça me semble le noeud du problème : la plupart des gens qui réclament du travail ne le fond probablement pas pour avoir le plaisir de passer des heures de plus dans l'entreprise, mais plutôt pour arrêter de compter les centimes en fin de mois, rajouter un peu plus de viande au menu, moins craindre les ordonnances du médecin ou savoir offrir des études à leurs enfants.

Ce pamphlet me semble donc ne concerner qu'une petite partie des travailleurs, ceux qui peuvent facilement se permettre de sacrifier une part de salaire pour le consacrer aux loisirs. Ou alors, il faut expliquer dans un autre livre comment instaurer une société purement égalitaire, qui songerait avant tout à combler les besoins de tous, avant de penser au luxe. le livre sera sûrement beaucoup plus épais, parce que de nombreuses solutions ont déjà été proposées, mais avec bien peu de réussite.
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Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite les misères individuelles et sociales qui, depuis deux siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l’amour du travail, la passion furibonde du travail, poussée jusqu’à l’épuisement des forces vitales de l’individu et de sa progéniture.
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Tous nos produits sont adultérés pour en faciliter l’écoulement et en abréger l’existence.
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Sous l'Ancien Régime, les lois de l’Église garantissaient au travailleur 90 jours de repos (52 dimanches et 38 jours fériés) pendant lesquels il était strictement défendu de travailler. C'était le principal crime du catholicisme, la cause principale de l'irréligion de la bourgeoisie industrielle et commerçante. Sous la révolution, dès qu'elle fut maîtresse, elle abolit les jours fériés et remplaça la semaine de sept jours par celle de dix. Elle affranchit les ouvriers du joug de l’Église pour mieux les soumettre au joug du travail.
Note page 135 (Édition Maspero 1976)
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Notre époque sera appelée l’âge de la falsification, comme les premières époques de l’humanité ont reçu les noms d’âge de pierre, d’âge de bronze, du caractère de leur production. Des ignorants accusent de fraude nos pieux industriels, tandis qu’en réalité la pensée qui les anime est de fournir du travail aux ouvriers, qui ne peuvent se résigner à vivre les bras croisés. Ces falsifications, qui ont pour unique mobile un sentiment humanitaire, mais qui rapportent de superbes profits aux fabricants qui les pratiquent, si elles sont désastreuses pour la qualité des marchandises, si elles sont une source intarissable de gaspillage du travail humain, prouvent la philanthropique ingéniosité des bourgeois et l’horrible perversion des ouvriers qui, pour assouvir leur vice de travail, obligent les industriels à étouffer les cris de leur conscience et à violer même les lois de l’honnêteté commerciale.
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Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traine à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l'amour du travail, la passion moribonde du travail, poussée jusqu'à épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture. Au lieu de réagir contre cette aberration mentale, les prêtres, les économistes, les moralistes, ont sacro-sanctifiés le travail. Hommes aveugles et bornés, ils ont voulu être plus sages que leur Dieu ; hommes faibles et méprisables, ils ont voulus réhabiliter ce que leur Dieu avait maudit. Moi, qui ne professe d'être chrétien, économe, et moral, j'en appelle de leur jugement à celui de leur Dieu.
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Le 5.07.18, Thomas Baumgartner évoquait ?Le Droit à la paresse? de Paul Lafargue dans ?Un été à ne rien faire? sur Radio Nova.
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