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Critique de isanne


C'est difficile de faire un billet pour ce livre parce qu'il est de ceux qui parlent à chacun en particulier, en sondant les convictions et même l'intime. Alors forcément, en parler, c'est parler de soi, de ce que l'on croit, de ce à quoi on aspire et au final, risquer en prenant parti de ne pas donner envie de le lire alors qu'en le refermant, c'est vraiment ce que je voudrais transmettre : donner l'envie de parcourir ces lignes, histoire de se questionner...
Parce que ce livre a été pour moi un questionnement au fil des pages - ou peut-être davantage une action de légitimer certains points de vue ou attitudes qui dérangent tant autour de moi...


Emylina arrive en France à l'âge de douze ans, en fuyant la Roumanie de Ceausescu, ses parents l'ont fait quitter le pays, par prudence, ils la rejoindront ensuite. La seule rencontre véritable est une jeune italienne, dont le regard pointe dans la même direction et cette amitié vraie qui épaule et stimule Emelyna est brisée par la disparition de cette jeune fille qui est recherchée par la police pour meurtre...

C'est le regard d'une apatride sur ce qui l'entoure, un regard vif et acéré du fait de son éducation : un père qui a su lui donner comme cadeau la liberté : celle de vivre, celle de penser par elle-même, celle d'avoir le droit (et le devoir) de se démarquer...
A son entrée dans la vie adulte, celle de l'indépendance consentie et permise par l'entrée dans un mode de société, Emelyna décide qu'elle n'en sera pas .. de ces "presque morts", de ceux qui rentrent dans un moule, dont la vie est toute tracée, dont les pensées s'arrêtent au bord des territoires de leur propre moi. Elle ne sera pas non plus de ces "jeunes jeunes" qui n'avancent que par le désir de posséder encore et encore, dirigés par les modes, les codes que l'on échange ou l'image que l'on donne de soi, la même que ceux qui font partie de cette communauté.

Vivre hors d'une société où on évolue est ardu, les rencontres font avancer, font réfléchir, se forger un esprit pour allier ce que l'on juge juste et ce que l'on fera pour le mettre en pratique au quotidien.


C'est un très beau récit sur la personne de ce père, sur le rapport entre ces deux êtres - un père spécialiste de Diderot et sa fille, qui construit véritablement cet être libre qu'est Emélyna, c'est le don de sincérité de celle qui s'émeut sur la misère du monde et décide de faire bouger les choses, sur le partage de la notion d'exil, sur les combats passés de ces libertaires qu'elle rencontre, qu'elle fréquente et sur ce qu'ils ont ouvert comme portes, lors de leurs batailles passées, sur ce qu'il reste de leurs espoirs...
C'est surtout un récit qui nous crie de refuser de suivre le groupe, de vivre en pensant librement au risque d'être exclu, mais qu'importe, puisqu'en retour il nous donne la certitude d'agir pour les autres, ceux qui sont oubliés, ceux dont la vie se résume à trois lignes dans les journaux, pour ceux dont il est de règle d'éviter le regard quand on les croise...

Un texte très original, tantôt récit, tantôt introspection, tantôt révolté, tantôt reflet d'un quant à soi, mais jamais résigné, et qui bouscule et scrute.



De cette indifférence généralisée et de cette vie frivole et en apparence facile qui nous éloignent des vraies questions que l'on doit se poser : il ne faut pas se consoler.
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