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sur 1674 notes
°°° Rentrée littéraire 2020 #37 °°°

Il est des romans qui vous embarquent par la force d'une histoire, animé d'un souffle qui traverse les pages. Ce n'est pas le cas de celui-ci qui reprend la thématique classique de la quête d'identité d'un homme et son inscription dans une lignée qui lui échappe en partie.

Il en est d'autres qui ont la grâce des mots. Histoire du fils est de ceux-là, il m'a enchanté dès le premier chapitre, superbe comme un matin dans la vie d'un enfant qui découvre le monde avec toute la sensualité et la douceur possible à cinq ans. Une ouverture comme un tableau qui en annonce d'autres. En fait, tout ce roman est une galerie de tableaux explosant la chronologie, faisant naviguer le lecteur sur cent ans de la vie d'une famille peuplée de pères et de fils, chacun ouvrant le paysage de Paris à Figeac en passant par Aurillac et le village cantalou de Chanterelle. La construction est remarquable, laissant le lecteur humer les secrets de famille, les ruminer avant d'en pleinement comprendre la portée.

Marie-Hélène Lafon écrit comme on peint. Ses phrases sont très travaillées, les mots choisis avec une intelligence pour donner force à ceux qui les entourent, tout comme la syntaxe, toujours précise. Elle ne cherche pas à étaler des belles phrases qui pourraient dévier le lecteur du propos, non, chaque phrase, dans son économie et sa concision, révèle les silences, les manques, les demi-teintes, les pudeurs, les zones d'ombre, les blancs d'une vie et d'une famille. Sans agressivité, sans racolage, avec douceur et ténacité, privilégiant la narration aux dialogues ( quasi totalement absents ). Une langue à savourer, remplie d'adjectifs justes, dont je me suis délectée à chaque instant pour les sensations physiques qu'elles offrent.

Ce qui est très puissant, aussi, dans l'écriture de l'auteure, c'est comment elle donne présence aux morts, aux absents, aux fantômes de cette lignée, à commencer par ce père non connu qui hante le fils du titre, André, abandonné par sa mère auprès de la famille de sa tante. Un abandon heureux puisqu'André a grandi aimé, choyé, entourée. Jusqu'à ce qu'il découvre qu'il a un père, un nom, une adresse, un métier.

«  Sa place d'homme était faite auprès de Juliette et d'Antoine,il aimait son métier qu'il n'avait pourtant pas choisi, il prenait de l'étoffe et des responsabilités, se dépliait, mais quelque chose, plus que quelqu'un, faisait défaut en coulisses, creusait un vide plus qu'un gouffre ; gouffre était trop abrupt, même si, à l'approche de la quarantaine et depuis qu'Antoine était là, André sentait que, loin, de se combler avec l'âge, comme il voulait à toutes forces le faire croire quand il avait vingt et trente ans, la faille allait s'élargir et se creuser ; le ver était dans le fruit. Il n'avait pas oublié les ratons laveurs de la main de fer qui lui croyait la poitrine certains soirs en dépit d'Hélène et des douceurs vivaces cultivées sous les platanes de Figeac. On irait donc à Paris, à Pâques, humer les traces du père. »

Tout est banal dans ce roman. Rien ne l'est pour dire ce qu'est une vie, sur comment on fait pour s'extraire de son destin et le fuir ou au contraire creuser un sillon tracé par ses ancêtres. Entre attachement et arrachement. Au final, Marie-Hélène Lafon parvient avec une densité et une limpidité superbes à dire tout cela en seulement 170 pages chahutant la linéarité chronologique, une véritable prouesse d'écriture sublimée par une qualité d'écriture rare.
Gros coup de coeur pour ce roman subtil à hauteur d'âme et d'homme qui me fait découvrir cette auteure.
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Un régal et une déception !
Lauréat du Prix Renaudot 2020, Histoire du Fils, le dernier roman de Marie-Hélène Lafon m'a parfois emballé mais plus souvent embrouillé et finalement déçu.
Pour réaliser une saga familiale d'une telle ampleur – elle s'étale sur un siècle, de 1908 à 2008 – il aurait fallu un énorme pavé de plus de cinq cents pages ! Or, rien de tout ça. En cent soixante-dix pages, avec son style soigné, peaufiné, travaillé sur l'établi comme Marie-Hélène Lafon aime le dire, elle tourne autour d'André, fils d'un père devenu vite invisible après son lycée à Aurillac (Cantal).
Fidèle à son habitude, l'autrice excelle à parler de la campagne, de la montagne, entre Aurillac et Figeac (Lot). Elle joue avec les odeurs, les parfums mais me perd vite en tant que lecteur avec une cascade de prénoms.
J'aurais aimé que l'internat au lycée, en 1919, soit plus développé mais l'autrice a choisi une autre option : elle fait des bonds dans le temps, débutant en 1908 pour un terrible drame familial, passant donc au lycée en 1919 puis sautant en 1950 pour revenir à 1934 et plus loin encore en 1923 puis 1935, 1960, 1962, 1945, 1984, 1974 et pour finir en 2008 devant des pierres tombales, dans le cimetière de Chanterelle (Cantal) où tout a commencé.
Entre frères, soeurs, neveux, petits-neveux, père, mère, cousins, cousines… Marie-Hélène Lafon m'a encore perdu dans ses dernières pages pour montrer toute l'étendue d'une famille, des liens tissés ou distendus entre les êtres.
Enfin, j'aurais vraiment aimé qu'elle creuse davantage ce personnage de Paul Lachalme qu'elle abandonne trop vite, laissant planer son ombre au-dessus du roman. Avec Gabrielle, il a eu un enfant, le fameux fils, André, qui cherchera à rencontrer ce père si énigmatique qui ne sait même pas qu'il a un fils…
Malgré ces quelques reproches, j'ai apprécié une fois encore l'écriture de Marie-Hélène Lafon et sa façon tellement précise de décrire nature et êtres. de plus, elle gagne sur les deux tableaux car elle connaît parfaitement le monde rural dont elle est originaire, et la vie à Paris où elle réside. Histoire du Fils est donc un roman bien dans la lignée de ses précédents livres.
Avec Antoine dans les dernière pages, je ressens une infinie tristesse en constatant ce choix de l'éloignement, de l'abandon des lieux de vie familiaux pour d'autres bien lointains, abandonnant toutes racines. C'est ce que nous a apporté la fin XXe siècle et ce qui s'est accentué au début du siècle actuel.

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Je viens de finir à l'instant la ...seconde lecture du roman de Marie - Hélène Lafon, " histoire du fils " , oui , oui , deux lectures consécutives. Voilà qui est curieux , non ? En fait , ce livre , il me faisait un peu peur , je l'avoue .Un personnage , André , " abandonné " par sa mère et pris dans " l' omerta " maternelle , voire familiale , je connais ....Et oui , André et moi avons sous nos pas le terrible gouffre de l'absence . Vous comprendrez aisément que raviver une question à laquelle on a , toute sa vie , en vain , cherché à trouver réponse , a de quoi faire réfléchir à ce que vous allez lire , d'autant plus que le poids du secret de famille a été plus fort que vous et qu'aujourd'hui , la famille , disparue , vous lègue un héritage un peu lourd mais ... Lors de ma première lecture , je me suis surtout glissé dans les pas d'André et de sa mère , Gabrielle et j'ai été rassuré. Leur relation m'en a rappelé une autre ...Je ne vous dis pas laquelle , mais je comprends mieux , pour la partager avec André, cette hésitation entre le besoin et la peur de savoir . On transfère toujours son amour ailleurs quand vos géniteurs vous le refusent , par faiblesse , lâcheté ou autre chose ...à taire. J'ai adoré le cheminement d'André . Je pourrais relater de nombreuses réflexions faites par le narrateur concernant sa relation avec " sa mère " . Je préfère vous livrer ce passage de la page 135 :" André fait le bilan ; mère lointaine et intermittente , certes , et père fantôme ; mais il avait eu Hélène , Léon, les cousines , la maison , le jardin et toute la rue Bergandine avec ses platanes , et Juliette et Antoine . Il avait fait sa vie d'homme avec l'appétit d'être qui avait accompagné toute son enfance et ne le quittait pas , pas encore , à plus de soixante ans " . Une belle conclusion , une belle revanche , un beau " pied de nez " pour une rencontre salutaire . Loin de toutes ces niaiseries insultantes de bêtise que j'avais pu lire dans des ouvrages appelés " roman" , c'est une émotion forte qui m'a étreint . Quelques heures plus tard, j'ai été pris d'une violent , d'une incroyable frustration .Pour avoir trop regardé " mon nombril " j'avais oublié le reste . Un famille de notables du Lot . Une rencontre du fils , lycéen, avec l'infirmière du lycée , la différence d'âge , les intérêts divergents, la fuite , l'abandon . La vie à Paris , les retours occasionnels dans le giron familial . le paraitre . La " fausse " désinvolture....C'est superbe et dramatique , plein de l'odeur des confitures de prunes , du café, celle de la lessive , des gestes simples et plein d'amour , jusqu'à la fin des uns , des autres , et l'arbre généalogique qui s'inscrit, se grave dans le marbre des tombes .
Marie - Hélène Lafon ne décrit pas la vie rurale dans le Lot entre 1908 et 2008 , non . Elle s'immisce avec une extrême pudeur , avec tact , dans deux familles et en tire " le meilleur et ...le pire ". Au tout début, en 1908 , c'est le drame avec Armand . En 2008 , c'est l'espoir avec Armand . D'Armand à Armand , la boucle est bouclée .
Un roman extraordinaire , un secret familial porté par une plume alerte , vive , sans concession , parfois même brutale mais tellement poétique qu'elle vous transporte , pour peu que vous vouliez bien lui accorder crédit . Les séquences " temporelles " peuvent dérouter au premier abord , mais quel bonheur quand on peut maitriser cet " obstacle " extraordinairement efficace .Le prix Renaudot a couronné cet ouvrage , c'est juste récompense . La discrète ( ou réservée ) Marie Hélène Lafon a , si j'en crois les avis des amies et amis babeliotes , conquis un large public , il était temps . " Histoire du fils " et " Nature humaine" de Serge Joncour sont , pour moi , deux romans " majeurs " de cette année 2020 , mais , bien entendu , cela n'engage que moi . Vivement le retour des " salons du livre " pour les rencontrer et échanger . En attendant , prenez bien soin de vous .
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Marie-Helene Lafon nous revient dans son dernier opus avec l'histoire d'une famille de la petite bourgeoisie provinciale, sur trois générations. Elle débute en 1908 et traverse un siècle.
Le Fils de l'Histoire, c'est André, père inconnu et mère à double fond, Gabrielle qui décide de le mettre au monde à trente-sept ans, suite à un accident de parcours d'une liaison qu'il entretenait avec un jeune garçon de seize ans son cadet. André est élevé par sa tante, et ne saura rien au sujet de son père jusqu'au jour de son mariage. Voilà, une situation particulière et socialement compliquée pour l'époque, mais là n'est pas le sujet...... 

La plume de Lafon est comme un pinceau. Sans entrer dans les détails elle esquisse à grands coups de pinceau , anachroniquement, une histoire d'un siècle en 176 Pages,
La mère, La Parisienne « efficace » jusqu'à la mort, qui apparaît, disparaît, n'élève pas son fils, fait mystère de tout,
La tante et l'oncle en province , qui «  font montre de dispositions ...magnanimes et généreuses à l'endroit d'une femme qui leur a littéralement fait un quatrième enfant dans le dos » ,
André, le plus beau cadeau de la Parisienne,
Et son fils Antoine qui bouclera l'histoire à Chanterelle, Cantal, Auvergne, France, là où elle a débuté, et d'où Marie-Hélène Lafon est originaire. Donc elle parle encore et toujours de son pays, de sa terre.
Lafon est un de mes auteurs français de prédilection avec Adam, Gallay, Ferney et Blondel, donc je ne peux que conseiller la lecture de son dernier livre pour qui aime son style et ses sujets.


“1962, 1984, 1998, une vie entière à flairer les traces du père, de loin ou de près , à Paris ou dans le Lot....”

Un grand merci aux Éditions Buchet-Castel et NetGalleyFrance pour l'envoie de ce livre.
#Histoiredufils#NetGalleyFrance





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Quel beau livre ! Quel grand petit livre !
C'est l'histoire d'un siècle, d'un long siècle, d'une goutte d'eau dans l'éternité, où des hommes et des femmes se rencontrent, se croisent, s'aiment, se rejettent, s'oublient ou disparaissent trop tôt au gré des hasards, des caprices et des destins.
Ces bouts de vies fragmentées, lancées comme on lance des dés, avec leur fil commun, parfois si fort, parfois si ténu, nous fait sentir d'une manière saisissante la flamboyance et l'orgueil de la jeunesse, les rêves qui s'effilochent petit à petit, les cris des enfants qui emplissent les maisons, le poids de la famille et l'inéluctabilité de la mort…
Ce livre nous parle de ce retour à la terre des anciens comme un besoin vital, et de ces paysages immuables admirés tant de fois et de manière si différente du grand-père au petit-fils…
Il fait parler ces marronniers vénérables à l'entrée de la maison familiale qui ont bien des choses à raconter si on prend la peine de les écouter.
Quelle galerie de personnages et de lieux sacrés… Léon le flamboyant et Gabrielle l'indépendante, la gaillarde incongrue ; le royaume de Chanterelle et le Cantal, pays perdu, pays perché ; le fantôme du jumeau et les guerres qui foudroient ; Léon le solide, le fidèle et l'infinie tendresse d'Hélène ; Armand le héros, si fier, si entreprenant, qui ne cessera jamais de courir après ce père absent tout auréolé de légendes et de secrets ; Antoine le dernier rejeton qui clôt cette longue histoire avant d'en entamer une autre, toute aussi hasardeuse, toute aussi balbutiante…
Phrases grises, phrases lumineuses, c'est raconté avec simplicité et rage, avec amour et tendresse… Elles coulent, elles palpitent, elles bouillonnent comme le sang dans le corps d'un homme.
N'allez pas le dire trop fort, mais je crois que je suis tombé amoureux de Marie-Hélène Lafon.

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Né à Paris en 1924, de père inconnu, André est confié par sa mère Gabrielle à sa famille du Cantal. Il est élevé par sa tante Hélène et le mari de cette dernière, au milieu de ses cousines, dans un foyer aimant que sa mère ne rejoint que le temps des vacances. le mystère de sa naissance n'en creuse pas moins discrètement son trou noir dans la tête et le coeur d'André…


Comme autant de photographies aux teintes sépia, douze journées, évoquées dans le désordre, suffisent à Marie-Hélène Lafon pour dérouler un siècle. S'y inscrit l'histoire d'un homme, qui, dans l'affection d‘un foyer attaché à combler le vide d'un « père fantôme » et d'une « mère lointaine et intermittente », s'est construit à l'ombre d'un secret de famille, omniprésent mais toujours occulté dans une sorte de pudeur bienveillante. Une profonde mélancolie imprègne ce texte tourné vers le passé, celui de la reconstitution de toute une existence à partir de quelques bribes, dont l'évocation en pointillés permet peu à peu au lecteur d'en saisir le dessin d'ensemble, et surtout, d'y entrapercevoir les profondeurs cachées derrière les décennies de non-dits. Car peu est formulé mais tout se devine et se ressent, dans une narration qui, en relatant la surface visible des évènements avec la plus grande économie d'effets, parvient à faire prendre au lecteur toute la mesure des silences et des pudeurs, des blancs et des demi-teintes qui ont pavé la vie de trois générations.


Rien de spectaculaire dans ce récit de l'ordinaire, mais la restitution profonde et sensible, dans une langue limpide et précise, de la trajectoire de vies enfuies, bâties autour des drames du quotidien, dans un sillon de joies, de tendresse mais aussi de souffrances parfois invisibles, et dont la seule trace perdure dans quelques photographies, des dates dans un cimetière et l'émotion des vivants.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Je dois vous faire une confidence : mon plaisir de lectrice, découvrir un auteur qui est capable de me « cueillir » "foudroyer" par un style qui sort des sentiers battus. C'est pour moi un moment de pur bonheur comme celui ressenti, cette année passée, à la lecture de Claude Simon, Sebald, Klaus Mann. Et puis les mots, je suis une amoureuse des mots. Trouver le mot juste, celui qui donne toute sa puissance, toute sa lumière à l'expression de la pensée. J'ai terminé l'année en beauté avec Marie-Hélène LAFON.

Marie-Hélène Lafon écrit avec ses tripes, elle communique avec ses personnages et avec son lecteur qui ressent le texte avec une acuité accrue. Elle m'a éblouie par la richesse de son écriture, simple, concise, mais d'une efficacité redoutable. Ses mots sont comme des neurotransmetteurs, ils infusent tout le texte, ils dispensent la vie, la passion, la sensualité. Ils sont visuels, animés. Ils palpitent, ils vibrent, ils sont charnels, ils nous emprisonnent délicieusement dans le récit. Marie-Hélène Lafon, votre écriture est comme je les aime, à mille lieux de celles qui sont inodores et sans saveur. J'ai fini la lecture les larmes aux yeux.

L'auteure parle de nous, de vous, de moi, du temps qui passe, de la famille, de nos personnalités différentes, des secrets de famille et elle en fait un prix Renaudot largement mérité.

Il faut lire le passage où il est question de Paul, adolescent, qui découvre les filles, qui s'ennuie dans son lycée et voudrait plus d'intensité dans sa vie de tous les jours, loin de Chanterelle. Nous sommes en 1919 dans le Lot. L'Armistice est passé par là et il fait froid à l'étude pour explorer Virgile. Paul n'a plus aucun secret pour nous, on vibre avec lui, on rêve avec lui.
Le portrait de Gabrielle aussi interpelle, curieuse femme et curieuse mère qui se dissimule derrière l'indifférence et des dehors trompeurs.

Mais c'est André qui va agréger tous les personnages en un récit d'une grande humanité, autour du vide que crée un père inconnu pour un fils inconnu.

Nous sommes entre Aurillac, Figeac, Chanterelle, Paris pendant tout ce XXème siècle. C'est beau, cela sent la terre, on entre dans cette famille que l'on va suivre pendant cent ans. On suit les vivants, les morts, les fantômes, ils sont tous là, leur présence ne nous quitte pas, on fait partie de cette famille dont chaque portrait possède sa propre personnalité avec ses failles que l'auteure nous trace avec finesse, avec amour. L'auteure peut parfois perdre, bousculer son lecteur par le choix des chapitres qui ne suivent pas l'ordre chronologique et par l'emploi des prénoms qui peuvent parfois créer un peu de confusion ; personnellement, je n'ai absolument pas été gênée.

Je voulais remercier ici Valérie Lambert qui m'a incitée à lire Marie-Hélène Lafon ce qui m'a permis de terminer l'année Babelio en beauté. Je reprendrais l'expression de Valérie « par cette écriture qui trace des sillons comme un paysans du Cantal ».

Très bonne et heureuse année 2023 à tous en espérant que cette nouvelle année apportera la Paix dans cette Ukraine dévastée.
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Le fils, c'est André. L'enfant de Gabrielle et d'un père inconnu. le quatrième enfant dans le dos, comme a dit son oncle, Léon. Car, même si l'enfant est de Gabrielle, il n'aura vu sa mère qu'en de rares occasions durant les premières années de sa vie. Elle aura préféré rejoindre Paris et le laisser à sa soeur, Hélène, et son beau-frère, Léon. Bien qu'épanoui, aimé, choyé, tendrement entouré de ses trois cousines, ce père, qu'il ne connait pas, prend une place de plus en plus importante au fil des ans...

D'avril 1908 à avril 2008, Marie-Hélène Lafon raconte trois générations auvergnates. Par le biais de dates-clés (un tragique accident, une rencontre, une révélation, un portrait ou simplement des instantanés de vie), elle tricote et détricote, sans chronologie, l'histoire de cette famille décomposée et recomposée. Au centre, André, fils de Gabrielle et de père inconnu. Autour de lui, ses ascendants et descendants, ses oncle et tante et autres cousines. Mais ce sont bien les personnages féminins, puissants et omniprésents, qui sont le socle de ce roman. À partir de courts chapitres qui s'emboîtent, l'auteure tisse une saga romanesque d'une puissance et d'une originalité incroyables et se joue des destins de chacun. Sa plume, concise, brute, tellurique, profonde, dépeint parfaitement les émotions et les sentiments.
Un roman certes court mais intense, presque vertigineux...
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Le roman commence en avril 1908 et se termine en avril 2008, soit cent ans plus tard et c'est par le récit de douze journées non chronologiques que Marie-Hélène Lafon nous conte la vie de ce fils André, né en 1924, de père inconnu. Sa mère Gabrielle ne l'a pas élevé mais l'a confié à sa soeur Hélène et son mari Léon qui l'aimeront comme leur propre fils. Ce n'est que lorsque André épousera Juliette que Gabrielle révélera à cette dernière l'identité de ce père.
Cette fresque familiale ancrée au coeur du Cantal traverse deux guerres. Elle est comme autant de morceaux qui reconstitueraient la généalogie de cette famille, avec tous ses silences et ses secrets.
Ce qui m'a marquée c'est la différence de caractère entre ces deux soeurs que sont Hélène et Gabrielle et l'opposé de ce que fut leur vie. Opposition également entre ce foyer aimant composé de Hélène et Léon et ce couple formé par Gabrielle et Paul. J'ai été frappée également par la capacité d'André, ce garçon laissé aux bons soins de sa tante par sa mère, à s'adapter à cette situation.
Se posera plus tard pour lui la question de savoir de qui il est vraiment le fils. L'est-il de son père biologique absent et de sa mère qui l'a en quelque sorte abandonné aux bons soins de sa frangine ou de ce père et cette mère d'adoption qui l'ont élevé dans un cocon de tendresse comme leur propre enfant ? Que dire également de ces non-dits familiaux, comment le manque pourra-t-il être comblé, combien de temps faudra-t-il pour cela ? Quelle est également la capacité de résilience de chacun ? En tout cas, beaucoup de questionnements tout au long de ce livre.
Difficile, en lisant Histoire du Fils, Prix Renaudot 2020, de ne pas être hanté par la scène inaugurale magnifique avec ses senteurs et ses couleurs mais dont le dénouement dramatique aura des répercussions sur plusieurs générations et permettra peut-être en partie d'expliquer certain comportement.
C'est un récit sur la filiation très intéressant que nous livre Marie-Hélène Lafon, avec de très belles descriptions de personnages et de paysages.
Néanmoins, j'ai été quelque peu gênée dans ma lecture par le fait qu'il n'y ait pas de suite temporelle. J'aurais préféré un récit linéaire sans rupture dans la chronologie.
Lien : http://notre-jardin-des-livr..
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« André, posé au bord du lit, dans la chambre nue, s'était soudain senti très las, comme accablé d'un poids de silence et de secret qui était son lot de fils ; père inconnu et mère à double fond. »

Si André est abattu, c'est que finalement une enfance heureuse auprès de son oncle de sa tante et de ses cousines, des études brillantes, un bon travail, un mariage épanouissant et un fils désiré n'auront pas suffit à lui faire oublier une mère en pointillé et une absence de père. Eh oui, les faits sont têtus, l'absence des géniteurs est toujours un traumatisme dont on se remet rarement.

Marie-Hélène Lafon le sait bien, qui situe l'histoire d'André et sa famille sur un siècle entre Lot Cantal et Paris, et choisit avec soin ses mots, chasse le superflu, mais reste dans une réalité bienveillante et poétique pour raconter des vies banales bousculées par les accidents de la vie, les non-dits et les secrets de famille aux résonances universelles.
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