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EAN : 9782070321827
320 pages
Gallimard (08/05/1979)
3.89/5   23 notes
Résumé :
L'imitation de Notre-Dame la Lune est un recueil de poèmes de Jules Laforgue publié en 1886.


Source : Wikipédia
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Citations et extraits (43) Voir plus Ajouter une citation
La lune est stérile.

Lune, Pape abortif à l’amiable, Pape
Des Mormons pour l’art, dans la jalouse Paphos
Où l’État tient gratis les fils de la soupape
D’échappement des apoplectiques Cosmos !

C’est toi, léger manuel d’instincts, toi qui circules,
Glaçant, après les grandes averses, les oeufs
Obtus de ces myriades d’animalcules
Dont les simouns mettraient nos muqueuses en feu !

Tu ne sais que la fleur des sanglantes chimies ;
Et perces nos rideaux, nous offrant le lotus
Qui constipe les plus larges polygamies,
Tout net, de l’excrément logique des fœtus.

Carguez-lui vos rideaux, citoyens de mœurs lâches ;
C’est l’Extase qui paie comptant, donne son Ut
Des deux sexes et veut pas même que l’on sache
S’il se peut qu’elle ait, hors de l’art pour l’art, un but.

On allèche de vie humaine, à pleines voiles,
Les Tantales virtuels, peu intéressants
D’ailleurs, sauf leurs cordiaux, qui rêvent dans nos moelles ;
Et c’est un produit net qu’encaissent nos bons sens.

Et puis, l’atteindrons-nous, l’Oasis aux citernes,
Où nos coeurs toucheraient les payes qu’on leur doit ?
Non, c’est la rosse aveugle aux cercles sempiternes
Qui tourne pour autrui les bons chevaux de bois.

Ne vous distrayez pas, avec vos grosses douanes ;
Clefs de fa, clefs de sol, huit stades de claviers,
Laissez faire, laissez passer la caravane
Qui porte à l’Idéal ses plus riches dossiers !

L’Art est tout, du droit divin de l’Inconscience ;
Après lui, le déluge ! et son moindre regard
Est le cercle infini dont la circonférence
Est partout, et le centre immoral nulle part.

Pour moi, déboulonné du pôle de stylite
Qui me sied, dès qu’un corps a trop de son secret,
J’affiche : celles qui voient tout, je les invite
A venir, à mon bras, des soirs, prendre le frais.

Or voici : nos deux Cris, abaissant leurs visières,
Passent mutuellement, après quiproquos,
Aux chers peignes du cru leurs moelles épinières
D’où lèvent débusqués tous les archets locaux.

Et les ciels familiers liserés de folie
Neigeant en charpie éblouissante, faut voir
Comme le moindre appel : c’est pour nous seuls ! rallie
Les louables efforts menés à l’abattoir !

Et la santé en deuil ronronne ses vertiges,
Et chante, pour la forme: « Hélas ! ce n’est pas bien,
« Par ces pays, pays si tournoyants, vous dis-je,
« Où la faim d’Infini justifie les moyens. »

Lors, qu’ils sont beaux les flancs tirant leur révérence
Au sanglant capitaliste berné des nuits,
En s’affalant cuver ces jeux sans conséquence !
Oh ! n’avoir à songer qu’à ses propres ennuis !

- Bons aïeux qui geigniez semaine par semaine,
Vers mon Cœur, baobab des védiques terroirs,
Je m’agite aussi ! mais l’Inconscient me mène ;
Or, il sait ce qu’il fait, je n’ai rien à y voir.
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L'île.

C’est l’Île; Éden entouré d’eau de tous côtés!….
Je viens de galoper avec mon Astarté
À l’aube des mers; on fait sécher nos cavales,
Des veuves de Titans délacent nos sandales,
Éventent nos tresses rousses, et je reprends
Mon Sceptre tout écaillé d’émaux effarants !
On est gai, ce matin. Depuis une semaine
Ces lents brouillards plongeaient mes sujets dans la peine,
Tout soupirants après un beau jour de soleil
Pour qu’on prît la photographie de Mon Orteil…..

Ah! non, c’est pas cela, mon Ile, ma douce île….
Je ne suis pas encore un Néron si sénile….
Mon île pâle est au Pôle, mais au dernier
Des Pôles, inconnu des plus fols baleiniers!
Les Icebergs entrechoqués s’avançant pâles
Dans les brumes ainsi que d’albes cathédrales
M’ont cerné sur un bloc; et c’est là que, très-seul,
Je fleuris, doux lys de la zone des linceuls,
Avec ma mie !

Ma mie a deux yeux diaphanes
Et viveurs! et, avec cela, l’arc de Diane
N’est pas plus fier et plus hautement en arrêt
Que sa bouche! (arrangez cela comme pourrez….)
Oh! ma mie…. – Et sa chair affecte un caractère
Qui n’est assurément pas fait pour me déplaire :
Sa chair est lumineuse et sent la neige, exprès
Pour que mon front pesant y soit toujours au frais,
Mon Front Équatorial, Serre d’Anomalies!…..
Bref, c’est, au bas mot, une femme accomplie.

Et puis, elle a les perles tristes dans la voix…..
Et ses épaules sont aussi le premier choix.
Et nous vivons ainsi, subtils et transis, presque
Dans la simplicité les gens peints sur les fresques.
Et c’est l’Île. Et voilà vers quel Eldorado
L’Exode nihiliste a poussé mon radeau.

Ô lendemains de noce où nos voix mal éteintes
Chantent aux échos blancs la si grêle complainte :
LE VAISSEAU FANTOME

Il était un petit navire
Où Ugolin mena ses fils,
Sous prétexte, le vieux vampire!
De les fair’ voyager gratis.

Au bout le cinq à six semaines,
Les vivres vinrent à manquer,
Il dit:« Vous mettez pas en peine;
«Mes fils n’ m’ont jamais dégoûté! »

On tira z’à la courte paille,
Formalité! raffinement!
Car cet homme il n’avait d’entrailles
Qu’ pour en calmer les tiraillements,

Et donc, stoïque et légendaire;
Ugolin mangea ses enfants,
Afin d’ leur conserver un père…
Oh! quand j’y song’, mon cœur se fend!

Si cette histoire vous embête,
C’est que vous êtes un sans-cœur!
Ah! j’ai du cœur par d’ssus la tête,
Oh! rien partout que rir’s moqueurs!…
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Les linges, le cygne.

Ce sont les linges, les linges,
Hôpitaux consacrés aux cruors et aux fanges ;
Ce sont les langes, les langes,
Où l’on voudrait, ah ! Redorloter ses méninges !

Vos linges pollués, Noëls de Bethléem !
De la lessive des linceuls des requiems
De nos touchantes personnalités, aux langes
Des berceaux, vite à bas, sans doubles de rechange,
Qui nous suivent, transfigurés (fatals vauriens
Que nous sommes) ainsi que des Langes gardiens.
C’est la guimpe qui dit, même aux trois quarts meurtrie :
«Ah ! Pas de ces familiarités, je vous prie… »
C’est la peine avalée aux édredons d’eider;
C’est le mouchoir laissé, parlant d’âme et de chair
Et de scènes ! (je vous pris la main sous la table,
J’eus même des accents vraiment inimitables),
Mais ces malentendus ! L’adieu noir ! -je m’en vais !
-Il fait nuit ! -que m’importe ! à moi, chemins mauvais !
Puis, comme Phèdre en ses illicites malaises :
«Ah ! Que ces draps d’un lit d’occasion me pèsent ! »
Linges adolescents, nuptiaux, maternels ;
Nappe qui drape la sainte-table ou l’autel,
Purificatoire au calice, manuterges,
Refuges des baisers convolant vers les cierges.
Ô langes invalides, linges aveuglants !
Oreillers du bon coeur toujours convalescent
Qui dit, même à la soeur, dont le toucher l’écoeure :
«Rien qu’ une cuillerée, ah ! Toutes les deux heures… »
Voie Lactée à charpie en surplis : lourds jupons
A plis d’ordre dorique à lesquels nous rampons
Rien que pour y râler, doux comme la tortue
Qui grignote au soleil une vieille laitue.
Linges des grandes maladies ; champs-clos des draps
Fleurant : soulagez-vous, va, tant que ça ira !
Et les cols rabattus des jeunes filles fières,
Les bas blancs bien tirés, les chants des lavandières,
Le peignoir sur la chair de poule après le bain,
Les cornettes des sœurs, les voiles, les béguins,
La province et ses armoires, les lingeries
Du lycée et du cloître ; et les bonnes prairies
Blanches des traversins rafraîchissant leurs creux
De parfums de famille aux tempes sans aveux,
Et la mort ! Pavoisez les balcons de draps pâles,
Les cloches ! Car voici que des rideaux s’exhale
La procession du beau Cygne ambassadeur
Qui mène Lohengrin au pays des candeurs !

Ce sont les linges, les linges,
Hôpitaux consacrés aux cruors et aux fanges !
Ce sont les langes, les langes,
Où l’on voudrait, ah ! Redorloter ses méninges.
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"Je ne suis qu'un viveur lunaire
Qui fait des ronds dans les bassins,
Et cela, sans autre dessein
Que devenir un légendaire.

Retroussant d'un air de défi
Mes manches de mandarin pâle,
J'arrondis ma bouche et j'exhale
Des conseils doux de Crucifix.

Ah! oui, devenir légendaire,
Au seuil des siècles charlatans !
Mais où sont les Lunes d'antan ?
Et que Dieu n'est-il à refaire ?"
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La mélancholie de Pierrot.

Le premier jour, je bois leurs yeux ennuyés….
Je baiserais leurs pieds,
À mort. Ah! qu’elles daignent
Prendre mon cœur qui saigne!
Puis, on cause…. – et ça devient de la Pitié;
Et enfin je leur offre mon amitié.

C’est de pitié, que je m’offre en frère, en guide;
Elles, me croient timide,
Et clignent d’un œil doux :mal
« Un mot, je suis à vous! »
(Je te crois) Alors, moi, d’étaler les rides
De ce cœur, et de sourire dans le vide…..

Et soudain j’abandonne la garnison,
Feignant de trahisons!
(Je l’ai échappé belle!)
Au moins, m’écrira-t-elle?
Point. Et je la pleure toute la saison….
- Ah! j’en ai assez de ces combinaisons!

Qui m’apprivoisera le cœur! belle cure…..
Suis si vrai de nature
Aie la douceur des sœurs !
Oh viens ! suis pas noceur,
Serait-ce donc une si grosse aventure
Sous le soleil ? dans toute cette verdure…
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Vidéo de Jules Laforgue
« Toutes les pensées et maximes qui ont quelque valeur sont fortement pessimistes. Quand on étudie ses semblables et soi-même avec quelque sincérité, on en rapporte rarement des observations avantageuses. »
Henry Maret (1837-1917)
« […] L'art des maximes est vieux comme l'homme. de tout temps […], l'homme aima ces formules, concises, abstraites peu ou prou, dans lesquelles il porte un jugement sur lui-même, sur ses semblables ou sur le monde. […] […] les Français, parmi les autres peuples, se sont signalés dès le XVIe siècle, par un goût très prononcé pour cette manière spéciale de s'exprimer qui, par ailleurs, trouvait sa formule naturelle dans les proverbes, manifestation générale de la pensée humaine qui est de toutes les époques, de tous les climats, de toutes les races. […] la profondeur, l'originalité De La Rochefoucauld, de Pascal ou… de l'Ecclésiaste ne seront vraisemblablement jamais dépassés ni même égalées. Mais, ce que ces penseurs de génie ont dit autrefois peut-être redit sous une forme nouvelle, à la mesure du temps présent. […] […] nous avons recueilli une grande quantité d'ouvrages de maximes, nous les avons lus attentivement et sans parti-pris et nous avons constaté […] qu'il en était très peu qui fussent absolument médiocres. Pas un où le lecteur ne pût découvrir une valeur, une note sérieuse, quelque observation typique. Pas un, surtout, qui ne décelât de la sincérité et quelque sensibilité. […] Près des héros, dans leur ombre parfois, se pressent des hommes qui les valent, qui valent mieux, souvent, et qui, cependant, par quelque défaut de caractère ou, simplement, par quelque cruauté des événements, demeurent voués aux seconds rôles. Philosophes par goût naturel ou par dépit, joyeux ou bien amers selon leur tempérament, ils se consolent de ne point agir en pensant ou en jouant au penseur : ainsi sont nées, naissent et naîtront encore bien des maximes ! [...] « L'homme est toujours le même ! » Tant qu'il sera nécessaire de proclamer cet axiome, le genre des maximes ne sera pas épuisé ! [...] »
0:00 - Remy de Gourmont 0:15 - Courteline 0:26 - Jules Laforgue 0:52 - Albert Guinon 1:08 - Louis Dumur 1:21 - Paul Brulat 1:34 - Princesse Karadja 1:44 - Aurel 1:54 - Georges Faillet 2:05 - Marcel-Lenoir 2:14 - Jeanne Landre 2:29 - Natalie Clifford Barney 2:42 - Charles Régismanset 2:51 - Étienne Rey 3:01 - Albert de Bersaucourt 3:10 - Henry Asselin 3:23 - Alain Chauvilliers 3:33 - Jean Ythier 3:45 - Lucie Paul-Margueritte 3:54 - Jeanne Broussan-Gaubert 4:12 - Pierre Aguétant 4:33 - Générique
Images d'illustration : Remy de Gourmont : https://leseditionsdeparis.com/collection/litterature/le-chateau-singulier-et-autres-textes-rares Georges Moinaux, dit Courteline : https://www.edition-originale.com/fr/litterature/envois-autographes-dauteurs-manuscrits/courteline-photographie-originale-dedicacee-de-1925-60004 Jules Laforgue : https://www.babelio.com/auteur/Jules-Laforgue/2537/photos Albert Guinon : https://www.abebooks.com/LILLUSTRATION-SUPPLEMENT-3119-SAMEDI-DECEMBRE-1902/30869087159/bd#&gid=1&pid=1 Louis Dumur : https://www.tdg.ch/societe/histoire/geneve-redecouvre-louis-dumur/story/25740549 Paul Brulat : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Brulat#/media/Fichier:Paul_Brulat,_1918.jpg Princesse Mary Louise Smith Karadja : https://sv.wikipedia.org/wiki/Mary_Karadja#/media/Fil:Princesse_karadja_1899.png Aurélie Octavie Gabrielle Antoinette de Faucamberge, dit Aurel : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/3/35/Aurel_writer_photo.png Georges Faillet : https://www.youtube.com/watch?v=J2IrgM3yyms Jules Oury, dit Marcel-Lenoir : https://fr.wikipedia.org/wiki/Marcel-Lenoir#/media/Fichier:Mrs._Julian_
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