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Tu ne trouves pas qu'il fait chaud subitement. Je me sens moite, la chemise collante et trempée de sueur. le soleil tarde à se coucher. Il n'est pas encore fatigué de sa folle journée à danser au-dessus des vagues. Je ne compte plus le nombre de verre de rhum, ni même de rondelles d'ananas. Je ne sais plus trop où j'en suis, ces effluves d'hibiscus et de bougainvilliers m'enivrent, j'ai la tête qui tourne. Tourne, tourne, tourne comme la danse de cette petite fille, la bien-nommée Alice Bienaimé.

Tu ne connais pas Alice ? Alors, laisses-moi te conter son histoire.

Cela remonte aux années quarante, sur une île qui aurait pu être paradisiaque, Haïti. De famille bourgeoise, Alice a été élevée par un père bien trop strict et une mère bien trop aimante. Elle se confiera donc plus à son oncle et aussi à Man-Bo, la servante couleur noire charbon. L'un lui apportera le sentiment d'être libre, l'autre la bienveillance.

En fait, je connais très mal l'histoire d'Haïti, son passé ainsi que son présent. Que sais-je de cette île ? Elle est entourée d'eau, une mer bleue azure que j'imagine. Des alizées parfumés de vanille bourbon, la nostalgie des bougainvilliers et les verres de Rhum de sa voisine, Cuba. D'ailleurs, tu n'imagines pas lire ce roman sans en goûter un verre. Là fut mon erreur, je n'avais à disposition que du rhum martiniquais. Je ne reviendrai pas sur le contexte économique, du genre achetons français, si le rhum cubain est bon, je ne m'interdirai pas un embargo. Mais bon je m'éloigne à la rame du sujet. Je redescends sur la plage – de sable fin où les alizées font voler les cheveux des belles haïtiennes – pour revoir Alice faire virevolter sa belle robe fleurie. Quand la nostalgie t'étreint, tu te sens heureux. Non ? Alice continue à danser car à Haïti, la danse est synonyme de lutte des classes.

Je ne suis pas certain d'avoir tout compris dans la danse, son importance et ses racines africaines. Je sais que cela lui procure un sentiment de liberté. Je perçois que danse et vaudou entraînent une même transe. Sans la danse, Alice aurait eu l'impression d'être retenue en cage, une cage dorée sous les cocotiers. Je ne suis pas sur non plus de comprendre les changements politiques de cette île. Un aveu de faiblesse de ma part. le roman débute avec la fin de l'occupation américaine et se termine avant la prise de pouvoir de François Duvalier (alias « Papa Doc »). Par contre, tout au long de ce roman, j'ai senti la poésie de son auteure, Yanick Lahens, au même titre que les effluves de ylang-ylang venues flirter avec mes narines et mettre mes sens en émoi. Je reviendrai sur cette île, à Port-au-Prince, voir les papillons danser et boire du jus de goyave. Je reviendrai sur la terre et les racines de Toussaint Louverture...

http://www.youtube.com/watch?v=jaNhEqNIAwk
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Yanick Lahens, écrivaine haïtienne, nous parle d'un langage que son héroïne embrassera, corps et âme, pour apprendre, pour vivre son identité et toute sa liberté : la danse. Danser pour survivre, pour ne pas laisser la mort gagner la partie.
« l'indicible ce « en de-çà de l'écrit ». Ainsi naîtra de cette bi langue, neuvième conscience des mots : l'ainsité, le tout de la Parole, son universalité. » comme l'écrit Patrick Chamoiseau.
Le mot, le geste, la main, le pied, la danse comme une bouche plantaire.
La castration identitaire et culturelle d'un peuple est dévastateur.
Haiti, la perle des Antilles, qui devint en 1804 la première République indépendante de population majoritairement noire, occupée de 1915 à 1934 par les Usa, dans les mains des Duvalier , dictateurs de père en fils, de 1957 à 1986. Haïti est fracturée. Fracturée dans son sol, fracturée dans sa mémoire. Pourquoi Haïti a-t-elle mis tant de temps à prendre entièrement conscience d'elle même ?
Plus de 80 % des haïtiens ont des origines africaines, descendants d'esclaves, majoritairement originaires du Bénin.
75 % de la population haÎtienne vit en dessous du seuil de pauvreté. Une « élite » politique, économique, marchande a totalement coupé les liens avec ses racines. Penser blanc, vivre blanc, étudier blanc, porter blanc, chanter blanc, voilà les fantômes culturels d'Haïti. Voilà les stigmates d'un colonialisme esclavagiste non expurgé.
Alice est haïtienne, enfant de la bourgeoisie de Port au Prince. Éduquée, cultivée. Mais ordre est communément admis de ne pas se mélanger, de ne pas se confondre avec le peuple haïtien, avec la culture des ancêtres. Deux Haïti se côtoie, l'une riche, l'autre pauvre. L'une de parquet et de pelouse entretenue l'autre des arrières cours et de la terre battue. Haïti la catholique, Haïti la vaudouiste.
Facture sociale profonde et injuste qui n'a de cesse de rejeter une identité commune. La parole commune. Cette lave qui sans cesse remonte dans les âmes, provoque transes et souvent torrents de colère et qui ressurgit.
Le traumatisme n'a pas été exprimé, expulsé. le refus de soi, la haine même de ses propres origines, le retournement de la violence à l'intérieur d'un groupe afin d'expulser une souffrance qui ne peut se faire entendre, à travers ses romans, Toni Morrison a su nous le faire comprendre .
Alors comment aujourd'hui réduire toutes les fractures d'Haïti ?
Il est temps pour Haïti de se regrouper, de sortir du groupe des vaincus.
De ne plus parler d'exil, mais de retour.
Les intellectuels haïtiens sont et seront ceux qui n'ayant jamais perdu la parole, permettront à Haïti de retrouver sa mémoire à travers son langage. Langage de terre, d'odeurs, de verbe, d'algues, de plage, d'océan, de poussière, de larmes, de chair, d'esprit, d'ancêtres, de couleurs, de musicalité, d'oralité, de poésie. Cette « oraliture » dont nous parle Chamoiseau. La multitude de ses langages que contient son corps. Cette langue commune dans laquelle la beauté offre « consolance » à la blessure.
« "entre les mots et le moi
un mince fil les sépare
un mince fil de salive
reliant pont de parole
au moteur d'une barque
pour mieux prendre le large » ecrit le poète James Noël.
Yanick Lahens nous parle du peuple haïtien, de son merveilleux multiculturalisme, elle nous écrit d'un retour dans la maison du père.
Très belle écriture que celle de Yanick Lahens.

Astrid Shriqui Garain



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Court mais d'une intensité rare, dans la maison du père nous dresse un tableau de l'enfance et de l'adolescence d'Alice, jeune haïtienne bien élevée dont les parents tentent de réprimer les pulsions et sensations, la sensualité et les souvenirs immémorables de l'Afrique lointaine.
C'est avec avidité que l'on se plonge dans les rues grouillantes de la capitale haïtienne, tentant de suivre la jeune femme qui poursuit elle-même les amis de son oncle et de ses idéaux, et qui ne peut résister aux tambours vaudous et à la danse interdite qu'ils appellent.
C'est difficilement que l'on referme ce roman aux poétiques et sensuelles effluves, et que l'on s'efforce de ne pas s'envoler pour les Caraïbes tenter de retrouver cette langueur et ces sensations si merveilleusement terrestres et musicales.
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En 1942, Alice, fille de bonne famille africaine vivant en Haïti, se débat pour se livrer en cachette aux danses primitives vaudous strictement interdites par Toussaint Laverdure depuis le 4 Nivôse, de l'an VIII de la République, ces danses qu'elle ressent au plus plus profond d'elle, non sans un sens exacerbé de la transgression... Belle aventure d'une jeune femme ayant très tôt le goût de la liberté.
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Un roman d'apprentissage de bonne facture ! Mais également des images de Haiti dans les années 40. Un pays en devenir où les noirs ne sont plus tous pauvres, où certains d'entre eux ont honte de la couleur de leur peau. Un pays où la danse, les pratiques ésotériques, la chaleur du climat, l'âpreté des hommes sont les ferments de la vie de tout un peuple. Une enfant, Alice, découvre tout cela ainsi que les joies de l'éducation bourgeoise (à la française). Elle prend conscience que son pays et sa culture sont occultés par des références (des valeurs) européennes. Et les journées de la révolution de 1945-46 sont décrites avec sobriété… Enfin, ce petit livre pose la question de la place de la femme dans cette société. Et comment résister ??? Je suis plutôt conquis par cette écriture rythmée, riche en images, qui me donne envie de découvrir d'autres auteurs des Antilles…
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Mouais mouais voilà quoi.
Je ne sais pas trop quoi retenir de cette lecture que je trouve assez oubliable (c'est un livre que j'ai du lire pour un cours encore une fois). On suit l'histoire d'une fille qui veut danser alors que son père ne veut pas, avec en fond l'indépendance d'Haïti. Je lai terminé en une soirée, c'est plutôt agréable à lire. Mais je n'ai rien retenu de plus de la part de ce bouquin, malheureusement.

A vous de voir si vous voulez jeter un coup d'oeil.
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Roman d'apprentissage dans les années 40 à Haïti
Alice Bienaimé, est issue d'une grande famille bourgeoise d'Haïti.
La danse , la chaleur du pays, la violence des hommes voilà ces trois éléments constituent l'ambiance, le climat de ce roman à l'image du pays. Alice reçoit une éducation de jeune fille de bonne famille. Elle apprend, elle fait connaissance de la culture populaire par sa bonne et son oncle. Elle suit péripéties des journées chaudes révolutionnaires de 1945-46. La danse sa pratique tient de la lutte de classe en Haïti. Un très beau livre, une histoire forte servit par une écriture très fluide, très agréable à lire, elle glisse, un grand plaisir ! à découvrir la littérature haïtienne est très attachante, c'est une littérature a ne pas ignorer cela serait tellement dommage !
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