Citations sur Les Poupées (86)
Ses mains étaient fines et douces. Pas le genre à ramasser des tomates. Donc, j’ai opté pour le commerce. À son âge, avec des bijoux sans valeur, elle n’occupait certainement pas un haut poste. J’ai hésité avec serveuse, mais il y a plus de boutiques que de bars et de restaurants, donc les probabilités étaient dans le camp de la vente.
Ce sont juste des hypothèses que je considère comme possibles. D’habitude, j’aime m’appuyer sur des éléments solides pour déplier un diagnostic différentiel, mais vous n’êtes pas du genre à attendre. Vous préférez l’action, le mouvement. Vous aimez mettre les gens sur le gril pour obtenir le meilleur d’eux. Alors, je vais dans votre sens.
Le criminel que vous recherchez n’a rien à voir avec cette inscription qui, vous n’avez pas manqué de le constater, est largement antérieure aux meurtres. Peut-être le tueur se sera-t-il reconnu dans ce qu’elle dit, toujours est-il qu’il n’en est pas l’auteur. Enfin, vous voulez savoir s’il va recommencer. Et là, je serai catégorique : il ne s’arrêtera que si vous l’en empêchez. Si vous échouez, que vous perdez du temps, il y aura d’autres morts.
J’ai d’abord envisagé la classique « peur du regard ». Les criminels n’apprécient pas que leurs proies les fixent dans les yeux. Parce que ça leur fait prendre conscience du mal qu’ils font. Mais je ne crois pas que ce soit ça. Il a dépassé ce stade. Je pense au contraire qu’il souhaite préserver de la décomposition les globes oculaires de ses victimes. Il doit vouloir les regarder dans les yeux comme s’ils étaient vivants !
Peut-être du fétichisme, quoique non, trop sexuel… La symbolique fœtale nous inviterait à aller chercher du côté des parents, de la mère surtout, pourtant je trouve ça un peu grossier, un peu facile, cela risque de nous emmener sur une fausse piste. Le fait de placer ses victimes dans cette position dans un endroit abrité et fermé par un verrou confirme ma théorie du « sanctuaire ». Dans un autre domaine, on peut s’interroger sur une possible forme de trichophobie. Avant que vous me posiez la question, c’est la phobie des poils ou des cheveux.
Qu’il soit atteint d’une pathologie mentale lourde, c’est indéniable, mais ne le sous-estimez pas. Je n’ai pas constaté de choc au crâne ni d’entailles profondes à proximité des organes vitaux. Sous réserve du rapport d’autopsie, ça signifie qu’il s’emploie à tuer sans violence. Donc en gagnant la confiance de ses victimes. Ce qui révèle un côté manipulateur. Autre chose : cette chapelle abandonnée est bien plus qu’un simple charnier où il est simplement venu se débarrasser des cadavres. C’est une sorte de sanctuaire. Il n’a pas choisi une église par hasard.
Il s’agit d’un psychotique extrêmement organisé : il parvient à capturer ses victimes sans attirer les soupçons. Et cela à six reprises. Il cible et chasse méticuleusement, avec une grande finesse. Il a développé un moyen de séduire si efficace qu’aucune disparition inquiétante n’a été signalée dans la région et que vous êtes toujours en train de chercher l’identité de ces six victimes. Je me trompe ?
Il n’existe aucun cas de femme ayant commis des meurtres de ce niveau d’atrocité. Mais surtout, il n’y a qu’un seul type d’empreintes, à ce qu’on m’a dit. Donc, c’est une personne seule. Or, pour descendre un corps inerte de voiture, le traîner jusque dans cette petite église, il faut être sacrément costaud. Vous avez vu le gabarit de certaines des victimes ? Une femme seule, même sportive, n’y arriverait pas.
Il s’attendait à un homme, c’était exact, mais surtout, il voulait se reposer sur quelqu’un d’expérimenté, de blasé même. Un praticien ennuyeux qui avait déjà tout vu, tout entendu, qui connaissait par cœur la noirceur de l’âme humaine et qui saurait en cartographier les ignobles tréfonds.
C’était une jeune femme qui, sans être jolie, ne manquait pas de charme. Elle avait le sourire généreux malgré les circonstances, et des yeux malicieux. Il n’était pas interdit de penser qu’elle plaisait facilement. Elle devait mesurer deux têtes de moins que lui et son fin minois contrastait avec les traits durs du Cow-boy.