L'histoire s'ouvre sur un lieu vide, grande pièce vide dans laquelle on perçoit différents espaces : un bar, une scène, une piste de danse et de conversation. Page après page, des voix apparaissent, le passé du lieu surgit. Et on découvre les voix et les corps à l'origine de ces paroles, les quelques personnes qui ont bâti
la Bigaille, quelques femmes et hommes désireux de créer un mouvement. Ce souffle imprègne autant la construction de ce lieu culturel que la bande dessinée. Thibault Lambert mêle les témoignages d'acteurs et d'actrices de cette fondation et distille des scènes issues de son imagination. On découvre alors les étapes financières, administratives et relationnelles pour monter un tel projet. L'auteur parle de l'importance du soutien des collectivités, du chemin sinueux pour obtenir des subventions et de l'engagement bénévole. Cet aspect est très intéressant car l'auteur suit le fil des réflexions des quinze personnes de
la Bigaille. Il y est question de responsabilité, de confiance et surtout de pouvoir, avec en filigrane ce besoin de savoir partir, quitter un rôle au premier plan.
Par sa mise en images dynamique, l'auteur mêle le réel et les références pour accompagner la fantaisie du projet de son humour. Par son trait, son propos humaniste et sa sincérité, cette bande dessinée se place dans les pas d'
Etienne Davodeau. Il y a de la légèreté dans le récit, ce qui sied parfaitement à l'innocence des personnalités réunies. Mais cela n'empêche pas de montrer la détermination de ce collectif et la manière avec laquelle il affronte des obstacles : qu'il s'agisse des portes fermées ou de l'éviction de personnalités incompatibles avec le projet global. Cette bande dessinée témoigne de la puissance d'un projet culturel sur un territoire et du cadre nécessaire pour faire vivre l'idée avant les individus. Les dernières pages, avec une scène marquante, montrent clairement ce passage de relais indispensable pour la survie d'une utopie.
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