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Critique de Kittiwake


De l'intime à l'universel, car ce récit bouleversant nous ramène à notre fragilité , filigrane qui se laisse oublier si souvent dans le tourbillon de nos occupations aussi indispensables que dérisoires.

Les attentats nous ont tous atteints, par leur injustice, par la profonde débilité d'exécuteurs sous influence, par ces vies brisées pour rien.

Philippe Lançon, c'est Libé, c'est Charlie, c'est une carrière brillante, et un talent d'écrivain, maintes fois attestés par de prestigieuses récompenses.

C'est aussi un matin de janvier, de ceux pour lesquels on se souvient de ce que nous étions en train de faire. Les jambes noires sont venues accomplir leur tâche morbide, nous privant à jamais d'une bande de trouble-fêtes particulièrement nécessaires dans une société toujours plus bâillonnée.

Le propos n'est pas le pardon, ou l'absence de pardon. C'est une magnanimité ou une rancoeur inutiles. de ces ombres massacrantes, ne subsistent des cauchemars et des angoisses lorsque la configuration des lieux rend l'irruption possible. C'est le parcours d'un survivant, miraculé, mais ô combien atteint dans sa chair et dans son esprit. Trois mois de supplices pour la bonne cause dans un service de stomatologie qui doit inventer pour reconstruire ces plaies de guerre, là où la routine rafistole les séquelles des cancers. le doublement patient subit de nombreuses interventions, dans un univers qui lui deviendra familier et dont il adoptera jusqu'au lexique, et constate l'impact de ce drame sur sa place et son rôle que ce soit dans une sphère privée ou professionnelle. Au-delà du journaliste reconnu, c'est en tant que victime que l'on s'adresse à lui.

C'est l'occasion d'une vibrant hommage aux équipes hospitalières, dont il saisit les limites humaines et celles que créent les restrictions budgétaires. Mais jamais malgré la douleur, la dépendance , les échecs, jamais il n'y aura d'hostilité dans les propos. Au contraire.

Le propos est dramatique, mais le ton général est loin d'être plaintif. Il s'agit avant tout de se reconstruire, au propre comme au figuré, sans s'éterniser sur un passé qui de toute façon ne demande pas la permission pour surgir au moment le plus inopportun, ni de se projeter dans un avenir incertain. Chaque jour se nourrit de ses échecs ou s'illumine de ses succès.

Deux alliés fondamentaux accompagnent Philippe Lançon de la chambre au bloc , en passant par les couloirs : Bach et la littérature, restreinte essentiellement à Proust, et Kafka :

« Bach et Kafka : l'un m'apportait la paix et l'autre une forme de modestie et de soumission ironique à l'angoisse. »

Lecture indispensable.

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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