Quelque chose en moi s'insurge contre le fait d'analyser un suicide, de lui trouver une cause, et plus encore une seule. car il me semble que c'est faire violence à la personne qui a décidé de mettre fin à sa vie. Une violence d'autant plus grande qu'elle n'a plus voix au chapitre. C'est oublier la complexité de son histoire et nier cette part de liberté dans ce qui demeure un choix, fût-il sous très forte contrainte.
Dans ma famille, il y a des semelles de plomb, qui entraînent par le fond, et des ornements de plumes qui frémissent au vent
Et côté plume, alors ? Il semble que là tout est dynamique et gai, léger sans être frivole, fragile et pourtant solide et résistant. Entre parure et écriture, de l'Egypte ancienne aux civilisations mėso-américaines, de l'éventail de l'élégance à l'attribut de l'écrivain, les plumes séduisent les hommes, comme elles émerveillent les enfants. Elles sont associées au souffle et à la grâce, à la pensée et au rêve, à l'imaginaire aérien et à cette "poétique des ailes" dont parlait Bachelard. Les poètes en effet connaissent mieux que personne les songes de L'air.
Mieux vaut apprendre du souvenir pour rebondir, résister et créer de nouvelles solidarités. Cela devient urgent.
La promotion étouffante de la figure de la victime dans nos sociétés confine celle-ci dans une identité de souffrance en lui déniant toute initiative. Et l'extension du règne de la compassion qui l'accompagne incite à panser les plaies du monde plutôt qu'à affronter les inégalités qui le fracturent.
Le sauve qui peut la vie, c’est la ligne de fuite, l’échappée parfois belle
Mieux vaut apprendre du souvenir pour rebondir, résister et créer de nouvelles solidarités
Dans ma famille, il y a des semelles de plomb qui entraînent par le fond , et des ornements de plumes qui frémissent au vent.
Dans ce triste jeu de la distinction et du rejet, des parvenus tellement arrivés (ou pas assez assurés de l'être, peut-être) rivalisent parfois avec les établis, en se faisant les propagandistes zélés de la xénophobie et du racisme. On a beau savoir que l'origine, l'expérience, l'histoire n'immunisent guère contre de telles dérives, cela a néanmoins quelque chose de particulièrement désolant. Ils n'ont donc rien appris? Comment ont-ils pu si vite oublier les épreuves et la vaillance de leurs aînés?
Je plaide au contraire pour la fidélité d'une mémoire en alerte;
Quelque chose en moi s'insurge contre le fait d'analyser un suicide, de lui trouver une cause, et plus encore une seule. Car il me semble que c'est faire violence à la personne qui a décidé de mettre fin à sa vie. Une violence d'autant plus grande qu'elle n'a plus voix au chapitre. p.101