Atlas des paradis perdus

En principe j'aime bien les Atlas des éditions Arthaud… En principe…

Car ce livre, s'il respecte la forme extérieure de la collection (format, couverture bleue, longueur des chapitres…) , est d'abord une suite de textes sur la notion de paradis, réels ou imaginaires, décrits par Gilles Lapouge sans grand souci de s'en tenir à un lieu précis. Une suite d'idées autour d'un thème, portés par une érudition certaine. Mais le texte se fait lourd par moments, notamment dans ses analogies entre paradis et sexe féminin – au point de consacrer une section aux maisons de plaisir ou aux éventuelles « îles des femmes » – et dans sa constante analogie entre monde libertaire et paradis (rêvé par les pirates, par Fletcher Christian, ou par les habitantes des béguinages...).

Quand aux cartes… Quelles cartes ? Des pages de localisations couvertes de lignes bleues, jaunes, rouge, ne correspondant à rien de précis – peut-être parfois aux courbes de niveau et rarement aux fleuves et rivières. Pas de légendes, pas d'index, juste de jolies couleurs posées ici et là. Ça vous plaît ? Moi pas.

Bon, seul point positif, j'ai découvert l'existence d'un lieu (réel) que je compte bien visiter un jour : le désert de Retz à Chambourcy, un parc paysager voulu par M. de Monville, juste avant la Révolution.

On a tous envie de trouver un petit coin de paradis pour s'y installer de son vivant même quand on n'y croit pas pour l'au-delà. Car les théologiens conseillent généralement de mourir avant d'y entrer mais la plupart des gens préfèrent se le fabriquer avant, si possible.
Alors Gilles Lapouge propose un "Atlas des paradis perdus" que je suis allée emprunter à la bibliothèque.
C'est un très beau livre mais je suis assez déçue de son contenu. D'abord, plus que les paradis perdus il s'agit de paradis trouvés par Gilles Lapouge. J'espérais peut être trouvé le mien, ce qui n'a pas été le cas. L'auteur classe les lieux par chapitre en répertoriant jardins, îles, couvents ou autres lieux utopiques ou encore cités idéales. Ce n'est pas ce côté inventaire qui m'a gênée car le livre est présenté comme un atlas. Et justement un atlas c'est avant tout des cartes et de ce côté, on n'est pas gâté. Une minuscule mappemonde indique le lieu mais c'est illisible. Les illustrations pleine page sont dessinées et ne permettent pas plus de localiser les paradis terrestres évoqués.
J'ai eu l'impression que l'auteur n'avait pas forcé son talent d'autant plus que les textes ne donnent pas tellement envie de connaitre ces Eden. Et puis je n'ai pas apprécié la présentation de Disneyland comme « univers pacifié de la miniature » considéré comme un paradis à égalité avec le planisphère de Charles Fourier ou encore avec Venise, cité idéale, ou des lieux plus intimes comme le paradis de l'enfance.
Au final j'ai trouvé que Gilles Lapouge insiste beaucoup sur le paradis comme variante de l'enfer ce qui ne colle pas avec le titre et ne rend pas cet atlas indispensable. Je me pencherai quand même sur d'autres titres de cette collection par curiosité.

En un mot: décevant.
En élaborant un peu plus: il s'agit d'un bel objet, couverture bleu turquoise parcourue de discrètes courbes suggérant les cours d'eau ou les courbes de niveaux d'une carte, intérieur sobre avec en illustration des cartes permettant de situer... ou non les paradis plus ou moins trouvés ou perdus, dos toilé (mais là ça se gâte, après moins d'un mois le titre commence déjà à s'effacer...).
La déception vient du contenu. Les titres des rubriques font encore rêver, mais la classification est discutable sur plusieurs points, les titres n'annoncent parfois qu'imparfaitement le sujet, les descriptions s'égarent (on nous dit que la cité utopique d'Océana est largement inspirée de Venise... et on ne nous décrit en conséquence que cette cité réelle!) et sont finalement assez maigres, et on a l'impression frustrante de ne toujours pas savoir grand-chose sur ces paradis après lecture.
L'ensemble du livre est finalement peu informatif, et constitue plus une sorte de méditation sur le thème du paradis perdu, et l'accent est davantage mis sur la "perte" que sur le paradis. Une lecture qui relève finalement plus du purgatoire que du paradis!

Ouvrage reçu dans le cadre d'une massa critique, je tenais à remercier Babelio et les éditions Arthaud.

L'ouvrage est un très bel ouvrage : une couverture de qualité qui donne une impression de "précieux", et des cartes très jolies à l'intérieur du livre qui renforcent l'idée de voyage qu'insuffle l'auteur tout au long de ses textes.

Sur le fond, je suis davantage mitigée mais je pense que chaque "paradis perdu" est subjectif. Certains m'ont beaucoup plus comme L'île des femmes, l'île des pirates ou celle relative à Aliénor d'Aquitaine mais d'autres beaucoup moins... Je pense que cela dépend vraiment de la sensibilité de chacun ; soit on part en voyage avec l'auteur soit on reste dans ses lignes.

En somme, c'est un très beau livre mais qui aurait mérité une écriture plus fine, ou des recherches plus fines (même si attention, on apprend quelques éléments très intéressants).

L'Atlas des paradis perdus est un peu une cartographie des rêves. Quel enchantement de parcourir ces pages, toutes vouées à situer et raconter ces terres mi-fantasmées, mi-explorées. Les illustrations sont à elles seules une merveille, la mise en page est délicate, le papier est splendide. Une petite pépite à sentir du bout des doigts, à parcourir comme un voyageur du livre que nous sommes tous, un ouvrage vibrant de mystères et de beauté.
Un grand merci à Babelio pour cette chance et aux éditions Arthaud, que je ne cesse d'admirer pour la qualité et l'originalité des ces publications. de l'audace et le goût de la beauté, indéniablement.