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Critique de michel.carlier15


Comment dire l'indicible , comment partager ces moments de chaos où le monde s'écroule sous vos pieds , et sous les balles de kalachnikov ?
Quand je suis passé une nuit de l'été 2016 à pied devant le Bataclan , j'avoue que j'ai été submergé par un océan de tristesse , je me suis arrêté et j'ai senti que ce lieu était habité , les âmes des morts planent toujours sur cet endroit .
J'ai la faiblesse , comme Erwan Lahrer , d'aller régulièrement aux concerts de rock , j'ai même assisté à un concert d'Eagles of Death Metal , pire encore j'étais dans une salle de concert la nuit du 13 au 14 novembre 2015 , mais pas à Paris .
Alors l'histoire qu'Erwan Lahrer nous fait partager , je me suis senti complètement impliqué dedans , j'ai éprouvé la peur , la tristesse , la souffrance , j'ai entendu les HURLEMENTS des blessés qui se vidaient de leur sang . Ce sont mes frères et mes soeurs que l'on a assassinés , mutilés et terrorisés .
Erwan Lahrer nous raconte son Bataclan cette fameuse nuit où tout a basculé pour lui et des centaines de personnes , où il a pris une balle dans la fesse tirée à bout portant . "A partir de là , ce n'est plus ton histoire , c'est aussi la nôtre" .
Essayez d'imaginer l'angoisse de ses proches , ses amis , sa famille , ses anciennes amantes , l'attente fébrile toute la nuit après l'attentat . Pour couronner le tout , son téléphone est resté chez son amie , et il n'avait aucun papier sur lui .
Et l'attente d'une délivrance dans une mare de sang , le sien et celui des autres victimes , les HURLEMENTS des blessés , les détonations d'armes de guerre .
On sent la souffrance du voisin (voisine?) qui s'agrippe à sa cheville , l'angoisse de ne pas être secouru à temps , l'hémorragie qui ne peut être contenue .
Et puis finalement la présence rassurante des militaires , puis les secours débordés par le nombre de victimes , l'arrivée à l'hôpital et la prise en charge .
Et , heureusement , tous les amis (quelle solidarité entre écrivain-es !) , la famille , tout l'environnement est là pour entourer le blessé et le soutenir moralement ("j'ai découvert tout cet amour . Il a fait dévier la trajectoire de la balle , n'essayez pas de me prouver le contraire" ) . Sans oublier le personnel hospitalier auquel l'auteur rend hommage pour leur générosité et leur bienveillance (petit bémol avec la psychologue genre "mère supérieure" , qui était censée être à l'écoute du survivant , mais apparemment psychorigide : "vous êtes trop joyeux" ) .
C'est un roman écrit à plusieurs voix , celle de l'auteur , prépondérante , celle des amis proches , de son amie Jeanne , de son père , et même deux des terroristes , Efrit et Iblis . Peut-être pour essayer de les comprendre , ces barbares , qui ne sont pas cultivés comme l'auteur , qui n'ont pas reçu ton éducation ou qui ont manqué d'amour ou d'attention de la part du corps social .
En s'attaquant à toi , ils ont attaqué notre société entière ("en te blessant , ils ont blessé chacun d'entre nous") .
En définitive , ils n'ont pas gagné , car l'auteur "va continuer à regarder le monde avec sa tête de cyber ludion au charme en bandoulière - et c'est tant mieux" .
J'ai découvert cet auteur avec ce roman , et je suis tellement emballé par son écriture que je vais m'attaquer à ses romans précédents , son livre m'a emporté , et touché profondément , j'ai l'impression que nous sommes semblables , donc frères . Sauf que je ne porte pas de santiags !



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