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EAN : 9782130450788
127 pages
Presses Universitaires de France (01/01/1993)
4.5/5   2 notes
Résumé :
L’individualisme repose avant tout sur la conviction que l’humanité est composée non pas d’abord d’ensembles sociaux (nations, classes…) mais d’individus : d’êtres vivants indivisibles et irréductibles les uns aux autres, seuls à ressentir, agir et penser réellement.


Cette conception qui nous est aujourd’hui familière constitue l’aboutissement d’une longue évolution des idées. Quelle est son histoire ?

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Avec la révélation du « cogito» énoncé dans le Discours de la méthode (1637), « Descartes signe l'acte de naissance philosophique des individus souverains » (André Glucksman). Dans la démarche (auto)critique qui y conduit et ne s'appuie que sur le doute de sa propre raison à l'encontre de tout ce qui vient de l'extérieur, l'auteur du Discours scande un « Je » signifiant l'initiative singulière d'une conscience qui se saisit et se pose dans sa puissance de penser par elle-même. Lorsqu'au terme de ce cheminement elle finit par s'apparaître à elle-même dans une irréductible autosuffisance, le « Je pense donc je suis» fait coïncider le sujet grammatical et le sujet pensant que cette autoréférence pose en subjectivité certaine de sa propre réalité, indépendante du monde et d'autrui. Cette foncière séparation ontologique érige la conscience de soi en unité distincte que la possession de la « raison naturelle » pourvoit de libre arbitre: l'individu est conceptuellement là, centré sur sa propre évidence et capable d'autodétermination.

Cette souveraineté « pensée» n'est pas l'apanage d'un seul être, elle vaut également pour tous les hommes définis en autant de « centres du monde », pour « un chacun en particulier ». (pp. 29-30)
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Ce n'est qu'aux alentours des XIIIe et XIVe siècles que se font ressentir les premiers effets de l'immersion de l'individualisation chrétienne de la foi dans les mentalités, la philosophie politique et l'organisation sociale européenne.

A cette époque charnière apparaissent des changements sociaux et culturels significatifs qui tendent à faire de l'individu l'acteur de base « visible» de la société. Une nouvelle ontologie de l'individuel s'élabore tandis que le sujet individualisé devient une catégorie fondamentale du droit – d'abord théologique puis laïque. Un peu partout en Europe occidentale, l'établissement puis la consolidation des premières véritables villes provient de la coopération de volontés individuelles agissant de leur propre initiative. En France, dès les XIe et XIIe siècles, Roscelin puis Abélard inaugurent la théologie de l'individuation. Mais l'épi- centre de ces surgissements spontanés, simultanés et interactifs, semble surtout se situer en Angleterre où Guillaume d'Ockham va accomplir la révolution épistémologique donnant naissance au cours du XIVe siècle à un second courant nominaliste plus puissant et aux implications politiques et sociétales considérables.

C'est dans ce pays qu'après Colin Morris (The discovery of the individual - 1050-1200, London, 1972), Alan Macfarlane voit poindre les prémisses concrètes d'une autre révolution, sociologique celle-là, amorçant la libération individuelle des entraves communautaires traditionnelles.

Dans la mesure où les thèses nominalistes (selon lesquelles n'existent d'une manière générale que des êtres singuliers dont chacun est absolument un) ne commencent à s'étendre à la conception des relations homme/société qu'au cours du XIV siècle, elles ont sans doute plus traduit ou accompagné le changement culturel déjà à l'œuvre qu'elles ne l'ont suscité.

A cette époque en tous cas, le résultat intellectuel de la confrontation théologico-politique d'Ockham avec la papauté est que pour la première fois dans l'Histoire, le paradigme individualiste commence à prendre forme dans le champ épistémologique, puis « sociologique» et éthique, en s'opposant à la philosophie réaliste et holiste alors dominante de saint Thomas. (pp. 21-23)
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Les partisans de la « révolution nationale » du maréchal Pétain proviennent essentiellement des deux rameaux de l'anti-individualisme réactionnaire : les ultra-nationalistes fascisants à même d'en finir avec la liberté individuelle léguée par les Lumières et les Droits de l'homme; et des catholiques traditionalistes avides de restaurer « par le haut» l'ancien ordre communautaire et religieux. Le système de valeurs pétainiste résulte de leur symbiose et résume tout ce à quoi un siècle et demi de procès de l'individualisme conduisait logiquement : une solidarité sociale « organique », un ordre moral répressif, la primauté de la famille patriarcale, une religion d'Etat, la vie de groupe et l'organisation corporative comme modèle, un pouvoir politique autoritaire et monolithique – soit un monde sans individus libres de vivre comme ils l'entendent.

Dans ses divers messages et discours de 1940-1941. l'anti-individualisme de Pétain est obsessionnel « Cet individualisme dont nous nous vantions comme d'un privilège est à l'origine des maux dont nous avons failli périr. Nous voulons reconstruire, et la préface nécessaire à toute reconstruction, c'est d'éliminer l'individualisme destructeur. Destructeur de la famille dont il brise ou relâche les liens; destructeur du travail, à l'encontre duquel il proclame le droit à la paresse; destructeur de la patrie, dont il ébranle la cohésion quand il n'en dissout pas l'unité. » Créateur des chantiers de jeunesse, J. de La Porte du Theil n'est pas moins clair: « Ce qui nous a porté le plus grand tort, c'est l'individualisme poussé jusqu'à l'extrême limite, chacun ne cherchant plus rien au-delà de son propre intérêt ou de sa propre jouissance, et le cherchant férocement par tous les moyens, licites ou non (...) Nous avons bien failli mourir d'un excès d'individualisme. A l'individualisme à outrance, il faut opposer la vie d'équipe, nous n'avons pas d'autre moyen de le combattre et de le vaincre. » (pp. 79-80)
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L'anti-individualisme théorique du rousseauisme a très vite engendré une pratique des plus révélatrices lors de la seconde phase de l'épisode révolutionnaire français: la Terreur. C'est au nom de la « volonté générale » inscrite dans la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qu'on entreprend alors d'expulser l'individu inscrit dans les institutions démocratiques de la première période par les libéraux (Girondins) – et surtout la répression violente et l'extermination de ceux-ci. Dans La guillotine et la Terreur (1987), D. Arasse explique: « En 1793, l'individualisme est anti-révolutionnaire car dans un État en révolution, il ne peut exister qu'une entité dans laquelle se fondent tous les individus : l’État (...) La guillotine indique que l'ennemi à abattre n'est autre que l'individu qui a choisi sa propre volonté particulière au détriment de la volonté générale. » (p. 82)
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Après une longue et souterraine gestation tout au long du Moyen Age au terme de laquelle l'individu émerge d'une manière balbutiante lors de la Renaissance comme réalité vécue et catégorie de la pensée, l'individualisme fait irruption au grand jour aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Alors s'opère une « révolution copernicienne » instituant l'individu en sujet séparé et autonome, puis en unité fondamentale de la société. Elle en légitime les aspirations à l'indépendance par la reconnaissance de son droit naturel de propriété et de libre disposition de soi. (p. 13)
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