Au sortir de la guerre, les acteurs du nazisme avaient le choix entre deux manières d'être au monde : soit ils reconnaissaient leur faute, ce qui aurait exigé l'introspection et le deuil des pertes avec une transformation de leur vision du monde, soit ils la désavouaient publiquement, ce qui eut pour conséquence la négation de leur adhésion au nazisme et le dénégation de la défaite. Cette dernière manière d’être au monde, choisie par la majorité, allait souvent de pair avec l'entretien d'une nostalgie secrète du nazisme. Cette nostalgie se manifestait concrètement dans une dévalorisation du présent, permettant d'atténuer la visibilité des fautes du passé. L'utopie déréalisante du nazisme fut généralement remplacée par une autre, le « miracle économique » ou l’Église.
Ce qui restait, ce fut, comme l'écrit la psychanalyste Gertrud Hardtmann, « un plaisir pervers pour ce qui est déplaisant, le plaisir d'asservir et d'être asservi, d'abuser ou d'être l'objet d'un abus. » En dessous du blanchissement public, les traces mentales demeuraient donc tenaces, et ce plaisir d'abuser devait se refléter dans l'éducation des enfants. Christa Wolf écrivit à propos de son enfance sous le IIIe Reich : « A un certain moment, l'enfant comprit qu’obéir et être aimé était une et même chose. »
Vendredi 8 mai 2009
Andréa Lauterwein, spécialiste de la culture allemande (dernier ouvrage paru : Anselm Kiefer et la poésie de Paul Celan, éd. du Regard 2006, Prix Artcurial du livre d'Art contemporain) : « l'exil des intellectuels allemands dans les années trente et l'après-guerre » dans le cadre du banquet de printemps 2009 intitulé " Exils et frontières"
Andréa Lauterwein est née à Zurich et vit en France.
Elle entretient un rapport privilégié aux deux langue : allemande et française.
Elle travaille sur la culture de langue allemande du 20e siècle et notamment les liens entre la société, les arts, la littérature et la Shoah.
Elle est traductrice.
En tant qu'auteur elle a publié un remarquable essai sur Paul Celan (Belin 2006)
De même, Anselm Kiefer et la poésie de Paul Celan (éd. du Regard, 2006, prix Artcurial du livre d'Art contemporain).
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