Je trouve a ce sujet une anecdote charmante dans les Mémoires de Gounod, et je la reproduis textuellement:
« Ma mère, qui avait été ma nourrice, m'avait certainement fait avaler autant de musique que de lait. Jamais elle ne m'allaitait sans chanter, et je peux dire que j'ai pris mes premières leçons sans m'en douter et sans avoir a leur donner cette attention si pénible au premier age et si difficile a obtenir des enfants. Sans en avoir conscience, j'avais déjà la notion très claire et très précise des intonations et des intervalles qu'elles représentent, des tout premiers éléments qui constituent la modulation, et de la différence caractéristique entre le mode majeur et le mode mineur, avant même de savoir parler, puisqu'un jour, ayant entendu chanter dans la rue par quelque mendiant sans doute) , une chanson en mode mineur, je m'écriai : « Maman, pourquoi il chante en do qui plore (pleure)? » .
J'avais d'une I'oreille parfaitement exercée, et je pouvais tenir avantageusement déjà ma place d'éleva dans un cours de solfège, où j'aurais pu même être professeur. »
La musique est une langue.
Infiniment moins précise que le plus rudimentaire des idiomes quant a la détermination du sujet traité, elle possède, en revanche, une intensité d'expression, une puissance d'émotion communicative, à laquelle ne saurait atteindre aucun langage parlé, si parfait qu'il soit.
II n'y a pas d'art sans science : la race tout entière des maîtres est là pour en faire foi.
Albert Lavignac, Marsch galop.