AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Patsales


Quand Jean Cocteau a écrit une énième version d'Antigone, il expliquait avoir voulu donné une réduction du mythe. Drôle d'idée. Et c'est l'impression que j'ai eue en lisant ce court roman de 150 pages: puisque tout a déjà été écrit, réduisons (au sens culinaire du mot), élaguons, allons chercher l'os (de l'anorexie comme métaphore de la concision littéraire)... Mais qui a bien pu fournir à Rouja Lazarova un tel sujet: "Vous traiterez de la condition humaine en reprenant de façon exhaustive les grandes problématiques du XX° siècle. Vous avez 4 heures."? Donc: la Shoah, le totalitarisme communiste, l'anorexie, l'amour, la mort, la psychanalyse, l'écriture. Excusez du peu. Et le pire c'est que parfois cela fonctionne: il y a des fulgurances dans ce roman, des rapprochements insolents qui font mouche: l'anorexie mentale confrontée à la mort par inanition des déportés, le cynisme du "Arbeit macht frei " jeté en pâture à ceux qui voudraient qu'un mourant se repose, la peur de la liberté remplacée dans nos démocraties par celle de la maladie... Mais aussi que de maladresses! Tant de fils tirés et si difficiles à tenir ensemble. Alors on les coupe. L'anorexie, le communisme passent à la trappe. Ou pire: on chausse de bons gros sabots pour montrer à toute force la cohérence du schéma. Par exemple la narratrice peine à avouer son amour non parce l'objet de ses désirs est son psychanalyste de surcroît beaucoup plus âgé qu'elle mais parce la dictature lui a trop longtemps appris à se taire. Ou bien l'amoureux décide de lire une lettre au calme plutôt qu'au milieu des embouteillages et impute sa patience à son expérience du camp de concentration. Lourd.
Ce roman tient des montagnes russes. Un shoot de subtilité. 10 pages d'ennui. Un flash d'intelligence pure. 4 paragraphes de poncifs. Deux échos habiles et délicats. Un rapprochement pesant.
Sans doute peut-on dire la même chose de bien des livres. Mais la concision, qui ne supporte que la perfection, grossit des défauts qu'on aurait tolérés sans problème sur 500 pages.
Tous mes remerciements à Babelio et aux éditions Intervalles.
Commenter  J’apprécie          50



Ont apprécié cette critique (5)voir plus




{* *}