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EAN : 9791022613613
Editions Métailié (19/04/2024)
3.99/5   38 notes
Résumé :
Jouissance du temps, des lieux, la marche est une dérobade, un pied de nez à la modernité. Elle est un chemin de traverse dans le rythme effréné de nos vies, une manière propice de prendre de la distance et d'affûter ses sens.

L'auteur a pris la clé des champs à la fois par l'écriture et par les chemins frayés. Il mêle dans les mêmes pages Pierre Sansot ou Patrick Leigh Fermor, il fait dialoguer Bashô et Stevenson sans souci de rigueur historique car ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Sensorialité et jouissance du monde par le biais de la marche sont au coeur de cet essai.
Bien écrit et très renseigné, l'auteur nous plonge à la fois dans une analyse philosophique, historique et littéraire de cette activité physique revenue au goût du jour depuis quelques années.

A la fin de cette lecture revigorante pour qui reste un peu trop sur son fauteuil à bouquiner, il ne nous reste plus qu'à chausser nos godillots pour prendre la clef des champs ... au plus vite.
En marchant bien sûr.
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Cet étonnant essai se situe de plusieurs manières à la croisée des chemins : entre traité sur la marche – sinon encyclopédie, dont il n'a pas la prétention – et apologie de la marche ; entre récit d'un narrateur marcheur et anthologie de réflexions et de témoignages de marcheurs illustres ; entre poétique philosophique au sens de Bachelard (cité plusieurs fois) et foudroyantes observations sociologiques. Les auteurs convoqués et cités sont véritablement des « compagnons de route » du sociologue, tant la complicité de leurs démarches et la similitude de leurs motivations sont évidentes, cependant que leurs écrits étonnent pour la variété de leurs horizons géographiques et temporels : les écrivains de récits de voyages, aventuriers et leurs héritiers, sont relativement minoritaires dans une bibliographie véritablement surprenante ; ils sont dignement accompagnés par des philosophes, les plus nombreux, des poètes et autres hommes (et quelques rares femmes) de lettres. La juxtaposition de leurs textes renforce le sentiment d'un certain universel dans la pratique de la marche : sentiment illusoire, sans doute, car il faudrait plutôt parler d'universel dans la réflexion philosophique, littéraire et poétique sur cette pratique.

Une longue première partie, « Le goût de la marche », renforce ce sentiment de même que l'impression encyclopédique, par la variété des thèmes dans lesquels elle se décline : « Marcher – le premier pas – La royauté du temps – le corps – Bagages – Seul ou à plusieurs – Blessures – Dormir – Silence – Chanter – de longues marche immobiles – Ouverture au monde – Les noms – La comédie du monde – L'élémentaire – Animaux – L'obliquité sociale – Promenades – Écrire le voyage – La réduction du monde où marcher ».
Suit une sorte d'antithèse, intitulée « Marcheurs d'horizons », qui relate de manière assez détaillée l'épopée de quatre expéditions « de l'extrême » : la traversée de l'Amérique du début du XVIe siècle par Cabeza de Vaca qui fuyait sa condition d'esclave des Indiens ; le pari de René Caillé, au début du XIXe siècle, d'être le premier Européen à pénétrer à Tombouctou et à en revenir vivant ; l'exploration obstinée des Grands Lacs d'Afrique centrale, par Richard Burton et John Speke qui, à la moitié du XIXe siècle, étaient hantés par l'ambition avouée de découvrir les sources du Nil et inavouée de relier toutes les colonies et protectorats britanniques d'Afrique par un axe Nord-Sud entre l'Afrique du Sud et l'Égypte ; enfin le rêve – teinté de mirage – de Michel Vieuchange en 1929 de parcourir les 1400 kilomètres de désert entre l'Atlas et la ville-fantôme de Smara. le choix de ces aventures-là est assumé comme absolument arbitraire ; leur nature semble totalement antithétique avec le « goût de la marche » analysé en détail dans la partie précédente : ultimes espoirs de survie ou obsessions individuelles, ces défis sur le fil entre la vie et la mort offrent une image complémentaire et contradictoire de la marche.
Les deux parties suivantes sont consacrées aussi à deux types de marche différents et spécifiques : la « Marche urbaine », qui est analysée sous le double prisme du corps de la ville et de celui du marcheur, parfois un flâneur, en particulier par quatre de ses sens, respectivement : l'ouïe, la vue, le toucher et l'odorat ; et enfin les « Spiritualités de la marche », c-à-d. les pèlerinages de jadis et d'aujourd'hui et autres itinérances spirituelles notamment bouddhistes et hindouistes – le hadj musulman et autres pèlerinages chiites brillent ici par leur absence totalement inexplicable et inexcusable.

La « Fin du voyage » porte aussi la marque d'une certaine spiritualité, au moins au sens d'une thérapeutique et/ou d'un certain caractère initiatique attribués à la marche. On pourrait presque faire l'hypothèse d'une ouverture sur une métaphysique de la marche, à en croire l'excipit :
« Les sentiers, la terre, le sable, les bords de mer, même la boue ou les rochers, sont à la mesure du corps et du frémissement d'exister. » Mais, précisément, nous sommes laissés ici à la croisée de plusieurs chemins...
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On peut dire que ce petit bouquin fait le tour de la question. Qu'il s'agisse de son effet sur les individus, de ses aspects anthropologiques, ou de ses différentes variantes, vous saurez tout sur la marche. Ou presque. Faut-il marcher seul ou accompagné(e)? Chanter ou se taire? Dormir à la belle étoile? Que mettre dans ses bagages?

Nous avons probablement tous ressenti quelque chose de spécial quand nous marchons (et je ne parle pas seulement de la fatigue ou de la soif). Qu'il s'agisse de la petite promenade post-prandiale d'une heure ou du chemin de St Jacques, qui n'a jamais éprouvé cette expérience de la liberté, de ce rapport spécial au temps? Qui ne s'est senti à la fois fort et fragile, prenant conscience de ce qui nous entoure? Et combien sera délicieux le repas le plus simple, le verre d'eau fraîche à la fin d'une longue journée!

Pour peu que l'on s'éloigne des villes, la marche offre l'opportunité - devenue rare - de retrouver un univers silencieux, propice à la méditation. Pas cette méditation devenue méthode pour ne penser à rien, à faire le vide, mais méditation au sens où l'entendaient les anciens, capacité à réfléchir au monde et à la place que l'on y tient. On sait que nombre de philosophes (Rousseau, Nietzsche... ) ne réfléchissaient jamais mieux qu'en marchant; on connaît moins les aventures d'explorateurs comme Cabeza de Vaca, qui traversa l'Amérique à pied de la Floride au Pacifique.

David le Breton convoque les meilleurs écrivains-voyageurs adeptes de la marche, certains très connus: Nicolas Bouvier, Bruce Chatwin, Stevenson. D'autres qui le sont peut-être moins, tels le japonais Bashô ou le sénégalais Oumar Dia.

Un livre facile à lire, format poche, et facile à caser dans le sac à dos...
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Même si les deux livres font la part belle à des incontournables tels Rousseau, Thoreau, Abbey, pas vraiment de redites (prévoir tout de même un certain laps de temps entre les deux lectures), et le breton, après quelques "généralités" consacre un beau chapitre à Cabeza de Vaca, René Caillé, Richard Burton et Michel Vieuchange, sans oublier la "marche urbaine" et la "spiritualité de la marche". La bibliographie en fin de volume est toujours "pousse au crime", le style dense mais fort lisible.

Quelques mises en bouche :

" le silence est saisonnier. Dans nos contrées, il n'est pas le même en janvier dans un champ enveloppé de neige ou en août dans le bruissement de la multitude des insectes, l'explosion des fleurs et des herbes brûlées par le soleil. Dans un même paysage, jamais le silence n'est égal d'un jour à l'autre." (p 55)

" Margaret Mead déplore avec humour l'invention des bateaux ou des automobiles. Si les hommes n'avaient eu d'autres moyens de se déplacer que leurs jambes, ils ne seraient allées bien loin au cours de leur existence. La vulnérabilité du marcheur est une bonne incitation à la prudence et à l'ouverture à l'autre plutôt qu'à la conquête et au mépris. Une chose est certaine, l'homme qui marche a rarement l'arrogance de l'automobiliste ou de celui qui emprunte le train ou l'avion car il demeure toujours à hauteur d'homme en sentant à chacun de ses pays l'aspérité du monde et la nécessité de se concilier amicalement les passants croisés sur son chemin." (p 62)

" Chaque espace contient en puissance des révélations multiples, c'est pourquoi aucune exploration n'épuise jamais un paysage ou une ville. On ne se lasse que de vivre." (p 74)
"Tout parcours hors des sentiers battus est simultanément animalier" (p 85)

Lien : http://en-lisant-en-voyagean..
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On pourrait croire qu'il n'existe qu'une seule façon de marcher, qui consiste à poser un pied devant l'autre, et bien ce petit essai, paru en 2000 et toujours d'actualité, nous démontre que non.

En cheminant d'une référence littéraire à une autre, l'auteur nous rappelle que l'humain ne retrouve son vrai rapport au monde qu'en se déplaçant humblement à la vitesse de son corps.

Une lecture qui donne envie d'enfiler ses chaussures pour voyager écologique, à la campagne ou en ville, à l'extérieur et à l'intérieur de soi.
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Le silence est saisonnier. Dans nos contrées, il n'est pas le même en janvier dans un champ enveloppé de neige ou en août dans le bruissement de la multitude des insectes, l'explosion des fleurs et des herbes brûlées par le soleil. Dans un même paysage, jamais le silence n'est égal d'un jour à l'autre." (p 55)

" Margaret Mead déplore avec humour l'invention des bateaux ou des automobiles. Si les hommes n'avaient eu d'autres moyens de se déplacer que leurs jambes, ils ne seraient allées bien loin au cours de leur existence. La vulnérabilité du marcheur est une bonne incitation à la prudence et à l'ouverture à l'autre plutôt qu'à la conquête et au mépris. Une chose est certaine, l'homme qui marche a rarement l'arrogance de l'automobiliste ou de celui qui emprunte le train ou l'avion car il demeure toujours à hauteur d'homme en sentant à chacun de ses pays l'aspérité du monde et la nécessité de se concilier amicalement les passants croisés sur son chemin." (p 62)

" Chaque espace contient en puissance des révélations multiples, c'est pourquoi aucune exploration n'épuise jamais un paysage ou une ville. On ne se lasse que de vivre." (p 74)
"Tout parcours hors des sentiers battus est simultanément animalier" (p 85)
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Il faudrait sans doute raconter bien d'autres balades sous le signe liquide à Calcutta, à Bombay ou à Goa dans l'oubli de la mousson mais dans la nécessité d'être trempés à longueur de journée. Un soir à Pokhara, cette année, tandis que j'écrivais ce texte, une pluie diluvienne a soudain inondé les rues, coupant l'électricité et donnant naissance à un orage spectaculaire dont les éclairs illuminaient plusieurs secondes l'obscurité de la ville. Nous dînions à bonne distance de notre petit hôtel, il a fallu marcher de l'eau jusqu'au genoux, tomber dans quelque trous, croiser quelques vaches immobiles et serrées contre les murs des maisons, inventer le chemin dans une nuit d'encre entre deux éclairs, un beau périple avant d'arriver enfin à bon port. Mais tout cela est aujourd'hui familier. Ce sont des moments de complications provisoires qui donnent leur sel à la marche urbaine et laissent des souvenirs impérissables.
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Je suis sûr que si je cherche un compagnon de promenade, je renonce à une certaine intimité de communion avec la nature. Ma promenade en sera certainement plus banale. Le goût de la société prouve l'éloignement de la nature. Adieu, ce quelque chose de profond, de mystérieux que je trouve en me promenant. (Henry David Thoreau cité par David Le Breton)
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« Dans l'usure de la marche, il y a parfois assez de puissance et de beauté pour que se dissolve la souffrance qui a présidé au départ. Lavée au contact des chemins, érodée dans la nécessité de la progression, celle-ci se fait moins incisive. Au fil du temps ce n'est plus le noyau d'épouvante de la douleur qui motive l'avancée, mais l'appel à la métamorphose de soi, au dépouillement, à une remise au monde qui requiert l'alchimie de la route et d'un corps qui s'y confond, noces heureuses et exigeantes de l'homme et du chemin. » (p. 164)
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« La vulnérabilité du marcheur est une bonne incitation à la prudence et à l'ouverture à l'autre plutôt qu'à la conquête et au mépris.
[…]
L'expérience de la marche décentre de soi et restaure le monde, inscrivant l'homme au sein de limites qui le rappellent à sa fragilité et sa force. Elle est une activité anthropologique par excellence car elle mobilise en permanence le souci pour l'homme de comprendre, de saisir sa place dans le tissu du monde, de s'interroger sur ce qui fonde le lien aux autres. » (pp. 62-63)
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Vidéo de David Le Breton
Emois et résonances de la première toilette des élèves aides-soignants
Avec la participation de Éric FIAT, David LE BRETON, Pascale MOLINIER, Patricia PAPERMAN Voir plus [+]
La combinaison de récits de toilettes par des apprenants aides-soignants et d'articles réflexifs par des universitaires reconnus rend cet ouvrage innovant et incontournable pour comprendre les enjeux du respect de la pudeur dans le soin de la toilette aussi bien du côté du patient que de celui du soignant.

La première toilette constitue un rite initiatique à l'issue duquel on devient soignant. Si le respect de la pudeur des patients représente un enjeu majeur de l'enseignement du soin, qu'en est-il de la pudeur des soignants ? Cette thématique inédite est au coeur de cet ouvrage où, grâce au travail du récit, chaque fois unique et singulier, des élèves engagent leurs mots et représentations dans la confrontation de leur propre pudeur avec celle de l'autre. Ils et elles participent à l'émergence d'une voix, d'une culture, d'un discours sur le soin qui contribue à la reconnaissance de leur métier et de sa complexité psychique.
Ces savoirs expérientiels combinés à des savoirs d'experts reconnus en sciences humaines révèlent les dimensions aussi bien éthiques qu'existentielles présentes dans la pratique du soin de la toilette. Loin d'être une tâche simple aux techniques vite apprises et acquises, celle-ci participe à ce geste éthique majeur : le respect de la dignité humaine.
Avec la participation des élèves de l'IFAS.
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