Sade: Attaquer le soleil

Je me souviens de cette exposition à Orsay, il y a quelques années, Organisée par Annie LeBrun. Sade me fascine, comme Bataille. J'oscille toujours entre une recherche de la sagesse quasi mystique et une attirance pour mon côté obscur, me plongeant dans mes fantasmes les plus indicibles. Sade m'aide pour cette deuxième recherche. Et je m'aperçois, non sans malice, que je suis loin d'être le seul. Lorsque je feuillette le catalogue de cette exposition, je m'aperçois que dès son vivant, Sade a exercé un pouvoir salutaire sur la société. On passera sur sa vie, ses frasques, son épouse et sa belle-soeur, son exil forcé en Italie… L'exposition se concentre sur les artistes qui se sont inspirés de son oeuvre où l'ont même précédé dans ses désirs : Ingres, Füssli, Delacroix, Fragonard, von Stuck, Goya, Cézanne, Valotton, Bellmer, Picasso, Moreau… pour ne citer que les plus connus. Tous ces peintres ont au moins une fois peint la douleur, le supplice, le mal, le cauchemar, à la manière De Sade. Parce que Sade, c'est qu'il y a de plus caché en nous. de plus secret, de plus inavouable. Un chapitre particulier est dédié à Félicien Ropps, peintre Belge qui n'hésite à mêler le sacré au profane (Pornokratès 1879). Ou Max Ernst qui nous fait réfléchir sur les bas-fonds de l'inconscient. Plus tard, la photo et le cinéma s'empareront de son oeuvre. de Man Ray à Pasolini.
Sade, comme Bataille, nous pousse dans nos retranchements. Cette édition spéciale de Beaux-Arts illustre parfaitement nos antagonismes en présentant cette exposition, à l'aide d'illustrations particulièrement bien représentatives de cette littérature de notre inconscient inavouable. Les textes, souvent choisis par Annie le Brun complètent parfaitement ces illustrations, en nous plongeant dans l'univers sadien.
Face à notre époque faussement aseptisée, inondés que nous somme par l'hyperconsumérisme, l'abrutissement des masses dont nous faisons tous partie, Sade nous donne l'occasion d'un sursaut, d'un réveil : Qui sommes nous ?