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sur 505 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Certains prennent les enfants du bon dieu pour des canards sauvages, et d'autres des loups pour des chiens. C'est ce qui arrive à Franck, après sa sortie de prison. Cinq ans pour braquage, la faute à pas de chance, et à la sortie, Jessica, la petite amie de son frère, qui lui offre le gîte et le couvert dans la ferme familiale, près de Langon. Son frère Fabien est parti faire du bizness en Espagne et Franck, qui ne rêvait que de liberté, de fraternité et de grand air se retrouve dans une caravane au milieu de nulle part, avec une famille dysfonctionnelle, comme diraient les psy, une famille de manganes, comme on dit à Bordeaux. Il y a Roland, alias le Vieux, escroc à la petite semaine, ferrailleur, en cheville avec les gitans, il y a Simone, la Vieille, une peau de vache, Jessica, la petite amie du frère, un peu nympho, camée, et hystérique et Rachel, sa fille, adorable gamine perdue et déjà brisée par ce trio de bras cassés.
Le Corre confirme ce que l'on savait déjà, qu'il est l'un des meilleurs auteurs de noir de l'Hexagone, et d'Europe aussi d'ailleurs -quand on aime on ne compte pas-. On se demandait s'il allait faire aussi bien qu'Après la guerre. On ne se le demande plus, on dévore Prendre les loups pour des chiens. Il nous avait prévenu Hervé, non, il ne faut pas faire comme le petit chaperon rouge dans les bois, et se laisser berner. Mais on n'a rien vu venir, ou on n'a pas voulu voir.
Prendre les loups pour des chiens est donc du très bon noir social, celui qui prend racine dans la vraie vie de la France d'en bas, pas celle qui a des ardoises à 900 000 euros, non, celle qui rame quand elle doit rembourser les centaines d'euros des trop perçus des allocs, comme si elle n'était pas déjà assez dans la mouise. Une France qui marine dans la colère et la rancoeur : « Sinon, Jessica et sa mère faisaient les vendanges près de Sauternes, des ménages, des remplacements pour s'occuper des vieux dans une maison de retraite à Bazas, ou dans un supermarché comme caissière. Envie de balancer de leur fauteuil les vieux gâteux, hargneux, marinant dans leur pisse, envie parfois d'étouffer sous un oreiller ceux qu'on avait abandonnés là comme des clébards et qui pleuraient en silence ou refusaient de quitter leur faction derrière la fenêtre de leur chambre, envie de jeter un pack de bière à la gueule du client râleur et méprisant, ou de faire manger le tiroir-caisse à la chef qui trouve que ça ne va pas assez vite et puis aller massacrer leurs vignes à tous ces connards de propriétaires qui vienne t surveiller le travail dans leur panoplie de paysan, bottes en caoutchouc, blue-jean, grosse veste de velours , juste ce qu'il faut de négligé pour marcher sans trop se salir dans la boue au milieu de ceux qui triment, courbés entre les rangs de vigne."
C'est donc l'histoire d'un brave type poissard, qui aurait pu sortir d'un roman de Jim Thompson ou de Charles Williams, des marécages louisianais ou de chez les péquenauds du Tennessee, et qui à l'instar du petit chaperon rouge perdu dans les forêts girondines, n'a pas su voir le loup sous son déguisement. Un type sympa qui aspirait à la liberté, au libre-arbitre, et qui voulait rompre avec la promiscuité se retrouve étrangement prisonnier dehors, de ses sentiments, de sa fidélité à son frère, de son empathie pour la petite Rachel, d'un code de l'honneur caduque, et des décisions des autres. Avec, comme toujours chez le Corre une écriture puissante qui sait à merveille évoquer une Gironde écrasée par la canicule, la Gironde de l'intérieur, celle des marais, de l'Estuaire et de la rive droite. Pour les façades XVIIIème, les pulls sur les épaules et le Sauternais de Malagar, il faudra repasser plus tard ou lire Mauriac. Ici ce sont des vies à la semaine, marquées par l'intérim, les aides à la personne et les combines avec pour perspective d'autres semaines à tuer.
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A l'image de ce clébard fourbe sur la couverture, Franck, à sa sortie de prison, aurait dû se méfier.
Anticiper que cette famille avait tout de l'aimant à emmerdes.
La belle-famille de son frangin comme petit nid douillet pour repartir d'un bon pied, la vaste blague que voilà.
Le paternel vicelard, la daronne rebutante, la donzelle camée un brin cyclothymique et sa gamine totalement mutique donneraient presque envie de retourner en taule en chantant la mélodie du bonheur.
Le frérot aux abonnés absents pour une durée indéterminée et c'est dans cet univers vicié que notre Francky allait devoir prendre ses nouvelles marques.
Avec un starting-block aussi foireux, peu de chances de concourir à la réinsertion de l'année, on va pas se mentir.

Lentement, méthodiquement, avec délectation, Hervé le Corre lève le rideau sur un décor poisseux conjecturalement à l'origine du Misèèèère de Coluche.
De pauvres gens, il en est bien question.
Mais des paumés de la pire espèce.
Sournois, nocifs, nuisibles, de ces pseudos amis qui vous dispensent d'avoir des ennemis sans toutefois y parvenir.

Lentement, méthodiquement, Franck et le lecteur s'embourbent de concert, tombant de Charybde en Scylla, s'évertuant à transformer le jour suivant en cauchemar éveillé plus marquant que le précédent.

Sur le fronton de leur taudis délabré, ces miséreux auraient dû y inscrire, à l'instar de la Divine Comédie, "Laissez toute espérance, vous qui entrez".
Mais cela aurait certainement gâché le surprenant potentiel entubatoire de ce nid de crotales décérébrés.

Prendre les Loups pour des Chiens, c'est un peu comme sauter sans parachute.
On se dit "pour le moment, tout va bien, pour le moment,... ", jusqu'au crash final.

Un grand moment de noirceur.
Le Corre, encore !
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Ce qui est formidable, d'abord, chez le Corre, c'est qu'on se retrouve dans un lieu, un vrai.

La Gironde en été : les forêts de pin sombres, impénétrables, comme une herse de barreaux dressés contre le ciel métallique ; derrière, la plage martelée de chaleur, la grande flaque grondante d'un océan de plomb fondu ; plus loin, à l'intérieur, les baraques de ferrailleurs dans la poussière de la cambrousse, les mobil homes et les cahutes des Gitans dans la moiteur des marais, et, au milieu de nulle part, les hyper marchés où l'on pousse un caddie harassé dans un air enfin respirable - conditionné .
La ville au loin , Bordeaux, avec ses boîtes de nuit, ses restaurants, ses HLM,- ses caïds, ses dealers, ses tox's, ses voleurs repentis. La ville avec sa prison.
Et l'autoroute comme un trait d'union à péage et à gendarmes entre ces deux mondes.

La deuxième chose formidable, chez le Corre, c'est qu'on y rencontre des personnes à aimer ou à haïr, mais toujours de vraies personnes, de chair, de sang, de rancoeur, de folie, de blessures, de silence, de fidélité, ou de poisse.

Des braves gars comme Frank, faux dur sorti de taule, petit frère solidaire et meurtri qui n'a rien balancé et tout pris, jeune écorché vif revenu de zonzon et de ses illusions, mais qui veut croire à un autre départ, plein de frustrations et de sève : le pigeon idéal.

Des gosses comme Rachel, petite môme meurtrie, marquée, muette, murée vive sur son manque d'amour.

Des femmes comme Jessica, belle à se damner, folle, peut-être, à lier, douce et féroce comme une panthère.

Des Vieux, pathétiques, vachards, combinards, vendus ou repentis. Des Parents Terribles , Pépère Pervers ou Protecteur, Mémère sorcière.

La troisième chose formidable chez le Corre, c'est que, quand on y a bien cru, à ce lieu, qu'on en sent les odeurs, qu'on en entend les rumeurs, qu'on en touche la moiteur, quand on s'est bien attaché à ces gens, qu'on tremble pour, qu'on vibre avec ou qu'on gronde contre , voilà que le récit monte d'un cran : la réalité devient mythe.

Voilà qu'on se met à prendre les loups pour des chiens.

Voilà qu'on voit des chiens partout : des chiens de garde, des chiens fureteurs, des chiens cureteurs, des chiens d'attaque, des chiens de combat, des Cerbère aux Enfers, des chiens des Baskerville, des chiens de terreur ou de mort ; oui, mais aussi des chiots sans défense, des Chiens Perdus sans Collier, des chiens battus, des chiens de sa chienne, des chiennes en chaleur, des chiennes lubriques - et partout des chiens de meute, des chiens de curée, des chiens d'hallali.

Et des chiens crevés dans une chienne de vie.

Pas un mot de plus sur le piège à loups qui referme sur nous ses mâchoires d'acier : on est enchaîné, happé, avalé, engouffré. Pas moyen de respirer… jusqu'à la dernière page.

Parce que la quatrième chose formidable chez le Corre c'est le style.

Ciselé, fulgurant, brutalement poétique, doucement violent, magiquement évocateur, sensuel ou déchirant, toujours sobre, toujours original. Évitant les clichés si nombreux dans le polar qu'ils en deviennent des "topoï"…

Un style qui donne soif, qui donne chaud, qui fiche les boules, qui donne la rage - un style qui déménage !

Encore une fois, merci à Pecosa qui m'a toujours fait découvrir des bouquins formidables –les livres de Javier Cercas entre autres- et à qui je dois la découverte de le Corre, le breton bordelais, un grand, un très grand auteur de roman noir.

Un auteur formidable!


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Franck 26 ans a passé plusieurs années derrière les barreaux pour un braquage.
Il est accueilli à sa sortie de prison par Jessica, l'amie de son frère Bastien parti en Espagne pour affaires...En attendant son retour, il est hébergé dans le Sud de la Gironde par les parents de Jessica : Roland et Simone, des parents bruts de décoffrage, Rachel leur petite fille mutique et un chien molosse.
Franck privé de repères se retrouve plongé dans leur univers de mouise, de gouaille, de trafics, de magouilles et de débrouilles...
Hervé le Corre nous plonge dans une atmosphère moite, glauque et animale où grouille un nid de crotales.. le chien inquiétant veille d'un oeil. Rachel voit tout mais ne dit rien.. Franck se laisse guider par la main de Jessica...L'attente est plombante et inquiétante et les scènes d'action et d'hystérie décoiffantes. La fin fantastique...
Les personnages déclassés du terroir ont de la consistance, une bonne descente, de la gueule. On marche sur des braises dans un milieu borderline où il suffit d'un regard, d'une étincelle pour que ça pète.
J'ai adoré... Prendre les loups pour des chiens !
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« Et si Hervé le Corre était notre meilleur auteur de romans noirs? » C'est par cette question que débute le portrait que l'Obs consacre à l'écrivain. Et la question est pertinente car l'auteur récompensé pour ses précédentes oeuvres vient de publier un roman noir d'une très grande force.

Voici en quelques mots l'argument du roman : à sa sortie de prison, Franck attend que son frère Fabien vienne le chercher. Mais c'est Jessica, son amie, qui le récupère et qui lui annone qu'elle l'hébergera chez ses parents le temps que Fabien revienne d'Espagne. Sans le savoir, Franck s'installe dans « un nid de couleuvres aux prises avec des crotales ».

Alors oui, nous sommes en plein roman noir. L'ambiance est étouffante, les personnages sont écrasés par la canicule. L'action se déroule dans une ferme isolée à quelques kilomètres de Bordeaux, autant dire au milieu de nulle part, tant la lande encercle et ensauvage tout. L'intrigue est noyée dans le mystère : un frère absent et injoignable, des non-dits, les combines, les histoires inextricables… La violence peut se déclencher à tout moment, imprévisible et brutale. le livre est peuplé par la faune de nos bas-fonds : dealers, truands, trafiquants. Il y a des soupçons de fantastique, certains lieux semblent imprégnés de magie. Les événements s'imposent d'abord à Franck qui devra s'extraire de ces rouages pur reprendre sa destinée en main. L'image du chien symbolise les peurs et les blocages que Franck devra surmonter pour parvenir à la résilience.

J'ai été marqué par la justesse et la puissance du récit. Il y a une multitude de détails criants de vérité, avec notamment les mots, les vêtements et les comportements des personnages qui démontrent la qualité d'observation et le souci de réalisme de l'auteur. Même les scènes de sexe sont crédibles, c'est dire. L'histoire m'a captivé et je me suis surpris à lire les passages d'une grand intensité à toute allure, en sautant des phrases.

Hervé le Corre signe un roman noir et puissant d'une très grande qualité. Et s'il est absurde de déterminer s'il est oui ou non le meilleur de son genre, il est certainement un auteur majeur du polar français.
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Excellent !!
Je viens de lire je ne sais où que Bordeaux est la ville en France où il fait le plus bon vivre...Après deux livres de le Corre à Bordeaux et en Gironde, j'ai comme un doute...
Des sables, des marais, des forêts de pins effrayantes, des fermes abandonnées en ruine, des mobiles homes décatis, une chaleur moite et écrasante, un soleil de plomb entrecoupé d'orages furieux...Manquent plus que les alligators et c'est la Louisiane pourrie de True Detective...
En tout cas, le Corre est un pro de l'ambiance, c'est génial. On s'enfonce avec lui dans les forêts d'épineux, dans une ferme habitée par une famille toxique. Franck, 26 ans, sort de prison. Il y est resté cinq ans pour un braquage avec son frère. Il est accueilli dans la ferme par la copine de son frère, Jessica. Son frère est parti en Espagne pour "affaires". Il doit l'attendre ici. Quelle famille ! le chien, monstrueux, kingien, les grands-parents, au pastis dès le petit-déjeuner, vivant d'expédients, d'embrouilles, la fille, Jessica, trop belle, trop folle, et la petite-fille Rachel, qui en a déjà trop vu à huit ans.
Personnages qui semblent vivre devant vous, décor angoissant, parfois presque fantastique, plages et stations des Landes telles que vous ne les avez jamais vues, mais encore plus réelles que réelles, intrigue noire, noire, il n'y a plus d'espoir, ce livre est vraiment une grande réussite.
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« C'était un temps déraisonnable
On avait mis les morts à table
On faisait des châteaux de sable
On prenait les loups pour des chiens
Tout changeait de pôle et d'épaule
La pièce était-elle ou non drôle
Moi si j'y tenais mal mon rôle
C'était de n'y comprendre rien».

Hervé le Corre n'a pas seulement emprunté au poème « Est-ce ainsi que les hommes vivent », d'Aragon, l'expression qui lui a servi de titre pour ce nouveau roman et cet extrait placé en exergue, mais toute une ambiance d'espoir et de désespoir entremêlés, d'une fatalité contre laquelle on arrête de lutter parfois. Il y a aussi dans Prendre les loups pour des chiens une énième mais ô combien réussie variation sur un thème ultra classique du roman noir.
Franck sort de prison. Six ans de placard pour un braquage et surtout pour avoir refusé de donner ses complices. À sa sortie, 60 000 euros doivent l'attendre, et aussi son frère, Fabien. Il n'y a finalement ni l'un ni l'autre. C'est Jessica, la petite amie de Fabien, celui-ci étant parti conclure une affaire en Espagne, qui attend Franck devant la maison d'arrêt de Gradignan. La très belle Jessica, sur laquelle Franck, après ses années de prison jette bien évidemment un regard concupiscent et qui va rapidement s'offrir à lui avant de le rejeter… puis de revenir, alternant mutisme menaçant, crises d'hystérie, littérale prédation sexuelle dont Franck accepte volontiers d'être la victime. Jessica vit dans une maison isolée de la campagne girondine, dans la grande Lande, loin des centres urbains et de la côte, où, dans la chaleur écrasante de l'été, et la touffeur des pins, Franck va se trouver confronté aux parents de la jeune, vieilles carnes vivotant de petits trafics de bagnoles en cheville avec des gitans pas commodes, mais aussi à la petite Rachel. La fille de Jessica a huit ans, une bouille d'ange et une défiance presque animale des adultes ; elle est aussi mutique et chien impressionnant ne la quitte pas. À partir de là, bien entendu, tout va partir à vau-l'eau pour Franck. Coincé en attendant le retour de son frère, repiquant d'autant plus vite aux conneries qu'il n'a rien d'autre à faire, il se laisse entrainer, pour Jessica, mais aussi au fond pour Rachel, dans une vengeance qui le dépasse.
Tout cela pourrait sembler bien banal. Mais les archétypes sont faits pour être dépassés et c'est ce que fait ici Hervé le Corre. Il les dépasse en donnant une consistance peu commune à ses personnages tout en prenant soin de leur laisser une part de mystère qui, ici, relève souvent de la menace sourde et rend l'ambiance toujours plus pesante. Il les dépasse aussi par une écriture qui vaut à elle seule, au-delà de l'intrigue, que l'on lise ce roman. D'aucuns, on le voit ici ou là dans certaines chroniques, disent d'elle qu'elle est une écriture « à l'os ». Oui, elle est en quelque sorte dépouillée, mais il ne faut certainement pas y voir une quelconque sècheresse. La singularité de cette écriture, c'est bien que justement elle n'est en rien sèche mais qu'elle dit beaucoup, qu'elle dit bien, en peu de mots, méticuleusement choisis et en évitant de tomber dans un lyrisme factice. Si elle est « à l'os », il y a aussi toute la moelle avec.
On ne cherchera donc pas non plus de démonstration. Les actes des personnages se suffisent à eux-mêmes pour dire ce quart-monde ignoré, la débrouille pour survivre, la facilité avec laquelle on replonge. Dans cet environnement toxique, sous cette chape de plomb posée moins par la haine que par des instincts primaires de survie selon lesquels l'étranger ne vaut que tant qu'il peut être exploité – et Franck, au fond, n'a rien d'autre à faire que de se plier à cela et d'accepter au moins provisoirement son sort – il y a aussi Rachel comme le rappel avec les souvenirs d'enfance récurrents de Franck, qu'un autre chemin peut être pris au bout duquel il y a même parfois de la lumière.
Il y a dans Prendre des loups pour des chiens une sorte de quintessence du roman noir qui rappelle incontestablement parfois Jim Thompson sans en être une resucée. Et surtout Hervé le Corre, après L'homme aux lèvres de saphir, Les coeurs déchiquetés et Après la guerre, semble revenir à la veine plus noire sociale de ses débuts – on pense nécessairement parfois à du sable dans la bouche – pour, riche de son expérience d'écrivain et des multiples champs d'écriture qu'il a explorés dans ses derniers romans, la rendre plus fine, moins démonstrative et donc plus puissante. Il montre aussi que l'on n'est pas forcé de réécrire indéfiniment le même livre. Lui, en tout cas, arrive à nous surprendre à chaque fois, et c'est précieux.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Voilà, je viens de lire la dernière page et je me dis que,comme Franck,je me suis bien laissé balader par un diable de bon écrivain.Le roman noir porté au sommet par une écriture sans failles,précise, envoûtante.Des lieux et des personnages hors normes dont la description frôle le génie. Ils sont peu nombreux ces personnages mais tous degueulent de violence,de haine,de non dits destructeurs.Les lieux sont pleins de mystère,de dangers aussi.C'est une sensation incroyable qui m'habite et je ne peux m'empêcher de rêver à un avenir pour Franck,son père et Rachel.
Je ne peux que vivement recommander ce livre aux amateurs du genre,non dépressifs de préférence. Monsieur le Corre,vous êtes brillant et je crois que je ne suis pas le seul à penser ainsi.Merci à vous.
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Pas un billet sur ce roman ? Comment est-ce possible ? Comment a-t-il pu échapper à la curiosité des amateurs de romans noirs ? Car pour être noir, il est noir.

Franck sort de prison. Il a pris cinq ans pour un braquage. Contrairement à ce qu'il attendait, ce n'est pas son frère qui vient le chercher à sa sortie mais Jessica, la copine de Fabien.
Cette fille est une bombe. ("gaulée comme un avion de chasse" comme dirait un ami à moi)
Elle l'emmène dans la ferme pourrie où elle vit avec ses parents et sa fille.
Le Vieux, alcoolo, maquille et retape des voitures pour le Gitan. La mère est une femme usée, revêche qui ne fait aucun effort pour cacher son hostilité. Enfin, il y a Rachel, une fillette de 8 ans, silencieuse, trop silencieuse, qui observe les adultes et cherche peut-être à déchiffrer ce qu'ils taisent.
C'est là, dans ce dépotoir, qu'il va devoir attendre le retour de son frère alors que règne une chaleur d'enfer. Embarqué dans des histoires auxquelles il ne comprend rien, il est littéralement aspiré dans une spirale infernale.
On est saisi d'emblée par l'ambiance glauque, pesante et moite mise en place par Hervé le Corre. le point de vue adopté est celui de Franck que 5 ans de prison ont déconnecté de relations sociales normales. Il est un peu perdu mais il y a autre chose…
Il y a des non-dits, des murmures échangés, une violence latente et surtout Jessica… Beauté solaire, provocante par instants, fille inaccessible, indifférente à d'autres, elle est surtout imprévisible.
Balloté par des sentiments contradictoires, des questions sans réponses, ses souvenirs douloureux, Franck devra faire face à une meute dangereuse dont le molosse de la maison n'est finalement qu'un piètre spécimen.
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En sortant de prison, il n'aspirait qu'à une chose, la tranquillité et aussi la vie trépidante d'une ville, où enfin libre de ses actes, il pourrait mater les jambes des filles, perdre son regard dans leur corsage et retrouver Fabien son frère, avec qui il s'entend si bien et avec qui il a commis un braquage cinq ans plus tôt, braquage pour lequel lui seul s'est fait pincer.
Il attendait Fabien, mais c'est la petite amie de ce dernier, Jessica, une femme infiniment désirable, et nymphomane et vénéneuse qui se présente à lui et on pourrait même dire qui s'offre à lui. Franck, subjugué, la suit là où elle veut bien l'emmener, en l'occurrence dans sa famille, en attendant le retour de Fabien qui a dû partir en Espagne pour affaires.
La maison familiale, perdue dans une sinistre forêt de pins, est tout sauf accueillante et se trouve dans une sorte de décharge, au milieu d'épaves de bagnoles et de tout un fatras de pièces rouillées où rôde un molosse hargneux, gardien des lieux. Les occupants en sont tout aussi avenants. le père, alcoolique est de mèche avec des trafiquants de voitures volées. Quant à la mère, clope au bec en permanence et regard torve, elle a tout de la sorcière. Seul rayon de soleil, la petite Rachel, enfant trop silencieuse à laquelle Franck va vite s'attacher. Tout cela baigne dans la chaleur poisseuse et gluante de Juillet qui avachit les corps et amollit les esprits.
Misère sociale, mais aussi misère des coeurs et noirceur des âmes.

Maintenant que ce décor désespérant est planté, le pire peut arriver et le jeu de massacre va commencer.
Et voilà qu'Hervé le Corre se déchaîne et, en maître du roman noir qu'il est, enchaîne les péripéties dans un paroxysme de violence où Franck, à son corps défendant, se voit entraîner.
Pas de temps mort pour cette plongée vertigineuse dans les errances de ces marginaux qui vivent d'expédients et de minables trafics, où l'auteur débusque la bêtise, la cruauté, la fureur, et la folie, tout en laissant parfois entrevoir "l'aube comme une sorte de nouvelle chance donnée chaque jour".
Une étude passionnante menée de main de maître par un auteur pétri de talent qui s'y entend pour restituer l'existence poisseuse de ceux qui ne peuvent ou ne veulent se couler dans le moule social habituel du commun des mortels.
Une oeuvre magistrale de noirceur dans laquelle, selon Baudelaire, "l'Espoir,
Vaincu, pleure, et l'Angoisse atroce, despotique,
Sur (le) crâne incliné plante son drapeau noir."
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