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EAN : 9782262033354
352 pages
Tempus Perrin (25/08/2011)
3.67/5   3 notes
Résumé :
Un constat cinglant et profond des maux dont souffrent la gauche et la société française.
De la révolution matricielle de mai 1968 jusqu'aux controverses actuelles et à l'" affaire DSK ", Jean-Pierre Le Goff dissèque la décomposition d'une gauche qui masque son impuissance par un discours incantatoire, écartelé entre modernisme " tendance " et surmoi radical issu de son vieux complexe envers son aile révolutionnaire.

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Le Goff Jean-Pierre - "La gauche à l'épreuve : 1968-2011" - éditions Perrin, 2011 (ISBN 978-2262033354)

Il s'agit ici, pour une large part, d'un recueil d'articles plus ou moins remaniés pour l'occasion, qui avaient été publiés antérieurement dans des revues entre 2000 et 2010, avec ajout d'une introduction et d'une conclusion.

En matière de discours politique, il est toujours prudent de commencer par identifier la personne qui parle ou écrit, de façon à relativiser le propos. Né en 1949, l'auteur appartient à cette génération qui a réellement "fait mai-1968" et la suite, en s'engageant dans un groupuscule maoïste, en arrêtant ses études pour aller travailler "sur le terrain", en se rattrapant ensuite aux branches par le détour d'un emploi de formateur d'adultes, pour finalement revenir dans la course universitaire bien-pensante et se recaser dans un poste de professeur d'université, avec bien entendu un rattachement au CNRS, alma mater de tout ce sérail de "penseurs critiques et engagés" qui garnissent une page sur deux dans le quotidien "Le Monde".
Il appartient à cette catégorie de gens qui, dans notre doux pays, continuent de penser la vie politique en termes d'affrontement entre "la droite" (les méchants arriérés) et "la gauche" (les gentils porteurs du progrès) : aujourd'hui encore, l'auteur tient absolument à s'identifier comme un homme "de gauche", ce qui est un standard dans le monde universitaire franchouillard (cette manie de ces gens de brandir leur drapeau...).
Toutefois, il met en avant sa particularité, qui n'est pas mince puisqu'elle consiste à entreprendre une critique des croyances traditionnelles de ce qu'il identifie comme "la gauche". Car notre auteur a découvert que le discours, la phraséologie, le mode de pensée de ce qu'il persiste à nommer "la gauche" ne correspond décidément plus à grand-chose.

Autre bémol : il va de soi que, dans ses articles, il n'apostrophe que des auteurs et des publications émanant de cerveaux catalogués comme appartenant à la même obédience : tout particulièrement dans le milieu universitaire français, ce que l'on appelle encore "la gauche" ne discute en général qu'avec elle-même. Mais tout de même, notre auteur ose (horresco referens !) citer fugitivement Raymond Aron, François Nourissier ou même Georges Bernanos et Charles Péguy ! Incroyable audace dans le Landerneau : il ose désavouer "l'héritage des héritiers" de Bourdieu ! Carrément ! Diantre ! Lorsque l'on connaît la pesanteur et l'emprise de l'idéologie dominante dans le milieu universitaire franchouillard, cela vous donne plus de frissons que le grand saut à l'élastique !
Que l'on se rassure cependant, il ne s'agit là que d'incartades très brèves, toutes les autres références respectent l'Index librorum prohibitorum et expurgatorum en usage implicite dans les chapelles sanctifiées par le CNRS, l'EHESS et tutti quanti.

Le débat d'idées n'est pas une pratique franchement répandue dans notre bon pays où le salutaire anathème de type papiste est encore de pratique courante – ça simplifie les échanges et évite d'attraper des maux de tête. Tout de même, pour n'être pas déçu par cette lecture, il convient donc ici de prévenir la lectrice et le lecteur qu'elle et il a entre les mains un ouvrage émouvant, si ce n'est poignant, dans lequel un auteur "de gauche" découvre avec quelques décennies de retard (trois ou quatre) les sérieuses réserves qu'émettaient – il y a vilaine lurette – des auteurs classés "à droite" (ouh ! les vilains pas beaux) par les gens "de gauche" (si vous ne suivez plus ce balancier subtil, inspirez un bon coup et reprenez depuis le début, oups !).

Une fois ces deux bémols admis, il reste encore à préciser le titre (qui ne doit pas émaner de l'auteur lui-même mais probablement de son éditeur) pour comprendre l'intérêt de ce recueil, dont le leitmotiv est "comment en est-on arrivé là ?". le lecteur soupçonneux et la lectrice espiègle de se demander "c'est où, là ?" : d'après l'auteur, nous en sommes arrivés tout doucettement à ce qu'il appelle "la barbarie douce", "la langue de caoutchouc", l'inculture et "le fil rompu des générations".
A mon humble avis, c'est d'ailleurs le titre de ce dernier article du recueil qui aurait pu servir de titre général, en le retouchant un peu, genre "comment ce que l'on appelle encore la gauche a-t-elle contribué à casser le fil générationnel ?" mais ce serait bien trop long et peu vendeur sur une page de titre.

L'auteur revient sur son analyse approfondie du "mouvement de mai 68" en y ajoutant – chose plus originale – une analyse plus poussée des années immédiatement post-soixante-huitardes (1968-1973 grosso modo), pour passer par ce qu'il nomme le "trou" des années 1980 (ah ! les années modernistes à la Minc-Fabius-Tapie, l'hallucinante émission "Vive la crise" d'un Montant grassement payé pour entonner l'hymne du "débrouillez-vous pour vous enrichir", en février 1984) et arriver à la débâcle actuelle entre "confusion" et "bricolage identitaire".

Pour conclure, relevons que le discours, loin d'être ennuyeux, est plutôt enlevé, et parsemé de moments savoureux : (pp. 240-241)
"Un rapport remis à la Haute Autorité de lutte contre les discriminations fait porter le soupçon sur l'un des fleurons de la poésie française : « En français, le poème de Ronsard Mignonne allons voir si la rose est étudié par tous les élèves. Toutefois, ce texte véhicule une image somme toute très négative des seniors. Il serait intéressant de pouvoir mesurer combien de textes proposés aux élèves présentent ce genre de stéréotype, et chercher d'autres textes présentant une image plus positive des seniors pour contrebalancer ces stéréotypes.»
Historiette qui pourra toujours servir pour égayer la table du Réveillon !

Un livre à lire avec beaucoup de précautions, mais qui, finalement, mérite le détour, à l'heure où un énième gouvernement "de gauche" accélère la marche vers la "barbarie douce"…
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