AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Monde Libertaire (Autre)
EAN : 9782379810022
62 pages
Editions du Monde Libertaire (26/02/2021)

Note moyenne : /5 (sur 0 notes)
Résumé :
Tokyo, 1911. Une anarchiste écrit ses derniers mots dans une prison pour femme. Sugako Kanno (1881-1911), condamnée à mort avec vingt-quatre compagnons, nous laisse un témoignage vibrant entre nostalgie et espoir. Libre, féministe, anti-autoritaire, elle mène son combat dans un Japon qui ressert ses griffes sur le mouvement anarchiste.

Plus qu’une découverte de ses textes, Aurélien Roulland nous fait voyager au côté de cette militante intrépide, entre... >Voir plus
Que lire après Sugako Kanno, les derniers mots d'une intrépideVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Le mouvement anarchiste japonais nous est surtout connu grâce à des sources anglo-saxonnes, aussi, une publication, même modeste – une cinquantaine de pages – sur le sujet est toujours fraternellement reçu.

Existent toutefois les travaux de Christine Lévy, de Philippe Pelletier, et on peut également regarder du côté des « mal rasés » de Jean-Manuel Traimond.
Ce nouvel apport dans la collection Graine d'ananar, sur Sugako Kanno, vient enrichir une collection de portrait de figures anarchistes et rappeler que le Japon n'était pas, fin XIX°-début XX°, en dehors du monde et des luttes pour l'émancipation et la révolution sociale.

Sugako Kanno, née en 1881 et condamnée à mort en 1911, fut une militante et journaliste, pacifiste, féministe : « Insurgez-vous, femmes ! Réveillez-vous ! Tout comme la lutte dans laquelle les travailleurs s'engagent contre les capitalistes pour détruire le système de classe, nos revendications de liberté et d'égalité avec les hommes ne seront pas facilement gagnées, simplement parce que nous le voulons ; elles ne seront pas gagnées si nous n'élevons pas nos voix ; elles ne seront pas gagnées si aucun sang n'est versé. »
Radical l'anarcho-féminisme de Sugako Kanno ! dans cet article de 1906, et pour qui l'action directe va s'imposer, comme chez beaucoup à cette époque.
Aurélien Roulland nous rappelle ces éléments dans son avant-propos biographique.
Sugako Kanno, victime d'un viol à son adolescence, rencontre les idées socialistes, devient vite journaliste, combat l'institutionnalisation de la prostitution, s'insurge contre la guerre russo-japonaise (1904-1905), vit librement ses amours. Activiste forcenée, elle crée une revue Sekai Fujin (femmes du monde), un journal Jiyu shiso (Pensée libre) avec son compagnon, Kôtoku Shûsui, et fera pour ses activités ou ses écrits des séjours en prison. Kanno est gagnée à l'idée qu'un geste violent contre l'empereur, détenant et symbolisant le pouvoir d'état, sera l'étincelle dont a besoin le mouvement. le projet ne se fera pas et le groupe sera arrêté.

Le petit volume est ensuite composé d'extraits du journal de Kanno, écrits lors de son incarcération dans la prison pour femmes de Tokyo jusqu'à son exécution en janvier 1911.
Textes extrêmement touchants puisque ce sont les dernières pensées (« La nuit dernière j'ai pensé à ce qui devrait être fait de mon corps après ma mort »), les dernières rencontres au parloir (« Je me souviens à quoi Sakai et Osugi ressemblaient lorsque nous étions ensemble durant le procès de l'incident du drapeau rouge dans la salle trois de la cour d'appel. Aujourd'hui ils n'avaient pas l'air différent. Tous deux sont vigoureux et en bonne santé »), les derniers mots qu'écrit une femme condamnée à la pendaison pour haute trahison (soit le projet d'assassiner rien de moins que l'empereur) : « Depuis le début je craignais que ce ne soit le cas, mais le procès fut conduit d'une façon si inattendue et méticuleuse que j'ai commencé à espérer que ce soit relativement juste. Les verdicts sont tombés comme un choc. J'étais si furieuse et bouleversée que j'ai ressenti comme si mon corps tout entier prenait feu ».
Procès expéditif, mené à huis clos. Vingt-quatre anarchistes seront condamnés à mort ; la sentence sera exécutée pour douze d'entre eux.

Petit bémol pour le manque de précision sur l'origine du texte. Ce journal de prison, intitulé Shide no michikusa - herbes sur la route de la mort - a été publié en 1950 (cf notice du dictionnaire de Louis Frédéric, Robert Laffont, 1996). Mais, de quelle édition viennent les textes reproduits ? Édition japonaise ? Anglaise ? Traduction faite par ? C'est un détail, mais...
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Phtisique, exténuée, Suga ne se fait aucune illusion sur l'issue du procès. Elle demeure impassible aux accusations, allant même jusqu'à rire au nez de la cour et de ses accusateurs, de cette parodie de justice. A sa dernière venue à la barre, fière, le regard haut, elle déclare à ses bourreaux "je mourrais sans gémir. C'est mon destin", et encore "je mourrais en victime sacrifiée. C'est mon destin".
Puis le verdict tombe. Glacial. Compact. Volcanique. De l'andésite, du basalte. Le mont Fuji ! Kanno et vingt-trois autres de ses co-accusés sont condamnés à mort. Pour autant, les anarchistes ne faiblissent pas devant l'ennemi triomphant et accueillent la sentence aux cris de "Banzaï !" et "Vive la révolution !". Douze d'entre eux verront leur peine commuée en prison à vie. En sortant de la salle, se retournant Suga s'adresse à ceux qui l'entouraient et leur lance avec douceur "Nous vous demandons pardon de vous avoir dérangé !"
Commenter  J’apprécie          00
Depuis le début je craignais que ce ne soit le cas, mais le procès fut conduit d'une façon si inattendue et méticuleuse que j'ai commencé à espérer que ce soit relativement juste. Les verdicts sont tombés comme un choc. J'étais si furieuse et bouleversée que j'ai ressenti comme si mon corps tout entier prenait feu.
Mes pauvres amis, mes pauvres compagnons ! Plus de la moitié d'entre eux étaient d'innocents témoins ayant été impliqués dans les actions de cinq ou six d'entre nous. Juste parce qu'ils nous fréquentaient ils sont maintenant sur le point d'être sacrifiés de cette monstrueuse manière. Simplement parce qu'ils sont anarchistes, ils sont sur le point d'être jetés par la falaise de leur mort.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : anarchieVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (12) Voir plus




{* *}