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EAN : 9782955155134
88 pages
Garamond (15/10/2017)
3.75/5   6 notes
Résumé :
Bréchéliant nous conte une intrigue médiévale. La scène se passe dans un château archétypal, en lisière d’une forêt, seuil de l’inconnu, à une époque qui pourrait être le XIIe ou le XIIIe siècle. Dans cet univers traversé de passions muettes, où le lointain bruit du monde est amorti sous le souffle de la prière, l’apparition d’un mystérieux voyageur précipite le drame...
Variation sur l'Amor de lonh de Jaufré Rudel, ce récit «breton » fait la part belle ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Bréchéliant est une fable où l'auteur s'est aventuré vers le mythe originel, la forêt du secret, l'eau de la légende vive. Car l' » amour de loin » des troubadours ou de Lancelot du Lac est une habile métaphore, non seulement de la lecture, ce périple immobile, mais de la nature même du désir, qui est toujours un au-delà, toujours sur l'autre rive, de l'autre côté de la glace, dans une attente qui signe conjointement l'exacerbation et l'abolition du temps. À l'image de l'errance infinie du Chevalier, ou de la veille interminable de la Dame de la plus haute tour, dont nous trouvons dans ces pages une nouvelle incarnation émouvante.
L'intrigue de Bréchéliant est aux antipodes d'une histoire qui se conterait – et se compterait – en quelques mots. La trame, nous le disions, est tout entière dans le décor même de la chronique, dans les bornes milliaires de la vie quotidienne aux jours lointains d'Excalibur et de la dormition du roi Arthur. Paradoxalement, l'atmosphère fait songer à l'un des récits les plus contemporains de Julien Gracq, Un balcon en forêt (1958), pendant la « drôle de guerre ». Dans l'incertitude et l'indécision qui marquèrent le préambule de la Seconde Guerre mondiale. On observe (on s'observe) et on attend. Comme l'oreille musicale guette le retour du leit-motiv. le blockhaus – nouvelle métamorphose du château fort – est l'armure et le belvédère. le havre aussi, où les yeux et le coeur couvent leurs songes, caressent leurs évasions. La durée prend une autre substance, comme un tapis de feuilles qui s'épaissit jour après jour. Et comme une lande s'abandonne au regard, sommeilleuse.
Dans Bréchéliant, le lecteur retrouvera toute la densité littéraire, et la diversité d'Annick le Scoëzec Masson. Dans une langue tantôt rêveuse et chatoyante, tantôt terrienne et savoureuse, toujours allusive à ce point de fuite du temps et de l'espace qui est le champ de notre mémoire et le terreau de nos désirs – dont l'origine remonte à l'étoile, justement, le sidus, la constellation sidérante. Écoutons la conteuse nous convier à l'assemblée des elfes, dans la clairière des géants d'écorce et de mousse, autour du feu de joie qui renaît chaque nuit. Écoutons la nostalgie et le vouloir, le passé et le futur qui trouvent leur lieu de rendez-vous, aurait dit Carlos Fuentes, dans la « consécration de l'instant, scellée par la fable des origines ». Oui, pour toujours et à jamais, il était une fois...
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Ce roman est comme une tapisserie de haute lice dont la chaîne serait l'histoire de la dame, recluse dans la tour d'un château breton depuis le départ de son seigneur aux Croisades, avec, pour seules compagnes, sa lectrice, Ariane, qui l'initie à la poésie occitane et à l'amour courtois, et sa belle-soeur, confidente, amie et complice d'un terrible secret qui l'empêche de trouver le repos de l'âme et rend vain les élans mystiques qui occupent son esprit tourmenté. La seconde partie du cadre est, bien sûr, occupée par l'arrivée d'un étrange naufragé qui rompt un équilibre précaire, accélère et dénoue le drame déjà en germe dans le huis clos de la première partie.
Quant à la trame de cette tapisserie à laquelle je me plais de comparer Bréchéliant, elle serait composée d'une multitude de références culturelles et littéraires, d'allusions aux usages et traditions de Bretagne, de légendes et de poèmes qui tiennent du monde celte aussi bien que de la lointaine Occitanie. L'ensemble donne un entrelacs de fils, merveilleusement servi par une langue fine et ciselée qui a su créer une atmosphère de mystère et de langueur et suggère le passage des saisons et la profondeur de la terre de Brocéliande, avec ses êtres énigmatiques, ses secrets maléfiques et la rumeur infinie de l'océan en toile de fond.
En outre, comme une tapisserie a besoin d'être admirée à plusieurs reprises et vue de loin et de près pour pouvoir être appréhendée dans toute sa richesse, ce roman gagne à être lu plusieurs fois, la première lecture vous entraîne dans un monde étrange et déroutant de mélancolie, d'inquiétude, et de cruauté, les suivantes éclairent certaines énigmes, répondent au fur et à mesure aux questions posées par le déroulement du drame et permettent de méditer sur quelques sujets choisi, tel celui de « l'amour de loin » au coeur des échanges entre la dame et sa lectrice.
Bref un beau roman, un petit bijou à garder précieusement.
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"Bréchéliant" est un récit poétique qui tente de recréer l'épaisseur du temps médiéval perçu depuis l'intimité de l'univers féminin. Il ne faut pas y rechercher les ingrédients et les ressorts de la "fantasy". C'est un roman de la solitude et de l'attente, habitées par les errances du sentiment. Les légendes de Brocéliande constituent le cadre imaginaire, la matière où s'inscrit cette attente, loin du vaste monde, de son écume, de son bruit et de sa fureur...
Rien n'est évident dans “Bréchéliant”. Tout est allusif, feutré, à lire entre les lignes, mais néanmoins violent : le Val sans retour où la fée Viviane enfermait les amants infidèles et les condamnait à errer pour l'éternité, la fontaine de Barenton et son perron d'où jaillissait le feu quand on y jetait de l'eau, les démons “korriganes” qui venaient hanter les âmes… La forêt toute proche est, dit-on, hantée. "Bréchéliant" bruisse de ces voix multiples qui en colportent l'effroi. On ne sait quelle forme y prend le risque, mais on s'y risque sûrement au péril de sa vie . Car on y meurt, dit-on, à moins que l'on y trouve la révélation, la découverte d'une autre dimension de l'existence, tellement forte que l'aventure valait bien que l'on s'y hasardât… Et puis, il y a le croisement de toutes ces formes “d'amour de loin” mises à l'honneur par la lyrique des troubadours… Quand la tradition occitane rejoint celle des chevaliers d'Arthur...
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Bréchéliant ne m'a pas vraiment passionnée. J'ai d'abord pensé qu'il s'agissait d'un conte merveilleux sur la Matière de Bretagne, ce dont je me réjouissais, mais il n'en est rien.
En fait, il ne se passe quasiment rien, hormis dans les dernières pages. On suit une Dame, qui vit recluse depuis le départ de son mari, parti embrasser la chevalerie. Elle se consacre à la religion et n'accepte pour seule compagnie qu'Ariane, qui lui lit des contes, et Violaine, sa belle-soeur.
L'arrivée d'un étranger retrouvé à moitié mort va rompre cet équilibre.
Ce texte s'inscrit dans la lignée de l'Amor de Lonh de Jaufré de Rudel. L'écriture est très soignée, très poétique, et si je lui trouve cette qualité, je regrette aussi certains passages un peu brouillons.
Une découverte intéressante, pour laquelle je remercie Babelio et les éditions Garamond!
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J'ai aimé cet univers étrange, fantastique et mystique. le regard de deux femmes ravivé par l'arrivée de l'inconnu, la part laissée belle à l'imagination avec tous les personnages qui gravitent autour des deux châtelaines. Et la forêt présente, un peu enchantée. Et ce langage fleuri qui sent bon les onguents, et le froufrou des soieries, le tout teinté de mélancolie.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
- Comme il fait froid, dit la dame, comme il fait froid toujours !
- Voulez-vous qu’on ajoute à votre chambre un brasero ? Bientôt finit l’hiver...
- Non, rien ne saurait mieux réchauffer mon âme que vous entendre. La fleur de givre à ma fenêtre ne m’est alors plus décembre, mais nez espiègle du printemps. Chantez, Ariane, chantez encore pour que mon cœur dégèle, pour que le sang à nouveau en moi coule ! Chantez ce poème...
La suivante prépara sa vielle en courbant le genou. Elle tendit les cordes sous l’archet.
- « Tant ai le cœur plein de joie, que tout pour moi change de nature. Fleur blanche, vermeille et claire, me semble la froidure... Tant au cœur d’amour, de joie et de douceur, que l’hiver me semble une fleur et la neige verdure ! »
Les notes s’évaporèrent après avoir tenu un moment dans l’air.
- Oui, parlez-moi de lui, de ce troubadour, de la légende..., soupira la dame.
- Celle du cœur mangé ?
Elle tressaillit :
- Oh, non, par pitié ! Tant de finesse, côtoyer tant de cruauté !
- C’est jalousie, Madame ! Jalousie qui retourne en nous le loup prêt à tout dévorer... Nul n’en est à l’abri et les médisants sont légion.
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On dit que le château de Tréhogonteuc fut bâti en une seule nuit par des êtres venus des profondeurs de la forêt. Ce n’étaient pas de ces créatures qui peuplent sources ou feuillages, au front bombé sous la résille, joncs graciles des bords de rivière. Ennemies du soleil, les korriganes se matérialisaient dans les émanations des marais lorsqu’une clarté parvient à fendre la ténèbre qui pèse sur les fourrés, de ce côté-là du bois. Elles jaillissaient alors avec des cris, vacillaient un instant au-dessus des tourbières, puis franchissaient à la vitesse de l’éclair les landes, les vallons, les taillis et les hautes futaies de Bréchéliant, pour planter leurs griffes dans les tempes des endormis, et leur ravir le peu d’âme dont ils se souvenaient. Après s’en être fait des colliers, après avoir tourné sur elles-mêmes comme des louves en ouvrant grandes leurs bouches folles, elles repartaient avant les lueurs du jour, vers les bas-fonds où elles enfouissaient leur butin à jamais.
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