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Critique de XL


XL
24 septembre 2011
Lisbonne, durant le mois de septembre 1985, celui de la mort d'Italo Calvino et du tremblement de terre à Mexico (de magnitude 8,2)Vincent Balmer, un ancien reporter de guerre d'une quarantaine d'années, et Antonio Flores, un photographe de dix ans son cadet, se sont connus à Paris. Relations de travail plutôt qu'amis, ils ont collaboré à un ouvrage dont l'un a écrit les textes accompagnant les images de l'autre et ils ont de l'estime pour leur travail respectif.
Fuyant une histoire d'amour à sens unique, Vincent s'est installé à Lisbonne depuis quelques mois comme correspondant de presse. D'origine portugaise, Antonio, qui a vécu son adolescence dans la capitale portugaise, n'y est pas revenu depuis dix ans. Ils se retrouvent pour couvrir le procès à sensation d'un tueur en série, un jugement en assises qui tarde à débuter.


Au cours de la première soirée, Antonio confie à Vincent le souvenir de « Canard », une jeune fille qu'il a aimée à quinze ans et dont il a été séparé. S'étant connus enfants sur le trajet de la ligne de tramway Eléctrico W, ils étaient vite devenus indispensables l'un à l'autre.
Aux dernières nouvelles, Canard était enceinte… Vincent, amoureux éconduit et insatisfait, écrivain et traducteur velléitaire, incapable de finir une histoire et sans doute désireux de prendre une revanche sur la médiocrité de son existence, entreprend d'accomplir le destin inachevé d'Antonio.
En même temps qu'il reconstitue et raconte l'histoire de Canard, il se révèle au lecteur : gentil mais inconsistant, souvent démuni et maladroit, compliqué, alors qu'Antonio, plus combattif, plus séduisant, apparaît comme son contrepoint. Pourtant, la fin les renvoie un peu dos à dos : secret pour dissimulation, malhonnêteté pour hypocrisie, l'attitude de l'un comme de l'autre ne me paraît pas mieux défendable.

Durant les neuf jours de leur cohabitation, Vincent le narrateur, a pris des notes dans un petit cahier : leurs rencontres avec une série de personnages secondaires qui se révèlent des archétypes féminins, leurs promenades dans Lisbonne, ses ruelles, ses maisons, ses vieux docks, de petits détails qui donnent du crédit à l'histoire.
Après les avoir laissées dormir pendant plus de vingt ans, il les livre en un roman à peine retouché : neuf chapitres au long desquels des intrigues s'ébauchent, se nouent, se déroulent. La confidence d'Antonio est le point de départ d'un enchaînement d'errements et de tergiversations, d'initiatives malvenues, d'événements qu'il se croit capable de maîtriser, de décalages successifs et inattendus. Un bref épilogue achève de lever le voile, refermant les portes sur toutes les histoires entr'ouvertes.

Un rythme lent qui confère au récit nonchalance et sérénité, une construction romanesque sophistiquée, un livre sur les affinités et les sentiments tout en nuances, des histoires multiples qui se chevauchent et s'imbriquent en un univers humain complexe, un travail sur la mémoire et la mise en abîme, j'ai reposé le roman avec l'envie de recommencer la lecture du début, pour en goûter toute la richesse. Mieux encore, le narrateur qui tout en partageant des réflexions sur l'écriture - l'écrivain s'écrivant en train d'écrire – glisse dans le cours du récit, ses traductions d'un auteur portugais méconnu qu'il veut révéler et des pistes de recherche sur la biographie qu'il projette d'écrire, m'a donné le goût de lire les contes, tour à tour fantastiques ou absurdes, de Jaime Montestrela.
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