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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Bon, ben j'ai pris une belle claque d'humilité.
On croit connaître à peu près les mythologies occidentales, et on s'aperçoit qu'on ignore absolument tout de la mythologie celtique. C'est un peu vexant au début, et puis Camille Leboulanger se charge de remplacer la vexation par l'exaltation de la découverte d'un mythe qui m'a remis dans l'ambiance d'un Silmarillion.

Après avoir fini le roman, je suis allé fouiner un peu sur Internet pour en apprendre un peu plus sur ce fameux Cuchulainn. C'est une figure positive, fondatrice de l'Ulster, un demi-dieu un peu magicien et grand guerrier, armé de sa lance-foudre Gae Bolg. Il accomplit mains exploits et meurt glorieusement le fer à la main. Dans le domaine de l'Imaginaire, d'aucun disent qu'il a inspiré certains héros des premiers tomes de Rigante de David Gemmell. J'ai pu voir qu'il a aussi son nom dans le cycle du Roi d'Ys de Poul et Karen Anderson.

Camille Leboulanger nous raconte un Cuchulainn bien différent, un Cuchulainn bien plus en demi-teinte – et même en teinte sombre tout court – dont la légende n'aurait pas été magnifiée par une réécriture nationaliste du mythe. le type est tout simplement odieux de bout en bout. Égoïste, entêté, revanchard, d'une violence inouïe, traitant les femmes comme de la chair fraiche à sa disposition et les hommes comme de la chair pour Gae Bolg. Très grand guerrier, ça oui, et l'arrogance incarnée. Rien ne compte pour lui que l'instant présent. Il veut quelque chose, il le prend, et gare à qui se met en travers.

Il faut dire à sa décharge que son environnement favorise ces comportements. Depuis sa mère qui lui a mis en tête qu'il était fils du dieu Lug, et donc destiné à un glorieux destin, aux humiliations et à l'indifférence que lui montre la cour. le monde ne lui offrira que crainte, condescendance ou mépris.
Peu de personnages attirent la sympathie dans ce roman. Même les femmes que l'auteur, de son propre aveu, essaie de faire exister par une résistance farouche aux attendus patriarcaux, exhalent surtout de la haine et du mépris comme Emer, ou une désillusion fatiguée à l'instar de Scathach. Cette « magicienne d'au-delà de la mer » porte un enseignement à Cuchulainn et ses compagnons d'une manière qui provoque moins la compréhension que l'humiliation chez ses élèves. Aurait-elle pu percer ces têtes de bois avec un peu plus de psychologie ? Je pense qu'elle a essayé par le passé, et qu'elle a échoué.
C'est Ferdiad qui m'a le plus ému. Cet autre héros, seul ami de Cuchulainn (d'aucuns l'ont rapproché de Patrocle par rapport à Achille) est un des rares dont n'émane pas de sombres sentiments. Son destin, pourtant, aurait pu le rendre amer. Mais si Ferdiad essaie de l'empêcher, ce destin ne provoque pas en lui de haine quand il est rattrapé par lui.
Autre excellent personnage : le narrateur lui-même, haut conteur devant les dieux, au verbe si lyrique qui ne renie pas les proverbes de taverne (« les paroles et les rumeurs, on ne sait jamais par quelle magie, avancent toujours plus vite que même les voyageurs les plus hâtifs »). Un véritable juke-box qui fonctionne tant qu'on remplit sa chope de bière. Un personnage indispensable ici, et probablement inventé par l'auteur.

Camille Leboulanger parvient à faire tenir ensemble le conte d'un mythe aux images puissantes et un point de vue « de la cave » sans concession. Une belle histoire cache souvent une réalité sombre. Lumière et ténèbres existent en tout et ne peuvent être séparées. Je retrouve un peu du message d'Ursula le Guin, et aussi du Frank Herbert du Messie de Dune (« méfiez-vous de ceux que vous idolâtrez »)

Merci au Lenocherdeslivres dont le billet m'a donné l'impulsion pour me lancer.
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Avec le Chien du forgeron, Camille Leboulanger nous dresse le portrait d'un héros de mythologie celtique, Cuchulainn. Passionnant et immersif, le roman nous plonge en pays celte là où L Histoire rencontre très souvent la magie. Véritable Hercule celte, Cuchulainn est cependant un héros sombre et à la colère effrayante.

Avec une écriture travaillée, l'auteur nous propose un récit plein de détails et nous permet de connaître un personnage inconnu d'une mythologie passionnante. A découvrir !
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Cuchulainn, héros mythique irlandais, prend vie sous la plume de Camille Leboulanger.
Figure récurrente dans les contes irlandais, Cuchulainn est le pendant d'Achille dans la mythologie grecque. Les historiens s'accordent à penser que les exploits relatés dans les contes seraient plutôt le fait de plusieurs guerriers et non d'un seul homme.
Dans son récit, l'auteur s'en tient à la légende et balaie les grandes étapes de la vie de Cuchulainn.
Avant de devenir le héros ulate bien connu, Setanta, seul héritier d'un petit seigneur marié à la soeur du roi, grandit en écoutant les histoires de sa mère. Il rêve de gloire et de bravoure. Aussi lorsque le sort lui offre la possibilité de se rendre à la cour du souverain, il n'hésite pas à abandonner son père et part sans se retourner vers la promesse d'une vie de conquêtes.
En chemin il gagnera le nom qui l'accompagnera jusqu'à sa mort : Cuchulainn, le chien du forgeron.

Camille Leboulanger brosse un portrait acerbe du guerrier.
Les exploits jadis chantés par les bardes et arrivés jusqu'à nous passent sous le scalpel de sa plume.
L'héroïsme et la virilité du guerrier deviennent abjection et violence idiote.
Avec patience et beaucoup d'adresse, l'auteur déconstruit le mythe.
La structure narrative du récit se présente comme un conte qu'un barde raconte au coin du feu en descendant des pichets d'alcool. Il interpellera volontiers le lecteur pendant son récit, le prenant à témoin des succès et des échecs du guerrier. Il pointera les dérives que le désir de puissance et d'héroïsme fait naître dans le coeur des hommes. Il soulignera à de nombreuses reprises et d'un doigt que j'ai trouvé un peu raide les faiblesses ainsi engendrées. J'ai trouvé que l'auteur insistait un peu trop, à nous haranguer constamment lors des passages où il démontre l'absurdité de la guerre et du combattant. Je pense que le lecteur peut comprendre tout seul. Ce besoin de l'auteur, quasi viscéral, de bien marquer ces éléments a fini par m'agacer et par presque gâcher ma lecture à vrai dire.
L'univers ésotérique des légendes est bien retranscrite avec les interdits et malédictions qui pleuvent sur les protagonistes. J'ai bien aimé la description de la vie sous le joug de ces héros. L'auteur a réussi à me transporter dans cet univers et à créer un intérêt pour le récit.
J'ai passé un bon moment.
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Bien loin des romans que je lis habituellement ! N'empêche qu'il en restera toujours un petit quelque chose gravé en moi. Roman médiéval d'un enfant promis à un destin glorieux et qui deviendra un antihéros. Tout ça parce que, croyant bien faire, il a tué le chien du forgeron et qui aura, pour punition, de le remplacer jusqu'à nouvel ordre. Chut ! Écoutez le narrateur qui l'a connu et va vous révéler le parcours de vie de Cuchulainn. Merci à l'auteur, muni d'une belle écriture, de faire connaître cette légende.
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Actualité chargée en cette année 2021 pour Camille Leboulanger qui cumule deux parutions en l'espace de quelques mois seulement : d'abord « Ru » (chez l'Atalante), roman éminemment politique dans lequel il met en scène une cité et ses habitants ayant élu domicile dans le corps d'une créature gigantesque, et puis « Le chien du forgeron » (chez la toute récente mais déjà prometteuse maison d'édition Argyll). Consacré à l'une des figures les plus emblématiques de la mythologie celtique, l'ouvrage nous relate le parcours extraordinaire de Cuchulainn, héros irlandais charismatique doté d'une force colossale et quasi invulnérable au combat. Considéré comme le fils du dieu Lug, le guerrier est réputé pour ses grands exploits et n'est pas sans rappeler d'autres personnages légendaires du même style, à l'image d'Héraclès ou encore Achille (qui se vit, comme lui, offert le choix entre une vie longue et paisible et une autre, plus courte, mais glorieuse). de son enfance dans une place forte reculée à son irrésistible ascension au sein de l'élite des guerriers du grand roi Conchobar mac Nessa, en passant par son apprentissage auprès de quelques unes des plus grandes figures de l'époque, sans oublier ses plus grands faits d'armes comme la razzia de Cooley ou l'enlèvement de la belle Emer, l'auteur revient sur tous les épisodes qui ont fait la renommé du personnage et forgé sa légende. En dépit de l'intérêt qu'aurait suscité à elle-seule l'histoire de ce personnage hors-norme, la version proposée ici est loin de se limiter à une simple remise aux goûts du jour de la vie de ce héros relativement peu connu de ce côté-ci de la Manche. le sous-texte qui accompagne le récit se révèle ainsi particulièrement intéressant, l'ouvrage proposant en effet une interprétation tranchant radicalement avec celle que l'on pouvait avoir jusqu'à présent de ce guerrier auréolé de gloire et presque invincible. Fidèle à ses habitudes, Camille Leboulanger propose ici une analyse plus politique du mythe, s'interrogeant notamment sur la place des femmes dans une telle épopée ainsi que sur l'éducation donné à ce garçon, entraîné presque malgré lui dans un engrenage destructeur le poussant encore et encore à réaffirmer sa virilité.

Difficile dans ces conditions de trouver un seul point négatif au roman qui m'aura enthousiasmée du début à la fin et se montre convainquant à tous les niveaux. La reconstitution de l'époque évoquée (le premier âge du fer) est ainsi très satisfaisante, l'auteur s'étant appuyé sur les travaux de plusieurs historiens spécialistes du sujet afin de rendre son récit le plus cohérent possible, quand bien même celui-ci n'a rien d'historique au sens propre du terme. de ce point du vue, l'ouvrage fait inévitablement pensé à une autre oeuvre parue récemment et traitant de la même époque, la fameuse série « Rois du monde » de Jean-Philippe Jaworski. On y retrouve la même volonté de se détacher des clichés sur les Celtes et leurs coutumes (même si cela est évidemment fait de manière bien plus succincte dans le roman présent) afin de donner au contraire une vision la plus réaliste possible de la manière dont était organisée la société ainsi que de la complexité des rapports de domination et de hiérarchie entre guerriers. Loin de se limiter à une simple énumération des grands faits d'armes du héros, le roman nous offre aussi un bel aperçu du quotidien du roi et de son entourage dans la forteresse d'Emain Macha, avec de nombreuses scènes de banquets, d'entraînements ou de discussions entre les femmes du domaine, autant de passages qui permettent d'apporter de la complexité à une épopée qui, sans cela, aurait sans doute été un peu légère du point de vue de la réflexion. Cette intellectualisation, elle passe aussi par le biais d'un personnage rajouté par l'auteur au mythe d'origine et qui joue ici un rôle déterminant dans l'histoire puisqu'il s'agit du narrateur. L'histoire de Cuchulainn nous est ainsi racontée par un conteur à l'aube de sa vie, dans une taverne quelconque auprès d'un public quelconque, et dont l'objectif est de lever le voile sur l'homme derrière la légende, quitte à prendre ses auditeurs à rebrousse-poil. Car la vision proposée ici par le vieil homme n'est pas particulièrement flatteuse à l'égard du héros et met en lumière, plutôt que ses exploits, ses fêlures et ses limites.

Sous la plume de Camille Leboulanger, le héros adulé de tous et à qui tout réussi prend un tout autre visage, plus sombre et infiniment moins glorieux. Loin de susciter l'admiration ou la sympathie du lecteur, le personnage fait naître au contraire toute une palette d'émotions chez le lecteur, la plupart du temps négatives, que ce soit la pitié ou le dégoût, la détestation ou la tristesse. Outre sa force exceptionnelle, Cuchulainn n'a en effet rien du héros, et pourrait au contraire plutôt être assimilé à un gros boeuf/beauf. Fonçant sans arrêt tête baissée, incapable de saisir le véritable sens des leçons qu'on lui inculque, arrogant à l'extrême, sale, bruyant, brutal… : le moins que l'on puisse dire, c'est que la légende en prend un sacré coup ! Bien qu'atterrés par le comportement du héros et conscients des dangers qu'il fait courir à la stabilité du royaume, celles et ceux qui gravitent dans son entourage ne parviendront (ou n'essayeront) jamais à ralentir la course folle du héros vers sa propre destruction. La galerie de personnages secondaires mis en scène ici est néanmoins convaincante, à commencer par les personnages féminins. le narrateur le rappellera à plusieurs reprises à son auditoire, cette histoire n'est pas une histoire de femmes, condamnées au rôle de simples spectatrices, impuissantes à influer sur le cours du destin du héros, voire même le leur. Pourtant, Camille Leboulanger ne les oublie pas, et met en scène un beau panel de personnages féminins complexes et ambivalents, à l'image de Dechtire, mère du héros et soeur du roi à la personnalité changeante et donc difficile à cerner, ou encore de la belle Emer, révulsée par ce guerrier qui cherche à la posséder et qui, bien que forcée de se soumettre, ne perdra jamais sa combativité. le poids du patriarcat et les ravages causés par une éducation érigeant la virilité au rang de vertu suprême sont ainsi autant de thématiques centrales du roman qui les aborde de manière suffisamment implicite pour que jamais l'analyse de l'auteur ne soit prise pour une leçon de morale assénée au lecteur, ce qui aurait eu pour effet de sortir ce dernier de son immersion qui demeure ici préservée du début à la fin.

Bien qu'ayant déjà beaucoup apprécié les précédents romans de l'auteur, aucun ne m'aura enthousiasmée au point de ce « Chien du forgeron » qui constitue certainement, à ce jour, l'oeuvre la plus aboutie de Camille Leboulanger. Celui-ci y revient sur une figure emblématique de la mythologie celtique, le héros Cuchulainn dont il propose une vision radicalement différente de celle véhiculée par la légende. Porté par une très belle plume, le récit retrace le parcours hors du commun d'un guerrier que l'auteur se plaît à faire chuter de son piédestal tout en s'interrogeant sur les valeurs véhiculées par un modèle tel que Cuchulainn, et au-delà de celui de toutes ces figures de guerriers virils et sanguinaires qui peuplent nos imaginaires. Un vrai coup de coeur, et un roman à mettre entre toutes les mains !
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Pour ma dernière lecture de 2021, j'avais envie de légèreté, de fraicheur, de ne pas me prendre la tête, alors je me suis tournée vers un genre que j'affectionne : la fantasy (même si j'en lis moins).

Délaissant les grosses machines anglo-saxonnes, je me suis tournée vers un auteur français dont les différentes critiques élogieuses de son roman m'avaient donné envie de le lire.

Direction les peuples Celtes, pas au temps d'Astérix, mais aux VIIIe et VIIe siècles avant J.-C (qui n'est pas Jules César, merci).

Un conteur entre dans un bar et, en échange du remplissage régulier de son gobelet, va conter aux personnes présentes la légende de Cuchulainn, dit aussi le Chien du Forgeron, ce héros légendaire, invaincu, dont l'aura continue de briller.

Oui, mais le conteur va leur proposer de leur raconter la véritable histoire, pas la légende que tout le monde connait.

Ce qui lui importe, c'est de parler de l'homme derrière la légende, quitte à choquer son auditoire qui est loin de s'imaginer que la vie de ce héros n'est guère flatteuse et que derrière les lumières que l'on fait briller, il y avait surtout un garçon avec ses blessures, ses fêlures, ses rêves, ses croyances, son égo démesuré et sa soif de victoires.

Derrière le mythe, il y a un homme et son portrait n'a rien de reluisant !

La plupart des auteurs/autrices, cherchent à rendre leurs personnages sympathiques, d'autres pas du tout. Ce qui fut le cas de Camille Leboulanger avec le personnage mythique de Cuchulainn.

Sincèrement, ce garçon n'a rien pour lui, on n'a absolument pas envie de l'aimer, de s'attacher à lui, par contre, on lui collerait bien des fessées pour tenter de brider son égo grandissant.

En grandissant, Setanta, qui ne n'a pas encore acquis les surnoms de Cuchulainn ou de Chien du Forgeron, ne va pas s'améliorer, que du contraire, il est détestable et malgré tout, on s'attache à sa personnalité, on a envie de suivre son parcours, parce que l'on sait qu'il n'est pas le seul responsable de ce merdier.

La faute est imputable à des hommes qui décident de donner à marier, à d'autres seigneurs, leurs soeurs ou filles, afin de monter des coalitions, des alliances, en se foutant pas mal de l'avis de la femme. Ici, le féminisme est banni, les femmes sont sans droits, soumises à l'autorité des mâles, hormis quelques-unes, qui résistent encore et toujours au patriarcat galopant.

Si le Chien du Forgeron n'attire pas les sympathies, s'il est un véritable boulet en société, ne comprenant rien aux règles (ou s'en moquant royalement), un gros macho de première catégorie (un beauf), nombriliste, lourd et ne comprenant que la force brute, le conteur aux cheveux blancs, lui, est un régal pour le lecteur.

Sa verve m'a enchantée et jamais son récit n'est devenu lourd ou ennuyeux, même si l'action n'est pas présente tout le temps. de plus, il y a une palette de personnages qui gravitent autour de Cuchulainn et dont certains auront leur importance dans le récit, forgeant le caractère du guerrier ou au contraire, le laissant faire.

Ce roman de fantasy est un petit bonbon acidulé, un de ceux qui fait du bien par où il passe et qui nous conte le mythe de Cuchulainn d'une autre manière. Même si, comme moi, vous ne connaissiez pas le mythe, la légende de ce guerrier formidable, même si vous n'êtes pas calé en histoire des Celtes, en mythologie, ce récit risque de vous ravir tant il est bien achalandé.

C'est aussi une page importante d'Histoire que l'on découvre dans ce récit, ainsi que la vie dans des places fortes aux temps des Celtes. Il y a une complexité dans le pouvoir politique, la hiérarchie est importante et le moindre battement d'aile de papillon peut déclencher des tempêtes plus tard. le tout est parfaitement intégré au récit, sans donner l'impression d'assister à une leçon d'école.

Le manque de dialogues, qui d'habitude m'énerve, ne m'a absolument pas empêché de prendre du plaisir dans ma lecture, tant j'avais l'impression d'être dans cette taverne à écouter un conteur et à faire en sorte que son verre soit toujours rempli.

Bref, c'est de la fantasy qui pourrait plaire à des lecteurs peu familiers du genre (ou aux allergiques) puisque la part de fantastique est minime (mythologique, surtout), que l'on se trouve dans un monde qui est le nôtre, à une époque lointaine où les valeurs n'étaient pas les mêmes que maintenant.

Pas de droits pour les femmes, des hommes guerriers, des lois différents et des commandements personnels pris par chacun et jamais renié, même jusqu'au boutisme.

C'est une histoire classique, celle d'un homme qui est monté sur un piédestal et qui a chuté un jour parce qu'il cherchait la gloire personnelle, puisqu'il voulait être adulé, être le plus fort, parce qu'il méprisait les autres et ne comprenait rien à rien…

Tout compte fait, Cuchulainn devient sympathique en raison du fait qu'il n'a pas compris les règles du jeu, qu'on lui a donné de mauvaises règles, qu'on ne l'a jamais arrêté, tel un enfant roi et qu'on n'a jamais pris la peine de demander son avis à sa mère, elle qui ne voulait pas se marier, ni avoir des enfants…

Un très bon roman de fantasy à découvrir, même pour les non familiers du genre, car c'est l'histoire de la vie. le cycle éternel…

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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En ces mois d'automne, j'avais envie de lectures mythologique, ésotériques et quoi de mieux que celle d'une figure de légende que j'ai rencontrée adolescente dans les chansons que j'écoutais, je parle bien sûr du Chien du Forgeron que Manau avait popularisé à l'époque. Pour plonger dans cette aventure, je fus très bien accompagnée par Steven de Maven Litterae, avec qui je partage le goût des belles plumes et l'envie d'un bol de mythologie celtique ! Spoiler : nous sommes tous deux sortis enchantés de cette lecture !

J'ai pour ma part découvert le texte dans sa belle édition chez Arygill, qui a une politique de collection assez sobre que j'adore au niveau des couvertures mais où on trouve toujours plusieurs éléments forts représentant bien l'histoire. Ici ce sont ces marques sigillés aux airs celtiques et bien sûr la figure du chien, surnom terrible du personnage principal. J'aime beaucoup l'effet que ça donne.

C'était la première fois que je lisais un texte de Camille Leboulanger, jeune auteur également professeur de français en Bretagne, et il m'a totalement emporté dans son univers. Avec lui, c'est simple, j'avais l'impression d'être assise au coin du feu à écouter un feu conteur nous relater la légende de cet anti-héros qu'est Setanta : le Chien du Forgeron. Avec une plume à la fois directe et riche, il nous plonge dans cet univers passé qu'il avoue lui-même avoir réinventé car il y a très peu d'écrits ou de témoignages dessus, c'est plus l'archéologie qui permet de la reconstruire, mais donc de manière incomplète. Cependant, il parvient à la faire vivre et vibrer sous sa plume.

J'ai de suite été fascinée par la figure qu'il avait choisie. Il faut dire que la chanson de mon adolescence m'avait déjà donné une image assez rude et tragique de ce personnage et que j'avais hâte d'en apprendre plus sur son destin. Je n'ai pas été déçue. Malgré une narration en épisode qui a eu un peu trop tendance à me couper dans mon élan, ce qui m'a posé problème par moment, j'ai beaucoup aimé l'écriture de ce héros / anti-héros. En nous interpellant sans cesse avec son narrateur impliqué également dans l'histoire, mais n'étant pas Setanta, l'auteur nous implique à notre tour. On est rapidement frappé par le destin de Setanta et sa transformation en Chien. C'est quelque chose !

Camille Leboulanger fait preuve de beaucoup d'âpreté pour nous faire découvrir ce personnage. C'est assez terrible de le voir transformé en cette figure quasi inhumaine du Chien dans laquelle on retrouve pourtant tous les travers de la masculinité toxique aussi bien en tant qu'agresseur que victime. du coup, on n'arrive ni à aimer ni à détester ce personnage, car malgré les atrocités qu'il commet, il subit lui aussi des actes terribles et est capable parfois de beaux sentiments. C'est très ambivalent.

De la même façon, j'ai été fascinée par l'univers décrit mais sans parvenir à pleinement l'apprécier ni le détester. C'est une terre celte antique brutale et sale qui nous est décrite où tout est à vif. J'ai eu beaucoup de mal à retenir les noms celtes de l'histoire et je me suis souvent retrouvée à me laisser porter par celle-ci par défaut, mais justement j'étais totalement plongée à l'intérieur de cette époque vue à travers le regard de l'auteur. J'ai notamment beaucoup aimé son mélange de croyances, de politiques et de questions sur le statut des femmes. Celles-ci dégustent vraiment dans l'histoire. L'auteur est dur avec elle mais justement il n'édulcore rien du sort qu'elles subissaient alors sous la férule des hommes et j'ai apprécié cette dureté et cette justesse, surtout que cela se couple à un très joli renvoi d'ascenseur dans les ultimes chapitres.

Grâce à Camille Leboulanger, j'ai aussi pu découvrir l'homme derrière la légende, l'univers dans lequel il vivait et pour finir les aventures qu'il avait connues. A travers cette écriture en épisodes, j'ai aimé découvrir les différents moments clés de l'histoire de notre Chien. C'était très intéressant et terrible d'assister à sa naissance en tant qu'homme et son basculement dans la figure qu'on connaît à cause d'une famille très singulière. J'ai rarement lu des lignes aussi avilissantes. Puis c'est la tragédie qui prend le pas et de ses premiers amours, à la quête quasi homérique qui va s'en suivre, on le voit commettre des actes terribles mais sans le repentir de son modèle (Ulysse pour ceux qui suivent), ce qui frappe. de la même façon, quand on assiste plus tard à ses premiers combats et aux exactions qu'il commet sur les femmes, notamment lors de son mariage pas du tout tout consenti, on a envie de le détester. L'auteur nous entraîne un peu de Charybde en Scylla avec lui, comme le démontrent ses échauffourées avec ses voisins et notamment un de ses amis de toujours qui se terminent bien mal. C'est vraiment la création d'une légende noire à laquelle on assiste en direct avec ses parts de réalité et de fantasme. L'auteur décrit très bien tout cela en sous-texte à son histoire.

Son narrateur est ainsi l'élément clé de l'histoire. C'est grâce à cet observateur de toujours, que Setanta finit par retrouver une figure humaine dans ses derniers instants alors que la tragédie et la vengeance le suivent de près telle une malédiction. A nouveau telle une tragédie grecque, il commettra le pire acte qui soit pour un père et il tombera par là où il a toujours pêché lors d'un moment suspendu dans le temps qui est MON moment préféré de l'histoire. Ce retour d'une forme de magie vengeresse fut terrifiante et unique et signe, pour l'auteur, un fort bel usage des figures de la mythologie celte. Avec une belle économie de mots, l'auteur fait sentir la toute puissance des bafoués et leur donne non la parole mais un moyen d'agir. C'est fort. Pas de doute, je fus donc servie ! 

Je pense que nous tomberons d'accord avec Steven, le Chien du Forgeron fut vraiment une lecture riche et intéressante avec des niveaux de lectures fascinants malgré la noirceur, la rudesse et la saleté de cet univers sans concession. L'auteur a réussi le tour de force de nous passionner pour un personnage qui est tellement ambivalent et une époque tellement différente de la nôtre qu'elle ne pouvait que nous choquer. Cette finesse dans la retranscription, cette justesse dans l'écriture de la figure du "héros / anti-héros" m'ont vraiment fait passer un bon moment et j'ai hâte de découvrir les autres textes de Camille Leboulanger.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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Il est indiqué sur la première de couverture que ce livre ne laissera pas indifférent. Je confirme absolument.
J'ai passé toute ma lecture à osciller entre admiration, rejet, pitié, dégoût, compassion et autres sentiments contradictoires.
Plus j'en apprenais sur le Chien, plus mes sentiments étaient ambivalents.
On en arrive à se douter de ce qui va arriver, et cela est sans doute dû à la forme du récit qui est très agréable (je me suis vu au coin du feu dans une taverne avec des chopes de bière en ribambelle posées un peu partout). O arrive donc à pressentir ce qui va arriver et malgré tout, on reste avec un léger espoir que cela n'arrive pas. C'est le premier roman que je lis de Camille LEBOULANGER, mais cela donne envie de lire d'autres oeuvres de cet auteur. A lire et découvrir pour ceux qui s'intéressent aux univers celtiques et aux récits de barde.
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On se retrouve aujourd'hui avec l'un des personnages les plus importants de la mythologie irlandaise : Cuchulainn, le champion d'Ulster, un guerrier renommé à la double ascendance, humaine et divine. le chien du forgeron, de Camille Leboulanger, revisite son histoire du point de vue d'un conteur étrange, un soir dans une taverne, en échange de quelques bières. le vieil homme nous promet la vérité vraie, très éloignée de la légende propagée par la rumeur.

Tout commence avec un mariage de raison, celui de Dechtire, soeur du roi Conchobar Mac Nessa, et de Sualtam, l'un de ses principaux vassaux. Alors qu'elle se refuse encore et encore à ce vieil époux dont elle ne veut pas, la jeune femme disparaît soudain pendant plusieurs années. Lorsqu'elle refait surface, elle prétend avoir été enlevée et violée par le dieu Lug. Quelque temps plus tard, naît Setenta, dont nul ne saura jamais déterminer la véritable parenté.

Élevé dans le culte de ce qu'il est censé devenir, à savoir le plus grand guerrier de tous les temps, le jeune garçon est doté d'un égo surdimensionné et ne doute jamais de rien. Pas une des leçons que la vie lui administrera ne lui inspirera la moindre humilité tant il est persuadé de sa propre importance. C'est la vie, épique au demeurant, de cet être à l'incroyable destinée, égoïste et imbu de lui-même, que le conteur nous livre ici, sans fard ni complaisance.

C'est un personnage ambivalent qu'on a du mal à apprécier, et pourtant, est-il réellement responsable de ce qu'il est devenu ? Quoi qu'il en soit, porté par la verve du vieux conteur, on se surprend bien vite à éprouver de la curiosité pour son histoire. À aucun moment, le récit ne m'a paru lourd ni ennuyeux. L'intrigue est au contraire bien construite, mêlant découverte de la vie dans les forteresses de l'époque avec intrigues politiques, sans oublier la thématique vitale du statut des femmes dans cette société.

Le style demande un petit temps d'adaptation. On nous raconte une histoire, elle ne se déroule pas sous nos yeux, il n'y a que peu de dialogues. Mais on s'y fait vraiment très vite, dès la fin du premier chapitre en fait. La personnalité très marquée du chien nous embarque, et avec quelle facilité ! Cela sonne tout à fait juste et c'est une véritable tragédie car vous vous doutez bien que pareille histoire ne peut pas bien se terminer. le chien du forgeron est comme une pierre qui dévale la montagne, écrasant tout sur son passage, et volant en éclats une fois arrivée en bas.

Ce fut une très belle découverte, que ce soit l'histoire réinventée de Cuchulainn, ou la plume de Camille Leboulanger. L'immersion est rapide et j'ai trouvé sympathique que, pour une fois, on égratigne un peu la figure du héros traditionnel, le grand guerrier imbuvable aux multiples faits d'armes. J'ai passé un très bon moment et j'ai hâte de découvrir d'autres romans de cet auteur.
Lien : https://etemporel.blogspot.c..
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Le Chien du forgeron est une excellente lecture. Outre l'immersion immédiate et le talent de conteur de son auteur, c'est un roman qui dénonce les failles des récits légendaires et égratigne joyeusement la figure du héros plein de virilité. Un regard assurément moderne sur un récit celte ancien qui le rend passionnant, un peu piquant et foncièrement engagé.

Critique complète sur yuyine.be!
Lien : https://yuyine.be/review/boo..
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