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Désir d’évasion, de dépaysement : que diriez-vous d’une belle immersion livresque au cœur de la Polynésie ? Les Marquises ne manquent pas d’attrait, jugez plutôt :

“Frémissante sous la brûlure du soleil, l’île épanouissait les fleurs de ses buissons et de ses futaies, les fruits juteux qui faisaient ployer les branches de ses arbres, aux racines rafraîchies de ruisseaux qui dévalaient en bondissant de ses hauts plateaux.”

En cette année 1842 sept tribus se partagent Nukuhiva, la plus grande île volcanique de l’archipel. D’incessantes luttes tribales rythment depuis des lustres la vie insulaire et malheur aux adversaires capturés vivants, l’anthropophagie est une coutume ancestrale. Corps recouverts de peintures, permissivité sexuelle mais aussi obéissance aveugle aux injonctions des dieux font également partie des particularismes locaux.

Alban, un ancien marin déserteur, vit depuis vingt-cinq ans au sein de la tribu Tai’oa. Feu son épouse Vaiana lui a donné deux enfants aujourd’hui jeunes adultes, la belle Hina et son frère cadet Heetai. Initiés par leur père à la langue française, ces deux métis pétillants de vie sont les personnages principaux du roman “La part du requin” publié début 2015 aux éditions Elytis.
Hina et Heetai ne se doutent pas que l'insouciance de leurs jeunes années bientôt sera mise à mal par l’arrivée au large de Nukuhiva de “La Reine blanche”, un navire de guerre aux impressionnantes rangées de sabords à canons entrouverts.

Serge Legrand-Vall, auteur bordelais, s’est livré à un minutieux travail d'ethnologue et son érudition concernant cette période charnière de l'Histoire marquisienne impressionne. Sa passion pour la civilisation polynésienne est manifeste et se retrouve dans la qualité de son écriture, particulièrement élégante. L'intrigue mêlant réalité et fiction est constamment agrémentée d'anecdotes surprenantes voire cocasses. Un roman qui tout à la fois divertit et interpelle.

“La part du requin” ou comment l’Etat français dans son délire impérialiste, dans sa soif de conquêtes, se livrait naguère à d’insensés ethnocides !
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L'histoire en elle-même est un prétexte à la description de la société marquisienne à Nuku Hiva au milieu de XIXe, au moment de l'annexion par les Français. On peut supposer que cette description est documentée puisque l'auteur à séjourné aux Marquises. Cette société marquisienne est fascinante ! Avec des positions très particulières sur l'amour, la mort, la vie.
Cette lecture est donc passionnante, et alimente le mythe, et mon rêve (qui ne se réalisera sans doute jamais) de connaitre ces îles paradisiaques. Ou pas... Les Marquisiens étaient cannibales... le tabou ultime pour nous ! Et ils se faisaient des vêtements avec les cheveux de leurs ennemis tués et mangés.
Cela m'a donné aussi envie de lire "Taïpi" d'Herman Melville qui relate son voyage à Nuku Hiva à la même époque. Et les récits de voyage de l'amiral Dupetit-Thouars qui annexa Nuku Hiva.
Une lecture qui en entraîne d'autres, comme des poupées russes, j'adore !
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Bonjour,
J'ai ressenti cette même impression de tranquillité et d'apesanteur que dans les deux autres romans de cet auteur. Il s'agit d'un sentiment bien personnel et qui définirait en quelque sorte un premier avis général.
Sur le fond, j'ai toujours apprécié l'idée de voyage, d'évasion, de découverte et en même temps cette idée qu'on peut en apprendre toujours plus sur soi-même. Donc le thème un peu « à la croisée des mondes » me parle beaucoup et c'est ce que j'ai apprécié en lisant ce roman. Surtout que l'histoire des îles Marquises reste assez méconnue et je trouve positif de mettre la lumière sur ces iles et leur culture ancestrale (je suis fan de géographie!). Serge Legrand-Vall romance parfaitement ce moment historique et essentiel de ce petit bout de Pacifique. Donc bravo !
J'ai eu aussi plusieurs rappels littéraires au fil des pages en pensant successivement à Rouge Brésil de Jean-Christophe Rufin, à Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre et à l'oeuvre du poète Saint-John Perse. On retrouve beaucoup de poésies dans le récit avec une omniprésente description du concept de Nature et de sa beauté (quel fragile équilibre !). Chacun des mots est pesé, sous-pesé et justement positionné à l'endroit où il doit se situer. Je me suis fait la remarque lorsque l'auteur utilise à deux ou trois reprises le verbe « écoper » ou quand est précisé, au milieu du récit, que le requin se sert de sa nageoire « caudale ». le style et le vocabulaire sont riches et très diversifiés. Il y a un bel équilibre entre les descriptions et les dialogues, ce qui permet au lecteur de rester « concentré ».
Je recommande donc vivement la lecture de ce roman !
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Dès les premiers mots, la magie de Serge Legrand-Vall nous transporte et nous dépose non seulement au coeur de son univers, mais aussi de l'action : oui, car pas de doute, nous avons immédiatement reconnu son écriture fluide, harmonieuse, si riche en senteurs, goûts, sons et couleurs… « La brise qui agite les larges feuilles des arbres à pain apporte, mêlées aux odeurs rondes et sucrées de la terre, des bandes de senteurs rafraîchies par l'haleine de l'océan ».
Nous ne sommes pas dans le film qui se déroule sous nos yeux, non, non : nous y sommes, tout là-bas, sur cette île lointaine qui nous caresse de son souffle parfumé...
…. Et l'action nous emporte sans prévenir :
« La nuit est profonde lorsque Hina sort de sa case avec précaution. (….) Elle a glissé dans sa ceinture d'écorce le couteau de marin aiguisé qu'elle tient de son père.»

Tous les indices en peu de mots : Hina, la fille du marin Alban (Les îles du Santal), nous entraîne dans son aventure nocturne. Un couteau aiguisé … Ce n'est pas un accessoire de fille, un couteau aiguisé. Pourquoi l'avoir pris ? A quoi va t'il servir ?
Bon, il va falloir s'accrocher parce que, de toute évidence, c'est parti !… Alors, partons, avec grand plaisir !!!
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Les îles lointaines, lorsqu'elles sont décrites dans des romans, récits de voyage, sont associées à des stéréotypes faciles : l'exotisme, l'étrangeté des moeurs décrites, l'incompréhension apparente de la conduite des autochtones, le mépris aussi.

Dans son roman « La part du requin » Serge Legrand-Vall prend soin de décrire la vie d'Hina et Heetai, respectivement fille et fils d'un marin français déserteur, Alban établi depuis plusieurs années aux Marquises, et d'une indigène .Leur mère a succombé à une épidémie .Ils voient arriver une escadre de guerre dans leur île, en 1842 .Cette arrivée est en fait le prélude à l'implantation française dans les îles Marquises à partir des années 40.

Les moeurs et usages aux Marquises sont très différents de ceux de l'Occident ; ainsi pour l'éducation sexuelle : « Ici, les jeunes gens devenaient à leur adolescence des kai'oi. Ils apprenaient les danses et les chants, récitaient les exploits des anciens et les légendes des dieux. (…) Ils vivaient ainsi hors des tapu, dans une grande maison où ils découvraient aussi les joies qu'apportaient les rencontres des corps. »
Les rapports de pouvoir y sont éventuellement cruels, implacables, et contredisent l'impression d'un observateur superficiel des usages de ces îles : « Contrairement à ce que pouvait croire un visiteur blanc lors d'une brève escale, les Marquisiens ne vivaient pas dans un éden où régnait l'égalité .Un petit groupe de chefs, prêtres et guerriers, détenait terres et pouvoirs .Le petit peuple était à son service. »
Le rapport au temps semble y obéir à des critères bien différents de ceux en vigueur en Occident : « Ici, le temps n'était pas de même nature qu'ailleurs. Il s'étirait et se contractait suivant les lunes et les vents, se fondait dans la nuit des ancêtres, dans l'immensité du ciel et de l'océan. »

Pourtant, les conflits décrits par l'auteur entre les différentes tribus (tribus Tai'oa, Puhi'oho, Tei'i, Hapa'a) et les Français récemment arrivés, vont provoquer, au moins en partie, la signature d'un accord qui entérine la présence des Français aux Marquises. Heetai parvient à échapper aux Français à la fin du roman, prolongeant ainsi sa liberté, sa volonté de sauvegarder son identité de Marquisien.
Le roman de Serge Legrand-Vall est librement inspiré de faits réels, notamment de la prise de possession des îles par l'amiral Dupetit-Thouars en 1842 ; il restitue aussi certains traits des moeurs des îliens, illustrant en cela leur intérêt quant à leur redécouverte et leur reconnaissance.
Il éclaire d'un jour nouveau cette confrontation, qui a abouti, par l'introduction de maladies diverses et de l'alcoolisme, à la décimation de la population, puis, plus tard, à sa renaissance partielle.
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Après "Les îles du Santal" un voyage aux Marquises issu de l'imaginaire de l'auteur, "La part du Requin" qui conte la suite de cette histoire, nous plonge profondément dans l'atmosphère de ces îles envoutantes qui livrent encore davantage leurs secrets d'histoire grâce au riche travail de recherche de cet auteur passionné d'Ethnologie et de son immersion parmi ses habitants lors d'un séjour aux Marquises. Parfums enivrants, rites ancestraux, magie, soif de conquête des "blancs" rythment ce joli roman à la fois divertissant et enrichissant.
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Un très beau livre où la mère et l'épouse disparue, insulaire et solaire, se fait esprit et se réincarne sous différentes formes pour réconforter, insuffler son amour, orienter les siens ; où le père, d'origine bordelaise, est repère, savoir, référent, roc, compagnon ; où les enfants balancent et se cherchent entre les deux cultures originelles. Au-delà du salvateur dépaysement sous les cieux marquisiens en cette fin d'hiver, ce récit inspiré m'a fait le même effet qu'un voyage en terre inconnue. Remise en perspective de la France, de nos propres ûs et coutumes, critique de la rationalité à tout crin, de l'enfermement aux sens propre et figuré, de l'ingérence et de l'impérialisme ; découverte de la richesse d'une culture, où la femme a le droit a deux maris pour mieux exprimer sa double personnalité, l'hédonisme est de rigueur, la sexualité source d'épanouissement et dont les pratiques "barbares" sont présentées sans jugement. Un hymne aux sens et à l'essence même de la vie, une invitation toute en finesse au voyage hors de notre matrice. Merci à l'écrivain, qui se fait tour à tour conteur, historien, sociologue, ethnologue...
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Livre double, livre métis, il nous fait à la fois vivre le monde des Marquises de 1842 tout en nous parlant individuellement à travers les doutes, les choix des personnages. C'est un voyage aux Marquises , dépaysant et si proche de nous parfois .
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Les Marquises, romancées par Serge Legrand-Vall
Publicitaire à Bordeaux, Serge Legrand-Vall est aussi écrivain. Une activité à laquelle il consacre tous ses vendredis pour noircir les pages de ses romans. Auteur de plusieurs livres dont un essai “Toulouse Bordeaux l'un dans l'autre”, de deux romans, “Les îles du santal” et “La Rive sombre de l'Ebre”, il publie cette année “La part du requin”, la suite des Îles du Santal dont l'histoire se déroule aux Îles Marquises. « J'ai toujours nourri un fantasme pour les îles ». Pour comprendre pourquoi, ill faut peut-être chercher du côté de l'histoire personnelle de l'auteur, confié jeune à l'Assistance publique. « Je me souviens que lorsque je regardais le planisphère, j'ai été attiré par les îles. Elles symbolisaient l'isolement, et correspondaient à mon histoire intime ». Dès lors, il nourrit une attirance pour ces territoires qu'il n'avait jamais approchés, si ce n'est dans son imaginaire et ses nombreuses recherches. En 2011 donc, paraît Les îles du Santal, roman de la rencontre amoureuse réparatrice d'un jeune marin et d'une indigène des Marquises, au début du XIXe siècle. À la suite de cette parution, il obtient une résidence d'écriture soutenue par la région Aquitaine, dans l'île de Nukuhiva, où il séjourne en décembre 2011. le Graal était alors au coeur de ses mains, pouvoir enfin découvrir ce qu'il avait toujours construit dans son imaginaire. Là- bas, l'auteur a fait de nombreuses rencontres, récolté aussi les témoignages des habitants et a abordé ces îles autrement que dans les livres. Dès son retour en France, il commencera l'écriture de ce qu'il allait nommer “La part du requin” dont l'histoire se déroule 25 ans après les Îles du santal. Au coeur de ce roman se place la colonisation et la complexité des relations entre les indigènes et les Français. L'Histoire est ici retranscrite avec une vision à la loupe d'une véritable transformation de la vie sur les îles depuis l'arrivée des Français. « Les Marquisiens ont vu avec convoitise l'arrivée des Français, ils ont été séduits par les produits manufacturés. le troc était la base des échanges. Les marins étaient aussi en demande de femmes qui étaient une monnaie d'échange. Au départ, les Français parlaient de protection mais le transfert de souveraineté a été brutal. Lorsque les indigènes l'ont compris, il était trop tard », raconte l'auteur. À travers le prisme du couple du jeune marin et de l'indigène qui ont eu des enfants, l'auteur va camper la notion du dilemme que vont vivre leurs enfants pris entre deux cultures. « Comment trouver sa place quand on est double, est une des grandes lignes de ce roman. « “La part du requin” est la part des blancs. En un siècle le peuple a perdu du fait des épidémies et de l'alcoolisme une grande part de sa population. Ils n'étaient plus de 2.000 en 1920 alors qu'ils étaient 100.000 à la fin XVIIIe », explique l'auteur. Lors de sa résidence d'écriture en décembre 2011, l'auteur a beaucoup appris de ce peuple, et « a compris sa psychologie ». « Aujourd'hui les Marquisiens ont besoin de reconstruire leur identité culturelle et mettent au coeur de leurs préoccupations l'importance de leur mémoire au travers de festivals de culture.» D'autre part, très peu de romans parlent des îles Marquises mis à part les écrits historiques. La part du requin et Les îles du Santal ont donc trouvé un écho dans le coeur des Marquisiens.
Fabienne Amozigh. La Dépêche du Bassin. 08 01 2015
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