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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Décidément, la révolution, l'engagement, le combat pour ses idéaux sont des thèmes qui inspirent la rentrée littéraire. Si Ah ! Ca ira... de Denis Lachaud donne à entrevoir les prémices d'un espoir d'amélioration du monde par la prise de conscience du peuple, le tableau que dépeint Jérôme Leroy avec ce Jugan est plein de noirceur, de sang et de fureur. D'une beauté violente d'où naît une sorte de fascination, comme celle qu'exerce le héros monstrueux du livre sur une innocente jeune fille.

Pas d'anticipation ici, pas de regard sur l'avenir mais un retour sur le passé qui hante le narrateur. Dix ans auparavant, il a été le témoin passif d'une série d'événements atroces au sujet desquels il n'a pas encore réuni tous les éléments susceptibles de lui apporter une forme de compréhension. Régulièrement, il rêve. Régulièrement, il refuse d'aller au bout de ses rêves aux relents toxiques. Cet été pourtant, au soleil de Paros, il laisse ses pensées suivre leur cours, dévoilant progressivement au lecteur les bribes de son histoire. Terrible contraste entre la lumière de l'île grecque, tout en blancs et en bleus et la noirceur du récit qui révèle peu à peu la monstruosité de Jugan. Joël Jugan. L'ancien chef du groupe d'extrême gauche Action Rouge, rendu célèbre dans les années 80 pour ses enlèvements et assassinats de patrons coupables de fermer leurs usines et de jeter des centaines de travailleurs au chômage. Joël Jugan, revenu à Noirbourg, sa ville natale du Cotentin après avoir purgé une peine de 18 ans de prison. C'est là que le narrateur, alors professeur de collège débutant a fait sa connaissance ainsi que celle de Clotilde, ancienne camarade de Jugan reconvertie dans l'enseignement. Jugan, l'ancien beau gosse, fils de notable comme la plupart des membres du groupe est devenu un monstre. Défiguré mais tout aussi hideux à l'intérieur. Comment ? Pourquoi ? Un soir, Clotilde racontera... Mais cela ne suffira pas à éviter le drame qui se prépare. Car Jugan a déjà repéré sa future proie.

Avec une belle maîtrise, Jérôme Leroy déroule les éléments qui mènent au désastre et agitent rétrospectivement le sommeil de son narrateur. le lecteur est entraîné dans un tourbillon où se mêlent le noir, le rouge et le caraco orange d'une gitane. Où se pose la question de l'engagement et de ses motivations. Jusqu'où aller ? Quel genre de personne devient-on après ? Peut-on laisser le passé derrière soi ? Que vaut-il mieux ? Une Clotilde aigrie par le regret d'avoir refusé la lutte armée 20 ans plus tôt et suspendue à l'espoir que Jugan remette ça pour lui offrir une seconde chance ? Des anciens membres rentrés sagement dans le rang et les convenances d'une certaine bourgeoisie de province ? Un Jugan, autrefois réputé pour son courage qui préfère désormais se défouler sur une jeune fille sans défense ? Tout ceci laisse un terrible arrière-goût de gâchis, une sensation de malaise et de culpabilité que le narrateur transmet au lecteur.

Cependant, le texte est beau. Très visuel. Comme un tableau contemporain, des grands jets de peinture qui se bousculent et se heurtent sur la toile. Il dégage une force intense et vénéneuse qui scotche le lecteur au récit. J'ai vu après avoir refermé le livre qu'il fallait le rapprocher de celui de Barbey D'Aurevilly, L'ensorcelée dont un extrait figure en exergue et que malheureusement, je n'ai pas lu. Il n'est donc pas inintéressant de se référer à ce billet paru dans Liberation qui apporte quelques clés et une vision différente de celle de la lectrice totalement vierge de référence que j'étais.

Une vraie découverte, de celles qui ne peuvent laisser indifférent. C'est tout le talent de l'écrivain que d'arriver à faire de cette violence monstrueuse, une véritable oeuvre d'art et une matière à réflexion.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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L'île grecque de Paros, Rouen, et surtout le fin fond de la presqu'île du Cotentin : trois lieux que je connais bien !

Un drame que l'on découvre au compte-gouttes sur fond de violences liées aux brigades d'extrême gauche des années 80's, du chômage de la crise économique et de l'immigration maghrébine. le thème m'a intéressé malgré l'enlisement dans ces événements des Brigades Rouges qui ont fait les choux gras de l'actualité à l'époque.

Malheureusement, une fois de plus l'intrigue se déroule sur plusieurs périodes différentes, et l'auteur va et vient de l'une à l'autre, avec pour seul intérêt celui d'embrouiller inutilement le lecteur. Les intrigues racontées chronologiquement se font de plus en plus rares !

Malgré tout, l'écriture est agréable à lire, et j'avoue avoir lu le roman d'une seule traite, ce qui est plutôt exceptionnel dans mes dernières lectures...
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Il y a des lires que nous lisons par hasard et qui se laissent lire, de la première à la dernière page. Jérôme Leroy est un malin car il débute le roman avec le narrateur en vacances, heureux, bien entouré. Puis il se met à parler de ce moment de sa vie qui l'a changé à jamais. On ne sera que ce qui c'est passé que sur les dernières pages du roman.

Ainsi, il va prendre le temps de nous parler de ce professeur sans trop d'ambition, de cette femme boiteuse qui aurait mourir pour la cause, les actions et la mentalité du mouvement Action Rouge (Action Directe), le développement des villes avec ces banlieues, de l'immigration, de la montée de l'intégrisme, du mythe des gitans...

Et puis surtout entre cela, il va glisser des moments de vie de Joël Junger, un leader charismatique avec sa force de caractère, son charisme, son courage, sa force de persuasion... Il va arriver à convaincre certains de ces camarades à tuer des gens. On va aller de sa période gloire à son emprisonnement jusqu'à sa nouvelle demi-liberté. Il connaît son pouvoir et va en abuser sur la jeune et innocente Assia Rafa. Elle nous est décrite avec beaucoup d'affection, de tendresse. Mais les mots l'accompagnant annonce un destin funeste dès le début. On ne nous dit pas commun, c'est juste à la fin que nous serons tout. Qu'à t'il pu arriver à une jeune fille qui avait tout pour réussir et être heureuse?

Une belle description de la déchéance et de la difficulté pour l'entourage de pouvoir aider en agissant avant qu'il ne soit trop tard. Au moins le lecteur était prévenu. il ne fallait pas trop s'attacher à elle.

Jugan, l'homme aux deux visages saura autant vous séduire que vous horripilez. le passé se mêle au présent pour vous plonger au plus prêt de l'horreur. Vous allez apprendre à regarder certaine personne d'un autre oeil.
Lien : https://22h05ruedesdames.wor..
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L'histoire est bien amenée avec une écriture fluide, pourtant le rôle du narrateur reste ambigüe. En effet, il est nécessaire d'avoir un point de vue extérieur face à l'intrigue qui est plutôt sombre. le personnage principal, Jugan ancien activiste du groupe d'extrême gauche Action Rouge sème la panique dans la ville de son enfance.
Pour nous, ce livre peut choquer les âmes sensibles puisqu'il retrace assez crument la personnalité d'un pervers narcissique. de plus le narrateur met tant de distance entre lui et les personnages qu'il n'y a plus d'empathie.
Cependant la réalité rattrape la fiction puisque l'auteur s'est très certainement inspiré des groupes action directe et brigade rouge pour créer son propre groupe Action Rouge.
Ce roman est troublant, mystique et au demeurant efficace, il ne s'agit toujours pas du roman de l'année.
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Jugan
Jérôme Leroy
roman
La Table ronde, 2015, 214p


Jugan est le nom de famille d'un monstre au physique comme au moral. C'est un ancien leader du groupe d'extrême-gauche Action Rouge, un fils de la bonne société normande, de Noirbourg précisément en plein Cotentin, qui a des idées révolutionnaires et veut changer ce monde capitaliste, injuste et minable dans lequel il vit. Il vient de sortir de prison dont il était un détenu particulièrement surveillé et il est en liberté conditionnelle précisément dans sa ville natale.
le narrateur est un professeur qui est en train de passer ses vacances à Paros avec sa femme et sa petite fille. Tout jeune professeur, il a connu Jugan qui travaillait après sa libération dans le même centre social que lui, en présence de jeunes enfants, lui un meurtrier notoire, et il fut le témoin passif du mal qu'il causait et de l'événement qui provoqua sa fuite.
A Noirbourg, Les Forges ont fermé, faisant un grand nombre de licenciés. Jugan se radicalise et tue le président des Forges. Ses actions deviennent de plus en plus sanglantes. Ses anciens partenaires le lâchent et se rangent, dont Clotilde, la CPE du collège où travaille le narrateur. Clotilde est surnommée la boîteuse parce qu'elle a une jambe atrophiée. Elle a aussi le coeur et la tête qui boîtent, elle qui n'a pas d'enfant de Jugan, qui se repent de l'avoir lâché. Elle a sympathisé avec le narrateur parce qu'il est fait pour le métier d'ensseignant. C'est ainsi qu'elle le recrute pour le centre social. Il aidera les gamins dans leur scolarité. Il y rencontrera Assia, une brillante élève, qui aide aussi les enfants. Elle est la soeur de Rachid que le narrateur a comme élève.
Noirbourg donne sur la lande de Lessay, où vivent les Gitans qui boivent un alcool qui fait voir des scènes passées et même présentes de la vie, où vit une sorcière marginale qui jette des sorts. Cette lande est la même que celle de Barbey d'Aurevilly l'auteur qui donne son nom au collège.
C'est une suite de rêves que le narrateur conduit des années après le drame. A Paros, l'île blanche et bleue, il veut vivre jusqu'au bout par le rêve les événements tragiques et monstrueux auxquels il a été mêlé, et être débarrassé enfin de cette noirceur.
le livre est peu convaincant. Les personnages n'ont rien d'attachant, il leur manque de l'épaisseur, Assia, un pantin, Clotilde une suiveuse aveuglée, l'écriture n'a rien de remarquable, et l'angle choisi pour narrer l'histoire n'est pas le bon. Que peut savoir le narrateur de l'intimité d'Assia, même si le père de celle-ci a donné quelques informations ? Jugan fascine. Comment ? Par son visage atrocement abîmé, et des gendarmes seraient en partie responsables de ce ravage? Parce qu'il tue sans scrupules, parce qu'il fait d'une jeune fille, qu'il se plaît à humilier sans cesse, son esclave sexuelle à seule fin de rajeunir sexuellement ? Parce que ce qui lui importe, c'est de ne pas retourner en prison ? La fin laisse flotter comme une vapeur de superstition et de fantastique, soit que le narrateur en ait vraiment fini avec cette tragédie, soit qu'il rende un ultime hommage à l'innocente victime. La fin comme le reste du roman est bancale.
Bien sûr, ce roman veut être la version moderne de L'Ensorcelée de Barbey d'Aurevilly. Ce n'est pas un coup de maître. Où la tension dramatique, où l'atmosphère qui angoisse, où le pouvoir de la « sauvage et fameuse » lande ? Certes Jugan est lui aussi fidèle à des idéaux d'un autre temps tout comme l'abbé de la Croix-Jugan, mais où sont les ombres, où la prose onirique ?
S'il faut ne lire qu'un livre, pardon Jérôme Leroy, lisez L'Ensorcelée.
Jérôme Leroy est né à Rouen en 1964. Il fut par choix pendant vingt ans professeur en zone d'éducation prioritaire à Roubaix. Il est le compagnon de route d'un communisme sans dogme, un anar des chemins buissonniers. Il écrit de tout, poésie, livres pour la jeunesse, romans noirs, romans.
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La construction du récit est efficace. Peut-être trop ! L'auteur semble manquer d'empathie pour certains de ses personnages, un peu trop caricaturaux. Est-ce volontaire pour établir une distance ? Paradoxalement, on ne perçoit pas une réelle critique des mouvements politiques décrits pourtant violents. le livre tient en haleine, cependant, car on a envie de connaître les destins des différents protagonistes.
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Attirée par le Cotentin en creux, j'ai apprécié la reconstruction d'une cité superposant des éclats de paysages de mon enfance.
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Jugan revient dans son village d’enfance, Noirbourg, « au carrefour de trois routes à quatre voies », dans le Cotentin. Il vient de purger une peine de dix-sept ans de prison.
Faisant écho à L’ensorcelée de Barbey d’Aurevilly, Jérôme Leroy présente les Gitans sous leur forme magique. Ces Gitans qui vivent dans la Zone, à la périphérie de la ville. Ensorcelée, Assia le sera totalement de Jugan, elle est totalement emprise de cet homme. Un homme-monstre au visage ravagé rappelant l’Homme qui rit de Hugo. Cette emprise sera sa descente aux enfers.
C’est également l’histoire des bandes armées d'extrême gauche tels que la Bande à Baader. Groupe "révolutionnaire" ayant pu poussé jusqu’à la lutte armée. Jugan fait partie de ces anciens terroristes, Clotilde, l’ancienne camarade aussi.
Avec la thématique de l’immigration et des bandes terroristes, Jérôme Leroy fait écho à notre époque et offre une fiction enchanteresse et destructrice.
Lien : https://novelenn.wordpress.c..
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