Rapide relecture de cet article de saison par
Claude Lévi-Strauss, sur l'engouement de nos sociétés pour le Père Noël. Il a pour point de départ un fait divers qui s'est déroulé la veille de Noël de 1951 :
L'Eglise s'inquiétait de la paganisation des fêtes de Noël, qui empiétait sur l'esprit chrétien de cette commémoration. Quand on sait que Noël est un descendant de fêtes païennes utilisées l'Eglise pour promouvoir la foi, ça fait sourire. En réalité, sous le prétexte que le mensonge des parents n'est pas une méthode d'éducation, et qu'il ne peut éveiller le sentiment religieux de l'enfant, ce qui gênait réellement était que le Père Noël avait remplacé Jésus dans le coeur des enfants.
Un évêque a alors décidé d'organiser devant les jeunesses des patronages, qui y ont été volontairement associées, un autodafé du Père Noël sur le parvis de la cathédrale de Dijon : il a été pendu, puis brûlé. le but était, d'une part, de diffuser l'idée selon laquelle il n'existait pas, et que mentir aux enfants sur un mythe était les tromper en encourageant le mensonge ; et d'autre part, qu'il décrédibilisait la croyance en Dieu, en détournant l'attention du seul que l'on doit célébrer : la naissance du sauveur.
L'opinion publique s'est enflammée contre ce geste. En effet, outre le fait que tout le monde n'est pas chrétien et a le droit de croire ou célébrer ce qu'il veut, ce geste a profondément choqué la jeunesse dans son ensemble : la pendaison et le bûcher sont des actes extrêmement violents, surtout s'ils sont destinés à marquer les enfants autant que les parents. Cet holocauste (au sens de sacrifice religieux) est-il un exemple à suivre, d'humanité et de tolérance ? Finalement, les contradicteurs de ceux qui ont tenté de s'immiscer dans une tradition dont la population avait besoin - tradition qui trouvait justement sa légitimité dans ce qu'elle pouvait apporter aux gens - ont contrattaqué en ressuscitant le Père Noël sur la place de l'Hôtel de Ville ! Nous voilà rassurés, cela n'a fait que renforcer sa popularité et sa légitimité.
« Dans cette affaire, tout se passe comme si c'était l'Eglise qui adoptait un esprit critique avide de franchise et de vérité, tandis que les rationalistes se font les gardiens de la superstition. Cette apparente inversion des rôles suffit à suggérer que cette naïve affaire recouvre des réalités plus profondes. Nous sommes en présence d'une manifestation symptomatique d'une très rapide évolution des moeurs et des croyances (…). »
Cela amène à se poser quelques questions : La principale, quelles sont les raisons qui ont poussé les adultes à inventer le Père Noël ?
Et des complémentaires : Pourquoi les gens en ont besoin aujourd'hui ? Pourquoi l'Eglise en a peur ? D'où vient ce mythe ?
Dans ces 50 pages vous trouverez quelques éléments de réponse ou au moins de réflexion. Car certes, on peut trouver pas mal d'origines anciennes au personnage du Père Noël et aussi de la date du 25 décembre. Mais ça ne répond pas à la question du pourquoi avons-nous besoin de perpétuer sa tradition ? Quel est son véritable rôle social : Est-il simplement d'apporter un peu de joie aux enfants ? de faire rêver les parents en les faisant retomber en enfance ? Est-il simplement le moyen de cantonner les réclamations de jouets des enfants à une seule période de l'année, ou encore le moyen de les faire rester sage… ?
Ou bien le Père Noël représente-t-il quelque chose de plus profond dans l'imaginaire collectif ?
Vous pourrez y réfléchir avec Claude Lévy-Strauss et peut-être vous faire votre propre opinion.
Et pour vous, est-il important de perpétuer cette tradition du Père Noël, et pourquoi ? Est-ce que vous y contribuez ? Est-ce que vous avez aimé qu'on le fasse avec vous ?