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EAN : 9782221071137
184 pages
Robert Laffont (14/03/1991)
4.57/5   7 notes
Résumé :

Le Prince de Ligne avait émigré au moment de la Révolution, mais sous l'Empire il aurait aisément pu revoir sa terre, à laquelle il était profondément attaché. Vers la fin de sa vie, comme on lui demandait ce qui le retenait encore de mettre fin à son exil, il répondit simplement : "L'humeur, l'honneur, l'horreur." Les sinologues sont de pauvres diables qui ne sauraient avoir grand-chose de commun avec un grand seigneur de génie (et certes, il n'y a pas de d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Le cinquième (et dernier ?) recueil d'essais de Simon Leys sur la Chine date de 1991, autrement dit, il est postérieur de deux ans aux massacres de la place Tienanmen. Ces massacres confirment le jugement que l'auteur portait sur le communisme comme système d'oppression et de destruction, mais Simon Leys est loin de se réjouir d'avoir eu raison quand tous les autres sinologues détournaient le regard et encensaient la "demi-douzaine de momies sanglantes et terrifiées" massacrant à plusieurs reprises "la jeunesse, l'intelligence et l'espoir de la Chine". L'auteur rappelle simplement que pour écrire "Les habits neufs du Président Mao" et ses autres recueils, il suffisait de lire le chinois et de voir ce que l'on voit. Il tire de cette expérience une réflexion désabusée sur la vérité et sur la nécessité de l'exprimer, concluant avec Baudelaire à "l'épouvantable inutilité d'expliquer quoi que ce soit à qui que ce soit."

Ce mince recueil n'est pourtant pas seulement une leçon de désabusement. Il contient plusieurs textes sinologiques extraordinaires, qui permettent de mieux comprendre la relation des Chinois à leur propre passé, fort différente de la nôtre ; une étude du poète français Victor Segalen, dont l'admirable roman "René Leys" donna à l'auteur l'idée de son pseudonyme ; les propos de Huang Binhong (1864-1955, "un des plus grands peintres de notre siècle") sur la peinture ; une étude de la personnalité de Zhou Enlai, ou l'art politique de "la barque vide" ; des remarques sur la méthode de la pékinologie politique du Père Ladany, inspirateur secret de tous ceux qui l'ont pillé ; des articles sur le massacre de la place Tienanmen ; et plus légèrement, enfin, deux recensions critiques concernant les livres de deux pompeux crétins ayant voyagé en Chine, Alain Peyrefitte et Bernard-Henri Lévy.

Ce livre diffère quelque peu des quatre précédents : même s'il est segmenté en brefs articles, et accorde une part importante à l'actualité politique, la pensée va plus loin dans l'audace et renouvelle la perception de la civilisation chinoise, au plan artistique et culturel. Un peu moins d'actualité, et plus d'art et de littérature : cela donne à ce recueil une place privilégiée dans l'oeuvre de Simon Leys.
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Esprit lucide , langage clair , plume acérée. Ces caractéristiques font que Simon Leys est toujours actuel et agréable à lire même si ces essais datent de 1991. Parlant de Zhou Enlai ,de Mao ou de Tian'anmen , il se hisse au-delà de l'évènement vers des considérations plus que jamais valables. Je retiens en particulier son développement sur « l'exotisme » , sur la peinture et aussi son réjouissant dézingage de fausses gloires ( Peyrefitte , BHL) A propos de ce dernier le titre de son compte rendu du livre « Impressions d'Asie » de cette baudruche est à lui seul un régal : Une excursion en haute platitude …tout est dit .
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
"[La Chine] a étudié son passé, elle s'en est servie pour concevoir et nourrir son présent d'une manière qui n'a d'équivalent dans aucune autre civilisation. Mais ses anciennes cités comme Suzhou étaient libérées du temps en tant qu'objets purement matériels. C'étaient des dépôts du passé dans un sens très particulier : elles incarnaient et suggéraient des associations dont la valeur résidait ailleurs. Leur passé était un passé de mots, et non de pierres. La Chine a conservé la plus vaste et la plus longue documentation du passé qui existe au monde. Elle a constamment réexaminé ce passé tel qu'il a été préservé dans les écrits, et elle l'a fait agir sur le présent. Mais elle n'a pas construit d'Acropole, elle n'a pas préservé de Forum romain. Et pourtant, ni les matériaux ni les techniques ne lui faisaient défaut ... La civilisation chinoise n'a pas logé son histoire dans des bâtiments. Même les plus grandioses palais et ses ensembles urbains ne se sont attachés avant tout qu'à projeter une certaine vision ; ils distribuent l'espace bien plus qu'ils ne comportent de constructions ... dénuées de permanence. La civilisation chinoise, semble-t-il, n'a jamais considéré que son histoire était violée ou spoliée quand ses monuments historiques venaient à s'effondrer ou à brûler : il suffisait qu'ils puissent être remplacés ou réparés de façon à exercer à nouveau leur fonction. Bref, nous pouvons dire que le véritable passé de Suzhou est un passé de l'esprit, ses moments impérissables sont des moments de l'expérience humaine. Les seules incarnations vraiment durables des éternels moments humains sont leurs incarnations littéraires."
F.W. Mote, A Millenium of Chinse Urban History : Form, Time and Space Concepts in Soochow", 1973, traduit et cité par l'auteur.
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["Six récits de l'Ecole des Cadres", Souvenirs de déportation pendant la révolution culturelle, de Yang Jiang]
L'art supérieur de Yang Jiang n'avait certes pas besoin de confirmation officielle ; les autorités communistes l'ont pourtant complimentée et donnée en exemple, car, disent-elles, son ouvrage "témoigne d'une blessure, sans pour autant proférer de plainte". En effet. Ce dernier trait rappelle irrésistiblement l'une des anecdotes politiques les plus amèrement chinoises qui soient : à l'époque Tang, le jeune frère d'un fonctionnaire prend congé de son aîné pour gagner le poste officiel auquel il vient d'être nommé. Il promet d'être circonspect et d'une soumission patiente dans ses contacts avec ses supérieurs. "S'ils me crachent à la figure, je me contenterai de m'essuyer le visage sans dire un mot. - Oh non ! ne fais surtout pas ça ! s'écrie l'aîné, épouvanté. Ils pourraient prendre ton geste pour de l'insolence. Laisse le crachat sécher de lui-même." Le propos est passé en proverbe dans la langue courante (tuo mian zi gan) ; il recouvre une réalité toujours actuelle dont le tranquille sourire de Yang Jian fournit une déchirante illustration.
1983
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Essentiellement, les gens croient ce qu'ils /souhaitent/ croire. Ils cultivent leurs illusions par idéalisme — et aussi par cynisme. Ils suivent leurs visions parce qu'ils ont soif de religion — et aussi parce qu'ils y trouvent leur avantage. Ils cherchent une croyance qui puisse leur inspirer l'âme — et aussi leur remplir le ventre. Ils croient, par générosité et par intérêt. Ils croient, parce qu'ils sont bêtes et parce qu'ils sont malins. Simplement, ils croient pour vivre. Et c'est précisément parce qu'ils veulent vivre que parfois ils étrangleraient volontiers quiconque serait assez insensible, cruel et inhumain pour les priver de ces mensonges qui soutiennent leur existence.
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On se demande parfois si BHL n’aurait pas eu avantage à rester cloîtré dans une cabine hermétiquement close et capitonnée, car, au contact des réalités de la rue, sa prose a fâcheusement tendance à enfler, et, comme un ballon gonflé d’air chaud, elle s’élève bientôt jusqu’à la zone des Hautes Platitudes… région dont elle ne redescendra plus, sauf pour quelques rafraîchissantes plongées dans un brouillard de volapük…
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Le livre de M. Lévy [Impressions d'Asie] amuse parfois (« le voyageur de l’avenir n’aura pas forcément le choix : il sera kantien, ou il ne sera pas » ; ou encore : « il y a Taipeh région du monde, et il y a Taipeh région de l’Être. On avait failli oublier qu’il y avait une ontologie de Taipeh »… etc.). Mais ces moments de franche gaieté sont trop rares pour qu’on puisse vraiment ranger cet ouvrage dans la catégorie des livres humoristiques.
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