- C'est la guerre !
Un à un ou par petits groupes, tous les hommes jeunes étaient partis à la guerre avec une sorte de résignation effrayante qui, à chaque départ, plongeait le village tout entier dans une désolation compacte, une sorte de gangue épaisse, visqueuse, où nous nous engluions. Et cette glaise, qui collait à nos gestes, ralentissait le rythme de nos vies. Encore moins de paroles, déjà rares, des échanges plus brefs autour des verres de vin - les "canons" - bus au seuil des caves ou lors des rencontres au lavoir, au four, à la croisée des chemins, où ceux qui n'avaient pas encore souffert d'un départ appréhendaient de quérir des nouvelles des mobilisés.