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Si les croûtes d'Hitler avaient eu du succès, celui-ci serait resté un barbouilleur sans talent mais ne serait peut-être pas devenu le mondial killer que l'on sait. Si Charles Manson avait réussi dans la musique, s'il avait pu développer le talent que lui reconnaissaient Neil Young et Denis Wilson eux-mêmes, il n'aurait pas eu besoin, peut-être, d'étendre son emprise de gourou maléfique sur les cervelles fragiles et hautement saturées de substances hallucinogènes des membres de sa « Famille » : le grand Tex, son « porte-voix », Clem, la brute docile et les petites silhouettes enfantines et sanguinaires de Katie, Sadie, Linda, Leslie mendiant à leur gourou satanique un regard (noir) , une étreinte farouche. Ou mieux encore, signe de confiance suprême : une mission… Par exemple celle de « tuer avec le plus de brutalité possible » les occupants d'une maison de Cielo Drive, sur les hauteurs de L.A., une villa autrefois occupée par le producteur de musique détesté (c'est lui qui a arrêté la carrière de rocker de Manson) puis habitée par Candice Bergen, femme de Louis Malle, et relouée, depuis peu, à une actrice célèbre, femme d'un metteur en scène de films d'horreur réputé, enceinte de 8 mois. C'est Sharon Tate, mais le gourou l'ignore en lançant son anathème. Il veut « juste » déclencher la guerre contre les « pigs », faire accuser les Black Panthers, réveiller la guerre civile entre noirs et blancs, bref, mettre en branle le Helter Skelter -c'est le titre d'un morceau des gentils Beatles, et c' est, chez eux, un joyeux tohu-bohu, une sorte de Grand Huit insolent- mais, dans la folie paranoïaque et meurtrière de Manson , c'est un véritable Armageddon… Je viens de clore, en deux jours, California Girls : lecture horrifique, lectrice horrifiée mais littéralement envoûtée... Un opéra-rock lyrique et inquiétant, magistralement construit et concentré sur 36 heures d'équipée sauvage. Le style est d'une noirceur impériale, fascinant et addictif. Malgré l'horreur des scènes évoquées, malgré la folie des protagonistes, ces doux hippies de Californie, fumeurs de joints et un peu crasseux, devenus loups fanatiques sous acide et sous le magnétisme de leur chef de meute… Simon Liberati est un grand adepte et un fin connaisseur du Romantisme noir- il a scénarisé cet épouvantable fait divers en un récit haletant, plein de sang et de fureur, qui s'apparente aux romans noirs anglais d'une Radcliff, d'un Walpole, d'un Lewis... Une sorte de remake hollywwodien avec play-list très sixties du Moine de Lewis. Ou alors un épisode futuriste de Game of Thrones mis en musique par les Mama's et les Papa's... Le Moine sanglant c'est Manson : il a la frénésie sexuelle de Little fingers, la taille de Tyrion Lannister, la « délicatesse » de Ramsay Bolton (les fans de G. O. T me comprendront !!). Ou alors un David Lynch particulièrement déjanté... Incroyablement documenté, sans aucun commentaire, moralité ou apologue, brutalement vrai, mais jamais voyeur, ce récit nous donne à voir de l'intérieur- on épouse le regard de Sadie, de Tex, de Linda..- l'épopée sanglante d'une folie manipulatrice dans des décors de cinéma rendus complètement surréalistes : vieux ranches poussiéreux, clubs de motards tout droit sortis d'Easy Rider, belles villas hollywoodiennes, désert du bout du monde, plages de surfeurs blonds et bronzés.. Âmes sensibles s'abstenir… + Lire la suite |