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Citations sur La passion selon G.H. (56)

Ah, mais pour parvenir au mutisme, quel grand effort de la voix. Ma voix est la façon par laquelle je vais en quête de la réalité ; la réalité, avant mon langage, existe comme une pensée qui ne se pense pas, mais la fatalité a voulu que je fusse et sois poussée au besoin de savoir ce que la pensée pense. La réalité précède la voix qui la cherche, mais comme la terre précède l’arbre, mais comme le monde précède l’homme, mais comme la mer précède la vision de la mer, la vie précède l’amour, la matière du corps précède le corps, et à son tour le langage un jour aura précédé la possession du silence.

Je possède à mesure que je désigne – et telle est la splendeur d’avoir un langage. Mais je possède bien davantage à mesure que je ne parviens pas à désigner. La réalité est la matière première, le langage est ma façon d’aller la chercher – et de ne pas la trouver. Mais c’est du chercher sans trouver que naît ce que je ne connaissais pas, et reconnais instantanément. Le langage est mon effort humain. Par mon destin il m’appartient de partir en quête et par destin de revenir les mains vides. Mais – je reviens avec l’indicible. L’indicible ne pourra m’être accordé qu’à travers l’échec de mon langage. Ce n’est que quand échoue la construction, que j’obtiens ce qu’elle n’a pas réussi.
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Ecoute, il faut que je parle parce que je ne sais que faire de ce que j'ai vu. Pire encore: ce que j'ai vu, je n'en veux pas. Ce que j'ai vu fait voler en éclats ma vie de tous les jours. Pardonne-moi pareil cadeau, je préférerai tellement avoir vu une chose agréable. Prends ce que j'ai vu. Délivre-moi d'une vision qui ne me sert à rien, délivre moi de mon péché inutile.
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Dans son appartement confortable de Rio de Janeiro, une femme commence sa journée, seule, face à une tasse de café. Elle sait qu'elle passera cette journée à la maison et que son travail devra être négligé. Elle a dû prendre cette sorte de congé pour s'occuper de son appartement à la suite du départ de la bonne.

Il y a donc une première rupture du rythme quotidien de cette femme. C'est la raison pour laquelle elle entame une interrogation sur le cours habituel de ses jours. Après, ayant décidé de faire le ménage dans la chambre de la bonne, elle découvre dans quelques signes laissés par la domestique qu'elle a vécu de longs mois, à côté de quelqu'un, resté totalement étranger. Commencent alors à sourdre les indices d'une seconde interrogation, plus large et plus complexe, qui part de ce point précis : son ignorance de l'autre, c'est-à-dire, de la domestique et de son monde...

... C'est en cherchant le sens primordial de ce qu'elle voit et ressent, et en essayant de comprendre les liens éventuels entre tout cela et Dieu, que G.H. avance, de station en station, dans sa passion, qui est à la fois un cri de douleur et de joie .
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j'étais en train de vivre la préhistoire d'un futur.
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Enfin, le corps imbibé de silence s'apaisait
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Cette image de moi entre des guillemets me satisfaisait et pas uniquement en surface. J'étais l'image de ce que je n'étais pas, et cette image du non-être me comblait : être négativement est l'une des façons d'être les plus fores qui soient. Comme je ne savais pas ce que j'étais, ce "non-être" constituait mon approche la plus juste de la vérité : j'avais au moins l'autre côté, j'avais au moins le "non", j'avais mon envers. Je ne connaissais pas le bien en moi, aussi vivais-je avec une certaine ferveur ce qui était mon "mal".
Et, en vivant mon mal, je vivais le côté inverse de ce que je n'arrivais même pas à vouloir ou à essayer. Tel celui qui mène avec amour et application une vie de "débauché" et possède au moins l'opposé de ce qu'il ne connaît pas, ne peut pas, ne veut pas : une vie de moine. Aujourd'hui seulement je savais que j'avais tout, bien que sur le mode contraire : je me consacrais à chaque détail du non.
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Je repousse l'heure de me parler. Parce-que j'ai peur ?
Et parce-que je n'ai pas un mot à dire.
Je n'ai pas un mot à dire, alors pourquoi ne pas me taire ? Mais si je ne fais pas violence aux mots, le mutisme m'engloutira au fond des eaux. Les mots et la forme seront la planche qui me permettra de flotter sur les flots déchaînés du mutisme.
Et si je repousse le moment de m'y mettre, c'est aussi que je n'ai pas de guide. Les autres récits de voyageurs me livrent peu de détails au sujet du voyage : toutes les informations sont terriblement incomplètes.
Je sens qu'un début de liberté me vient petit à petit... Car jamais autant qu'aujourd'hui cela ne m'a été égal d'offenser le bon goût : j'ai écrit " les flots déchaînés du mutisme", ce que je n'aurais jamais dit avant parce que j'ai toujours respecté la beauté et sa modération intrinsèque. J'ai dit "les flots déchaînés du mutisme", humblement mon coeur s'incline, et j'admets. Aurais-je enfin perdu tout un code du bon goût? Mais, cela sera-t-il mon seul gain ? Combien j'ai dû vivre bâillonnée pour me sentir désormais plus libre uniquement parce que je fais bon marché d'une entorse à l'esthétique. (...) Je veux savoir ce qu'à perdre, j'ai encore gagné. Pour le moment, je ne sais pas : c'est seulement en me faisant revivre que je vais vivre.
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Je me promets pour un jour ce même silence, je nous promets ce que j'ai appris maintenant. Sauf que pour nous il faut que ce soit la nuit, car nous sommes des êtres humides et salés, nous sommes des êtres d'eau de mer et de larmes. (...) Nous sommes des êtres qui ont besoin de plonger dans les profondeurs pour respirer, comme le poisson plonge dans l'eau pour respirer, sauf que mes profondeurs sont dans l'air de la nuit.
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Je n'ai pas un mot à dire, alors pourquoi ne pas me taire? Mais si je ne fais pas violence aux mots, le mutisme m'engloutira au fond des eaux.
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Nombreux sont ceux qui ont abandonné tout ce qu'ils avaient, et sont partis à la recherche d'une faim plus grande.
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