AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Aelinel


Les Chroniques Coups de coeur du culte d'Apophis et de Lutin82 m'avaient déjà bien convaincu de lire cette novela. Mais quand en plus, elle fait partie de la sélection de la Rentrée Littéraire de ma librairie préférée, là, je ne pouvais plus y couper! D'autant plus que la couverture d'Aurélien Police que je ne présenterai plus, est magnifique. Juste un petit bémol (il faut bien que je râle de temps en temps!), le prix me paraît un peu prohibitif au regard du nombre de pages et j'ai trouvé cela un peu dommage, surtout que ce n'est pas un grand format...

Dans un futur proche, deux scientifiques, l'un historien et d'origine chinoise, Evan Wei et le second qui est aussi son épouse, Akemi Kirino, une physicienne japonaise, font une découverte stupéfiante : celle d'avoir la possibilité d'assister aux évènements du passé. Cette invention possède malheureusement une contrainte technique : l'histoire ne peut être visualisée qu'une seule fois, sans possibilité pour un individu du présent d'y retourner. Evan Wei et Akemi Kirino décident alors d'axer leur programme de recherche sur un évènement du passé méconnu : l'Unité 731.

L'homme qui mit fin à l'histoire s'est révélé être à plus d'un titre remarquable grâce à son style d'écriture maîtrisé et son scénario intelligent. Ken Liu utilise la Science Fiction comme prétexte pour faire passer son message au plus grand nombre et dénoncer ainsi un évènement historique méconnu mais qui a réellement existé : l'Unité 731. Cette dernière avait été créée lors de l'invasion japonaise en territoire chinois, en 1932, afin d'expérimenter des armes bactériologiques sur des cobayes humains mais également pour former les futurs chirurgiens japonais. Environ cinq cent mille personnes, pour la plupart d'origine chinoise, coréenne et russe, ont été exterminées tandis que peu de responsables du camp seront jugés pour leurs crimes. Pour ma part, je savais que les Japonais avaient commis des exactions lors de l'invasion de la Chine mais j'ignorais totalement l'existence de ce camp d'expérimentations.

Ken Liu offre également à son lecteur plusieurs pistes de réflexion philosophique notamment sur la quête de la vérité, l'histoire et ses sources, le révisionnisme (revoir un fait historique soit par l'apport de nouveaux éléments, soit par le ré-examen des sources), le devoir de mémoire et le deuil ou le négationnisme (contestation d'un fait historique).
- Je souhaiterais ainsi revenir sur le thème de l'histoire et ses sources. Comment étudier L Histoire lorsque ne subsistent d'un évènement plus aucune trace (après l'annonce de la capitulation du Japon, en 1945, les bâtiments ont été pour la plupart détruits par les soldats japonais) ou quasiment aucun témoignage (les victimes ont toutes été éxécutées ; quant aux dix milles médecins, infirmier(e)s et soldats qui tenaient le camp, certains ont été condamnés lors de procès soviétiques mais la plupart sont rentrés au Japon et ont mis sous silence leur passé de bourreau)?
- Comment est-il possible pour un peuple d'exercer son devoir de mémoire et de faire son deuil, lorsque le principal responsable de ces atrocités, Shiro Ishii, a négocié son immunité en donnant aux Américains les résultats de ses recherches, échappant ainsi à la justice?
- le voyage temporel devient-il une nouvelle source historique pour les scientifiques ou doit-il aider en priorité les familles des victimes encore vivantes à faire leur deuil et à une nation, son devoir de mémoire?
- Enfin, puisque le voyage temporel ne peut être effectué que par un seul témoin qui sera forcément subjectif, ne laisse-t'on pas la porte ouverte aux négationnistes pour contester l'existence de l'Unité 731 et de ses expériences mortifères?

Un dernier point avant de conclure : cette novela comprend quelques passages très difficiles et éprouvants à lire. Moi-même, je me suis sentie mal et j'ai dû faire une pause après la description des expérimentations de l'Unité 731, notamment sur la vivisection sans anesthésie.

En conclusion, L'homme qui mit fin à l'histoire est une novela remarquable qui devrait être lu par le plus grand nombre. Il s'agit d'un ouvrage riche en réflexion, intelligent, bien écrit et surtout qui dénonce des faits de notre société En bref, voilà de quoi clouer le bec aux détracteurs qui insinueraient que la SFFF ne serait adressée qu'à des adolescents attardés et décérébrés...

Si vous souhaitez en savoir davantage sur l'Unité 731, je vous suggère deux documentaires (vous pouvez les trouver soit sur Youtube, soit sur mon blog) : le premier diffusé sur France 2, en 2005 et intitulé Kizu, les Fantômes de l'Unité 731 et le second diffusé sur ARTE, en 2010, intitulé les Héritiers du Docteur Mengele.
Commenter  J’apprécie          4416



Ont apprécié cette critique (40)voir plus




{* *}