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sur 704 notes
Un sujet très difficile, une narration singulière, une dimension philosophique marquée... On ne peut pas dire que Ken Liu ait choisi la facilité en écrivant "l'homme qui mit fin à L Histoire". Et c'est un miracle qui se produit sous la plume de l'auteur. En à peine plus de 100 pages, Liu livre un récit d'une richesse, d'une intelligence, d'une subtilité, en un mot d'une excellence peu commune.

La forme narrative consiste en un enchaînement de témoignages, conférences, exposés et interviews formant un documentaire. Ce procédé aurait pu donner lieu à un récit d'une froideur clinique. Ce n'est pas le cas, on ne lit pas "l'homme qui mit fin..." comme un lit un article de journal. le récit de Liu n'est absolument pas désincarné, il a de la chair et une âme.

L'auteur prend son temps pour exposer le contexte de l'expérience du voyage dans le temps, ses implications, les questionnements que cela induit. Retarder l'apparition des passages au coeur de l'unité 731 permet au récit de bien exposer les enjeux et d'éviter toute gratuité ou tout voyeurisme. Etonnamment, même lors de ces scènes, le récit est d'une grande pudeur. Et cela tout en n'atténuant pas l'horreur absolue de ce que fut le camp 731. Liu dit les sévices, les tortures, les abominations. Pourtant, ces descriptions n'avilissent jamais les victimes. Au contraire, Liu leur rend l'humanité qui leur a été déniée.

"L'homme qui mit fin..." est une charge contre le négationnisme. Mais Liu n'est pas animé par une rage vengeresse. L'enjeu n'est pas une quelconque réparation (d'ailleurs impossible), c'est la vérité et le souvenir qu'il réclame ici. La mémoire est au coeur du récit. le voyage dans le temps n'est pas vraiment une façon de revivre des événements passés mais plutôt un moyen de se souvenir, de ne pas oublier. Il ne s'agit pas de désigner des coupables, il s'agit de ne plus nier notre capacité à tous à faire le mal, et ainsi retrouver l'humanité à travers la reconnaissance des victimes en tant que frères humains.
Et loin de tout simplisme, l'auteur n'hésite pas à pointer du doigt la part de responsabilité de la Chine dans cet oubli collectif.

"L'homme qui mit fin..." est aussi une réflexion passionnante sur le métier d'historien. le récit nous incite notamment à réfléchir sur la subjectivité de cette science (humaine donc par définition inexacte), sur la frontière parfois ténue qui peut séparer l'historien de l'activiste. Ken Liu évoque également le paradoxe du métier d'archéologue qui, pour découvrir L Histoire, est aussi contraint de la détruire en partie.

La formation de juriste de l'auteur transparait également au détour de questionnements éthiques ou juridiques. Ainsi, un professeur de Droit se demande : "puisque la maîtrise d'un territoire passe d'une souveraineté à l'autre au gré du temps, sous quelle juridiction doit se trouver le passé du territoire en question ?". Plus loin, un archéologue s'interroge en ces termes : "la souffrance des victimes relève-t-elle du domaine privé, ou participe-t-elle de notre Histoire collective ?". On le voit à travers ces réflexions, "l'homme qui mit fin..." a une dimension philosophique forte.

Le côté science-fiction, loin de n'être qu'un prétexte, façonne tout le récit. Cette dimension science-fictionnelle ne fait pas de "l'homme qui mit fin..." un récit futuriste éloigné de toute actualité. Au contraire, les éléments science-fictionnels renforcent le caractère universel et intemporel des thèmes traités.

"L'homme qui mit fin..." continue de vivre dans l'esprit du lecteur une fois le livre fermé. Je sais déjà que ce texte restera toujours imprimé en moi, pour l'émotion qu'il suscite, pour les questionnements qu'il suggère et surtout pour l'humanité bouleversante qui l'habite.
Chapeau Monsieur Liu pour avoir écrit un si beau, si grand livre !

Challenge Multi-défis 2016 - 44 (un roman inspiré d'une histoire vraie)
Challenge Petits plaisirs 2016 - 38
Challenge ABC 2016-2017 - 2/26
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Un livre court (100 pages) ,condensé mais terriblement bouleversant.
Il marque déjà par son originalité. En effet, ce n'est pas une narration continue mais un ensemble de témoignages, d'interviews, .., ce qui forme au final un documentaire, et pourtant la lecture en est fluide et agréable.

Deux chercheurs, mari et femme, réussissent a créer des voyages dans le temps. Une période historique touche particulièrement l'un d'eux. La relation sino japonaise lors de la seconde guerre et tout particulièrement ce qu'il se passait dans l'unité 731. Les Japonais ont utilisé des prisonniers chinois afin d'expérimenté toutes sortes de choses.

Ce roman est très fort il arrive a mobiliser en peu de pages tout un état de questionnement. L'intérêt historique des voyages dans le temps. Quels preuves sont autorisées pour accepter que des faits deviennent historiques ?

Mais l'essentiel réside surtout sur le questionnement du négationnisme. Des intérêts des différents états de reconnaître ou non un fait , de s'en excuser. Et de savoir si les malversations faites par le passé sont a mettre au compteur du présent ou du futur. Sommes-nous responsables des actes de nos ancêtres ?
Mais ce documentaires est tellement bien étayé et maîtrise une certaine neutralité que chacun des personnages et des lecteurs peut se faire sa propre opinion.

Un petit roman qui devrait être d'utilité publique a mon sens.
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"L'homme qui mit fin à L Histoire" constitue une expérience de lecture rare, je ne suis pas sûr d'avoir déjà lu un livre proposant, en à peine cent pages un tel concentré de réflexions sur autant de thématiques distinctes.
L'auteur va commencer par nous instruire d'un fait historique aujourd'hui avéré, à savoir que le Japon a largement rivalisé avec le régime nazi dans l'horreur pendant la seconde guerre mondiale. Je ne sais pas pour vous, mais pour ma part je ne connaissais pas l'unité 731, soit l'équivalent d'Auschwitz au pays du soleil levant.
Maintenant, imaginez qu'une machine à remonter le temps vous donne la possibilité d'être le témoin oculaire d'événements tels qu'ils se sont réellement déroulés dans le passé, de voir de vos yeux ce qu'on vous a caché. Imaginez le fait d'assister à l'agonie de vos grands parents sur une table de dissection dans un laboratoire secret.
L'utilisation de la science fiction va permettre à l'auteur non seulement de nous instruire, mais de nous démontrer l'imposture des états concernant le devoir de mémoire, il nous parlera de négationnisme et des manipulations rhétoriques pour étouffer ou minorer la vérité, une vérité que deux scientifiques idéalistes voudraient faire éclater à la face du monde en donnant la preuve irréfutable de ce qui s'est réellement passé.
Qui pourrait être contre la vérité ? Personne à n'en point douter, c'est d'ailleurs la première impression générale qui va prévaloir et je dois dire que jusque là je n'étais pas plus impressionné que cela par ma lecture.
Ce qui m'a fasciné dans cette lecture tient dans la démonstration que toute vérité n'est pas bonne à dire, que le temps qui passe estompe les souvenirs et la volonté de les raviver. Ce qui m'a troublé aussi, c'est que les arguments pour le droit à l'oubli, surtout 60 ans après sont recevables d'un certain point de vue, autant que l'exigence du devoir de mémoire auquel je crois résolument, les deux points de vues étant bien sûr incompatibles et irréconciliables.
L'ambiance de ce roman passe de l'exaltation à la plus noire des mélancolies, car à la noblesse d'un idéal peut s'opposer la plus farouche hostilité usant de procédés le plus souvent déloyaux, et suivre les états d'âmes contrariés de nos scientifiques (à la façon d'un documentaire je le rappelle) va se révéler une lecture finalement très triste.
Je sors de cette lecture émerveillé par la subtilité de ce scénario qui, en plus de nous instruire, nous propose une vaste réflexion sur la complexité de nos convictions les plus profondes, cette façon d'opposer l'émotion à la raison nous donne à ressentir la finalité de ce que nous sommes, j'aime les textes qui favorisent l'introspection, ils nous aident à nous connaître mieux.
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« Pour lui, ignorer l'histoire, une histoire qui déterminait de biens des façons qui il était, constituait un péché en soi ».

Si vous pouviez voyager dans le passé, où remonteriez-vous ? Dans un épisode de votre propre passé, personnel et intime, afin d'en savourer de nouveau toutes les saveursà présent estompées, voire totalement fanées ? Dans un épisode historique plus lointain et collectif afin de mieux le comprendre, être témoin de ces grands épisodes étant plus parlant pour vous que parcourir les insipides phrases des livres d'histoire ? Dans un fait divers marquant qui a changé ensuite la face du monde afin d'en modifier le cours, sorte d'uchronie vous donnant un sentiment de puissance incroyable et le statut envié d'héros oeuvrant pour le meilleur ?
Étant en train de lire l'incroyable 22/11/1963 de Stephen King, voyage temporel dans lequel le héros tente de changer l'histoire en revenant à chaque voyage, compteur remis à zéro, en septembre 1958, je me suis intéressée à cette nouvelle de Ken Liu qui propose également un voyage dans le passé. @Indimoon m'avait parlé d'un uppercut. Un uppercut ce fut.

« Voir et entendre le passé vous interdirait de rester apathique »

Evan Wei et Akemi Kirino sont deux scientifiques en couple dans la vie. Lui est historien, spécialiste sino-américain du Japon de l'époque de Heian, elle est physicienne expérimentale. Tous deux sont américains mais lui est d'origine chinoise, elle d'origine japonaise. Lorsqu'ils découvrent par hasard, lors d'une séance de cinéma, l'existence de la terrible et effroyable Unité 731 dans les années 1930, centre d'expérimentation des japonais sur des prisonniers chinois, la vie de l'historien est bouleversée.
Le couple met alors ses compétences respectives en commun et élabore un procédé révolutionnaire permettant de retourner dans le passé, de voir l'histoire se dérouler comme si on assistait à une pièce de théâtre. Une seule et unique fois par période visitée, pour une seule et unique personne, et sans aucune possibilité pour l'observateur d'interférer avec l'objet de son observation. Une révolution qui promet la vérité sur les périodes les plus obscures de l'histoire humaine. Plus de mensonges. Plus de secrets d'État. Un procédé révolutionnaire.
Le silence et le déni, sont tels concernant l'Unité 731 que Wei veut, avec ce procédé, pouvoir réhabiliter les victimes et les familles de victimes, sensibiliser les gens, recueillir les excuses du Japon et la reconnaissance de ces crimes de guerre. Une lutte contre le négationnisme, sans pathos ni haine.

« L'histoire écrite n'a qu'un but : concevoir le récit cohérent d'un ensemble de faits. Nous sommes restés enlisés trop longtemps dans la controverse sur la justesse de ces faits. le voyage temporel mettra la vérité à portée de vue, comme si on regardait par la fenêtre ».

Cette Unité a vraiment existé, je suis allée faire quelques recherches, je ne connaissais absolument pas ce centre, c'est effrayant à l'image des camps de la mort. Créée en 1932 sous mandat impérial japonais, dirigée par le général Shiro Ishii, l'Unité 731 se livra à l'expérimentation humaine à grande échelle dans la province chinoise du Mandchoukouo, entre 1936 et 1945, provoquant la mort de près d'un demi-million de personnes… Vivisection sur des sujets vivants et non endormis, viols, démembrements, expérience de gel, de feu, d'eau bouillante…L'Unité 731, à peine reconnue par le gouvernement japonais en 2002, passée sous silence par les forces d'occupation américaines pendant des années, est la première cible de cette invention révolutionnaire. La vérité à tout prix. Quitte à mettre fin à L Histoire qui est toujours histoire de narration et de points de vue.

« Tenter de rajouter l'empathie et l'émotion aux recherches historiques lui a valu l'opprobre de l'élite universitaire. Or, mêler à l'histoire la subjectivité du récit personnel renforce la vérité au lieu d'en détourner».

En une centaine de page, Ken Liu nous offre un récit d'une humanité, d'une richesse, d'une intelligence stupéfiante narré sur la base d'un ensemble de témoignages, d'interviews, de conférences de personnes tant chinoises que japonaises. Un documentaire dans lequel, au-delà des atrocités dont nous prenons connaissance, sont interrogées les questions relatives à la reconnaissance des crimes de guerre, celles relatives aux méthodes utilisées par les historiens et au rôle de l'histoire, celles liées à la valeur du témoignage personnel. Les crimes commis par le passé sont-ils à mettre au compteur du présent ou du futur ? Sommes-nous responsables des actes de nos ancêtres tant d'un point de vue collectif que personnel ? Quelles auraient été nos réactions dans les ténèbres et sous la pression ?
Toutes ces questions juridiques, scientifiques, philosophiques et éthiques, donnent beaucoup de profondeur au récit en lui évitant un certain voyeurisme, écueil dans lequel il est facile de tomber lorsque nous parlons d'atrocités. Sans pour autant passer à côté du côté effroyable des exactions perpétrées. Il y a un équilibre subtil qui nous permet à la fois d'être choqués et en même temps de nous interroger posément. le coeur côtoie la raison avec gravité. Touchés et posés, nous sommes en même temps, ce jusqu'à la fin qui m'a personnellement beaucoup marquée.
En cela, en cette balance délicate, le texte est un très grand texte. Percutant et enrichissant en très peu de pages. Un uppercut pour ne jamais oublier !


« Ce texte est dédié à la mémoire d'Iris Chang et de toutes les victimes de l'Unité 731. L'idée d'écrire un récit sous forme de documentaire m'est venue à la lecture de la nouvelle : Aimer ce que l'on voit : un documentaire, de Ted Chiang »…

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Le titre rappelle une de ces théories bidon sortie de l'esprit d'un intellectuel resté trop longtemps assis. Même avec de la science-fiction, la fin de l'histoire ? Ts même pas peur ! Mais n'allons pas trop vite...

Ce roman n'est qu'une nouvelle en fait (mais vendue au prix d'un recueil). Vite lue. Vite oubliée ? Pas si vite. C'est vrai, c'est un reportage, mis en scène avec témoignages, micro trottoirs, interviews d'experts, extraits de commission parlementaires, etc. Ca fait tellement vrai par moments que je suis allé vérifier si tous ces gens n'existaient pas vraiment.

En fait cette nouvelle est une simple dénonciation des crimes de guerre japonais, avec des témoignages d'atrocités à vous faire dresser les plumes sur la tête ? Mais non, en fait, plutôt une dénonciation du négationnisme, de la recherche de la vérité ensevelie par la raison d'état ? Il y a de belles analyses des relations entre Chine populaire, Japon et Etats-Unis (mais il n'a pas un peu oublié la Russie ?). C'est ça ? Oui, mais non.

L'histoire se réduit-elle aux témoignages ? C'est quoi le devoir de mémoire ? La preuve historique peut-elle mettre en péril la paix ? Quel respect doit-on au passé ? Aux familles du passé ? Cette nouvelle ne nous mâche pas la tâche, comme l'indique cette critique décousue. C'est moralement complexe, dialectique dans la forme, ça pousse à réfléchir

Pour en revenir au titre. Fukuyama, va te coucher. Ken Liu dans mes bras. Les outils permettant de décrire précisément l'histoire n'existent pas, même dans la science-fiction, même ce qu'on en connaît. On ne peut pas décrire la réalité sans s'y impliquer, sans l'interpréter, voire la déformer. Ce qui ne nous empêche pas de chercher, heureusement, de tailler de nouvelles facettes dans la gangue du diamant. Et puis tant que le monde durera il y aura toujours des négationistes, des révisionistes, et même des platistes et tout ce que vous voulez.
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Objectivement, et vu sa qualité littéraire et les questions qu'il soulève, je ne peux nier que ce livre vaut (probablement) plus que la note de 3,5/5 que je lui ai attribué, mais la lecture -en général- est, au moins pour moi, avant tout une question de sentiments et/ou d'immersion.
Et là, je n'ai réellement pas senti grand chose...

Le style, je devrais dire la « forme » d'écriture (un film documentaire raconté par le biais de présentations, d'interviews, débats, témoignages) m'a tenu éloigné de l'affectivité que j'aurais aimé éprouver pour les deux personnages qui, dans ce récit, ont rendu possible de jeter un (autre) regard sur le passé et l'Histoire.
Histoire qui, dans ce petit livre (dont je pense que l'aspect SF ne sert que de cadre) nous transporte dans la deuxième guerre mondiale, en Mandchoukouo, et aux atrocités des expérimentations humaines et médicales subies par des milliers de chinois (ainsi que des prisonniers politiques et de guerre), dans le camp de l'unité 731 alors édifié par les japonais dans le district de Pingfang.

Or, même si cette fiction (documentaire) espère nous ouvrir les yeux sur cet enfer inhumain, j'ai estimé que le véritable sujet de cette narration se trouve plutôt dans la confirmation du négationnisme des crimes de guerre, la responsabilité culpabilisante que les différents pays impliqués (la Chine, le Japon et les Etats-Unis) essaient de se refiler et aux controverses quant au rôle et la définition de l'historien.

Un livre qui m'a certes beaucoup intéressé (de la même façon qu'un documentaire peut m'interpeller à la télévision), mais qui, par sa présentation « distante » m'a écartée de toute émotion.
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J'ai enfin terminé L'homme qui mit fin à l'histoire.

Pour commencer, j'ai du mal à faire correspondre le titre avec ce que j'ai lu. En effet, je pensais à un quelconque rebondissement qui le justifierait, mais je suis peut-être passée à côté, à moins qu'il ne soit fait référence aux pans de passé qui s'effacent dès lors qu'ils sont observés par un "voyageur".

Le point positif de ce "roman", on va dire documentaire, n'est-ce pas, parce que ce n'est pas un roman, est que j'ai découvert des événements dont je n'avais absolument pas connaissance.

Le livre se présente donc sous forme de documentaire, entre interviews et témoignages, et j'ai avancé dans la nébulosité la plus complète jusqu'à presque la moitié du "récit", entre ce que je ne comprenais pas et ce qui ne m'intéressait pas vraiment. La physique et moi, on n'est pas potes.

Puis, un sursaut et la lumière fut : par un système de connexion de neurones trop complexes pour que je puisse en expliquer la cause, quelques lueurs de compréhension sont parvenues jusqu'à moi... trop fugaces pour que ça dure et l'auteur m'a vite à nouveau perdue, ou inversement.

Je ne sais que dire sur ce récit, sinon qu'il est à la fois génial et pas fait pour moi.

Je voulais le relire, en espérant qu'à la lumière de ma première lecture complète, la première moitié serait plus compréhensible, mais j'ai eu tellement de mal avec le dernier tiers que je n'en ai pas le courage.

Le texte est trop saccadé, je n'ai éprouvé aucune empathie ou presque, alors que les faits étaient plus qu'horribles, mais la narration est tellement froide et distante que pour arriver à s'immerger, du moins moi, c'était mission impossible.

Voilà, je suis désolée et je vous invite à lire les retours des lecteurs et lectrices qui l'ont compris et aimé. Je ne devrais même pas poster ce non-retour.
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Le documentaire : voilà une forme de récit de science-fiction plutôt originale.
Ce n'est pas la première fois que je la rencontre. Antoine Bello l'a pratiquée dans ses récits Go Ganymède ! et Éloge de la Pièce Manquante. Mais il vaut bien avouer que Ken Liu dirige l'exercice avec maestria.

Donc vous vous plantez devant votre télé et vous regardez ce documentaire – probablement sur Arte – qui mélange images d'archive, témoignages et micro trottoir sur un sujet brûlant autant que poignant.
On peut le voir comme un fils spirituel du film Shoah de Claude Lanzmann qui se fracasserait sur le rocher de la realpolitk. Deux universitaires développe un moyen d'assister en direct à des événements du passé et se concentre sur les exactions (le mot est carrément trop faible à la lecture de la novella) de l'armée japonaise dans un camp de Mandchourie dans les années 1930. Cela donne lieu à des descriptions de ce que l'homme peut faire subir à ses pareils qui vont au-delà de ce n'importe qui pourrait imaginer (j'essaie de me convaincre que c'est vrai, mais je suis certainement naïf).
Et là commence l'imbroglio politico-temporel. le Japon s'excusera-t-il pour les exactions d'un régime du passé qu'il a depuis longtemps condamné? Les États-Unis seront-ils vraiment choqués des horreurs qui s'étaient abattues sur des Chinois qu'ils considèrent comme de dangereux rivaux sinon comme des ennemis ? La Chine elle-même, comment réagira-t-elle si on ne la laisse pas prendre les commandes des expériences temporelles ?

Ken Liu maîtrise à merveille le discours de chaque intervenant, sans jamais tomber dans la caricature : l'intellectuel chinois, le membre du Congrès américain, l'homme de la rue chinois ou américain, le témoin japonais… Les opinions contradictoires s'entrechoquent au point qu'il est impossible d'imaginer où se situe la vérité. La dimension émotionnelle n'est pas oubliée car l'auteur développe une tragédie personnelle bouleversante vécue par les deux chercheurs à l'origine du voyage dans le passé. Même la description de la physique à l'origine du voyage est judicieuse.

Impossible d'imaginer où se situe la vérité, disais-je. On comprend quand même que Ken Liu pousse un cri. Il nous met face à une horreur de guerre qui n'a jamais eu son Nuremberg. La réception qu'il imagine dans ce récit imaginaire, quoiqu'impeccable, n'est pas le principal. le principal, c'est cette horreur.
Inhumaine ? Non, si humaine, malheureusement.
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Livre lu en format numérique.

Livre découvert lors de sa parution en numérique. le résumé et la couverture m'ont beaucoup intrigué. Par contre, l'écriture sous forme de documentaire m'a beaucoup dérouté. Sachant que le livre était court, j'en ai continué la lecture.

Le sujet traité est très intéressant mais quelque peu survolé, différents personnages prennent la parole pour nous en parler et principalement le Pr Wei et son épouse. Cela m'a néanmoins donné envie d'en savoir plus sur cette période de l'Histoire. Tout comme dans « État d'urgence » qui nous parlait d'eugénisme à la fin du livre, cette période méconnue entre le Japon et la Chine fait se poser pas mal de questions sur les pays en guerre et sur les exactions commises pour le bien de la paix... À se demander si ces gens arrivent ensuite à vivre avec leurs consciences ou s'ils ont effacé leurs mémoires comme un disque dur... L'histoire racontée dans ce livre est vraiment trop courte mais pour le bien de la science et de la médecine, certains sont vraiment prêts à tout. Ce qui me révolte le plus, c'est que les gouvernements n'ont jamais voulu reconnaître l'exactitude de ces faits pour le bien des victimes, car il fallait conserver la paix, jusqu'en 2002... L'espèce humaine est peut-être intelligente mais on peut se demander parfois à quoi ça sert, vu que tout ce qu'elle sait faire, c'est prendre le pouvoir par la force et les génocides de toutes sortes (eugénismes, chasse aux sorcières, Holocauste...).

Comme vous l'aurez compris, ce roman a été une bonne découverte pour la part historique mais pas pour la forme de documentaire. Pour ceux qui souhaitent approfondir leur vision de l'Histoire, je vous conseille de lire ce petit roman très intéressant, sinon il vaudrait mieux passer votre chemin, il est assez dérangeant dans son style. Pour ma part, j'ai « Ménagerie de papier » du même auteur que je lirais bientôt pour voir si son style se modifie.

Sur ce, bonnes lectures à vous :-)
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Le livre de SF de l'année, tout simplement

Sur un sujet d'une gravité extrême, Ken Liu évite les nombreux pièges dans lesquels un écrivain moins doué aurait facilement pu tomber pour nous livrer une novella d'une intelligence, d'une justesse, d'une habileté et surtout d'une profondeur (celle des questionnements qu'elle fait naître chez son lecteur) rarissime. Et tout cela, c'est à souligner, sans faire de l'aspect SF un prétexte ou un oripeau, en lui laissant une place nette, réelle, équilibrée dans l'intrigue. Intrigue qui aurait pu être un texte aride, pour esthètes de la SF ou de la littérature, mais qui pourtant ne l'est pas. On qualifie souvent Ken Liu de prodige, de génie littéraire, et ce texte montre que le qualificatif n'est en rien galvaudé. Et ce même si les révélations finales, si l'évolution de la situation des personnages, sont assez prévisibles.

Il me paraît cependant évident que ce roman court n'est malheureusement pas destiné à tout le monde : son sujet, l'horreur absolue (et pourtant jamais voyeuriste ou à intentions purement commerciales) de certaines scènes, font qu'il va laisser de côté une partie du lectorat. Ce n'est clairement pas un livre à mettre dans les mains d'une personne sensible, par exemple. Et pourtant… il participe à un devoir de mémoire, à une lutte contre le Négationnisme et le Révisionnisme, qui devraient en faire une lecture incontournable.

Bref, si vous pensez que vous avez les tripes pour plonger dans une des pages les plus sombres (mais pourtant « incroyablement » méconnue) de l'histoire de l'humanité, je vous conseille ce livre sans réserve. C'est clairement le roman de SF de l'année.

Vous trouverez une version beaucoup, beaucoup plus détaillée de cette critique (avec un point historique sur l'Unité 731 en propos liminaire) sur mon blog.
Lien : https://lecultedapophis.word..
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