Récit à voix multiples,
La Splendeur du Portugal raconte la fin du colonialisme portugais en Angola. le lecteur est immergé dans la révolution et la guerre civile à travers la vie d'une famille d'origine portugaise.
Une mère, veuve, et ses trois enfants Carlos (fils naturel du père avec une jeune femme noire), Clarisse (fille que la mère aurait eu avec son amant et qui va mener une vie dissolue, enchaînant les relations amoureuses et sexuelles avec des hommes mariés, de l'âge de son père) et Rui le jeune fils (seul véritable enfant du couple et qui est un simple d'esprit, atteint d'une tare héréditaire et fait des crises de démence et d'épilepsie). C'est un peu le récit de la famille impossible, soit il y a trahison, tromperie, soit il y a tare, anormalité.
Chaque nouveau chapitre projette comme des flashes les pensées et réflexions intimes, sans censure, d'un personnage.
La petite histoire, celle de la famille, est comme projetée sur un écran, à des époques très différentes de la vie des personnages (enfance, jeunesse, vie d'adulte ou vieillesse de la mère) sans soucis de la chronologie.
Le temps est éclaté. D'un chapitre à l'autre, on passe de 1984, à 1995, 1978, 1980 et si la date peut être un indice pour savoir qui parle, il faut à chaque fois un moment d'adaptation au lecteur pour comprendre qui parle.
Le roman débute le 24 décembre 1995 et c'est Carlos qui, à Lisbonne, a invité sa soeur Clarisse et son frère Rui à passer le réveillon de Noël. Mais son attente sera vaine.
Il a épousé Lena, une femme blanche des bidonvilles (surnommée la « bidonvillaine ». Et cette femme, connaissant ses origines refuse d'avoir un enfant avec lui. Elle ne veut pas d'un enfant métis. Dans la société coloniale et post-coloniale il est plus stigmatisant d'être noir que d'être pauvre ... le rejet de l'autre et la ségrégation ont aussi leur hiérarchie.
Au-delà de l'histoire de la fin du colonialisme portugais en Angola, le roman illustre l'impossible communication entre les êtres. Chacun monologue, n'entend pas les autres, interprète, transforme à travers son propre prisme. C'est sans doute ici le psychiatre
Antonio Lobo Antunes qui parle. Chacun occupe une place d'où il perçoit les choses. de même chaque protagoniste parle sans suivre de fil conducteur, au gré de ses pensées, comme cela lui vient. Un peu comme sur le divan d'un psy où il se laisserait aller et se raconterait sans plan prémédité, sans trier, sans juger.
La Splendeur du Portugal est un roman puissant qui marque d'autant plus que la violence du colonialisme, de la révolution et de la guerre sont illustrées au travers de l'empreinte profonde et indélébile qu'elles laissent dans le psychisme des êtres.
A lire donc, tant pour se documenter sur cette période de l'histoire de l'Angola et du Portugal, que pour entamer une réflexion sur
L Histoire et les histoires individuelles (qui n'en sont pas moins universelles) ...