AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations sur La nébuleuse de l'insomnie (15)

 Ils me rendent visite un dimanche par mois dans ce qui a été un jardin avec une fontaine en pierre sans eau, des grilles autour faisant mine de ne pas être des grilles, après les grilles, un mur (servant à quoi ? )
La fenêtre de la chambre où je dors des grilles également et voilà mon père, ma mère avec toutes ses épingles à cheveux et ses boucles d’oreilles bien droites, mon frère, mon grand-père, ils restent avec moi à parler de tout et de rien une heure ou deux (plus tard j’expliquerai mieux)
Puis ils repartent j’imagine par le même chemin que celui emprunté par les hommes qui m’ont amené ici, semblables à ceux qui servent le dîner dans le réfectoire en retirant les assiettes d’un chariot en aluminium tordu par les années, une route qui ne passe ni par la lagune ni par la frontière, je leur ai demandé
- vous croyez qu’il y’a des grenouilles plus grandes que nous ?
Et eux muets, c'est-à-dire l’un des hommes m’a donné une tape sur l’épaule
- Te tracasse pas avec les grenouilles va
- Et pourtant j’aurais juré que j’en distinguais le bruit…
Commenter  J’apprécie          222
ma mère abandonnant le réfrigérateur pour s'enfermer dans sa chambre, on a entendu le lit parce que le bois n'est plus tout jeune et les clous non plus, quelle entreprise de démolition le temps, regardez ma grand-mère
- Jaïme
et après le lit je ne sais quoi contre l'oreiller, des sanglots qui montaient du fond de la gorge et lui secouaient le corps, le crayon s'est interrompu un instant pour considérer les larmes puis a recommencé à tapoter
- Il a essayé de s'enfuir avant hier ?
un milan dans les genêts qui coiffaient un éperon rocheux scrutant par-dessus la montagne ce qui était hors de notre portée, des baies, des golfes, des kiosques à musique, le crayon s'est mis à l'horizontale sur le bureau
- Il a essayé de s'enfuir avant-hier
dans une espèce de rêve dont il a tardé à revenir pendant que je m'interrogeais à quoi pensait-il et ce qui me venait alors à l'esprit c'était un enfant attrapant des mouches entre la tenture et l'embrasure de la fenêtre, refermant sa main sur elles et sentant les chatouilles de leurs ailes ou une femme sur un canapé vers qui le crayon s'inclinait desserrant la cravate avec une lente férocité
Commenter  J’apprécie          152
qu'elles sont longues les nuits quand le corps renonce et les meubles visibles malgré l'obscurité, le contour de chaque objet, la moindre brèche au plafond et tout si loin de nous, ce que nous avons vécu, ce que nous avons été, ce qui nous a fait envie un jour, les gens qui nous parlent à travers une paroi de verre et peu importe ce qu'ils disent car même si on comprend ce n'est pas à nous qu'ils s'adressent, c'est à ce que nous avons cessé d'être, des phrases qui se replient sur elles-mêmes sans nous atteindre
Commenter  J’apprécie          110
Et les bonnes de la cuisine étonnées pendant que je me secouais pour enlever la paille, combien de fois me suis-je demandé quelle odeur avait le vent, par moments il sentait le verger, d'autres fois le parfum des malles dans les combles, d'autres fois l'odeur de mon corps crucifié sur la clôture
j'ai toujours imaginé que c'était comme ça qu'on mourait, un son ténu qui se prolonge quelques secondes avant de renoncer et renoncer ça signifie les yeux ailleurs vu que ce qui reste ce ne sont pas des yeux
Commenter  J’apprécie          40
il est descendu le long de son buste jusqu'à ses genoux et s'est blotti contre eux dans l'espoir que ce goût de vieux maïs et de terre sèche qu'il avait sur la langue finisse par disparaître.
Commenter  J’apprécie          30
… quand il perdait une dent de lait il la mettait sous le traversin et le lendemain, à la place de la dent, une pièce qu’une petite souris complice avait déposée ou alors on attachait la dent avec du fil à coudre à la poignée de la porte, on claquait la porte et un trou juste à l’avant de la bouche que la langue n’arrivait pas à abandonner, comment une dent si petite au bout d’un fil occupait-elle des kilomètres de gencive entravant la parole et puisqu’on évoque le sujet pour quel motif une autre dent dessous dont on pouvait palper les crénelures, combien de dents puis-je avoir se tenant cachées et désirant pousser, si la femme du canapé demandait à cet instant
– Un problème mon nounours ?
je lui désignerais mes molaires, quand je serai seul j’attacherai un fil à la poignée et je claquerai la porte du cabinet pour voir ce qui se passe, peut-être pas seulement la dent, moi tout entier suspendu à la porte, certains matins, je vous assure, je soulève le traversin à la recherche des pièces et la déception qu’aucune ne soit là à m’attendre, un espace interminable entre la taie et le drap, comme l’existence perd toute saveur quand on cesse d’avoir peur du noir, le crayon avait un mal de chien à éloigner l’enfance…
Commenter  J’apprécie          21
Je ne partirai pas demain, ce sont eux qui m'emmèneront, des hommes venus de je ne sais où me désignant à mon père
- C'est celui-ci ?
les grenouilles du marais s'inquiètent tellement que je n'entends plus les gens, j'entends les bestioles qui m'assourdissent et m'empêchent de mourir, quelqu'un que je ne distingue pas à qui j'inspire de la compassion
- Ce n'est pas la peine de l'attacher
ma mère tentant un sourire et ses yeux qui coulent le long de son visage, chaque larme un oeil qui coule sur ses joues
(pourquoi des larmes ?)
les bonnes de la cuisine
- Le pauvre
et pour quelle raison
- Le pauvre
si moi pas malade, intrigué j'ai interrogé ma mère
- Où avez-vous trouvé tous ces yeux ?
ne vous tourmentez pas pour moi mère, il me suffit d'avoir la certitude que vous n'êtes pas partie et un jour peut-être me remarquerez-vous en train de vous attendre sans vous parler étant donné que je n'ai pas besoin de parler, le parfum des malles suffit et vous savoir dans cette maison pour que j'attende que vous m'accordiez un peu d'attention un jour, sûr que vous m'accorderez un peu d'attention même si c'est par pitié
Commenter  J’apprécie          20
-Tenez
et des chèvres et des milans et le contremaître et le mulet n'écoute pas ma mère.
-Quelle vie
laisse tomber Lisbonne dans le fleuve et apprenez-moi les corneilles, les roues dentées de leurs ailes,leur façon de poser ,quand j'étais petit
non
Commenter  J’apprécie          10
(celui-là finalement vous vous en souveniez, comment expliquer le mystère des détails qui perdurent, des insignifiances dont la ténacité effraie)
Commenter  J’apprécie          11






    Lecteurs (100) Voir plus



    Quiz Voir plus

    Le chien des Baskerville

    Au cours de quel siècle ce roman a-t-il été publié ?

    17ème
    19ème
    20ème

    10 questions
    664 lecteurs ont répondu
    Thème : Sherlock Holmes : Le Chien des Baskerville de Sir Arthur Conan DoyleCréer un quiz sur ce livre

    {* *}