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Citations sur Le manuel des inquisiteurs (14)

Ma femme s'affalant doucement comme une pieuvre s'endort, plongeant ses tentacules dans le sable des draps
- Quel soulagement
moi, craignant qu'elle ne me dévore, de m'habiller dare-dare avant qu'elle ne me demande dans son sommeil
- Tu ne me fais pas un bisou Luis ?
et que je ne soit obligé de me couler jusqu'à cette chose flasque en chemisier à volants et de frotter mon menton sur un front enduit de crème hydratante, pendant qu'une paume visqueuse me pincerait l'oreille
- A ce soir Luis
me rappelant une fille brune, boulotte, en train de m'enfiler une alliance au doigt sur la photo de l'album, j'ai fait chauffer du café dans la cuisine en priant pour qu'elle ne s'amène pas en chaussons histoire de m'aider à allumer le gaz, trouver le sucre, ouvrir le placard au-dessus du micro-ondes.
- Tu n'as jamais su où se trouvaient les tasses Luis
et de me quitter sous le porche en me gâchant la matinée avec son petit au-revoir d'adolescente décrépite, j'ai traversé le jardin à pas feutrés, la cravate pendue autour du cou, j'ai fais les nœuds à mes lacets...
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- Je fais tout ce qu'elles veulent mais je n'enlève jamais mon chapeau de la tête pour qu'on sache bien qui est le patron -

Mon père, la main ouverte sur la nuque de la fille du métayer, une adolescente nu-pieds, sale, rousse, suspendue aux mamelles des vaches sur un petit banc de bois accroupie, la prenant par le collet et l'obligeant à se pencher sur la mangeoire sans qu'elle lâche ses seaux à lait, mon père encore une fois écarlate lui écrasant son nombril sur les fesses, le cigarillo allumé pointant vers les poutres du plafond, sans que la fille du métayer ne proteste, sans que personne ne proteste ou ne songe à protester, mon père retirant sa main de ma nuque et désignant avec mépris la cuisine, les chambres des domestiques, le verger, le domaine tout entier, le monde enfin

- je fais tout ce qu'elles veulent mais je n'enlève jamais mon chapeau de la tête pour qu'on sache bien qui est le patron -
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...le château tout là-haut après des files et des files d'oliviers somnolents, après une volière et un restaurant de muletiers avec un réfrigérateur de cornets de glace à l'entrée, on tournait à gauche et on tombait sur le portail du domaine, son nom en lettres peintes sur un azulejo, ses colonnes de pierres, l'allée de cyprès conduisant à la maison, sauf que cette fois aucun chien n'a aboyé, le moulin s'est arrêté, les oranges du verger, sans éclat, se ramollissaient éparses sur le sol, le tracteur gisait immobile à demi-renversé parmi les décombres de la serre et une de ses roues arrière tournait en silence depuis des semaines et tournerait toujours (les vitres brisées de la serre, les châssis fracassés, les vases en morceaux, les orchidées aux pétales dilatés pendillant en longues lèvres violacées) ...
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Et en pénétrant dans l'enceinte du tribunal à Lisbonne, c'est au domaine que je pensais. Non au domaine d'aujourd'hui avec ses statues brisées dans le jardin, la piscine vide, le chiendent qui envahissait les chenils et qui ravageait les parterres, la grande maison au toit percé où il pleuvait sur le piano garni d'un portrait autographié de la reine, sur la table de l'échiquier auquel manquaient des pièces, sur les déchirures de la moquette et sur le lit en aluminium que j'ai rangé dans la cuisine, adossé au fourneau, en vue d'un sommeil torturé toute la nuit par le ricanement des corbeaux et en pénétrant dans l'enceinte du tribunal à Lisbonne, je ne pensais pas au domaine d'aujourd'hui mais à la maison et au domaine du temps de mon père quand Setùbal (une ville aussi insignifiante qu'un village de province, aux lumières voltigeant autour du kiosque à musique dans un vibrement de ténèbres et lacérées par les hurlements des chiens) n'était pas arrivé jusqu'aux saules et au portail du mur, et ne descendait pas droit jusqu'au fleuve dans une pagaille de tavernes et de chalutiers, Setùbal où la gouvernante m'emmenait avec elle faire les commissions les dimanches matin en me trainant par le coude sous le volettement des pigeons...
(incipit)
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Sofia ajustant son serre-tête en rougissant de timidité, les corbeaux ricanant sous les hêtres, le reflet de la maison miroitant dans la piscine, la femme du sergent nous souriant, à nous en mal de témoin, et mon père jaugeant Sofia, de cette même voix distraite avec laquelle il parlait des animaux dans l'étable
- Un portemanteau, un squelette, tu n'as jamais rien compris en matière de génisse -
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Je voudrais être morte je voudrais que nous soyons tous morts
Et j’avoue que , par moments, tout bien pensé, je ne peux m’empêcher de lui donner raison.
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le major qu'on asseyait à l'heure du goûter sur le sofa, une couverture de laine sur les genoux, au milieu du reste des épouvantails, chacun avec sa couverture de laine, placés en demi-cercle devant la télévision où passait le feuilleton brésilien, sans que les épisodes les divertissent, muets comme des carpes, des épouvantails sans incisives ou avec tout au plus unes incisive qu'il fallait alimenter à la cuillère comme des bébés vétustes, en leur braillant aux oreilles
- Ah cette petite bouche cousue monsieur l'architecte cette petite bouche qui ne veut rien avaler
jusqu'à ce que la bouilloire de l'un d'eux se taise sans prévenir et on le remplaçait la semaine suivante par un épouvantail identique, également incapable de parler, avec une même couverture de laine, avec sur son petit crâne chauve les mêmes deux ou trois mèches de cheveux moisissants de poupée de grenier,
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Ce qui m’a permis de comprendre que les pauvres ne savent pas se tenir à leur place, ou bien ils trainent une tuberculose et nous jettent leurs bacilles en plein visage, ou bien ils deviennent tout à fait odieux, enragés qu’ils sont d’être pauvres et d’habiter des cabanes de planches et de tôles.
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Le roi mage noir devait être plus servile que tous les autres précisément parce qu’il était noir.
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L’indépendance des Noirs : puisque la seule chose à laquelle ces macaques peuvent servir c’est à montrer leurs dents avec un air de satisfaction béate sur les calendriers des missions, alors venir maintenant me parler d’indépendance, pour l’amour de Dieu ne me faites pas rire.
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