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Maurice Couturier (Traducteur)Yvonne Couturier (Traducteur)
EAN : 9782743618445
413 pages
Payot et Rivages (03/09/2008)
  Existe en édition audio
3.77/5   727 notes
Résumé :
DAVID LODGE
LA VIE EN SOURDINE

Desmond a des problèmes d'ouïe. Et d'ennui. Professeur de linguistique fraîchement retraité, il consacre son ordinaire à la lecture du Guardian, aux activités culturo-mondaines de son épouse, dont la boutique de décoration est devenue la coqueluche de la ville, et à son père de plus en plus isolé là-bas dans son petit pavillon londonien.

Lors d'un vernissage, alors que Desmond ne comprend pas un tr... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (92) Voir plus Ajouter une critique
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Un roman convaincant, remplis d'ironie désabusée sans pathos ou excès cependant.
Il y a une certaine légèreté qui se mélange à une gravité certaine .
C'est un roman anglais jusqu'au fin fond du style et de la tonalité générale.
Il y a un humour pince sans rire très british. C'est drôle. c'est grave .c'est drôle mais pas hilarant.
L'auteur aborde des sujets difficiles sur le plan humain et là où il y a du drame je trouve qu'il dédramatise sans édulcorer la gravité, le drame et la peine.
Les personnages sont d'une très solide consistance.
Un excellent roman sur la vie et sur le temps qui passe et qui dédramatise ce qui fait peur en posant l'ordre des choses comme contexte naturel.
Mon premier de l'auteur et il est excellent.
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Il est temps de vous parler du livre de poche que j'ai préféré des 5 que j'ai pu dévorer pendant mes pauses estivales.

Ce roman , il est pas vraiment tout neuf, puisqu'il a été publié en 2008 aux Editions Rivages, je l'avais depuis super longtemps dans ma bibliothèque( même avant que je blogue).

C'est à ce jour le dernier roman en date de l'excellent auteur britanique David Lodge, dont je n'avais lu pour le moment que le non moins excellent "Pensées secrètes", publié quelques années avant celui ci.

Même si je n'ai lu que deux livres de cet auteur, je sais que la vie universitaire tient une place très importante dans toute son oeuvre, puisque Lodge a longtemps été un universitaire très reconnu en Grande Bretagne.

Ici, comme dans plusieurs romans précédents de David Lodge, le monde universitaire est évidemment bien présent puisque le héros de cet histoire, est comme dans tous les romans de l'auteur, très fortement impregné de lui: la narration est organisée, les 9/10èmes du livre, autour du journal intime d'un professeur d'université en linguistique à la retraite, un certain Desmond Bates qui possède une caractéristique que possède également David Lodge: il est affreusement sourd.

Ce professeur à la retraite doit donc composer avec cette surdité qui le handicape énormément dans la vie de tous les jours, et qui peut l'amener dans des situations parfois tragi comiques. On voit que l'auteur connait intimement ce handicap, car jamais on n'a aussi bien retranscrit les aléas de ce handicap, avec sincérité, mais toujours avec cet humour anglais que j'affectionne tant et tant. Ce handicap dont souffrait mon grand père paternel, celui qui crée un mur de verre entre vous et les autres jusqu'à provoquer un repli terrible. Rien que pour cela, ce livre fut une aubaine pour moi.

Mais la vie en sourdine n'est pas qu'une simple chronique sur la surdité vue de l'interieur, tant Lodge aborde d'autres sujets que j'ai trouvé tout aussi passionnants et qui sont ici traités de façon remarquable en acuité et en justesse : parmi ceux ci, on note les relations familiales et conjugales, les troubles de l'âge, et plus particulièrement aussi la gravité de la vieillesse du père qu'il faut accompagner, et bien sur comme toujours, mais il le fait avec une tel bonheur, les arcanes du monde universitaire anglais, avec ses guerres d'égos sur fond de thèses alambiquées.

Car le roman commence lorsque Bates rencontre une jeune étudiante américaine qui lui parlera sans qu'il ne comprenne un traitre mot à la discussion, et lorsque l'objet de sa demande deviendra plus claire, notre héros va se trouver confronter à des situations assez incongrues, mais jamais prévisibles et toujours jouissif.

Dans ce si brillant roman, David Lodge nous raconte avec ce qu'il faut d'humour malicieux et de vraie gravité (avec notamment le récit d'un voyage poignant à Austwitchz), quelques évènements vécus par cet universitaire en l'espace de quelques mois.

On pourrait penser que ces évenements d'un quotidien d'un retraité sont un peu banals, mais Lodge sait mettre la quantité parfaite de dérision, de tendresse et d'originalité pour captiver et rendre ces personnages si attachants et tellements humains.

Cette vie en sourdine est un roman superbemement touchant et terriblement drôle qui m'a totalement convaincu et que j'ai été triste de quitter aussi vite.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Il est rare de rire aux éclats à la lecture d'un roman. le support ne s'y prête guère, on se trouve plutôt dans un entre-soi feutré avec l'auteur et, au mieux, on pouffera silencieusement aux passages les plus désopilants.
Avec "La vie en sourdine", pas du tout ! J'ai franchement rigolé à plusieurs reprises en lisant les mornes aventures de ce vieux professeur sourdingue et dépressif, outrageusement manipulé par une étudiante délurée. Probablement le meilleur David Lodge. Très fin, très drôle, avec cette petite pointe d'anxiété et d'absurdité qui nous plaît tellement.
Pour ceux qui ne connaissent pas David Lodge ou qui pensent que les anglais ne seront jamais rien d'autre qu'un peuple d'épiciers, lisez-le quand même, c'est un pur bonheur...
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Desmond Bates, linguiste en préretraite, pour éviter l'isolement que lui confère ses troubles de l'audition, utilise différents subterfuges : se battre avec la technique, feindre de comprendre son interlocuteur, ou se perdre dans sa bulle de silence. Et quand il doit faire face à la démence débutante de son père : l'étendue des malentendus (!) donne le vertige. Les relations avec l'entourage se teintent d'exaspération , voire de suspicion (n'entendrait - il que ce qu'il veut bien entendre?

Il n'est pas simple d'être drôle avec des sujets aussi déprimant que la vieillesse, le handicap, la difficulté de vivre en couple. Il faut tout le talent de David Lodge pour se sortir de ce défi. Et c'est à grand renfort d'ironie et d'auto dérision qu'il se tire de ce mauvais pas. le ton est loin d'être badin, et le sujet n'est pas esquivé. Et l'on sent poindre à l'occasion un certain désespoir.

L'irruption d'une jeune étudiante au comportement énigmatique vient mettre d'un peu de piment au récit, en maintenant en éveil la curiosité du lecteur.

Rédigé sous la forme d'un journal, le propos est à l'occasion livré à la troisième personne (tentative de distancier le discours pour mieux analyser ce qu'il sous-tend?)

Une grande part de l'oeuvre est autobiographique : non que je veuille sous-estimé les capacités de documentation de David Lodge, mais il est évident que ce témoignage est vécu de l'intérieur

Les personnages secondaires permettent de donner quelques coups de griffe à la société bien-pensante de ce début de 21ème siècle.

C'est une agréable lecture, à condition d'être plutôt optimiste, afin de ne pas se laisser glisser dans la dépression que pourrait induire la peinture réaliste de l'entrée dans la vieillesse avec toutes ses conséquences
Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Ça commence d'une façon hilarante ! Et ça termine d'une façon poignante…

David Lodge est un de mes auteurs favoris, et ce roman a comblé toutes mes attentes : j'ai ri, j'ai opiné, j'ai même été remuée jusqu'au tréfonds.
Car il n'a pas son pareil pour discuter de la vie dans ce qu'elle a de plus quotidien, de plus prosaïque, même, et d'y mêler des événements émouvants, le tout parsemé ici et là de haute voltige intellectuelle. N'oublions pas l'humour et l'auto-dérision, et vous avez le cocktail complet de ce qu'est cet auteur et une idée de ce que j'ai ressenti tout au long de cette lecture : du plaisir intense mâtiné d'émotions vives ou profondes.

L'histoire : Desmond est un professeur de linguistique à la retraite. Il est quasi sourd et ne peut se passer de ses appareils auditifs, sous peine de dire de grosses bêtises et de se faire passer pour un demeuré. L'explication de sa vie quotidienne est désopilante et cocasse, mais en même temps tellement vraie ! Un aveugle, c'est tellement plus tragique qu'un sourd, dit-il. L'aveugle, on le plaint ; le sourd, on s'en moque.
Une pile à plat, un appareil qui tombe, ou tout simplement un brouhaha dans un lieu public, et le voilà tout nu, en butte à des histoires burlesques. C'est ce qui arrive à un vernissage d'exposition, où il est obligé de faire semblant de comprendre une jolie jeune femme lui assénant des propos très sérieux, opinant à tout ce qu'elle dit alors qu'il ne comprend rien…
Cette jeune femme sans-gêne et très spéciale se verra mêlée à sa vie durant plusieurs mois. N'oublions pas que Desmond est marié et heureux dans ce ménage recomposé, avec enfants et beaux-enfants qu'il faut accueillir pour la Noël, sans oublier ce vieux père qui habite Londres et qui veut absolument vivre seul…

Bref, un condensé de vie quotidienne saupoudré d'événements inopinés, tristes ou heureux, le tout enrobé d'un esprit vif et caustique non dénué de naïveté et d'humanité : un régal !
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Citations et extraits (45) Voir plus Ajouter une citation
Le grand monsieur grisonnant à lunettes , qui se tient en lisière de la foule dans la salle principale de la galerie, et qui se penche tout contre la jeune femme au corsage en soie rouge, baissant la tête et la détournant de son interlocutrice, opinant du chef sagement et émettant un murmure phatique par moments, n'est pas, contrairement à ce que vous pouvez penser, un prêtre hors service qu'elle aurait convaincu d'entendre sa confession au beau milieu de cette assemblée, ni un psychiatre à qui elle aurait extorqué une consultation gratuite ; et lui, il n'a pas adopté cette posture pour mieux regarder dans le décolleté de la jeune femme, bien que ce soit un bonus accidentel qu'il tire de la situation, le seul en fait...
Il est, voyez-vous, " dur d'oreille " , ou " malentendant " ou encore, pour faire simple, sourd - pas sourd comme un pot, mais assez sourd pour rendre la communication imparfaite dans la plupart des situations sociales, voire impossible dans certaines, comme celle-ci... Ils parlent, ou plutôt elle parle, depuis dix minutes maintenant, et il a beau faire, il est incapable d'identifier le sujet de la conversation. S'agit-il des œuvres d'art accrochées aux murs - des photos en couleur représentant en gros plan des terrains vagues ou des fragments de détritus ? Il ne le pense pas, elle ne les regarde pas ni ne les montre du doigt, et l'intonation de son discours, pour ce qu'il peut en saisir, ne correspond pas à ce schéma déclaratif caractéristiques des palabres sur l'art ou de ces couillonneries artistiques comme il dit parfois de manière irrespectueuse pour taquiner sa femme. Elle parle plutôt d'un ton personnel, anecdotique et confidentiel. Il regarde le visage de la jeune femme pour voir s'il trahit quelque chose. Elle le regarde fixement d'un air sérieux avec ses yeux bleus, et marque un temps d'arrêt dans son débit, comme si elle attendait une réponse. " Je vois ", dit-il, ajustant son comportement afin d'exprimer à la fois son acquiescement et une réflexion judicieuse, dans l'espoir que l'une ou l'autre expression semblera adéquate, ou tout du moins pas grotesquement inappropriée à ce qu'elle pouvait bien être en train de dire.Toujours est-il qu'elle semble s'en satisfaire, et elle se remet à parler. Il ne reprend pas son ancienne posture : il ne sert à rien en fait d'orienter son oreillette droite pour capter ce qu'elle dit puisque le babillage de la réception se déverse dans la gauche, et si d'aventure il essayait de couvrir son oreille gauche avec sa main cela ne ferait que déclencher un hurlement en retour dans sa prothèse auditive et lui imposer en même temps une posture qui paraîtrait totalement excentrique. Que faire maintenant ? Que dire lorsqu'elle s'arrêtera de nouveau de parler ? Il est bien trop tard pour avouer : " Écoutez, je suis désolé, je n'ai pas entendu un traître mot de ce que vous m'avez dit depuis dix minutes " ( ça peut faire un quart d'heure maintenant ), " je suis sourd, voyez-vous, je n'entends rien dans ce vacarme. " Elle se demanderait raisonnablement pourquoi il ne l'avait pas dit plus tôt, pourquoi il l'avait laissé continué à parler, hochant la tête et murmurant comme s'il la comprenait. Elle serait contrariée, embarrassée, offensée, et il n'a aucune intention de paraître grossier... Par ailleurs, elle semble plutôt gentille, elle doit avoir entre vingt-cinq et trente ans, elle a des yeux bleus étincelants, un teint pâle et soyeux, des cheveux de lin qui lui tombent sur les épaules mais coupés droit avec une raie au milieu, et une silhouette naturellement gracieuse- à en juger par le petit puits d'ombre entre ses deux seins que l'on discerne par l'ouverture déboutonnée de son corsage, sa poitrine n'est pas maintenue artificiellement par de la silicone, ni tendue ou soutenue par une armature métallique, mais possède la plasticité trémulante de la chair réelle et en liberté, et une légère transparence de peau comme une jolie porcelaine - et il ne veut pas laisser une mauvaise impression à cette jeune femme avenante qui a pris la peine de parler à un vieux chnoque comme lui, même si ce genre de rencontre fortuite a peu de chance de se répéter.
Elle marque à nouveau une pose dans son monologue et le regarde comme si elle attendait quelque chose. " Très intéressant, dit-il. Très intéressant. "Espérant gagner du temps, attendant de voir si cela suffira, il porte le verre de vin à ses lèvres mais pour se rendre compte aussitôt qu'il est vide et qu'il lui faut l'incliner presque à la verticale et le tenir ainsi quelques secondes pour contraindre les dernières gouttes de chardonnay du Chili à descendre dans son gosier. La jeune femme le regarde d'un air curieux comme si elle attendait à ce qu'il réalise un tour de magie, tenir par exemple son verre en équilibre sur son nez. Son verre de vin blanc à elle est presque plein, elle n'en a même pas bu une gorgée depuis qu'elle a commencé à lui parler, de sorte qu'il ne peut proposer d'aller avec elle au bar se resservir, et il serait tout aussi discourtois de partir seul remplir son verre ou de l'inviter à l'accompagner dans sa démarche. Heureusement , elle semble comprendre son embarras - non pas son véritable embarras, à savoir sa totale ignorance de ce qu'elle a dit - mais son besoin de boire un autre verre ; elle sourit et, faisant un geste en direction de son verre vide, dit quelque chose qu'il est presque sûr de pouvoir interpréter comme un encouragement à aller refaire le plein. " je crois que je vais y aller, dit-il. Puis-je vous en rapporter un autre ? " Question stupide, que ferait-elle de deux verres de vin blanc, un dans chaque main ? Et ce n'est manifestement pas le genre de personne à avaler un verre d'un trait pendant que vous allez lui en chercher un autre. Cependant, elle sourit à nouveau ( un joli sourire qui découvre une rangée de petites dents blanches régulières ), décline l'offre en secouant la tête, puis, à son grand désarroi, lui pose une question. Il comprend que c'est une question en raison de l'intonation montante et parce que ses yeux bleus s'élargissent légèrement, ses sourcils se froncent, et cela exige évidemment une réponse. " Oui ", dit-il, en prenant le risque : et, comme cela semble lui faire plaisir, il ajoute vaillamment : " Absolument ". Elle pose une autre question à laquelle il répond également par l'affirmative, et alors, à sa grande surprise, elle lui tend la main. Manifestement, elle va quitter la réception. " Ravi de vous avoir rencontrée ", déclare-t-il en prenant la main et en la serrant. Elle est fraîche et légèrement moite au toucher. " Comment avez-vous dit que vous vous appeliez - avec tout ce bruit, je n'ai pas très bien saisi." Elle prononce de nouveau son nom mais en vain : le prénom sonne vaguement comme " Axe ", ce qui n'est pas plausible, et le nom de famille est totalement inaudible, mais il ne peut se permettre de lui demander de répéter une nouvelle fois. " Ah, oui ", dit-il, hochant la tête, comme s'il était content d'avoir assimilé l'information. " Eh bien, c'était très intéressant de parler avec vous ".
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Je voulais faire une critique du livre audio en tant que tel, n'ayant pas trouvé la possibilité de le faire, je la déguise sous forme de citation !
Un chef d'oeuvre remarquablement lu.
Arriver à raconter la déchéance liée à l'âge, la relation avec un père vieillissant, une surdité naissante, une histoire d'amour amusante, un portrait de l'Angleterre contemporaine, une puissante réflexion sur la Shoah, un séjour dans un parc de loisir formaté...Le moins que l'on puisse dire c'est que ce roman est fort riche, très drôle par passages entiers, et finalement puissamment mélancolique.
La lecture qui en est ici faite est superbe, très british, très élégante, et elle colle parfaitement à l'ambiance de ce livre qui est pour moi l'un des meilleurs de ce formidable romancier. Un romancier dont on apprend dans ses mémoires à quel point il puise dans sa propre vie pour écrire ses livres. Point n'est besoin d'auto-fiction pour dire des choses aussi personnelles et l'on sait gré à son auteur d'avoir tenté (et plus que réussi) cette forte construction romanesque si élégante et drôle.
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Il trouve qu'une assiette ne remplit pas sa fonction si elle n'est pas copieusement enduite de moutarde et n'a pas un petit monticule de sel sur le bord, quels que soient les aliments composant le repas, et ça ne sert à rien de lui dire que la moutarde ne vas pas avec la dinde ou qu'un excès de sel est mauvais pour la santé. Et il ne sert à rien non plus de lui tendre un moulin à sel - ou bien il le tourne dans le mauvais sens, le désarticulant en faisant tomber les cristaux de sel marin sur la table, ou bien il peine à moudre, avec une impatience croissante, assez de minuscules fragments pour ériger un tas conséquent au bord de son assiette.
Un jour, Fred a été si irritée par cette procédure qu'au repas suivant elle lui a mis une boîte en plastique d'un demi-kilo de sel Saxo à côté de son assiette, mais, au lieu de comprendre ce que ça voulait dire ou de s'en offusquer, il l'a remerciée d'y avoir pensé.
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L'épisode m'a mis d'une humeur exécrable - où est-ce qu'on va comme ça ? -, état d'esprit auquel je succombe de plus en plus souvent ces temps-ci, sous l'effet de certains phénomènes comme Big Brother, les mots orduriers dans le Guardian, les anneaux vibrants pour le pénis en vente chez Boots, les noceurs qui vomissent dans le centre-cille le samedi soir, la chimiothérapie pour les chats et les chiens. Bizarrement, il est plus facile de focaliser sa colère et son désespoir sur ces offenses à la raison et à la bienséance relativement triviales que sur les choses plus graves qui menacent la civilisation, comme le terrorisme islamique, Israël et la Palestine, l'Irak, le sida, la crise de l'énergie et le réchauffement climatique, choses qui semblent échapper à tout moyen de contrôle.
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« Ma pile est morte, ai-je dit. Tu veux que j’en mette une nouvelle ? C’est un peu délicat dans le noir.
- Non, pas la peine », a répondu Fred comme elle n’arrête pas de dire ces temps-ci. Il lui arrive par exemple d’entrer dans mon bureau pendant que je travaille sur l’ordinateur sans porter mon appareil parce qu’il transforme le murmure apaisant du clavier en un cliquetis gênant aussi bruyant qu’une vieille Remington, et de me dire quelque chose que je n’entends pas et, en une fraction de seconde, il me faut faire un choix : interrompre la conversation pendant que je cherche à tâtons la pochette de mon appareil et que j’installe les oreillettes, ou bien tenter d’improviser sans ça ; généralement, j’essaie d’improviser, et le dialogue se déroule plus ou moins de la façon suivante :
Fred : Mur mur mur.
Moi : Quoi ?
Fred : Mur mur mur.
Moi (cherchant à gagner du temps) : Ah ah.
Fred : Mur mur mur.
Moi (essayant de deviner le contenu du message) D’accord.
Fred (surprise) : Quoi ?
Moi : Qu’as-tu dit ?
Fred : Pourquoi as-tu dit « d’accord », si tu n’as pas entendu ce que j’ai dit ?
Moi : Attends que je mette mon appareil.
Fred : Non, pas la peine. Ce n’est pas important.
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