"_Je suis bien placé pour savoir à quel point c'est difficile de reconnaître soi-même qui l'on est. Pour cela, c'est vrai, il faut du courage."
Là-bas, y a pas personne qui m'connaissait, pis y a pas personne qui avait quelque chose à dire sur la façon que je vivais ! Pis si il y a une chose que j'ai bien comprise à c't'heure, ma belle... c'est que ma vie, c'est ma vie ! Pis ma vie, je m'en vas la vivre comme ça me tente... Pis pas comme ça tente au monde !
Icitte, c'est chez moé, pis moé, j'trouve ça ben correct d’héberger comme je veux le monde qui en a besoin !...
- Tu sais Marie, c'est certain que ça m'arrive de temps en temps de penser que j'aimerais ça que mon Isaac soit encore le beau gars qu'il était avant la maudite guerre...
Mais c'est pas ça qui me manque le plus... Parce que mon Isaac, sous sa face toute moche pis ses pas d'zyeux, c'est le même bon gars qu'avant...
Non.... C'qui me manque, c'est la lumière dans son regard, quand il me disait que j'étais la plus belle...
J... J'aimerais ça qu'il puisse encore me regarder...
Mais avec toi, c'était pas possible....mais le pas possible, ça n'enlève pas l'envie....
-J'aimerais ben savoir ce qu'il en dit, monsieur le curé!...
-Ouains, un homme seul chez une veuve, c'est déjà pas correct...pis à c' t' heure en voilà deux!!!
-Hmph! Avec une robe de même....
-On dirait ben que le deuil est passé....
Icitte, c'est chez moé, pis moé, j'trouve ça ben correct d’héberger comme je veux le monde qui en a besoin !
Je trouve ça ben correct, pis j’pense que tout bon chrétien devrait faire pareil !
Pis Monsieur le curé, il trouve ça ben correct aussi !
Ca fait que vous êtes mieux de pas m’achaler avec ça, là !
C’est-tu clair !?
Bon te v’la rendue dans le manège à c’te heure… le grand manège de la vie à la ville… celui qui étourdit pis qui grise les esprits… Ça fait que moi, là, pogné dans l’ciel… J’te vois faire une folle de toi, pis j’me dis que… ouains… ça a l’air de t’faire ben plaisir de pouvoir t’épivarder… pis t’encanailler d’même sans avoir tous les yeux du village virés sur toi… À c’t’heure, y’a juste moi qui te regarde aller Marie… ça fait que j’va juste attendre, pis avoir hâte que ça finisse tes folleries. Parce que Marie, c’est ben beau ton respire de liberté là… pis si j’me force, je peux presque comprendre… Mais si tu te reposais un pied sur le plancher des vaches… tu verrais tout de suite c’que ça fait autour de toi ta griserie de Montréal… Ça fait pas rien, tu sais Marie.
[…]
Bon, la r’voilà, ma Marie. Elle a fini ses patarasses, pis elle s’en est revenue au bercail…[…] Là, c’est toi Marie, bonne comme le bon pain, à servir le monde dans mon magasin. Bouge plus d’là, Marie, ma belle Marie.
Ma belle Clara, si tu savais comment je regrette...Je regrette...Pis chuis ben tanné de manger des taloches !